feu vert pour les audiences délocalisées au Mesnil

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Publié sur Dalloz Actualité (http://www.dalloz-actualite.fr)
Rétention des étrangers : feu vert pour les audiences
délocalisées au Mesnil-Amelot
le 24 septembre 2015
AVOCAT
ADMINISTRATIF | Droit fondamental et liberté publique
CIVIL | Profession juridique et judiciaire
La première chambre civile a rejeté le pourvoi contestant les audiences délocalisées du juge des
libertés à proximité du centre de rétention du Mesnil-Amelot.
Civ. 1re, 9 sept. 2015, F-D, n° 13-27.867
En 2013, les audiences du tribunal de grande instance de Meaux de prolongation de la rétention
(juge des libertés et de la détention) ont été délocalisées à proximité du centre de rétention du
Mesnil-Amelot (V. Dalloz actualité, 13 avr. 2015, art. J. Mucchielli ).
Des professionnels du droit s’étaient mobilisés contre ce projet, y voyant une atteinte à
l’impartialité et à la publicité de l’audience (V. Dalloz actualité, 18 sept. 2013, art. A. Portmann ). Ils
viennent de perdre une nouvelle manche dans leur bataille judiciaire. Le 9 septembre 2015, la
première chambre civile a rejeté le pourvoi qui contestait la décision de la cour d’appel de Paris
validant ces audiences délocalisées (sur la décision de la cour d’appel de Paris, V. Dalloz actualité,
7 nov. 2013, obs. C. Fleuriot ). Ce pourvoi était formé notamment par le Conseil national des
barreaux, le Syndicat des avocats de France, l’Association des avocats pour la défense des
étrangers, le Syndicat de la magistrature et la Ligue des droits de l’homme.
À leurs yeux, la cour d’appel n’avait pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L.
552-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Celui-ci prévoit
que, « si une salle d’audience attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer
publiquement a été spécialement aménagée à proximité immédiate [du] lieu de rétention, [le juge
des libertés et de la détention] statue dans cette salle ». Le Conseil constitutionnel avait validé le
recours à de telles salles d’audience à proximité immédiate des lieux de rétention, estimant qu’il
visait à limiter « des transferts contraires à la dignité des étrangers concernés » (V. Cons. const., 20
nov. 2003, n° 2003-484 DC, AJDA 2004. 599, note O. Lecucq ). Il avait néanmoins retoqué un
dispositif législatif prévoyant des audiences du juge des libertés et de la détention au sein du
centre de rétention (V. Cons. const., 10 mars 2011, n° 2011-625 DC, Dalloz jurisprudence).
Une action devant la Cour européenne des droits de l’homme ?
Le pourvoi reprochait à la cour d’appel de ne pas s’être expliquée « sur le fait de savoir si l’étranger
emprunte un passage interne pour accéder à la salle d’audience, ce dont il résulterait que la salle
d’audience est dans l’enceinte des centres de rétention ». Mais la première chambre civile juge que
la cour d’appel a légalement justifié sa décision en constatant que « la salle d’audience se trouvait
hors de l’enceinte des centres de rétention et n’était pas reliée aux bâtiments composant ces
centres, de sorte que toute personne retenue devait les quitter pour accéder aux salles
d’audience ».
Par ailleurs, selon la première chambre civile, les avocats disposant « exactement des mêmes
moyens qu’au palais de justice, notamment d’une salle réservée, avec un bureau équipé
d’ordinateurs », la cour d’appel en a exactement déduit que ces locaux répondaient aux exigences
de l’article L. 552-1 du CESEDA.
La décision de la première chambre civile reste silencieuse sur deux branches du moyen soulevé
par le pourvoi. Les demandeurs soutenaient que la cour d’appel aurait dû « rechercher
concrètement si la configuration des lieux et la surveillance stricte de la salle d’audience par les
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fonctionnaires de la police des frontières étaient de nature à faire naître dans l’esprit du justiciable
et du public des doutes légitimes sur l’indépendance et l’impartialité du tribunal ». De plus, ils
reprochaient à la cour d’appel de ne pas avoir recherché « ce qu’avaient été les conditions
concrètes et la durée de l’éloignement du lieu de rétention vers le lieu de justice ». Le pourvoi
signalait que l’étranger avait fait valoir qu’il avait été maintenu enfermé dans une cellule sans
fenêtre de 8 h à 14 h environ, le temps des audiences du matin, dans des conditions portant
gravement atteinte à ses droits individuels.
Une action devant la Cour européenne des droits de l’homme n’est pas exclue, signale Patrick
Henriot, secrétaire national du Syndicat de la magistrature.
par Caroline Fleuriot
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