Clause de réserve de propriété : portée de la nature de sûreté réelle

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Clause de réserve de propriété : portée de la nature de
sûreté réelle
le 23 octobre 2013
AFFAIRES | Entreprise en difficulté
En application des dispositions combinées des articles 2329 du code civil et L. 624-9 du code de
commerce, si la clause de réserve de propriété constitue une sûreté réelle, elle ne confère à son
bénéficiaire aucun droit de préférence dans les répartitions.
Com. 15 oct. 2013, F-P+B, n° 13-10.463
La consécration par l’ordonnance n° 2006-646 du 23 mars 2006 de la qualification de sûreté de la «
propriété retenue » (C. civ., art. 2329) n’est certainement pas sans portée sur le régime de la
clause de réserve de propriété (V. P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives,
Dalloz Action, 2013/2014, n° 816.13) mais, pour autant, celle-ci ne constitue toujours pas, à tous
égards, une sûreté (V. L. Aynès et P. Crocq, Les sûretés. La publicité foncière, 7e éd., LGDJ, 2013, n°
805). Et, quoi qu’il en soit, la nature de sûreté réelle que lui attribue l’article 2329 du code civil ne
saurait suffire à déroger aux règles d’ordre public des dispositions spéciales prévues par le livre VI
du code de commerce et rendre caduque la jurisprudence construite sur ce fondement.
Aussi, que le vendeur réservataire soit titulaire d’une sûreté réelle ne lui est hélas d’aucune utilité
s’il omet de revendiquer le bien dans le délai de forclusion de l’article L. 624-9 du code de
commerce. Peu importe, dans ce cas, qu’il ait, comme en l’espèce, déclaré sa créance à titre
privilégié en mentionnant sa sûreté (démarche de précaution toujours recommandée bien que la
Cour de cassation ne subordonne pas l’efficacité de la revendication à la déclaration de la créance
du prix de vente, v.Com. 20 oct. 1992, n° 90-18.867, D. 1993. Somm. 288, obs. F. Pérochon ) :
son droit de propriété, qu’il ne perd nullement (d’où le refus de transmission d’une question
prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, Com. 15 mars 2011, n° 10-40.073, Bull.
civ. IV, n° 44 ; Dalloz actualité, 22 mars 2011, obs. A. Lienhard ; D. 2011. 815, obs. A. Lienhard ;
ibid. 2687, chron. F. Arbellot et H. Guillou ; Rev. sociétés 2011. 387, obs. P. Roussel Galle ; RTD
com. 2011. 642, obs. A. Martin-Serf ), n’en sera pas moins inopposable à la procédure, de sorte que
le bien, devenu le gage des créanciers, pourra être vendu par le liquidateur à l’égal des actifs du
débiteur (V. F. Pérochon, Entreprises en difficulté, 9e éd., LGDJ, 2012, n° 1438).
Le raisonnement, sans doute un peu désespéré, de la société créancière ne pouvait donc prospérer.
La cour d’appel y avait déjà répondu, en confirmant la décision du juge-commissaire considérant
que le caractère privilégié de la créance n’était pas justifié, mais sur le terrain inadéquat de l’article
2329 du code civil (selon lequel, « les causes légitimes de préférence sont les privilèges et
hypothèques »), où le débat avait été placé.
L’attendu de principe formulé par le présent arrêt (qui précise que, « si la clause de réserve de
propriété constitue une sûreté réelle, elle ne confère à son bénéficiaire aucun droit de préférence
dans les répartitions ») s’explique donc par la volonté de la Cour de motiver en droit sa décision de
rejet, tout en la resituant dans le champ des sûretés réelles.
Irréprochable en l’état du droit positif, la solution a cependant quelque chose de gênant par sa
sévérité. Dans le souci d’introduire un minimum de souplesse dans ce régime sans merci pour le
vendeur négligent, un auteur a suggéré un aménagement de lege ferenda, qui offrirait au
propriétaire retardataire la possibilité de bénéficier d’un relevé de forclusion lorsqu’il est lié par un
contrat en cours au jour du jugement d’ouverture, hypothèse dans laquelle, depuis la réforme du 18
décembre 2008, le délai de revendication court également de la publication du jugement
d’ouverture au BODACC (V. Gaz. Pal. 8-9 juill. 2011, p. 32, note E. Le Corre-Broly).
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par Alain Lienhard
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