¶ 17-012-L-10 Vessies neurologiques G. Amarenco, J. Kerdraon Les troubles vésicosphinctériens sont d’une grande fréquence au cours des pathologies neurologiques dont ils peuvent être un des signes révélateurs. Ils posent toujours le problème de leur retentissement, tant en termes fonctionnel (qualité de vie) que médical (complications uronéphrologiques). Ils nécessitent ainsi une évaluation multidimensionnelle, souvent multidisciplinaire, permettant une analyse de leur mécanisme physiopathologique par les explorations urodynamiques et de leur retentissement à l’aide des données cliniques (catalogue mictionnel, scores de symptômes et de qualité de vie) et paracliniques (radiologiques et biologiques). Leur traitement est indispensable, qu’il soit médical (médications à tropisme vésical ou sphinctérien, toxine botulique, autosondage), ou qu’il fasse appel aux différentes techniques chirurgicales (entérocystoplastie, sphinctérotomie, sphincter artificiel, neuromodulation des racines sacrées...). Le suivi clinique et paraclinique (urodynamique, échographique, biologique) de ces vessies neurogènes est fondamental en termes de confort du patient et de pronostic. © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Vessie neurologique ; Incontinence ; Urodynamique Plan ¶ Introduction : problèmes posés par la vessie neurogène 1 ¶ Rappel physiologique 1 Organisation des réflexes du contrôle urinaire 4 ¶ Évaluation et moyens d’étude des troubles vésicosphinctériens neurogènes 4 Évaluation clinique des vessies neurologiques 4 Évaluation urodynamique des vessies neurologiques 6 Évaluation neurophysiologique des vessies neurologiques 8 Évaluation endoscopique et radiologique des vessies neurologiques 10 Évaluation biologique des vessies neurologiques 10 ¶ Différents types de vessies neurologiques (classification) 11 Classification topographique 11 Classification pronostique 11 ¶ Complications des vessies neurogènes 11 ¶ Troubles associés aux vessies neurogènes 12 Troubles anorectaux neurogènes 12 Troubles génitosexuels neurogènes 12 ¶ Troubles mictionnels révélateurs d’une lésion neurologique 12 ¶ Différentes pathologies 13 Vessie neurogène du blessé médullaire 13 Troubles vésicosphinctériens de la sclérose en plaques 13 Troubles vésicosphinctériens de la maladie de Parkinson 15 Troubles vésicosphinctériens des neuropathies périphériques 16 Troubles vésicosphinctériens des accidents vasculaires cérébraux 16 Troubles vésicosphinctériens des autres affections neurologiques 17 ¶ Traitements des vessies neurologiques 18 Traitements de l’hyperactivité vésicale 18 Traitements de l’hypoactivité vésicale 18 Traitements de l’hypertonie sphinctérienne 19 Traitement de l’hypotonie sphinctérienne 19 Autres traitements 19 Modalités de surveillance des vessies neurologiques 19 ¶ Conclusion 20 Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) ■ Introduction : problèmes posés par la vessie neurogène La plupart des maladies neurologiques s’accompagnent de troubles vésicosphinctériens, ces derniers pouvant même en constituer un des signes révélateurs (Tableau 1). Du fait de leur retentissement en termes de confort de vie et du risque spécifique de complications rénales et infectieuses, ils nécessitent une évaluation clinique, urodynamique, radiologique et biologique régulière. Leurs traitements, qu’ils fassent appel aux médicaments, aux injections de toxine botulique, aux techniques manuelles (autosondages) ou à la chirurgie, doivent toujours être discutés en fonction de la pathologie initiale, de son pronostic, de son évolutivité, des signes anorectaux et génitosexuels associés, du degré de handicap général et de celui généré par les troubles urinaires eux-mêmes. Leur prise en charge sera au mieux assurée par une équipe multidisciplinaire. ■ Rappel physiologique Le cycle continence-miction permet le stockage à basse pression des urines dans l’intervalle des mictions et la vidange périodique de celle-ci de manière aisée, complète et sans hyperpression. Pour cela, outre les propriétés viscoélastiques de la vessie (faculté de compliance), le système nerveux joue un rôle régulateur essentiel. Les centres mictionnels sont étagés tout au long du névraxe et répondent à une double organisation bien connue, stratifiée en systèmes somatique et végétatif [1-4]. Les centres somatiques sont intégrés au niveau sacré (métamères S2S3S4). Le nerf efférent est le nerf pudendal. Ce dernier permet la contraction de l’ensemble de la musculature périnéale, tout particulièrement le sphincter strié urétral. Il permet aussi de véhiculer certaines sensations de besoin, depuis l’urètre et la vessie jusqu’aux relais médullaires. 1 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques Tableau 1. Étiologies principales des troubles vésicosphinctériens neurologiques. Lésions encéphaliques - tumeurs, abcès cérébraux - accidents vasculaires cérébraux - hématomes cérébraux post-traumatiques - traumatismes crâniens - syndromes extrapyramidaux (maladie de Parkinson, MSA) - démences - leucoencéphalopathies - encéphalites Lésions médullaires - lésions traumatiques - paraplégies « médicales » (fistule, angiome, spondylodiscite) - sclérose en plaques - méningoradiculite (herpès, maladie de Lyme, VIH) Lésions radiculaires, plexiques - traumatismes du bassin - fractures du sacrum - queue de cheval - lésions plexiques traumatiques, postradiothérapiques Lésions périphériques - neuropathie périphérique - corne antérieure - dysautonomie VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; MSA : atrophies multisystématisées. Centre inhibiteur miction Centre activateur miction Nerf hypogastrique - Sympathique dorsolombaire Nerf pelvien Parasympathique sacré Somatique sacré + + Nerf pudendal Figure 1. Schéma simplifié de la régulation neurologique de l’appareil vésicosphinctérien. Les centres parasympathiques sont aussi sacrés (Fig. 1). Le nerf afférent, le nerf pelvien, permet la contraction du détrusor par la libération du neuromédiateur qu’est l’acétylcholine, permettant ainsi de comprendre la possibilité de dépression de l’hyperactivité vésicale par l’administration de parasympathycolytiques (anticholinergiques-atropiniques) (Tableau 2). Les centres sympathiques dorsolombaires interviennent sur le détrusor (nerfs hypogastriques) en déprimant l’activité vésicale (bêtarécepteurs) et surtout sur le sphincter en renforçant sa contraction (alpharécepteurs), ce qui permet d’expliquer le rôle des alphabloquants dans l’amélioration de la vidange vésicale. Mais de nombreux autres systèmes non adrénergiques, non cholinergiques interviennent et les neuromédiateurs sont multiples. Ceci permet d’expliquer les essais actuels de multiples manipulations pharmacologiques (système acide gamma-aminobutyrique [GABA]ergique, NK2 et NK3, N-méthyl-D-aspartate [NMDA], bloqueurs calciques et potassiques, NO...). Les centres encéphaliques sont nombreux [5-10]. Chez l’animal, il a été individualisé, dès 1920, un centre mictionnel au niveau de la protubérance, dont la stimulation électrique permet d’aboutir à une miction harmonieuse [1]. La stimulation de la région médiodorsale de la protubérance provoque chez le chat une diminution de la pression urétrale, un silence électromyographique périnéal et une contraction vésicale. Cette région, nommée « M-region », a des connexions avec les neurones de la colonne intermedio-lateralis de la moelle sacrée. Ces colonnes contiennent des neurones parasympathiques destinés à l’innervation vésicale et des interneurones inhibiteurs des motoneurones innervant la musculature pelvienne (noyau d’Onuf). Par l’intermédiaire de ces projections, la région M est susceptible d’induire une miction par stimulation du détrusor et par inhibition, dans le même temps, des motoneurones innervant les muscles pelviens, ce qui se traduit par la relaxation du sphincter urétral. Parallèlement, il a été démontré qu’une autre région protubérantielle, « L-region », avait des projections sur les motoneurones sacrés des noyaux d’Onuf. Il semble ainsi que la région M soit le site contrôlant la miction, alors que la région L contrôle la continence (Fig. 1). Ces deux centres protubérantiels reçoivent peu de projections sensitives depuis l’appareil urinaire. Ceci n’est pas le cas de la substance grise périaqueducale (SGPA) qui reçoit un grand nombre d’informations sensitives en provenance de la moelle sacrée. Il existe des connexions Tableau 2. Sites et type d’action des neuromédiateurs sur le système vésicosphinctérien. Parasympathique Sympathique Stimulation Blocage Stimulation Action sur le détrusor Contraction vésicale +++ Relaxation vésicale +++ Relaxation vésicale +/- Action sur le sphincter 0 0 Contraction sphincter + Relaxation sphincter +++ Drogue active Parasympathycomimétique Anticholinergique (parasympathycolytique) Alphastimulant Alphabloquant 2 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Blocage Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 entre la SGPA et les centres mictionnels protubérantiels suggérant ainsi qu’au cours du remplissage vésical, la SGPA exerce une influence tonique permanente sur les neurones du centre L. Lorsque la vessie atteint un certain seuil de remplissage et que la situation est appropriée, il y aurait une permutation de l’activité des neurones du centre L aux neurones du centre M. Il résulterait de cette modification une relaxation du sphincter urétral et une contraction du détrusor, d’où une vidange vésicale complète. Comme chez le chat, il a été individualisé chez l’homme deux zones protubérantielles susceptibles de participer au contrôle nerveux de la miction. La première zone, située dans la partie postéromédiane de la protubérance, proche du IVe ventricule, serait l’équivalent de la région M, puisque le débit sanguin cérébral y est significativement augmenté lors de la miction. La deuxième zone, située dans la protubérance mais dans une position ventrolatérale, pourrait correspondre à la région L. Il a été observé une augmentation significative du flux sanguin cérébral au niveau de la SGPA, pendant la miction des sujets volontaires sains. On peut supposer que l’activation de la SGPA, résultant de la stimulation des tensorécepteurs vésicaux par le remplissage vésical, soit responsable de l’activation du centre M entraînant la miction. L’hypothalamus paraît également être impliqué dans la miction. Chez le chat, la stimulation de certaines structures cérébrales telles que le gyrus cingulaire antérieur, le noyau préoptique de l’hypothalamus, l’amygdale, entraîne des contractions vésicales. Toutes ces structures donnent naissance à des voies descendantes se projetant sur la SGPA et sur le système nerveux dit « émotionnel ». Seul le noyau préoptique envoie des projections directement sur le centre mictionnel protubérantiel (région M). Le rôle exact du noyau préoptique hypothalamique dans la miction demeure méconnu. On peut supposer que l’influence directe de cette aire hypothalamique sur le centre mictionnel protubérantiel détermine le début de la miction. Qu’il y ait ou non miction dépend toujours de l’environnement dans lequel se situe l’individu. Ainsi, lorsque l’information de plénitude vésicale est véhiculée via les afférences sensitives d’origine sacrée et la SGPA, et qu’il peut y avoir miction, celle-ci ne se produirait que lorsque certaines structures, telles que le noyau préoptique hypothalamique, ont « décidé » que l’environnement s’y prêtait. Le cervelet, quant à lui, exerce une action inhibitrice lors de la phase de continence et un rôle facilitateur durant la miction. Le cortex a un rôle plus obscur. Deux zones corticales sont impliquées dans la miction : la partie dorsolatérale du cortex préfrontal droit qui est activée lorsque la miction débute, mais également lorsqu’elle est permise par le sujet mais non réalisée ; le gyrus cingulaire antérieur droit lorsque le sujet se retient d’uriner. Cette désactivation du gyrus cingulaire antérieur refléterait une inhibition des informations sensitives vésicales dans le but d’atténuer la sensation de plénitude vésicale et, par conséquent, le besoin impérieux d’uriner. Il est probable que l’activation du cortex préfrontal et du gyrus cingulaire antérieur ne soit pas spécifique de la miction, mais soit liée à des actions plus générales telles que l’attention et la sélection d’une réponse appropriée. Les zones cérébrales (cortex et protubérance) impliquées dans la miction se situent de façon prédominante à droite chez des sujets volontaires sains, droitiers. Cette latéralisation du contrôle mictionnel permettrait d’expliquer pourquoi l’incontinence urinaire est particulièrement fréquente après les lésions hémisphériques droites. Le débit sanguin cérébral de la SGPA augmente parallèlement au degré de remplissage vésical, confirmant le rôle de cette structure nerveuse dans le contrôle mictionnel. Une activité protubérantielle est également mise en évidence au cours du remplissage vésical. Cependant, cette zone d’hyperactivité protubérantielle est différente de la région L sollicitée lors des efforts de retenue. Au cours du remplissage vésical, il a été observé une activation bilatérale des lobes latéraux du cervelet et des aires frontales, suggérant que ces différentes structures Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) ont un rôle non seulement moteur au cours de la miction mais également sensitif pendant le remplissage vésical et le maintien de la continence. Le débit sanguin cérébral au niveau du gyrus cingulaire est également modulé en fonction du remplissage vésical et de la sensation d’impériosité mictionnelle, et cela en dehors de toute perception douloureuse. Ceci confirme le rôle complexe joué par le gyrus cingulaire dans l’utilisation des informations sensitives vésicales afin d’influencer la perception de besoin impérieux et la continence urinaire. Aucune modification significative d’activité n’est observée au niveau du cortex somesthésique lors du remplissage vésical ou de la perception d’un besoin mictionnel impérieux. Les structures cérébrales impliquées dans la perception du besoin impérieux semblent différentes de celles impliquées dans la sensation de remplissage vésical. Ainsi, certaines modifications telles que la désactivation au niveau de l’hypothalamus, du cortex prémoteur, de certaines parties du gyrus cingulaire de façon bilatérale sont corrélées à la perception d’un besoin mictionnel impérieux et sont indépendantes de la perception de plénitude vésicale. D’autres études ont rapporté l’activation de l’insula et de l’opercule pendant le remplissage vésical. La stimulation de l’insula chez l’homme provoque une augmentation du tonus sympathique. L’activation des fibres sympathiques est connue pour accroître la relaxation du détrusor, entraînant une augmentation de la capacité vésicale. Ces résultats suggèrent que l’insula pourrait être une zone d’intégration de la réponse autonomique au cours du remplissage vésical. Les centres mictionnels sacrés sont le siège de l’automatisme vésical. Privé de toute afférence, le détrusor se contracte de manière périodique sans modulation inhibitrice des voies supérieures médullaires ou encéphaliques. Le simple remplissage vésical (réflexe A delta), par stimulation des tensorécepteurs, permet la contraction détrusorienne, dès le seuil sensitif réflexogène obtenu. C’est un des mécanismes essentiels de « l’automatisme vésical » de l’animal spinalisé ou du paraplégique. Cette activité autonome sacrée est physiologique chez l’enfant encore immature par l’absence de régulation corticale et sous-corticale. Les mictions sont périodiques, totales, sans résidu, non réfreinées par une quelconque inhibition sociale, culturelle ou réflexe. L’apparition d’une sensibilité consciente, la maturation du système nerveux, l’éducation et parfois les contraintes parentales aboutiront rapidement à une régulation sociale, volontairement acceptée de la miction. Mais ce réflexe A delta ne résume pas les possibilités de contraction. Chez l’enfant, chez l’animal spinalisé et chez le blessé médullaire, un autre réflexe, médié par les fibres non myélinisées de type C, capsaïcine-sensible, permet la contraction vésicale. C’est, à côté de la suppression des influx inhibiteurs suprasacrés par la lésion médullaire, le deuxième mécanisme essentiel de l’hyperactivité du paraplégique. La réémergence de ce réflexe archaïque est un des mécanismes physiopathologique de cette hyperactivité et permet d’expliquer l’efficacité des drogues vanilloïdes intravésicales. À côté des variations de la neuroplasticité des afférents vésicaux, le changement de comportement des récepteurs centraux a été récemment incriminé. La fonction de ces récepteurs est moins bien connue. À un niveau beaucoup plus périphérique, les modifications du muscle lui-même et de l’urothélium jouent un rôle probablement non négligeable. L’hypertrophie détrusorienne secondaire à l’hyperactivité modifie le métabolisme vésical, avec une plus grande sensibilité à l’ischémie et un coût énergétique altéré, aboutissant à une altération des nerfs périphériques, les modifications de l’urothélium étant responsables d’une modification des neuromédiateurs locaux, des facteurs neurotrophiques, et partant une modification des messages afférents. Ces différents niveaux d’action ne sont pas univoques et non systématiquement à évoquer dans toutes les hyperactivités vésicales. Ces facteurs physiopathologiques sont en effet possiblement liés à l’étiopathogénie même de l’hyperactivité vésicale : les causes neurologiques ont un manifeste substratum physiopathologique différent de l’obstruction (où la réactivation 3 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques du réflexe C est bien connu expérimentalement) ; l’hyperactivité médullaire ne repose pas sur les mêmes mécanismes que l’hyperactivité induite par une lésion cérébrale. Ainsi, si le comportement urodynamique de l’hyperactivité vésicale est assez univoque (encore que souvent une activité détrusorienne phasique est bien plus évocatrice d’une lésion médullaire que le « simple » réflexe mictionnel non inhibé des lésions encéphaliques), les mécanismes physiopathologiques sont bien différents, ce qui sous-entend que les modalités thérapeutiques et la gravité (risques uronéphrologiques) sont probablement bien différents suivant la cause considérée. Organisation des réflexes du contrôle urinaire L’activité volontaire ou réflexe des muscles périnéaux (sphincters urétraux et anaux, muscles bulbocaverneux, ischiocaverneux, transverses du périnée) est supportée par des centres intégrateurs sacrés localisés dans les métamères S2S3S4 et dont l’efférent est constitué par le nerf pudendal [10]. La contraction volontaire de ces muscles permet d’inhiber le réflexe mictionnel en cas de besoin notamment urgent (réflexe périnéodétrusorien inhibiteur). La contraction réflexe, succédant par exemple à un effort de toux, permet par une anticipation musculaire d’augmenter les pressions intrasphinctériennes et de s’opposer ainsi à l’augmentation des pressions intravésicales induites par l’effort. Parallèlement, la stimulation de l’afférent sensitif (gland, région clitoridienne), détermine une contraction réflexe des muscles périnéaux. Ces réponses dont l’afférent et l’efférent sont constitués du nerf pudendal et l’intégration médullaire des centres sacrés, peuvent être étudiées cliniquement (réflexes bulboanal et bulbocaverneux) et électrophysiologiquement (latence du réflexe bulbocaverneux). Ce réflexe est toujours présent chez le sujet sain, retardé ou aboli dans les lésions radiculomédullaires basses ou les lésions purement périphériques, et enfin conservé (voire exacerbé par levée de l’inhibition suprasegmentaire) lors des lésions médullaires suprasacrées. Dans cette dernière population de blessé médullaire, d’autres réflexes périnéaux ont pu être décrits et spécifiquement étudiés. Des contractions vésicales réflexes peuvent ainsi être obtenues par des stimuli habituellement non efficaces pour déclencher une miction chez l’homme normal. Ainsi, les stimulations cutanées périnéales (suprapubienne, périanale), voire des cuisses, l’étirement de la marge anale, la pression du gland ou du clitoris, la percussion sus-pubienne, peuvent déterminer une contraction vésicale. De même, l’augmentation de la pression intravésicale est aussi un stimulus bien connu de la contraction détrusorienne, qui physiologiquement peut être annihilée par l’augmentation simultanée du tonus urétral. Parallèlement, la stimulation directe de la muqueuse vésicale détermine, chez le paraplégique, une contraction détrusorienne mais aussi des muscles périnéaux, l’anesthésie muqueuse inhibant ces réponses. La voie afférente de ces deux réflexes (« vésicodétrusorien » et « vésicopérinéal ») est probablement constituée de fibres A delta et C. Le seuil de déclenchement réflexe est probablement plus bas pour le réflexe vésicopérinéal versus réflexe vésicodétrusorien. D’autres réflexes activateurs de la miction sont décrits. La stimulation urétrale (flux urétral) renforce ainsi la contraction détrusorienne. ■ Évaluation et moyens d’étude des troubles vésicosphinctériens neurogènes Évaluation clinique des vessies neurologiques L’examen clinique reste un élément fondamental dans l’approche diagnostique et thérapeutique des troubles vésico- 4 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) sphinctériens neurogènes. Il est le préalable indispensable à toute exploration, qu’il s’agisse d’examens urodynamiques, électrophysiologiques ou radiologiques. Il permet de les hiérarchiser et, confronté à leurs résultats, d’optimiser ces derniers pour assurer une meilleure compréhension physiopathologique, étiopathogénique et une meilleure prise en charge thérapeutique des troubles mictionnels neurogènes. Interrogatoire Il va permettre de définir la typologie, le mode évolutif et les circonstances d’apparition des troubles. Certains éléments sont en faveur d’une étiologie neurogène. L’association de plusieurs troubles entre eux (troubles urinaires, anorectaux et génitosexuels simultanés) est hautement évocatrice d’une maladie neurologique, en raison de la proximité anatomique (moelle basse) des centres neurologiques de contrôle de ces différentes fonctions. Les fuites sans effort et sans besoin, si tant est qu’il n’existe pas de fistule ou d’abouchement urétéral ectopique, ni d’antécédent récent de chirurgie chez l’homme, sont évocatrices d’une étiologie neurologique. L’impériosité, les mictions impérieuses avec ou sans fuites ne sont pas toujours en rapport avec une étiologie neurologique, même si nombre d’affections neurologiques centrales suprasacrées, médullaires ou encéphaliques, s’accompagnent souvent de tels symptômes en rapport avec une instabilité vésicale par défaut d’inhibition des centres supérieurs. Une dysurie peut être certes secondaire à un obstacle infravésical (adénome, sténose, maladie du col) mais aussi à un obstacle fonctionnel neurologique (dyssynergie vésicosphinctérienne), la miction s’effectuant souvent avec un bon débit mais avec plusieurs jets successifs involontairement stoppés. Si la perception d’un résidu postmictionnel dans le cadre d’une rétention chronique n’est pas évocatrice, le caractère indolore (sans besoin) d’une rétention urinaire aiguë est en revanche très en faveur d’une lésion neurologique. L’absence de besoin au cours d’une rétention chronique est moins spécifique car pouvant s’observer au cours des détrusors « claqués » (émoussement des tensorécepteurs du détrusor) dont on connaît la multiplicité des étiologies. De même la diminution ou l’abolition de la perception du passage urétral des urines plaide grandement en faveur d’une étiologie neurologique. Le mode d’installation des troubles vésicosphinctériens est tout aussi important à préciser. L’apparition récente des troubles peut être un élément sémiologique déterminant devant une hyperactivité vésicale en faveur d’une étiologie neurologique en opposition à une immaturité vésicale idiopathique apparaissant dès l’enfance avec énurésie tardive et urgence mictionnelle souvent présente tout au long de la vie. L’installation très aiguë d’un trouble urinaire et tout particulièrement d’une dysurie, plaide en faveur de son origine neurologique, une installation moins brutale, progressive évoquant plutôt une étiologie urologique obstructive. Examen neuropérinéal Si cette étape n’est pas forcément la plus démonstratrice, il s’agit toutefois de l’examen le plus spécifique puisque étudiant les voies et centres impliqués dans le contrôle neurologique du fonctionnement vésicosphinctérien, anorectal et génitosexuel [11-14]. L’étude des réflexes sacrés est, avec celle de la sensibilité périnéale, l’exploration la plus importante (Tableau 3). L’arc réflexe nerf honteux interne-métamères S2S3S4 peut en effet être étudié cliniquement : le pincement rapide du gland ou du clitoris détermine une contraction réflexe visible et/ou palpable des muscles périnéaux (sphincter anal, muscle bulbocaverneux). De même, la stimulation de la marge anale par une piqûre induit une contraction réflexe du sphincter anal (réflexe nociceptif anal). Ces réflexes empruntent les branches sensitives afférentes du nerf honteux interne (nerf dorsal de la verge, nerf clitoridien), transitent par la moelle (métamères S2S3S4), et enfin cheminent par les voies effectrices du nerf honteux interne. Toute abolition de ces réflexes témoigne théoriquement Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Tableau 3. Éléments de diagnostic topographique et étiologique apportés par l’examen neuropérinéal. Type de périnée Sensibilité Réflexe du cône Tonus du sphincter anal Central Normale Augmenté Augmenté Diminuée Périphérique Diminuée Diminué Diminuée Diminué Commande Mixte (syndrome Diminuée du cône terminal) Augmenté Augmenté Diminuée Mécanique Normale Normal Normal Diminuée Psychogène Dissociée Normal Normal ou augmenté Diminuée ou normale d’une lésion à un point quelconque de l’arc réflexe (nerf honteux interne, métamères S2S3S4, racines, plexus). En réalité, ils peuvent être absents chez 20 à 30 % des sujets sains même lorsqu’ils sont recherchés dans de bonnes conditions (sujet en position gynécologique ou en décubitus latéral, rectum vide, décontracté). Dans ces cas, seule l’exploration électrophysiologique du périnée (latence du réflexe bulbocaverneux) permettra de juger réellement de l’intégrité de l’arc réflexe sacré et de quantifier une éventuelle atteinte. Cette dernière peut être le fait d’une lésion purement périphérique (mononeuropathie du nerf honteux, polynévrite, polyradiculonévrite, lésion plexique, atteinte radiculaire) ou médullaire basse (lésions du cône terminal vasculaire, tumorale ou encore traumatique). L’existence d’une perturbation de ces réflexes associée à un trouble périnéal plaide en faveur de l’étiologie neurologique de ce dernier. Ailleurs, ce réflexe est perturbé dans le sens d’une exagération. Des réflexes périnéaux vifs, diffusés (la stimulation à distance, par exemple sur les fesses ou la face postérieure des cuisses, induisant encore une réponse motrice avec contraction du sphincter anal) évoquent alors une lésion neurologique centrale suprasacrée (lésions médullaires cervico-dorsolombaires, lésions encéphaliques). Quant au réflexe anal à la toux (contraction de l’anus lors de l’effort de toux), il est intégré à un niveau métamérique supérieur (D12). L’étude de la sensibilité périnéale est tout aussi fondamentale. La sensibilité profonde s’étudie par la perception des vibrations induites par un diapason posé sur les ischions et le sacrum, la sensibilité périnéale superficielle par la perception tactile (doigt, coton, aiguille), la sensibilité thermique par la reconnaissance du chaud et du froid. La totalité de la région périnéale doit être examinée : bourses, verge, vulve, vagin (niveau S2-S3) fesses (niveau S3), face postérieure des cuisse (niveau S2), pourtour de la marge anale (niveau S4), triangle postérieur anal (niveau S5). L’examen est complété par l’étude des sensibilités testiculaire et prostatique (intégrées à un niveau suprasacré). Un trouble de la sensibilité est d’autant plus évocateur d’une maladie neurologique que l’on note une distribution métamérique ou tronculaire des troubles. Le tonus du sphincter anal est apprécié par le toucher rectal. Une hypotonie franche (pouvant aller jusqu’à la béance anale) peut s’observer au cours des lésions neurogènes périphériques. À l’inverse, une hypertonie au retrait du doigt intrarectal peut être mise en évidence au cours des affections neurologiques centrales spastiques. Mais cette hypertonie s’observe aussi chez les sujets neurotoniques mal relâchés pendant l’exploration. La commande musculaire s’apprécie par le toucher pelvien. Elle se teste (cotée de 0 à 5) sur les différents muscles du plancher périnéal (releveurs, sphincter anal). Une abolition même complète n’est pas pathognomonique d’une lésion neurologique car elle s’observe aussi avec une grande fréquence au cours des troubles urinaires mécaniques. Ainsi, si l’examen clinique neuropérinéal n’est pas toujours spécifique, il reste dans tous les cas indispensable et permet de plus une bonne approche diagnostique et parfois topographique grâce à la confrontation des différentes données (Tableau 1). Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Examen neurologique Il complète l’examen neuropérinéal et l’examen général. Ce dernier s’attache tout particulièrement à la notion de prise médicamenteuse pouvant retentir sur l’équilibre vésicosphinctérien, à l’examen de la peau en regard de la moelle sacrée (angiome, lipome, touffe de poils, fossette coccygienne) et à la mise en évidence d’un syndrome dysmorphique (pieds creux). L’examen neurologique est parfois très évocateur lorsqu’il met en évidence une abolition des réflexes achilléens (S1) ou un déficit sensitivomoteur proche des territoires sacrés (fléchisseurs des orteils, releveurs des pieds). En effet, ce type d’altération suggère une atteinte neurologique proche des territoires sacrés, lieu d’intégration des fonctions vésicales. Ailleurs, la mise en évidence d’anomalies neurologiques (atteinte pyramidale, extrapyramidale, motrice, sensitive, cognitive ou des nerfs crâniens) sera d’autant plus importante qu’il s’agit d’un trouble vésicosphinctérien révélateur d’une maladie neurologique. Examen urologique Il est tout aussi indispensable à la recherche de facteurs associés, une maladie neurologique pouvant décompenser une affection urologique et ces dernières pouvant constituer une épine irritative au cours de certaines vessies neurologiques. De plus deux affections définies, neurologique et urologique, peuvent coexister, ce d’autant que certaines sont quasi inéluctables, voire physiologiques (hypertrophie bénigne de la prostate chez l’homme, modifications hormonales de la femme ménopausée, manifestations tissulaires, mécaniques et biochimiques du vieillissement de l’appareil vésicosphinctérien). Enfin, des affections purement neurologiques peuvent déterminer des troubles urologiques secondaires (cervicocystoptôse des vessies périphériques paralytiques), et à l’inverse, des pathologies purement mécaniques peuvent se compliquer d’atteinte neurologique (neuropathie périnéale d’étirement des prolapsus). Chez l’homme, cet examen est dominé par l’exploration de la prostate par le toucher rectal (appréciation du volume à la recherche d’une hypertrophie, consistance, souplesse, existence de nodules). L’inspection de la verge, du méat urétral, du gland est là aussi systématique. Chez la femme, l’appréciation d’un prolapsus, l’examen de la vulve, du méat, du vagin, précède l’exploration dynamique vessie pleine, où lors de la toux, on essaye de démasquer une incontinence à l’effort éventuellement améliorée par la manœuvre de Bonney. Dans les deux sexes, l’étude anorectale (toucher rectal, hémorroïdes, fissures) termine l’exploration morphologique, et l’interrogatoire précise la prise éventuelle de médications pouvant retentir sur l’équilibre vésicosphinctérien. Catalogues mictionnels Le catalogue mictionnel est souvent un outil indispensable pour affirmer et quantifier la réalité d’une pollakiurie, pour chiffrer une incontinence, pour évaluer une rétention. L’interrogatoire classique ayant par définition un caractère rétrospectif, le patient ne peut habituellement préciser les modalités détaillées de sa miction ou des troubles mictionnels, modalités qui vont déterminer nombre de stratégies thérapeutiques. En routine, le catalogue mictionnel doit comporter l’heure et le volume de la miction, celui du résidu si nécessaire, les épisodes de fuites et le type des circonstances déclenchantes. Réalisé pendant un nombre de jours (et nuits) limité pour avoir une bonne acceptabilité, il permet ainsi d’étudier la pollakiurie diurne et nocturne, la diurèse, la fréquence et le type des fuites. Il s’agit donc d’un outil simple, non coûteux, dont la reproductibilité a été prouvée si tant est qu’il soit pratiqué sur au moins 3 jours consécutifs. Il doit être réalisé dans les conditions habituelles de vie (difficulté de mesure du volume mictionnel à l’extérieur du domicile, voire sur les lieux de travail). Il s’agit d’un outil quotidiennement utilisé au cours de la prise en charge des vessies neurologiques. 5 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques Scores de symptômes et de qualité de vie au cours des vessies neurogènes Ces scores permettent une objectivation plus fiable et quantifiable des troubles mictionnels neurogènes. Ils permettent un suivi évolutif et sont un instrument indispensable dans l’appréciation des résultats thérapeutiques, notamment au cours des essais cliniques et des études prospectives. Plusieurs type de score peuvent être utilisés mais aucun n’est spécifique des troubles vésicosphinctériens neurogènes. En ce qui concerne les scores de qualité de vie, rares sont ceux validés en français spécifiquement dans l’évaluation du retentissement des troubles vésicosphinctériens neurogènes. L’échelle Qualiveen a été spécifiquement validée dans les troubles urinaires secondaires à une lésion médullaire traumatique ou à une sclérose en plaques. Ils permettent là encore une évaluation objective du retentissement psychologique et social des troubles sphinctériens et leurs modifications après traitement. Évaluation urodynamique des vessies neurologiques Principe des explorations urodynamiques (EUD) Les EUD permettent une évaluation objective du fonctionnement vésicosphinctérien et partant une analyse physiopathologique précise des symptômes urinaires, tout particulièrement de l’incontinence. Outre ce rôle dans la précision des mécanismes des troubles urinaires, les EUD apportent des éléments pronostiques essentiels dans le cadre des vessies neurogènes. Enfin, des éléments étiopathogéniques, évolutifs, topographiques ou thérapeutiques peuvent parfois être donnés par ces explorations, mais cela n’est pas leur objet initial. Les EUD comprennent plusieurs examens : la cystomanométrie qui permet l’enregistrement des pressions intravésicales ; la sphinctérométrie qui analyse les pressions intra-urétrales ; la débitmétrie qui quantifie la miction. L’exploration électrophysiologique complète souvent ces examens manométriques en évaluant l’aspect fonctionnel sphinctérien et en analysant d’éventuelles composantes neurogènes dans la genèse des troubles. Sémiologie urodynamique Principes de base des différents examens manométriques La cystomanométrie permet l’étude des pressions intravésicales [15]. L’examen débute par un sondage vésical (sonde de cystomanométrie plastifiée) chez un patient aux urines stériles. Les pressions intravésicales sont alors étudiées au cours d’un remplissage progressif de la vessie par un fluide (eau ou gaz), simultanément aux pressions urétrales et à l’activité électromyographique du sphincter strié urétral. La vitesse à laquelle la vessie est remplie est, soit physiologique (poids maximal en kilogrammes, divisé par 4, exprimé en ml/min), soit non physiologique. Chez le neurologique, la vitesse est habituellement lente (50 ml/min), voire très lente (20 ml/min) chez les tétraplégiques en raison du risque de dysautonomie lors de la réplétion vésicale. La fonction de remplissage vésical est appréhendée par quatre paramètres : sensibilité vésicale, activité du détrusor, compliance vésicale et capacité vésicale [15]. La sensation normale de réplétion vésicale peut être analysée par trois événements notés pendant la cystomanométrie de remplissage, événements quantifiés par le volume de la vessie au moment de leur apparition. La première sensation de remplissage vésical est la sensation du patient lorsqu’il devient conscient de l’apparition de cette sensation de remplissage vésical. Le premier besoin d’uriner est défini comme la sensation qu’il est nécessaire d’aller uriner dès que l’instant sera propice, mais cette miction peut être différée si cela s’avère nécessaire. Le besoin intense d’uriner est défini comme l’apparition d’un besoin d’uriner persistant, mais sans crainte de perdre les urines. L’augmentation de la sensibilité 6 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Cysto PR 50 ml EMG#1 1500 EMG 1000 uV 500 0 60 Pves 40 cmH2O 20 0 60 T 40 o T Pabd o u cmH2O 20 x ux 0 600 400 Vinfus ml 200 0 T T ST PB P a r l e T o u x 1 0 1 = T P a l T r mo l u e 3x 0 1 = T o u x 2 0 1 = T o 4 u 0 x 1 = P a r l e P e r c u s s i o n s T o u x = 1 0 3 P T P T B1 ODM CM PP T Figure 2. Bilan urodynamique : cystomanométrie retrouvant un détrusor stable à faible pression, à capacité maximale normale. vésicale est définie comme une première sensation trop précoce de remplissage vésical (ou d’une sensation trop précoce de besoin d’uriner) et/ou une sensation trop précoce de besoin intense, qui apparaît pour de faibles volumes de remplissage et qui persiste. Cette évaluation de la sensation vésicale des patients est subjective et il n’est pas possible par exemple de quantifier un seuil dans la définition d’une hypersensibilité vésicale. La diminution de la sensation vésicale est définie comme une sensation diminuée de remplissage vésical. L’abolition de la sensibilité vésicale signifie que durant la cystomanométrie de remplissage, le patient n’a aucune perception de besoin ou de remplissage. Les sensations vésicales non spécifiques, durant la cystomanométrie de remplissage, peuvent conduire l’individu à prendre conscience du remplissage vésical (comme par exemple, une sensation de réplétion abdominale ou l’apparition de symptômes végétatifs). L’urgence mictionnelle, pendant la cystomanométrie de remplissage, est un soudain et irrésistible besoin d’uriner. L’étude de l’activité détrusorienne pendant la cystomanométrie de remplissage est fondamentale [15]. Dans la vie quotidienne, les individus inhibent leur activité détrusorienne, jusqu’à ce qu’ils soient dans une circonstance permettant la miction (Fig. 2). Ainsi, une fois l’analyse de la phase de remplissage effectuée, et quand le patient désire uriner, normalement, la permission d’uriner est donnée. Ce moment est indiqué sur les courbes d’urodynamique, et toute activité du détrusor avant cette « permission » est définie comme une activité détrusorienne involontaire. Ainsi, une fonction détrusorienne normale permet un remplissage vésical avec un minime ou aucun changement de pression. Aucune contraction involontaire phasique n’apparaît malgré une manœuvre provocative (toux par exemple). L’hyperactivité détrusorienne est une constatation urodynamique caractérisée par des contractions détrusoriennes involontaires pendant la phase de remplissage qui peuvent être spontanées ou provoquées. Différents types d’hyperactivité détrusorienne sont décrits. L’hyperactivité détrusorienne phasique (Fig. 3) est définie par des ondes de contraction caractéristiques qui peuvent ou non conduire à une incontinence urinaire (les contractions détrusoriennes phasiques ne sont pas toujours accompagnées d’une sensation). L’hyperactivité détrusorienne terminale (Fig. 4) est définie comme une simple et unique contraction détrusorienne involontaire apparaissant à la capacité maximale cystomanométrique, contraction qui ne peut être inhibée et qui détermine habituellement une incontinence avec une vidange vésicale. Cette hyperactivité est typiquement associée à une diminution de la sensibilité vésicale, comme cela est observé par exemple chez les patients âgés ou chez les patients atteints d’accidents vasculaires cérébraux (AVC), où les urgences mictionnelles peuvent être ressenties au moment de la contraction mictionnelle. Cependant, dans les lésions médullaires complètes, il peut ne pas y avoir de quelconque sensibilité vésicale au cours de contractions. Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Cysto PR 50 ml EMG#1 600 EMG uV Pves cmH2O Pabd cmH2O Vinfus ml 400 200 0 60 40 20 0 60 40 20 0 600 400 200 0 PB Vo T o u x Vo = 2 0 1 Vo = 1 0 1 T ST M i c t i o n l T m o u x T l o m u x T o u x T B1 T Vo CM ODM M M T Figure 3. Bilan urodynamique : cystomanométrie retrouvant un détrusor hyperactif (hyperactivité phasique), à capacité normale. Cysto PR 50 ml EMG#1 EMG uV Pves cmH2O Pabd cmH2O Vinfus ml 400 200 0 60 40 20 0 60 40 20 0 600 400 T o u x T o u x Vo = 1 0 1 200 P a r l e l T m o u x Vo = 2 0 1 P a r l e l m P e r c u s s i o n s M i c t i o n T o u x Vo = 3 0 1 T o u x 0 T ST PB B1 T P Vo T Vo P T Vo CM ODM M P T Figure 4. Bilan urodynamique : cystomanométrie retrouvant un détrusor hyperactif (hyperactivité terminale), à capacité réduite. L’hyperactivité détrusorienne est qualifiée neurogène quand il existe manifestement une cause neurologique à ces contractions. Ce terme remplace l’ancien terme d’« hyperréflexie détrusorienne ». D’autres types d’hyperactivité détrusorienne peuvent être observés comme par exemple : association d’une hyperactivité détrusorienne terminale et phasique ; ou bien encore contractions détrusoriennes soutenues, en plateau, à haute pression, observées chez les patients atteints de lésions médullaires, lorsqu’une miction tente de s’effectuer contre un sphincter dyssynergique. Des percussions sus-pubiennes peuvent être réalisées pour étudier la réactivité détrusorienne à ce stimulus et préjuger des possibilités de rééducation vésicosphinctérienne, si tant est que l’automatisme sacré soit préservé (cas des lésions médullaires cervicodorsales). Les manœuvres sensibilisatrices sont définies comme des techniques utilisées durant l’exploration urodynamique, dans le but de provoquer une hyperactivité détrusorienne. Ainsi, le remplissage rapide, le test à l’eau glacée, l’injection de produit acide, les changements posturaux, l’immersion des mains dans l’eau sont des techniques usuelles. Le test à l’eau glacée est très spécifique des vessies neurogènes. Le réflexe vésical au froid (cooling reflex) est connu de longue date (Adler, 1918), l’instillation intravésicale d’eau glacée favorisant la contraction détrusorienne. Utilisé comme test diagnostique (test à l’eau glacée) par Bors et Blinn [5], il permet de différencier les lésions médullaires suprasacrées, où le test est positif, des lésions infrasacrées, où le test est négatif, comme chez les sujets normaux. Outre cet apport diagnostique et son intérêt physiologique (mise en évidence de thermorécepteurs vésicaux par McDonald en 1959), il a pu être utilisé comme thérapeutique (réentraînement à l’eau glacée des vessies médullaires). Le réflexe vésical au froid est considéré comme un réflexe primitif disparaissant vers l’âge de 5 ans, lors de la maturation Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) du système nerveux. Secondaire à une stimulation des thermorécepteurs vésicaux, médié par les fibres afférentes non myélinisées de type C, c’est un réflexe segmentaire sacré sous influence inhibitrice des centres supérieurs suprasegmentaires. L’instillation d’eau glacée (0 à 4 °C) déclenche une contraction du détrusor supérieure à 15 cm d’eau chez le sujet atteint de lésion médullaire suprasacrée. Cette réponse est à différencier d’une augmentation plus faible des pressions (cold contracture de Kurihara). L’apparition d’une réponse à l’injection d’eau glacée pourrait constituer un argument en faveur d’une possibilité de motricité vésicale, quelle que soit la cause de l’acontractilité (mécanique ou neurologique, notamment périphérique) et de préjuger ainsi d’un meilleur pronostic et/ou d’une lésion incomplète. La méthodologie de réalisation du test à l’eau glacée est variable selon les équipes. Bors et Comarr, en 1971, utilisent un cathéter 18 Ch et 60 à 90 ml d’eau glacée. Le test à l’eau glacée est considéré comme positif si ce cathéter est expulsé dans la minute. Geirsson (1993), après une cystomanométrie, injectent 100 ml d’eau à 0 °C en 15 à 20 secondes par cathéter 8 Ch, laissé 1 minute. Le test est positif en cas de contraction vésicale soutenue avec fluide expulsé. Le test est considéré comme un faux négatif si on objective une contraction vésicale soutenue de même amplitude que la contraction mictionnelle, sans expulsion du fluide. Plus récemment, une autre technique a pu être utilisée : cystomanométrie de base à 100 ml (sérum tiède) ; cystomanométrie à l’eau glacée : si une contraction apparaît avant 200 ml, le test est classé A ; si la contraction apparaît entre 200 et 400 ml, le test est classé B. Le test est classé C si la cystomanométrie de base retrouve une hyperactivité vésicale et que le volume auquel apparaît la contraction non inhibée durant l’injection d’eau glacée est inférieur de moitié à celui observé au cours du test de base [16]. L’étude de la compliance vésicale pendant la cystomanométrie est importante en termes d’indice pronostique. La compliance vésicale décrit la relation qui existe entre le changement du volume vésical et sa relation avec la pression intradétrusorienne. Elle est calculée en divisant la variation de volume par la variation de la pression intradétrusorienne. Elle est exprimée en ml/cm d’eau. La capacité cystomanométrique est le volume vésical obtenu à la fin de la cystomanométrie de remplissage quand la permission d’uriner est donnée. L’évaluation des résistances urétrales est parfois utile au cours des vessies neurologiques. La pression urétrale est définie comme la pression suffisante pour ouvrir un urètre fermé. Le profil de pression urétrale est une courbe indiquant la pression intraluminale tout au long de l’urètre. La pression urétrale de clôture est donnée par la soustraction de la pression intravésicale, de la pression urétrale. La pression urétrale maximale est la pression maximale mesurée sur le profil urétral. La pression abdominale de fuite est la pression intravésicale à partir de laquelle apparaît une fuite urinaire lors d’une augmentation de la pression abdominale, en l’absence de contraction détrusorienne. Cette pression de fuite peut être obtenue en fonction du site d’enregistrement de la pression de référence (rectale, vaginale ou intravésicale) et de la méthode avec laquelle la pression est générée (toux ou manœuvre de Valsalva). La pression détrusorienne de fuite est définie comme la pression détrusorienne minimale à partir de laquelle apparaît une fuite urinaire en l’absence d’une contraction détrusorienne ou d’augmentation de la pression intra-abdominale. La pression détrusorienne de fuite a été utilisée très fréquemment pour prédire l’existence future de détérioration du haut appareil urinaire chez les patients neurologiques, avec des vessies de compliance réduite. La miction normale est effectuée par une contraction détrusorienne volontairement initiée et continue qui conduit à une vidange vésicale complète dans un temps normal et en l’absence d’obstruction. Pour une contraction détrusorienne donnée, l’amplitude de la pression enregistrée va dépendre du degré de résistance sous-vésicale. L’hypoactivité détrusorienne est définie comme une contraction réduite en force ou en durée, déterminant ainsi une vidange vésicale 7 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques prolongée, ou un défaut de vidange complète dans un temps habituel. Le détrusor acontractile est observé lorsqu’on ne peut démontrer une contraction détrusorienne pendant une exploration urodynamique. La dyssynergie vésicosphinctérienne est définie comme une contraction détrusorienne associée à une contraction involontaire des muscles striés urétraux ou périurétraux [15]. Occasionnellement, le débit peut être globalement altéré. La dyssynergie vésicosphinctérienne apparaît typiquement chez les patients avec des lésions suprasacrées, comme par exemple des lésions médullaires hautes ; cette dyssynergie est très inhabituelle dans les lésions de la partie basse de la moelle épinière. Alors que les muscles striés urétraux et périurétraux sont habituellement tenus comme responsables de cette dyssynergie, le sphincter lisse peut aussi être incriminé. Grands tableaux urodynamiques et physiopathologiques des vessies neurologiques L’incontinence urinaire est toujours le fait d’une inadéquation entre les forces de retenue urétrales et les pressions intravésicales pendant la phase de remplissage. Les mécanismes sont multiples et bien mis en évidence par les EUD : le plus souvent, c’est une hyperactivité vésicale, qui s’exprime cliniquement par une impériosité isolée, une incontinence par miction impérieuse ou une simple pollakiurie (augmentation de la fréquence des mictions). Elle est souvent associée à un syndrome pyramidal et à une spasticité, dont elle partage la même physiopathologie (diminution des possibilités d’inhibition corticale). Ailleurs, les fuites urinaires sont secondaires à une instabilité urétrale définie par des chutes brutales du tonus urétral au cours d’une sphinctérométrie, voire à une insuffisance sphinctérienne responsable d’une incontinence goutte à goutte permanente ou dans les cas plus modérés d’une incontinence survenant à l’effort prolongé. La dysurie est due, soit à une diminution des possibilités contractiles du détrusor, soit à une augmentation des résistances urétrales, soit encore à une dyssynergie vésicosphinctérienne (c’est-à-dire au maintien de la fermeture sphinctérienne pendant la contraction vésicale). L’énurésie est le fait d’une désinhibition vésicale motrice nocturne. La pollakiurie isolée (diurne et/ou nocturne) est le plus souvent secondaire à une hyperactivité vésicale seule ou associée à une instabilité urétrale, mais elle peut être aussi le fait d’une simple hyperesthésie détrusorienne (premier besoin trop précoce ou télescopage des différents besoins mictionnels en cystomanométrie). Certaines fuites urinaires ne sont ni en rapport avec une instabilité vésicale et/ou urétrale, ni avec une insuffisance sphinctérienne mais due à un trouble sensitif : hypoesthésie, soit en rapport avec une atteinte sacrée, soit s’intégrant dans une sémiologie urodynamique de type « cordonale postérieure » (retard du premier besoin, grande capacité vésicale avec persistance d’une contraction détrusorienne qui ne peut être inhibée). Évaluation neurophysiologique des vessies neurologiques Électromyographie périnéale L’exploration électrophysiologique du périnée permet d’apporter des arguments en faveur d’une origine neurologique au trouble urinaire [17]. L’enregistrement de l’activité électromyographique du sphincter strié au cours d’une cystomanométrie permet d’affirmer l’existence d’une dyssynergie vésicosphinctérienne (noninstinction ou renforcement de l’activité pendant la miction obtenue par contraction détrusorienne), témoignant d’une lésion neurologique médullaire. L’électromyographie de détection (Fig. 5) effectuée sur un ou plusieurs des muscles du plancher périnéal (bulbocaverneux, sphincter strié urétral ou anal, ischiocaverneux, transverse) permet de mettre en évidence des anomalies de type neurogène périphérique (potentiels lents de dénervation, rafales pseudomyotoniques, fibrillation et, lors de la contraction volontaire, 8 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Figure 5. Électromyographie de détection du sphincter strié urétral. appauvrissement du tracé et sommation temporelle). La constatation de telles anomalies est en faveur d’une lésion du système nerveux périphérique responsable des troubles vésicosphinctériens (dysurie, rétention urinaire complète ou incomplète) [18]. La latence du réflexe sacré (latence du réflexe bulbocaverneux) est obtenue par la stimulation de l’afférent sensitif (nerf dorsal de la verge à la base du pénis par des électrodes annulaires, nerf clitoridien par électrode de surface) [19-23]. Le recueil se fait dans le muscle bulbocaverneux où est insérée l’électrodeaiguille de réception. Tout allongement (> 44 ms) ou le nonrecueil de la réponse témoignent d’une perturbation de l’arc réflexe nerf pudendal - métamères sacrés S2S3S4 et apporte ainsi des arguments en faveur de l’origine neurogène des troubles (atteinte radiculomédullaire basse, neuropathie périphérique). Les potentiels évoqués somesthésiques corticaux du nerf honteux interne permettent l’étude de l’ensemble des voies somesthésiques : branche sensitive du nerf pudendal, cordons postérieurs médullaires, voies lemniscales du tronc cérébral, thalamus jusqu’au cortex pariétal [24]. Ils sont obtenus par le même type de stimulation que pour les potentiels évoqués sacrés, mais 100 à 200 passages sont nécessaires pour extraire la réponse évoquée du bruit de fond cortical. La latence doit être inférieure à 44 ms. La vitesse de conduction sensitive du nerf dorsal de la verge, déterminée par stimulation du nerf sur le gland et réception à la racine du pénis, permet l’étude de l’afférent sensitif. Cet examen est intéressant dans le bilan des troubles génitaux neurogènes, le nerf dorsal de la verge étant fondamental dans le maintien de l’érection et pouvant être lésé au cours de multiples affections du système nerveux périphérique, tout particulièrement au cours des neuropathies diabétiques ou éthyliques. Les potentiels évoqués cutanés sympathiques (variation de résistance des tissus cutanés induite par la stimulation des glandes sudoripares, elle-même secondaire à l’activation des fibres non myélinisées de type C des nerfs sympathiques efférents qui innervent ces glandes) sont recueillis par électrodes de surface sur la paume de la main, la plante du pied et le pénis après stimulation électrique du nerf médian [25]. L’abolition de la réponse pénienne témoigne d’une lésion sur les voies sympathiques impliquées dans le contrôle vésical. Ce test peut être intéressant au cours des dysautonomies d’origine centrale (Shy-Drager, atteinte médullaire cervicale ou dorsale) ou périphérique (neuropathie périphérique). D’autres tests électrophysiologiques peuvent être utiles : étude du seuil de perception sensitif ; potentiels évoqués moteurs par stimulation magnétique transcorticale et médullaire ; latences distales motrices et sensitives du nerf honteux interne par stimulation endorectale. Électromyographie fonctionnelle et dyssynergies La dyssynergie vésicosphinctérienne constitue un des problèmes majeurs des vessies neurogènes en raison de leur retentissement potentiellement grave sur le haut appareil, sur la fonction rénale, et sur la survenue d’infections urinaires parfois sévères. Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Deux types de dyssynergies sont décrits (dyssynergie striée, dyssynergie lisse) qui ne s’excluent pas [15]. La connaissance et la description de la dyssynergie vésicostriée datent du début du siècle (Denis Brown). La définition la plus communément acceptée de la dyssynergie vésicosphinctérienne est la présence de contractions involontaires du sphincter strié urétral enregistrées par électromyographie pendant la contraction du détrusor. Blaivas insiste sur le caractère involontaire des contractions du sphincter strié et du détrusor [26]. Yalla définit la dyssynergie vésicostriée comme un désordre mictionnel résultant d’une contraction involontaire ou l’absence de relaxation de pression urétrale accompagnant une contraction du détrusor [26]. Pour Penders et Deleval c’est l’absence de relaxation urétrale et/ou une contraction sphinctérienne avant et/ou pendant la contraction du détrusor [26] . Andersen et Bradley, considèrent la dyssynergie vésicosphinctérienne présente quand il existe une augmentation de l’activité électromyographique du sphincter strié, entraînée par la distension vésicale (sans contraction du détrusor) [26]. Il existe en fait deux grandes classifications. • La classification de Yalla, en 1977, repose sur trois grades de dyssynergies vésicostriées à partir d’une étude de 200 patients neurologiques présentant une atteinte médullaire, complète ou incomplète [26]. Le grade I est un retard de la miction par absence de relaxation prémictionnelle urétrale et persistance de l’activité électromyographique du sphincter strié au début de la contraction du détrusor. Le grade II est marqué par une activité du sphincter strié pendant la contraction du détrusor, responsable d’une miction en plusieurs jets. Le grade III est caractérisé par une augmentation de l’activité du sphincter strié urétral pendant la contraction du détrusor, rendant la miction impossible. • La classification de Blaivas (1981) distingue trois degrés de dyssynergie très superposables à partir de 550 patients [26]. Le type I se manifeste par une augmentation de l’activité électromyographique du sphincter strié au début de la contraction du détrusor, la survenue tardive de la relaxation urétrale et une miction différée. Le type II est caractérisé par une succession d’augmentations de l’activité électromyographique du sphincter strié, alternée avec des relaxations urétrales pendant la contraction du détrusor. Le type III se manifeste par une absence de relaxation urétrale, une activité permanente du sphincter strié pendant la contraction du détrusor et l’absence de miction. Cliniquement, il est commode de se référer à un concept simple : absence de relaxation urétrale prémictionnelle et persistance d’activité urétrale pendant la contraction du détrusor, dans le cadre d’une dyssynergie tonique (ou passive) ; dyssynergie clonique (ou active) se manifestant par des contractions du sphincter strié urétral pendant la contraction du détrusor, associée ou non à une relaxation prémictionnelle des pressions urétrales. Ceci peut s’observer au cours d’un simple examen urodébitmétrique, où la courbe, au lieu d’être comme normalement monomorphe « en cloche », devient polyphasique avec interruption du débit, témoignant d’une miction dyssynergique en plusieurs jets successifs (Fig. 6, 7). Pour la majorité des auteurs, la dyssynergie vésicostriée épargne les lésions supraspinales. Dans les atteintes médullaires, la fréquence de la dyssynergie varie selon les critères d’appréciation (de 100 % à 45 %). Plusieurs auteurs considèrent qu’il n’existe pas de relation entre le type de dyssynergie et le niveau médullaire mais que l’importance de la dyssynergie est dépendante de l’importance de la lésion médullaire (complète ou incomplète). Il est actuellement discuté des moyens d’exploration de la dyssynergie : observation clinique, exploration échographique, débitmétrie, urodynamique avec électromyographie, vidéourodynamique, multicapteurs étagés tout au long de l’axe vésicocervico-urétral [26]. En fait, le plus important est l’évaluation de Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Débitmétrie P. Abdo sur table#2 25 Q M = 28 20 Débit ml/s 15 10 5 Pabd cmH20 0 40 30 20 10 Vol. uriné ml 0 400 300 200 100 0 DM Figure 6. QM FM Débitmétrie normale, monophasique, en « cloche ». Figure 7. Débitmétrie au cours d’une dyssynergie vésicosphinctérienne : aspect polyphasique. son retentissement par la cystomanométrie (régime de pressions en permictionnel), de ses conséquences cliniques par le catalogue mictionnel (pollakiurie déterminée par une rétention incomplète, importance et permanence du résidu), de ses complications par la radiologie (UCRM à la recherche de reflux) et la biologie (infections urinaires, insuffisance rénale). La dyssynergie vésicolisse est souvent associée à la dyssynergie striée mais en est indépendante. Le diagnostic est radiologique, bien que l’enregistrement étagé des pressions urétrales au cours d’une cystomanométrie permette la mise en évidence d’une activité du col et de l’urètre postérieur concomitante de la contraction du détrusor pendant la miction. La dyssynergie détrusor-col est ainsi définie comme une contraction du col vésical accompagnant la contraction du détrusor pendant la miction. Cette dyssynergie accompagne la contraction du détrusor sur toute sa durée. La cystographie avec cliché mictionnel permet de visualiser la fermeture complète du col vésical avant la miction et son ouverture harmonieuse et symétrique en entonnoir au cours de la miction. 9 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques Figure 8. Reflux vésicorénal au cours d’une vessie neurologique. Évaluation endoscopique et radiologique des vessies neurologiques • La cystoscopie est un examen fondamental pour éliminer une obstruction cervicale (maladie du col) ou sous-cervicale (sténose urétrale, adénome ou cancer prostatique) et dans l’appréciation du retentissement vésical d’une vessie neurologique (diverticules, état de la muqueuse urétrovésicale). L’endoscopie vésicale permet aussi d’éliminer un cancer de vessie chez les patients sous autosondages, où l’on sait que la prévalence de cette pathologie est significativement augmentée. • L’urographie intraveineuse permet de juger de l’intégrité de la vessie (diverticules, épaississement de la paroi vésicale, lithiase) et du haut appareil (dilatation urétéro-pyélocalicielle, lithiase, reflux vésicorénal). Elle est cependant de plus en plus abandonnée et remplacée par des explorations moins nocives sur le plan des radiations ionisantes (échographie, scanner). • L’urétrocystographie avec clichés permictionnels est d’un apport important dans l’appréciation des dysuries pour dépister un obstacle organique ou fonctionnel (dyssynergie vésicosphinctérienne lisse et/ou striée). Cet examen permet aussi de mettre en évidence un reflux vésicorénal (Fig. 8), fréquent au cours des vessies neurologiques et susceptible de dégrader le fonctionnement rénal, mais aussi de juger de l’état de la vessie (diverticules, déformations...) (Fig. 9). • L’échographie vésicorénale, totalement atraumatique, prend toute son importance dans le suivi régulier des patients. Elle permet d’apprécier la vessie, sa paroi, l’existence d’un épaississement du détrusor, de diverticules et de juger de l’état du haut appareil : séquelles de pyélonéphrite, dilatations. Elle permet de mettre facilement en évidence un résidu postmictionnel (Fig. 10). En règle, ce dernier examen est répété tous les ans. 10 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Figure 9. Vessie neurologique déformée avec diverticules. Figure 10. Mise en évidence d’un résidu postmictionnel par échographie. Évaluation biologique des vessies neurologiques Les dosage de l’urée, de la créatinine, de la clairance de la créatinine permettent l’appréciation de la fonction rénale. Ils doivent être effectués tous les ans dans la surveillance des vessies neurologiques, contrairement à l’examen cytobactériologique des urines (ECBU) qui ne sera réalisé qu’en cas de signes patents d’infection urinaire ou de modification de la symptomatologie (douleurs urétrales, dysurie, incontinence, impériosité, pollakiurie) ou a fortiori de fièvre. Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 ■ Différents types de vessies neurologiques (classification) Il est parfois nécessaire de classer les vessies neurogènes afin de préciser le diagnostic ou le pronostic. Classification topographique Suivant le niveau lésionnel, une typologie particulière, clinique et urodynamique, peut s’observer, sans qu’aucun des tableaux ne soit spécifique d’un étage donné. Vessie centrale La neurovessie centrale est de fait une vessie privée de sa régulation cortico-sous-corticale de par une lésion cérébrale (centres mictionnels) ou médullaire (voies de conduction). Il s’agit en règle d’une pathologie de l’inhibition, les centres mictionnels sacrés s’affranchissant des influx inhibiteurs provenant des centres sus-jacents. Mais il ne s’agit pas d’une simple déconnexion de la régulation suprasacrée, des mécanismes de réactivation des réflexes archaïques médiés par les fibres non myélinisées de type C capsaïcine-sensibles étant aussi en jeu. La vessie centrale est en règle une vessie hyperactive avec un syndrome clinique d’hyperactivité vésicale (nycturie, pollakiurie, impériosité, fuites sur urgence) s’exprimant ou non suivant l’existence d’une dyssynergie ou de troubles sensitifs associés. En effet, l’existence d’une dyssynergie lisse et/ou striée (spécifique des lésions médullaires) peut modifier le tableau, soit en l’enrichissant d’une dysurie caractéristique (mictions fractionnées en plusieurs jets successifs avec sensation de vidange incomplète), soit en le réduisant en une rétention complète. Dans tous les cas, l’exploration urodynamique met en évidence une hyperactivité du détrusor avec contractions désinhibées pendant la phase de remplissage. L’existence de contractions phasiques est plus en faveur d’une lésion médullaire ; la mise en évidence d’une unique contraction terminale de forte amplitude (« réflexe mictionnel désinhibé ») plus en faveur d’une lésion encéphalique. Vessie périphérique La neurovessie périphérique est secondaire à une lésion des voies de conduction périphérique (lésion de la queue de cheval, lésions plexiques ou radiculaires, lésions neuropathiques). Elle s’exprime donc habituellement par une hypoactivité vésicale. Cliniquement, on note une dysurie avec ou sans rétention, une altération de la perception du besoin d’uriner et du passage urétral des urines et souvent des troubles anorectaux associés à type de dyschésie. Le bilan urodynamique retrouve une hypoactivité avec hypocontractilité et hypoesthésie détrusorienne avec des pressions urétrales souvent basses. Mais une atteinte végétative associée, en déséquilibrant la balance sympathique-parasympathique, peut totalement modifier ce tableau en déterminant par exemple une hyperactivité détrusorienne (dénervation sympathique prédominante). C’est le cas de nombreuses neuropathies périphériques telles que le diabète par exemple. Vessie mixte Elle emprunte des éléments à la neurovessie centrale et à la neurovessie périphérique. C’est par exemple le cas des lésions du cône terminal où l’on observe une hyperactivité du détrusor avec hypoesthésie vésicale, hypoesthésie périnéale et souvent dyssynergie vésicosphinctérienne importante. Classification pronostique Cette classification est indispensable pour les décisions thérapeutiques et la fréquence des bilans récurrents. Ce sont les EUD qui évaluent au mieux ce risque. Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Vessies à risque La vessie à risque est une vessie avec un travail vésical excessif : régime de pression constamment trop élevé pendant le remplissage vésical avec, soit contractions phasiques de forte amplitude constantes, soit pression élevée en plateau soutenu ; soit défaut de compliance majeur avec tonus vésical très élevé ; soit hyperpression permictionnelle prolongée sur dyssynergie vésicosphinctérienne. Le corollaire est souvent un résidu, source d’infections récurrentes, les conséquences une dégradation de la paroi vésicale et un reflux vésicorénal. Ces vessies à risque sont le plus souvent des vessies secondaires à une lésion médullaire (traumatique essentiellement) mais aussi à certaines scléroses en plaques. Vessies sans risques Ce sont les vessies hypoactives, flasques, à grande compliance à supposer qu’il n’y ait pas de violentes poussées abdominales pour assurer la vidange. Vessies équilibrées Une vessie équilibrée est une vessie à basse pression pendant le remplissage, qui le reste pendant la miction, et qui se vide spontanément ou par autosondage totalement, sans résidu. ■ Complications des vessies neurogènes Ce sont ces complications qui font tout le problème des vessies neurogènes. Diverticules, reflux vésicorénal, insuffisance rénale sont les complications à prévenir qui grèvent le pronostic vital des vessies neurologiques. La rétention chronique, complète ou incomplète, est source d’infections urinaires à répétition avec un risque de dissémination parenchymateuse (pyélonéphrite) dont on connaît les conséquences éventuelles sur la fonction rénale. L’apparition d’une fièvre chez le patient neurologique doit faire réaliser un ECBU. De même, toute modification de la symptomatologie urinaire (apparition de mictions impérieuses ou d’urgenturies chez un patient jusqu’alors bien équilibré) ou tout changement dans le status neurologique (majoration brutale de la spasticité) doit faire évoquer une infection urinaire et conduire au traitement. A contrario, certains signes d’appel classiques ne sont pas forcément spécifiques (coloration ou odeur des urines) avec une valeur prédictive non clairement établie. L’ECBU systématique n’a pas raison d’être avec le risque de traitement abusif (notamment chez les patients sous autosondages), conduisant à une résistance aux antibiotiques et une sélection des germes. Chez l’homme, le toucher rectal est systématique devant un syndrome infectieux à la recherche d’éléments de prostatite, devant alors conduire à un traitement antibiotique prolongé. Une pathologie urogynécologique associée aux troubles sphinctériens neurogènes doit savoir être recherchée. En effet, la vessie neurologique vieillit et l’homme atteint d’une pathologie neurologique est tout autant susceptible de souffrir d’une hypertrophie bénigne de la prostate qu’il importe de dépister. Ces hypertrophies prostatiques peuvent d’ailleurs constituer un diagnostic différentiel au cours de vessie neurogène de certaines pathologies neurologiques de l’homme mûr telles que la maladie de Parkinson. Parfois, le diagnostic en est très difficile et seul un traitement d’épreuve de l’obstruction prostatique (par le biais d’une prothèse endo-urétrale) permet de discriminer ce qui revient à l’obstruction mécanique et ce qui est du ressort de l’hypoactivité neurogène. Chez la femme, la carence hormonale à la ménopause, le vieillissement de l’appareil vésicosphinctérien sont autant de facteurs pouvant déterminer une incontinence urinaire à l’effort dont les indications thérapeutiques seront difficiles, notamment 11 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques en ce qui concerne l’éventuel traitement chirurgical qui peut déstabiliser une vessie neurogène ou induire des complications spécifiques (dysurie, rétention, hyperactivité vésicale) plus fréquentes, plus délétères ou plus compliquées à prendre en charge que dans la population générale. Il existe aussi des complications mécaniques urogynécologiques inhérentes à la vessie neurogène. C’est ainsi le cas des prolapsus des poussées abdominales chez la femme avec dysurie avec le risque de cystocèle, de rectocèle, de prolapsus hémorroïdaires qu’il importera de prévenir en limitant les poussées abdominales (traitement d’une dyssynergie, traitement d’une dyschésie, mise sous autosondages...). Les autosondages posent aussi des problèmes spécifiques avec le risque de fausses routes urétrales avec urétrorragies, développement d’urétrocèle, de sténoses. Le cancer de vessie est aussi plus fréquent dans cette population de patients autosondés. Pour toutes ces complications, l’endoscopie vésicale permet le diagnostic et l’évaluation du risque. ■ Troubles associés aux vessies neurogènes Troubles anorectaux neurogènes En théorie, la multiplicité des centres régulateurs, activateurs ou inhibiteurs, l’importance des voies de conduction étagées tout au long du névraxe expliquent la fréquence des troubles anorectaux dans la plupart des maladies du système nerveux. Cependant, ces troubles anorectaux (dyschésie, incontinence fécale) sont souvent au second plan par rapport aux troubles vésicosphinctériens, avec qui ils partagent pourtant les mêmes systèmes régulateurs et les mêmes mécanismes physiopathologiques. Ceci est le fait, d’une part de l’absence de complications organiques graves des troubles anorectaux qui contrairement aux troubles urinaires ne grèvent pas le pronostic vital (insuffisance rénale, troubles infectieux divers des vessies neurologiques), d’autre part d’une physiologie différente. Ainsi, alors que la rétention d’urine est une urgence médicale en raison du risque rapide de détrusor claqué, les effets de la dyschésie ou de la constipation sont moins immédiats. De même, le défaut d’inhibition suprasacrée est immédiatement symptomatique sur le versant vésicosphinctérien avec apparition d’une hyperactivité vésicale responsable de mictions impérieuses avec fuites. Ce n’est pas le cas le plus fréquent en matière de motricité anorectale, l’incontinence fécale étant plus tardive, voire absente en raison des plus grandes capacités de compliance du réservoir rectal, les fuites ne survenant en règle que lors de la défaillance des systèmes sphinctériens strié et lisse. Quoi qu’il en soit, le dépistage et le traitement des troubles anorectaux au cours des vessies neurogènes sont indispensables car, d’une part ils peuvent retentir sur la qualité de vie du patient et d’autre part, ils constituent une épine irritative importante pour les troubles urinaires. Bien souvent, la régularisation d’une constipation, le traitement d’une incontinence permettent d’améliorer, voire de supprimer les troubles urinaires. L’examen clinique reste bien évidemment un des éléments essentiels. L’interrogatoire précise la symptomatologie : dyschésie avec difficulté d’expulsion des selles (parfois aidée par la prise de suppositoire, voire évacuation au doigtier) ; constipation de progression avec émission rare de selles ; incontinence fécale (aux liquides, aux solides), incontinence aux gaz ; trouble sensitif rectal avec difficulté ou impossibilité de discriminer le contenu rectal (solide, liquide ou gaz) ; impériosité fécale avec risque de fuite par défaut de recrutement strié d’urgence par altération fonctionnelle du sphincter anal. L’existence de saignements, d’émissions de glaires, de douleurs, doit toujours faire suspecter une étiologie digestive associée. L’examen du périnée recherche un prolapsus éventuellement induit par les efforts répétés de poussées abdominales au cours 12 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) des dyschésies, voire une éventuelle hypertonie sphinctérienne au toucher rectal. Une hypotonie anale pouvant aller jusqu’à la béance, une insuffisance de contraction du sphincter anal, peuvent être la cause d’une incontinence fécale. La défécographie permet une analyse dynamique de la statique et de la dynamique anorectale lors de l’évacuation d’un produit radio-opaque semi-solide préalablement injecté dans le rectum. Elle permet la mesure de l’angle anorectal, d’une éventuelle rectocèle et d’un prolapsus interne du rectum induit par des efforts de poussées abdominales. Le temps de transit des marqueurs radio-opaques permet de chiffrer le temps de progression du bol alimentaire et, en cas de constipation, d’en déterminer le siège lors des contrôles radiologiques successifs. La manométrie anorectale permet l’enregistrement des pressions dans le canal anal et dans le rectum, au repos et après stimulation. Au cours des dyschésies, elle permet de montrer une anomalie du réflexe rectoanal inhibiteur (RRAI), une hypertonie sphinctérienne avec ou sans ondes ultralentes, une perte de la synergie anorectale (anisme) ou un trouble de la compliance rectale (mégarectum). Dans l’incontinence fécale, elle peut révéler une cause rectale (microrectum, anomalie de la contractilité) ou anale (hypotonie de repos, défaut de contraction volontaire, diminution de la longueur fonctionnelle, absence ou retard de la contraction réflexe striée lors du RRAI). Au cours des affections neurologiques, la manométrie anorectale permet de mieux appréhender les mécanismes physiopathologiques des troubles anorectaux. On retrouve ainsi des antagonismes anorectaux dans les spina bifida avec ouvertures spontanées intermittentes de la partie haute du canal anal synchrones des contractions rectales. Des ondes ultralentes sont fréquentes au cours des scléroses en plaques et dans certaines paraplégies traumatiques. Le RRAI persiste dans les lésions du cône terminal ou de la queue de cheval, mais la relation linéaire du RRAI avec le volume de distension disparaît au cours des lésions médullaires (traumatiques, sclérose en plaques) ou neurogènes périphériques. La contraction réflexe d’urgence du sphincter anal lors du RRAI est abolie au cours des lésions médullaires suprasacrées. Troubles génitosexuels neurogènes Les troubles de l’érection, les difficultés à l’éjaculation, les perturbations de l’orgasme, les altérations plus globales de la sexualité au sein du couple sont souvent rencontrés au cours de l’évolution des maladies neurologiques. Leur relation exacte avec la maladie neurologique ne peut pas toujours être clairement établie. Néanmoins, l’intervention des facteurs organiques est certaine, liée aux lésions neurologiques et peut-être dans certains cas à un déséquilibre hormonal. Les facteurs psychologiques, les conséquences du handicap sur la vie sexuelle ne peuvent cependant pas être négligés. Dans tous les cas, les troubles génitosexuels concourent, comme les troubles urinaires et les troubles anorectaux, à perturber la qualité de vie des patients neurologiques, justifiant une prise en charge spécifique. Cette problématique génitosexuelle ne peut en aucun cas être ignorée, notamment dans la réflexion des choix thérapeutiques de la vessie neurogène. ■ Troubles mictionnels révélateurs d’une lésion neurologique Ils posent un problème spécifique. Certains éléments sont évocateurs d’une étiologie neurogène : l’association de troubles urinaires à des signes anorectaux et/ou génitosexuels, ces différentes fonctions ayant le même substratum anatomophysiologique ; l’apparition brutale du trouble d’origine neurologique qui contraste avec l’apparition en règle progressive des troubles urologiques ; le caractère sans effort et sans besoin des fuites si tant est qu’il n’existe pas de fistule ou d’abouchement urétéral ectopique ni d’antécédent récent de Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 chirurgie chez l’homme. Les mictions impérieuses avec ou sans incontinence ne sont pas forcément en rapport avec une étiologie neurologique même si nombre d’affections neurologiques centrales suprasacrées, médullaires ou encéphaliques, s’accompagnent souvent de tels symptômes, car elles peuvent s’observer au cours des syndromes obstructifs. La dysurie « urologique » s’exprime par un jet faible mais continu, alors que la miction du neurologique dysurique s’effectue avec un bon débit mais avec plusieurs jets successifs involontairement stoppés. Le caractère indolore d’une rétention urinaire est hautement évocatrice d’une lésion neurologique de même que la diminution ou l’abolition de la perception du passage urétral des urines. ■ Différentes pathologies Vessie neurogène du blessé médullaire Les troubles urinaires sont quasi constants chez les blessés médullaires [27, 28]. Ils nécessitent toujours un bilan et un suivi spécialisés en raison des complications uronéphrologiques grevant le pronostic vital. En effet, les causes génito-urinaires sont au premier plan des causes de décès chez le paraplégique. Plusieurs éléments pronostiques sont à prendre en considération : le sexe féminin est classiquement un facteur de meilleur pronostic que le sexe masculin, de même que l’âge jeune de survenue des lésions neurologiques ; le niveau d’atteinte neurologique, avec une réduction de l’espérance de vie nettement plus importante chez les patients tétraplégiques par rapport aux patients paraplégiques. Différents tableaux cliniques et urodynamiques Après la phase de choc spinal où la vessie est flasque, aréactive, le tableau clinique et urodynamique va dépendre du niveau lésionnel, du caractère complet ou incomplet des lésions et des complications urologiques éventuelles. Dans le cadre des lésions suprasacrées, la vessie est en règle hyperactive avec un train de contractions phasiques, souvent en plateau, associé à un trouble du besoin (parfois remplacé par un équivalent végétatif à type de frissons, céphalée, horripilation, pesanteur diffuse, contracture) et à une dyssynergie vésicosphinctérienne. Il existe parfois un trouble de compliance. Le patient est habituellement rétentionniste du fait de cette dyssynergie (souvent dyssynergie striée et lisse associée) avec parfois des fuites incontrôlées secondaires à l’hyperactivité détrusorienne avec hyperpression lors des contractions dépassant les résistances urétrales. Le régime de pression intravésicale déterminé par les EUD est un des éléments clés du pronostic, les patients ayant des pics d’hyperpression vésicale à plus de 40 cm d’eau mettant en danger leur haut appareil urinaire à moyen terme. L’existence d’une diminution de la compliance, d’une dyssynergie vésicosphinctérienne (chez des patients n’utilisant pas de cathétérisme) sont également des facteurs de dégradation du haut appareil urinaire. La dyssynergie vésicosphinctérienne est également un facteur de dégradation du bas appareil urinaire chez les patients urinant par percussion ou par poussées. Une des caractéristiques du comportement détrusorien des lésions médullaires est l’hyperréflexie : la stimulation (par exemple par percussion sus-pubienne) d’une vessie stable détermine des contractions réflexes du détrusor (qui peuvent aussi être induites par d’autres stimuli tels que la stimulation des muqueuses vésicale ou du col, ou rectoanale). Ces percussions peuvent aussi « éteindre » quelque peu l’activité striée et permettre une miction. Mais celle-ci reste par essence dyssynergique avec des à-coups hyperpressifs (du détrusor) et des élévations intermittentes des pressions cervico-urétrales (dyssynergie) conduisant à une miction réflexe fractionnée avec régime de pression trop élevé et longtemps soutenu pouvant induire des complications. C’est dire que ces modes mictionnels (percussions sus-pubiennes, et a fortiori méthode de Crédé, Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) poussées abdominales) ne sont actuellement plus guère utilisés, les autosondages ayant remplacé ces modalités mictionnelles risquées. Différentes complications de la vessie du blessé médullaire L’insuffisance rénale est la complication principale qui peut altérer le pronostic vital [29]. Sa prévention est essentielle par une prise en charge de la vessie neurologique avec obtention d’une vessie à basse pression et une vidange périodique et sans hypertonie de celle-ci. La surveillance biologique repose sur la mesure de la clairance de la créatinine sur les urines de 24 heures (pouvant poser des problèmes en cas de fuites importantes, notamment chez la femme) et/ou la mesure de la clairance du 99 Tc par scintigraphie rénale (un peu lourde à utiliser dans le suivi systématique) et non pas sur le calcul simplifié de la clairance de la créatinine à partir de la créatininémie selon la formule de Cockroft [30]. La constatation d’une protéinurie est un signe de gravité de l’atteinte rénale. La proportion de patients médullaires (tous niveaux de lésions confondus) en dialyse est estimée entre 3,5 et 7,5 % [29]. L’influence du niveau lésionnel sur la survenue de lésions rénales est discutée, mais il semble que les lésions du haut appareil soient plus fréquentes chez les patients tétraplégiques que chez les patients paraplégiques. La prévalence de la lithiase vésicale est très variable dans la littérature [31-33] . Elle dépend du mode mictionnel et des antécédents. Les patients les plus à risque de lithiase sont ceux en cathétérisme permanent (sonde à demeure ou cathéter suspubien). L’examen de référence dans le cadre du diagnostic des lithiases de l’appareil urinaire est le scanner spiralé sans injection. Son interprétation, éventuellement en s’aidant d’une injection, est souvent plus aisée que les images indirectes de l’urographie intraveineuse, ou que l’échographie, rendues encore plus difficiles dans leur analyse du fait du météorisme abdominal fréquent chez ces patients. Le mode mictionnel a une influence sur la survenue de lithiases, non seulement du bas mais aussi du haut appareil : le taux de lithiases passe de 1,5 % chez les patients urinant sans cathétérisme à 3 % chez les patients ayant un cathétérisme permanent. Les infections posent un problème fréquent chez le blessé médullaire [34-39]. La présence de germes dans les urines est d’une très grande fréquence au cours des vessies neurologiques. Chez les patients ayant un cathétérisme permanent, elle est ainsi de 100 % après 1 mois. Dans la population générale, la bactériurie est définie par une concentration de germes > 105 colonies formant unité (CFU) par ml. Chez les patients neurologiques, cette concentration est différente suivant le mode mictionnel. On parle de bactériurie chez les patients sous cathétérisme intermittent à partir de concentration de germes >10 2 CFU/ml, pour les patients utilisant des étuis péniens à partir de concentrations de germes >104 CFU/ml. C’est dire que l’utilisation des bandelettes urinaires ne peut être recommandée chez les patients neurourologiques, puisque cette technique a été validée pour avoir une bonne sensibilité et spécificité pour la détection de germes à une concentration de 105/ml. Dans tous les cas, les patients urinant par poussée abdominale ou par percussion sont à haut risque de développer des complications urologiques (lithiase vésicale, bactériurie, insuffisance rénale). Troubles vésicosphinctériens de la sclérose en plaques Les troubles vésicosphinctériens sont d’une extrême fréquence au cours de la sclérose en plaques, atteignant près de 80 % des patients [40-50]. Révélateurs de la maladie dans 6 % des cas, ils engagent toujours le pronostic fonctionnel et majorent le handicap social et/ou psychologique déjà souvent important. Plus rarement, le pronostic vital est en jeu en raison du risque 13 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques Tableau 4. Troubles urinaires dans la sclérose en plaques : résultats cliniques de 11 études. Nombre de patients % avec impériosité % avec pollakiurie % avec incontinenceimpériosité % avec dysurie Sachs (1921) 57 31 Langworthy (1938) 97 37 49 54 33 34 Carter (1950) 40 36 24 17 50 Miller (1965) 231 60 50 36 Bradley (1973) 90 86 60 Philp (1981) 52 61 59 Goldstein (1983) 86 32 32 49 Awad (1984) 47 85 65 72 36 Gonor (1985) 64 70 48 56 30 Betts (1993) 170 85 82 63 49 34 Amarenco (1995) 225 73 42 63 46 24 potentiel de dégradation uronéphrologique [51, 52]. La compréhension de leur mécanisme physiopathologique repose sur les EUD qui permettent, dans la majorité des cas, l’instauration d’un traitement spécifique efficace améliorant ainsi la qualité de vie des patients [53]. Épidémiologie des troubles urinaires de la sclérose en plaques La fréquence estimée est de 50 à 80 %. Cette fréquence augmente avec la durée d’évolution. Six pour cent des scléroses en plaques sont inaugurés par des troubles vésicosphinctériens, ces derniers posant alors des problèmes diagnostiques, la difficulté étant de rattacher ces troubles à la maladie et de ne pas les attribuer à tort à des affections non neurologiques (incontinence à l’effort chez la femme, maladies prostatiques chez l’homme). Les explorations urodynamiques et neurophysiologiques du périnée apportent dans ces cas des arguments majeurs en faveur d’une maladie neurologique. Ainsi l’existence d’une vessie hyperactive avec dyssynergie vésicosphinctérienne, la coexistence d’une instabilité vésicale avec un trouble du besoin, la perturbation des potentiels évoqués corticaux du nerf honteux interne, l’augmentation de la latence du réflexe bulbocaverneux, la persistance du réflexe sacré permictionnel, sont autant d’arguments en faveur d’une vessie neurogène. Le plus souvent les troubles vésicosphinctériens surviennent au cours d’une sclérose en plaques connue, tout le problème étant alors d’en apprécier le mécanisme physiopathologique par l’interrogatoire, l’examen clinique et les EUD afin d’en assurer un traitement efficace. Ce dernier est d’autant plus indispensable que les troubles urinaires majorent le handicap social ou psychologique souvent déjà important, altérant ainsi la qualité de vie des patients. Il est enfin des cas où les troubles vésicosphinctériens surviennent dans un tableau neurologique non étiqueté. Leur analyse clinique, urodynamique et neurophysiologique peut alors apporter des éléments en faveur du diagnostic. % avec rétention 17 33 2 28 20 47 la symptomatologie : impériosité et pollakiurie se retrouvent dans 60 à 80 % des cas, l’incontinence par impériosité dans 50 à 70 %. Ces signes sont le plus souvent secondaires à une vessie hyperactive. Les fuites sont le plus souvent le fait d’une vessie hyperactive (75 % et même 85 % s’il s’agit de fuites par impériosité). Cette hyperactivité vésicale rend compte de la suppression des influx inhibiteurs sur le détrusor par lésion des voies de conduction inhibitrice médullaire ou par atteinte des centres corticaux inhibiteurs. Mictions impérieuses, fuites par impériosité et pollakiurie sont corrélées à l’existence d’un déficit pyramidal des membres inférieurs et aux scores d’atteinte pyramidale et sensitive de l’échelle de Kurtzke. Il est bien difficile d’établir des corrélations entre le tableau clinique neurologique, le type de troubles urinaires et le comportement vésicosphinctérien lors du bilan urodynamique. En effet, le signe prédominant est la symptomatologie « irritative » (miction impérieuse avec ou sans fuite, pollakiurie), signes s’observant aussi bien en cas d’atteinte pyramidale, que d’atteinte cérébelleuse, sensitive ou des nerfs crâniens. De plus, au cours de l’évolution de la sclérose en plaques, alors que la formule sémiologique neurologique se modifie au cours des poussées successives (apparition ou disparition des différents signes sensitifs, pyramidaux, cérébelleux), les signes urinaires sont remarquablement constants, ne changeant dans notre série de type que dans 16 % des cas. Il semble ainsi illusoire d’établir une relation entre un tableau clinique donné souvent changeant et un type de comportement vésicosphinctérien le plus souvent stable. La dysurie et la rétention sont moins fréquentes. Elles sont isolées dans 22 % des cas. Elles sont rarement le fait d’une hypoactivité vésicale (20 %), mais le plus souvent associées à une dyssynergie vésicosphinctérienne (100 %) par interruption des faisceaux médullaires de coordination (le centre de la synergie étant situé dans la protubérance). Ces divers signes peuvent être associés entre eux et s’accompagner de troubles anorectaux (dyschésie, incontinence fécale) et génitosexuels (hypoérection, troubles de l’éjaculation, hypo-orgasmie) en raison de la proximité anatomique des centres de contrôle neurologique de ces différentes fonctions. Typologie clinique des troubles urinaires de la sclérose en plaques Typologie urodynamique Les troubles vésicosphinctériens au cours de la sclérose en plaques sont d’un extrême polymorphisme (Tableau 4). Ce polymorphisme est le fait du caractère multifocal des lésions de démyélinisation, de l’évolution par poussées successives (du moins au début, les troubles mictionnels évoluant souvent ensuite pour leur propre compte), de l’existence conjointe ou secondaire d’une atteinte urologique, et enfin de l’existence possible d’« épines irritatives » (escarres, fécalome, lithiase vésicale ou rénale) susceptible de modifier en théorie le comportement vésicosphinctérien. Les troubles urinaires sont d’autant plus prononcés que le syndrome pyramidal des membres inférieurs est important. Les signes irritatifs dominent Les EUD permettent de préciser le mécanisme physiopathologique des troubles et les choix thérapeutiques (Tableau 5). La cystomanométrie met le plus souvent en évidence (50 à 80 % des cas) une hyperactivité vésicale, la vessie n’étant hypoactive que dans 21 % des observations. Cette hyperactivité vésicale est souvent corrélée à l’existence d’un syndrome pyramidal bilatéral, bien qu’une hypoactivité vésicale ait été décrite dans la moitié des scléroses en plaques avec syndrome pyramidal faisant discuter une possible aréflexie détrusorienne secondaire à une dyssynergie vésicosphinctérienne. Les EUD demeurent indispensables pour la compréhension des mécanismes des troubles urinaires : l’interrogatoire et l’examen clinique ne suffisent pas 14 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Tableau 5. Troubles urinaires dans la sclérose en plaques : résultats des explorations urodynamiques de 18 études. Nombre de patients Hyperactivité vésicale % Hypoactivité vésicale % Activité vésicale normale % Bradley (1973) 99 59 40 - Anderson (1976) 52 63 33 - Bradley (1978) 302 62 34 4 Summers (1978) 50 52 12 18 Schoenburg (1979) 39 69 5 15 Piazza (1979) 31 74 6 9 Blaivas (1979) 41 56 40 4 Philp (1981) 52 99 0 1 Goldstein (1982) 86 76 19 5 Van Poppel (1983) 160 66 24 10 Awad (1984) 57 66 21 12 Hassouna (1984) 37 70 18 11 Petersen (1984) 88 83 16 1 McGuire (1984) 46 72 28 - Gonor (1985) 64 78 20 2 Weinstein (1988) 91 70 16 12 Betts (1993) 70 91 0 9 Amarenco (1995) 225 70 9 21 pour déterminer les modalités de la prise en charge. En effet, si la sensibilité des données cliniques est bonne (82 %), leur spécificité (58 %) est insuffisante pour envisager d’entreprendre « à l’aveugle », sans vérification cystomanométrique, un traitement anticholinergique pour une hyperactivité vésicale supposée. L’étude des pressions urétrales n’apporte aucun élément diagnostique, physiopathologique ou pronostique. En revanche, l’étude de la synergie vésicosphinctérienne est fondamentale. Une dyssynergie est mise en évidence dans 50 à 80 % des vessies hyperactives et dans 100 % des cas de dysurie-rétention. Cette dyssynergie dont la présence est bien corrélée à l’existence d’une spasticité périnéale et/ou d’un signe de Babinski constitue un facteur de risque potentiel de dégradation vésicale, voire du haut appareil. Elle représente en effet, en théorie, un obstacle fonctionnel lors de la miction, la non- ou mauvaise ouverture du sphincter strié pouvant induire un reflux vésicorénal, une hypertrophie de la paroi vésicale avec apparition de diverticules, un résidu postmictionnel, source d’infections hautes ou basses. Il n’existe cependant pas de corrélation statistiquement significative entre l’existence d’une dyssynergie vésicosphinctérienne et la présence d’une complication grave (urétérohydronéphrose, reflux vésicorénal, pyélonéphrite, lithiase). Il n’existe pas non plus de corrélations entre ces complications et le type d’activité vésicale (hyper-, normo- ou hypoactivité). La fréquence des complications est discutée (de 1 % à 40 %) ; certes 24 % sont bénignes (infections urinaires à répétition, diverticules et épaississements du détrusor) mais 16 % sont graves, pouvant alors engager le pronostic vital, telles que des pyélonéphrites (11 %), des reflux vésicorénaux (3 %) et des dilatations du haut appareil (2 %). L’insuffisance rénale semble en revanche exceptionnelle contrairement à ce que l’on observe au cours de l’évolution des paraplégies traumatiques. Il est probable qu’au cours de ces dernières, l’évolution, en règle plus longue, des signes urinaires puisse favoriser la dégradation vésicorénale. Le traitement des troubles vésicosphinctériens de la sclérose en plaques répond à une double problématique : assurer le confort du patient en évitant des symptômes altérant significativement la qualité de vie tels que l’incontinence urinaire, l’impériosité mictionnelle ou la pollakiurie ; préserver l’avenir uronéphrologique en assurant un drainage vésical correct et un régime à basse pression dans l’intervalle des mictions ou des drainages. En fait, ce dernier point, s’il est au premier rang des préoccupations au cours du management des vessies neurologiques des blessés médullaires, mérite d’être nuancé dans le cadre de la sclérose en plaques, cette dernière ne déterminant que rarement des altérations vésicales ou rénales. C’est dire que le Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) confort du patient doit toujours être privilégié dans la discussion et la stratégie thérapeutique à court, moyen et long terme des neurovessies des scléroses en plaques. Troubles vésicosphinctériens de la maladie de Parkinson Les troubles vésicosphinctériens sont fréquents au cours de la maladie de Parkinson [54-56]. Parfois révélateurs de la maladie neurologique, ils posent toujours un problème diagnostique car ils surviennent à un âge où s’observent diverses pathologies urologiques ou urogynécologiques (adénome de la prostate chez l’homme, carence hormonale et cervicocystoptôse chez la femme). Ces pathologies purement mécaniques peuvent selon les cas être confondues ou intriquées avec le dysfonctionnement vésical neurogène. La prise en charge thérapeutique des troubles urinaires est le plus souvent souhaitable, non pas tant en raison de leur faible risque de retentissement infectieux ou uronéphrologique, qu’en raison de la majoration du handicap fonctionnel que ces troubles induisent toujours. Diagnostic et traitement reposent sur une analyse sémiologique clinique mais aussi sur les données des explorations paracliniques, urodynamiques et les investigations neurophysiologiques notamment. Données cliniques Les troubles urinaires observés au cours de la maladie de Parkinson sont très polymorphes. De début volontiers insidieux, parfois révélateurs de la maladie neurologique, ils évoluent en règle d’un seul tenant. Les urgences mictionnelles avec faible délai de sécurité et les fuites par impériosité sont les signes les plus fréquemment rencontrés. Ils sont aussi les plus contraignants fonctionnellement et en termes de qualité de vie, surtout chez des sujets où la mobilité est souvent entravée par le syndrome extrapyramidal, les empêchant ainsi de souscrire rapidement aux envies pressantes d’uriner. La pollakiurie et l’énurésie nocturne sont souvent associées. Tous ces troubles témoignent en règle d’une hyperactivité vésicale par défaut d’inhibition et libération trop précoce et involontaire du réflexe mictionnel. La dysurie avec nécessité de poussées abdominales pour vidanger la vessie, voire la rétention chronique, sont plus rares. Elles ne sont d’ailleurs pas systématiquement signalées par le patient car en règle peu gênantes sur le plan fonctionnel, ce qui explique qu’elles soient souvent découvertes au cours d’un examen systématique ou fortuitement. Ces signes sont le fait, soit d’une hypocontractilité vésicale (« akinésie » du détrusor), 15 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques soit d’une hypertonie sphinctérienne, notamment dans le cadre d’une dyssynergie vésicosphinctérienne avec contraction inappropriée du sphincter strié urétral pendant la contraction détrusorienne mictionnelle. Mais ces symptômes sont loin d’être spécifiques de la maladie de Parkinson et même d’une atteinte neurogène. Ils peuvent être le fait d’une atteinte urologique obstructive chez l’homme (adénome de la prostate), tant en ce qui concerne les signes irritatifs (mictions impérieuses des vessies luttant au-dessus de l’obstacle prostatique), que la dysurie ou la rétention (obstruction sous-cervicale). Chez la femme, ils peuvent aussi être confondus avec le syndrome postménopausique (insuffisance sphinctérienne, défaut de compliance urétrale) pouvant être à l’origine de fuites urinaires. L’examen clinique est en règle peu contributif. Données paracliniques L’exploration urodynamique n’est pas spécifique. Elle va en revanche mettre en évidence le mécanisme des troubles. Souvent il est nécessaire d’effectuer des examens pour éliminer une étiologie urologique associée ou prédominante. Ainsi l’étude pression-débit lors du bilan urodynamique permettra d’obtenir des arguments en faveur d’une obstruction, la cystoscopie mettra en évidence un obstacle suggéré par l’échographie. Parfois, seul un test thérapeutique (mise en place d’une prothèse endo-urétrale) permettra le diagnostic. L’électromyographie de détection effectuée sur un ou plusieurs des muscles du plancher périnéal (bulbocaverneux, sphincter strié urétral ou anal, ischiocaverneux, transverse) permet de mettre en évidence des anomalies de type neurogène périphérique. Ces anomalies sont en règle absentes dans la maladie de Parkinson mais s’observent à l’inverse dans les atrophies multisystématisées. Troubles vésicosphinctériens des neuropathies périphériques La systématisation, à l’étage sacré, des fonctions vésicosphinctériennes explique la fréquence des troubles urinaires au cours des syndromes de la queue de cheval. Si ces troubles ont été largement décrits à la phase aiguë de l’atteinte neurologique (dysurie ou rétention urinaire par vessie paralytique acontractile), leur évolution à long terme est mal connue et aucun travail n’a été ainsi publié sur leur évolution clinique et urodynamique. Ils engagent pourtant toujours le pronostic fonctionnel et majorent le handicap social et/ou psychologique déjà souvent important en raison du déficit sensitivomoteur des membres inférieurs. Exceptionnellement, ils peuvent engager le pronostic vital, en raison du risque potentiel mais rare de dégradation uronéphrologique. Ceci procède en fait non pas d’une lésion de type queue de cheval stricto sensu mais d’une lésion du cône terminal. C’est dire l’importance des EUD qui permettent de dépister dans ces cas non pas une hypoactivité avec hypocontractilité et hypoesthésie détrusorienne mais une hyperactivité détrusorienne. La surveillance des vessies des syndromes de la queue de cheval est ainsi indispensable avec des EUD en condition standard et sensibilisatrice (test à l’eau glacée) tous les 6 mois pendant au moins 3 ans, pour ne pas méconnaître l’apparition à bas bruit d’une hyperactivité détrusorienne « silencieuse » masquée par le trouble sensitif (hypoesthésie vésicale avec perte du besoin) et non exprimée (par une pollakiurie ou des fuites) en raison d’une rétention induite par une dyssynergie. Les explorations électrophysiologiques périnéales confirment l’étiologie neurogène et son siège à l’étage sacré. Dans la majorité des cas, le traitement repose sur la pratique des autosondages, améliorant la qualité de vie des patients et évitant les complications infectieuses. Les troubles urinaires des neuropathies périphériques sont fréquents. Ils s’observent ainsi au cours des neuropathies diabétiques ou alcooliques. L’atteinte est loin d’être à prédominance somatique, avec ainsi une participation végétative importante. L’expression clinique est souvent une dysurie avec altération de la perception 16 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Tableau 6. Typologie clinique des troubles urinaires au cours des accidents vasculaires cérébraux. Incontinence Dysurie et/ou et/ou pollakiurie rétention Mixtes Perrigot et al. (1977) 20 9 6 Khan et al. (1981) 16 _ 4 Thiry et al. (1983) 31 7 0 Tsuchida et al. (1983) 26 7 6 Pelissier et al. (1985) 31 7 _ Codine et al. (1988) 61 15 _ Burney et al. (1996) 32 Sakakibara et al. (1996) 18 203 (71 %) 28 _ 5 15 50 (18 %) 31 (11 %) du besoin d’uriner, de la perception du passage urétral des urines, rendant compte d’une neurovessie périphérique hypoactive, hypoesthésique, hypocontractile. Une rétention incomplète avec résidu postmictionnel est fréquente dans ce tableau. Mais parfois, l’atteinte végétative et tout particulièrement la dénervation sympathique modifie cette typologie, déterminant un syndrome clinique d’hyperactivité vésicale (pollakiurie, impériosité, fuites sur urgence) avec, sur le plan urodynamique, une hyperactivité du détrusor. Les tests cardiovasculaires de la fonction autonome sont souvent perturbés (tilt test, étude de la variabilité de l’espace R-R au cours du Valsalva, du cold pressor test, du hand grip test, de la respiration ample dirigée. Le traitement est dicté par la survenue de complications (infections urinaires récurrentes essentiellement, fuites par regorgement, pollakiurie secondaire à une rétention incomplète chronique). Il repose avant tout sur la pratique des autosondages. Troubles vésicosphinctériens des accidents vasculaires cérébraux Ils sont fréquemment rencontrés (20 à 60 %) [57-64] . Si certaines localisations déterminent des tableaux en règle stéréotypés (rétention des lésions protubérantielles ou du cervelet, incontinence des atteintes frontales ou thalamiques), souvent, en raison de la dualité de fonction de nombreux centres encéphaliques du contrôle mictionnel, la symptomatologie clinique est imprévisible. La tenue d’un catalogue mictionnel, l’exclusion par l’examen clinique de tout problème urologique associé (palpation de la prostate chez l’homme, examen urogynécologique chez la femme), l’élimination de toute pathologie iatrogène (prise d’anticalciques, de tricycliques, de parasympathycolytiques), et enfin la réalisation d’examens complémentaires (bilan urodynamique notamment) permettent de cerner le mécanisme physiopathologique exact des troubles vésicosphinctériens et de proposer un traitement adapté (drainage, parasympathomimétiques, alphabloquants en cas de rétention, anticholinergiques en cas d’incontinence). Ailleurs, un trouble du comportement mictionnel nécessite une reprogrammation psychomotrice et comportementale longue mais souvent couronnée de succès. Symptomatologie clinique des troubles urinaires au cours des accidents vasculaires cérébraux L’incidence des troubles vésicosphinctériens (TVS) varie entre 20 et 60 % avec un taux voisin de 50 % lors de l’admission des patients dans les services de neurologie. La typologie clinique est dominée par les signes irritatifs (pollakiurie avec ou sans incontinence) secondaires à une désinhibition du réflexe mictionnel par interruption des influx corticaux inhibiteurs [59, 60] (Tableau 6). Mais l’incidence de la rétention d’urine (par lésion des centres activateurs corticaux, protubérantiel et cérébelleux) ou des troubles urinaires mixtes est assez élevée (30 %) lorsque les troubles sont analysés de manière systématique. Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Tableau 7. Typologie urodynamique des troubles urinaires au cours des accidents vasculaires cérébraux. Activité du détrusor Nombre de sujets Hyperactivité (%) Normoactivité (%) Hypoactivité (%) Perrigot et al. (1977) 26 61 6 4 Khan et al. (1981) 20 95 5 - Tsuchida et al. (1983) 24 89 8 4 Thiry et al. (1983) 32 63 27 Pelissier et al. (1985) 32 72 16 12 Codine et al. (1988) 76 68 13 18 Gelber et al. (1993) 19 42 37 21 Burney et al. (1996) 60 52 35 13 Sakakibara et al. (1996) 22 68 - 13 La tenue d’un catalogue mictionnel par l’équipe soignante (mesure du volume uriné et du volume résiduel par sondage ou mieux par échographie), l’exclusion par l’examen clinique de tout problème urologique associé (palpation de la prostate chez l’homme, examen urogynécologique chez la femme), l’élimination de toute pathologie iatrogène (prise d’anticalciques, de tricycliques, de parasympathycolytiques) ou d’une infection urinaire sont systématiques. Enfin, la constatation de troubles urinaires au cours de la phase aiguë des AVC constituerait un facteur de mauvais pronostic de l’hémiplégie vasculaire. Examens À la phase aiguë de l’AVC, le dépistage d’une rétention chronique par échographies postmictionnelles répétées est indispensable en raison des risques encourus, tant infectieux (par mauvaise vidange vésicale) que mécaniques (dégradation de la contractilité vésicale, source potentielle d’incontinence ou de dysurie résiduelle). Le bilan urodynamique permet de préciser le mécanisme physiopathologique du trouble urinaire [64]. La cystomanométrie retrouve souvent, en cas de fuites, une hyperactivité détrusorienne (Tableau 7). L’hypoactivité vésicale est parfois responsable d’une dysurie, de même que les exceptionnelles dyssynergies vésicosphinctériennes. Les pressions urétrales sont variables. Un bilan urologique spécifique (cystoscopie, échographie prostatique) est parfois nécessaire lors de la suspicion d’une obstruction mécanique associée. Traitement des troubles urinaires des accidents vasculaires cérébraux L’hyperactivité vésicale est traitée par les anticholinergiques en surveillant par bladder-scan l’apparition ou la majoration d’un résidu postmictionnel. Leur utilisation doit être aussi prudente, voire contre-indiquée, en cas de troubles du rythme cardiaques. La desmopressine, en diminuant la diurèse, permet d’améliorer la pollakiurie et l’énurésie nocturnes. La rééducation périnéosphinctérienne peut être proposée en cas de troubles résiduels. Le traitement de la dysurie et de la rétention repose avant tout sur les hétérosondages. La mise en place d’une prothèse endo-urétrale peut se discuter chez l’homme. Dans tous les cas, les éléments de surveillance doivent être mis en place. Le catalogue mictionnel permet de chiffrer la fréquence des mictions et des fuites. Il aide à la prise de conscience du trouble et permet de surveiller l’efficacité d’un traitement. La mesure du résidu et de la diurèse permet de déterminer les doses de médicaments ou la fréquence des drainages (auto- ou hétérosondages) en sachant qu’un minimum de trois évacuations complètes par jour sont nécessaires et que le volume vésical ne doit pas excéder 700 ml en raison des risques de vessie forcée. L’échographie vésicale postmictionnelle permet de vérifier la présence ou l’absence de résidu spontané ou apparaissant sous imprégnation parasympathycolytique. L’évolution (spontanée et parfois sans traitement) est souvent favorable. Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Troubles vésicosphinctériens des autres affections neurologiques Les troubles vésicosphinctériens sont connus au cours des dysautonomies, y compris au cours de la pandysautonomie aiguë pure ou syndrome de Young et Adams. Ce sont le plus souvent des dysuries ou rétention. L’association de signes cardiovasculaires (tensionnels et rythmiques) et de signes ophtalmologiques (xérophtalmie) à une dysurie de survenue brutale évoque d’emblée une atteinte du système nerveux autonome. Les troubles vésicosphinctériens et anorectaux sont rarement rapportés au cours des pathologies musculaires. Peu fréquents, probablement le plus souvent non spécifiques en raison du support principalement végétatif et non somatique strié de la continence anale et urinaire, ils demeurent pourtant une source de préoccupation car ils sont susceptibles de majorer le handicap général de ces pathologies et d’altérer ainsi la qualité de vie des patients atteints de pathologie musculaire [65-67]. Trois types de pathologies ont fait l’objet d’études spécifiques : la dystrophie myotonique (essentiellement sur l’aspect incontinence anale) ; la dystrophie musculaire de Duchenne ; la myopathie héréditaire du sphincter anal. La myopathie de Duchenne a fait l’objet de très rares travaux. Le plus complet est celui de Caress portant sur sept patients explorés cliniquement et au moyen d’une investigation urodynamique et électrophysiologique [66]. La symptomatologie était caractérisée par une incontinence urinaire rapportée par la cystomanométrie à une hyperactivité vésicale avec contractions non inhibées du détrusor associée à une dyssynergie vésicosphinctérienne. Ces éléments sont pathognomoniques d’une atteinte médullaire conduisant les auteurs à justement conclure que les troubles urinaires observés au cours des myopathies de Duchenne ne sont pas spécifiques et s’intègrent dans les lésions rachidiennes (scoliose, compression médullaire), ce d’autant que l’électromyographie sphinctérienne ne retrouve aucun signe myogène. La dystrophie myotonique a été beaucoup plus largement étudiée [68, 69]. L’atteinte du sphincter strié anal a été mise en évidence dans plusieurs études, tant sur le plan manométrique qu’électromyographique. Cliniquement, l’incontinence anale est le signe principal. D’autres symptômes sont décrits tels que douleurs abdominales, diarrhée chronique, constipation par mégacôlon. La manométrie anorectale retrouve une baisse des pressions de repos, une diminution de la contraction volontaire, une diminution de la durée et de l’amplitude du réflexe rectoanal inhibiteur. Les symptômes urinaires sont beaucoup plus rarement rapportés, mais un interrogatoire systématique retrouve une prévalence de 33 %, mais sur une faible série (2/6). La typologie urodynamique n’a pas de spécificité avec, pour un patient, une acontractilité vésicale, et pour l’autre, une hyperactivité détrusorienne. L’analyse électromyographique ne met en évidence que des potentiels polyphasiques alors que les perturbations du réflexe bulbocaverneux vont dans le sens d’une diminution. 17 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques D’une manière générale, l’existence d’une dysautonomie reste très discutée. L’étude de l’intervalle R-R ne permet de retrouver qu’une très minime atteinte parasympathique. Aucune modification des dosages de noradrénaline n’a été constatée, de même qu’une variabilité positionnelle de la pression artérielle, éliminant ainsi une atteinte sympathique. L’atteinte urinaire et gastro-intestinale ainsi observée au cours des dystrophies myotoniques serait donc plus myogène que secondaire à une dysautonomie associée. La myopathie héréditaire du sphincter anal est une entité rare [70]. Elle peut déterminer des douleurs périnéales (proctalgie fugace familiale) et une constipation. La manométrie anorectale peut mettre en évidence des ondes ultralentes. La biopsie musculaire confirme l’atteinte myogène. ■ Traitements des vessies neurologiques détrusoriennes anarchiques, et partant, de guérir les incontinences urinaires rebelles aux traitements usuels (anticholinergiques). L’injection intradétrusorienne se fait sous contrôle cystoscopique et une anesthésie locale est donc nécessaire. Trois ampoules de 100 unités Botox® sont injectées en une session. L’efficacité est souvent spectaculaire avec disparition des fuites urinaires, des urgences, de la fréquence mictionnelle. Mais rançon de cette efficacité, l’injection de toxine botulique induit une véritable paralysie (certes transitoire mais souvent totale de la vessie) nécessitant le recours aux autosondages. La durée d’action de la toxine dans le détrusor est d’environ 7 à 10 mois. Ces injections constituent désormais une alternative médicalement efficace, psychologiquement plus adéquate et économiquement plus rationnelle que les interventions chirurgicales de type entérocystoplastie d’agrandissement, voire neuromodulation des racines sacrées. La neuromodulation directe des racines sacrées ou par électrostimulation périphérique d’un afférent sensitif (nerfs périnéaux, nerf sciatique poplité interne) est en effet également une technique de choix dans un certain nombre d’hyperactivités rebelles. Son mode d’action reste hypothétique, mais la modulation du réflexe mictionnel par une stimulation des afférents périphériques est probable. Traitements de l’hyperactivité vésicale L’hyperactivité vésicale va le plus souvent déterminer une symptomatologie « irritative » dominée par les fuites sur urgence mictionnelle et la pollakiurie. Ces troubles sont très constamment accessibles à un traitement anticholinergique (les nerfs pelviens déterminant la contraction vésicale par une transmission cholinergique, l’administration de drogues parasympathycolytiques [anticholinergiques atropiniques] induira une diminution d’amplitude des contractions et une augmentation de la capacité maximale vésicale [71]). L’oxybutynine est l’anticholinergique le plus employé, mais ce produit n’est pas dénué d’effets secondaires (sécheresse buccale, constipation, flou visuel). La toltérodine récemment introduite sur le marché est efficace, plutôt mieux tolérée, mais n’est pas remboursée par les organismes de sécurité sociale. Le trospium semble donner de meilleurs résultats que l’oxybutynine. De nouvelles drogues anticholinergiques sont en voie d’évaluation dans les vessies neurologiques (solifénacine, fésotérodine). Les différentes drogues doivent être testées une par une en raison d’une susceptibilité individuelle des patients aux différents types de molécules. L’association des drogues entre elles est parfois nécessaire pour stabiliser au mieux l’hyperactivité vésicale, mais a souvent pour corollaire de majorer les effets secondaires atropiniques. La recherche et le traitement éventuel d’une épine irritative (cutanée, ostéoarticulaire, infection urinaire) sont systématiques ainsi que le traitement d’une possible spasticité (baclofène, dantrolène, tizanidine) et la prise en charge de troubles anorectaux associés. Les instillations intravésicales ou les flash intraveineux d’anticholinergiques ne sont plus guère réalisés en raison de leur efficacité partielle et de résultats à moyen terme décevants. L’instillation vésicale de substances vanilloïdes (capsaïcine, résinifératoxine), en agissant sur une autre volée afférente (fibres non myélinisées de type C capsaïcine-sensibles) du réflexe mictionnel, a un intérêt potentiel en cours d’évaluation de même que les neuropeptides (NKA) et les bloqueurs des canaux calciques. La rééducation périnéosphinctérienne et les techniques chirurgicales (entérocystoplastie d’agrandissement, neuromodulation S3) sont proposées en cas d’échec du traitement médical. Cette intervention urologique consiste, après une cystectomie sus-trigonale, à former une sphère d’intestin grêle détubulisée qui est patchée sur le reliquat vésical. Ce traitement est strictement irréversible et présente une morbidité propre périchirurgicale et à long terme, et nécessite une hospitalisation d’au moins 10 jours en chirurgie urologique. Le traitement de l’hyperactivité vésicale s’est enrichi ces dernières années de l’essor de la toxine botulique. L’injection de toxine botulique en intravésical est en effet une technique récente [72] . Elle a pour but de supprimer les contractions 18 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Traitements de l’hypoactivité vésicale Les parasympathicomimétiques déterminent des contractions vésicales en reproduisant l’action du parasympathique et de son neuromédiateur l’acétylcholine. Ils sont ainsi utilisés dans les cas de paralysie vésicale, notamment par atteinte neurologique périphérique. Il peut s’agir de parasympathicomimétiques directs tel l’Urécholine (betanechol chloride) qui prennent littéralement la place du neuromédiateur absent, soit de parasympathicomimétiques indirects (anticholinestérasiques) qui s’opposent à la destruction par la cholinestérase du neuromédiateur (ambénonium : Mytélase®, pyridostigmine : Mestinon®, prostigmine : Prostigmine®). En fait, ces molécules, outre le fait qu’elles n’ont pas l’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication, n’ont jamais été démontrées comme réellement efficaces et ont de plus des effets cardiovasculaires potentiels délétères. Elles ne sont de fait quasiment plus utilisées. C’est dire que l’autosondage reste le traitement de choix de la rétention urinaire dès l’instant où le résidu est supérieur à 100 ml, ou qu’il existe des complications urinaires inhérentes à la rétention (infections à répétition, infection fébrile, miction par regorgement) ou à la dysurie (prolapsus, hémorroïdes, prolapsus interne du rectum). La pratique de l’autosondage a révolutionné le traitement des vessies neurologiques. Son apprentissage nécessite souvent, chez le neurologique, une équipe multidisciplinaire (infirmière, kinésithérapeute, ergothérapeute) en raison des déficits, déficiences et handicaps associés pouvant nécessiter la mise en place d’aides techniques (attelles), de correction chirurgicale (réanimation chirurgicale du membre supérieur), de traitement d’hypertonie localisée (adducteurs) par neurotomie ou toxine botulique. L’autosondage s’effectue désormais par des sondes autolubrifiées à faible friction qui ont pu démontrer leur efficacité, leur bonne tolérance à moyen et long terme avec réduction des risques de complications traumatiques et enfin l’amélioration du confort de vie des patients. La fréquence des autosondages dépend de la diurèse mais en fait surtout du régime de pression intravésicale, de la stabilisation détrusorienne obtenue ou non par les anticholinergiques ou la toxine botulique, de la récurrence des infections urinaires, de l’existence de fuites (y compris par regorgement) et enfin de la pathologie. C’est ainsi que cinq à sept autosondages quotidiens sont parfois nécessaires chez le blessé médullaire, alors que trois à quatre sont souvent suffisants dans la sclérose en plaques. Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 Traitements de l’hypertonie sphinctérienne Le traitement de la dysurie et de la rétention repose sur les alphabloquants qui diminuent les résistances urétrales [73-77]. En cas d’échec, des infiltrations parasphinctériennes de toxine botulique peuvent être essayées, avant la pratique des autosondages ou des hétérosondages. L’innervation du col vésical est essentiellement adrénergique. L’utilisation des alphabloquants dans le traitement des dyssynergies lisses se justifie donc en théorie. Des travaux expérimentaux ont démontré un rôle modulateur des neurones adrénergiques spinaux sur l’activité tonique sympathique et l’activité somatique du plancher pelvien. L’importance des récepteurs adrénergiques spinaux sur le contrôle du col vésical est encore soulignée par l’action de la clonidine sur le tonus sympathique viscéral et le profil urétral. La térazosine, la tamsulosine, l’alfuzosine sont actuellement les alpha-1 bloquants sélectifs les plus utilisés dans le traitement des dyssynergies neurologiques lisses. En revanche, un effet direct des alphabloquants au niveau de la musculature urétrale striée est controversé bien que ces drogues soient régulièrement utilisées dans cette indication. Cet effet pourrait être lié à une inhibition centrale du système sympathique et somatique agissant sur le bas appareil urinaire. Une action complémentaire pourrait être associée à une action centrale non sélective des alpha-1 bloquants, avec ou sans diminution de l’activité musculaire striée périnéale. Des études cliniques ayant porté sur l’effet des alphabloquants sur les dyssynergies vésicosphinctériennes ont conduit à des résultats variables. Même si ces médications sont souvent essayées, d’autres solutions thérapeutiques sont tentées, et notamment la toxine botulique [78, 79]. La toxine botulique est une neurotoxine produite par la bactérie anaérobique Clostridium botulinum. Elle agit en empêchant la libération de l’acétylcholine au niveau des terminaisons nerveuses présynaptiques, en bloquant sélectivement SNAP-25, une protéine intracytoplasmique nécessaire à l’exocytose de ce neurotransmetteur. L’utilisation de la toxine botulique pour les dysfonctions vésicosphinctériennes a été introduite par Dykstra [78] . L’administration de la toxine se fait par injection intramusculaire directe du sphincter strié, soit par voie transurétrale, soit par voie transpérinéale. Le traitement est ainsi simple, se faisant en consultation externe sans aucune anesthésie. L’injection se fait le plus souvent par l’intermédiaire d’une électrode-aiguille creuse d’électromyographie permettant, d’une part de repérer précisément le sphincter après avoir introduit l’aiguille dans la région périnéale (entre bourse et anus chez l’homme, juste au-dessus du méat urétral chez la femme), d’autre part d’injecter le produit (1 ampoule, soit 100 unités Botox®). Les deux voies d’administration semblent être également efficaces. Des études de résonance magnétique nucléaire avec utilisation de gadolinium ont montré que l’injection de la toxine par voie transpérinéale sous contrôle électromyographique est fiable et que la toxine administrée se localise au niveau du sphincter urétral strié et ne diffuse pas aux tissus environnants. Plusieurs études, dont certaines contre placebo ou lidocaïne, ont montré l’efficacité de la toxine botulique dans les dyssynergies vésicosphinctériennes. Les paramètres d’évaluation les plus souvent utilisés sont le résidu postmictionnel, la pression permictionnelle, la pression de clôture maximale et la sévérité de la dyssynergie vésicosphinctérienne. En cas de résultat positif (près de 70 % des cas), des réinjections peuvent être effectuées 3 à 6 mois plus tard. Dans les cas de rétention chronique, l’injection de toxine botulique s’est révélée efficace, particulièrement chez les patients porteurs d’un syndrome de la queue de cheval ou ayant une hypocontractilité vésicale d’origine indéterminée. La chirurgie (sphinctérotomie) est plus rarement indiquée en raison du risque d’incontinence postchirurgicale et d’éjaculation rétrograde chez l’homme. Neurologie © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) À noter que les antispastiques par voie générale (dantrolène, baclofène) ne sont guère efficaces sur la dyssynergie striée et ont été peu évalués dans cette indication. Traitement de l’hypotonie sphinctérienne Les sympathicomimétiques (adrénergiques alphastimulants) permettent d’augmenter le tonus urétral et sont donc potentiellement utilisables dans le traitement des insuffisances sphinctériennes neurogènes responsables d’une incontinence urinaire. Leur efficacité est très variable et il n’existe pas à l’heure actuelle de véritable molécule spécifique. La Néosynéphrine® a pu être utilisée mais sans réelle étude contrôlée. La duloxétine est un inhibiteur de la recapture de la noradrénaline et de la sérotonine. La sérotonine et la norépinéphrine augmentent l’effet du glutamate au niveau du noyau d’Onuf, ce qui potentialise l’activité efférente neuronale des fibres du nerf pudendal lors de la phase de remplissage vésical. Il en résulte une stimulation des récepteurs nicotiniques localisés dans le sphincter urétral externe et une augmentation de la contraction de la musculature striée périurétrale lors de la phase de remplissage vésical et au cours des efforts. Plusieurs études cliniques, dont certaines randomisées et contrôlées, ont démontré l’efficacité clinique de la duloxétine dans l’incontinence urinaire à l’effort de la femme, mais aucune étude spécifique n’a jusqu’à présent été conduite chez le neurologique. Autres traitements Un certain nombre de pathologies neurologiques, et tout particulièrement les lésions médullaires, s’accompagnent d’une inversion du rythme de la diurèse. La desmopressine, en diminuant la diurèse (et probablement aussi par un effet central), permet d’améliorer la pollakiurie nocturne (nycturie) et l’énurésie. Elle doit être utilisée avec précaution chez le sujet âgé (maladie de Parkinson par exemple), avec vérification stricte de la natrémie. Enfin, dans certaines lésions centrales, encéphaliques, avec troubles du comportement mictionnel, où les fuites urinaires ne sont pas le fait d’une quelconque hyperactivité du détrusor mais d’une libération du programme mictionnel et non du réflexe mictionnel, une rééducation psychocomportementale (conduite aux toilettes à heures fixes) peut être instaurée. C’est le cas des troubles mictionnels secondaires aux hydrocéphalies, aux démences. La reprogrammation motrice psychocomportementale par calendrier mictionnel est ainsi fréquemment efficace, notamment en cas de syndrome clinique d’hyperactivité vésicale. Le rôle du cortex préfrontal et du gyrus cingulaire n’est certainement pas neutre, en modifiant l’attention et l’intégration du signal qu’est le besoin d’uriner et sa distorsion qu’est l’impériosité mictionnelle. Modalités de surveillance des vessies neurologiques Le catalogue mictionnel permet de chiffrer la fréquence des mictions et des fuites. Il aide à la prise de conscience du trouble et permet de surveiller l’efficacité d’un traitement. Les mesures du résidu et de la diurèse permettent de déterminer les doses de médicaments ou la fréquence des drainages (auto- ou hétérosondages) en sachant qu’un minimum de trois évacuations complètes par jour sont nécessaires et que le volume vésical ne doit pas excéder 700 ml en raison des risques de vessie forcée. L’échographie vésicale postmictionnelle permet de vérifier la présence ou l’absence de résidu spontané ou apparaissant sous imprégnation parasympathycolytique. L’échographie vésicorénale est un examen non traumatisant, aisément disponible, qui peut être réalisé une fois par an pour juger de l’état de la vessie et du haut appareil. Le contrôle systématique de l’ECBU est strictement inutile et ne peut conduire qu’à des traitements antibiotiques intempestifs sélectionnant des germes multirésistants. Ces examens biologiques ne se justifient qu’en cas de 19 17-012-L-10 ¶ Vessies neurologiques modification brutale de la symptomatologie urinaire chez un patient bien équilibré, ou d’apparition d’une fièvre associée à des signes urinaires. L’examen urodynamique peut être préconisé tous les ans en raison de la variabilité du comportement vésical chez le patient neurologique, de la possibilité d’une pathologie urogynécologique intercurrente modifiant l’équilibre vésicosphinctérien et de la nécessité de vérifier la pertinence et l’efficacité d’un traitement. l’échographie sont autant d’éléments positifs dans la prise en charge de ces troubles. Leur traitement a reposé pendant de longues années sur les autosondages qui ont révolutionné la prise en charge thérapeutique et le pronostic, et sur l’administration d’anticholinergiques. Le drainage obtenu (autosondage) et la stabilisation des pressions effectuée (anticholinergiques), les problématiques médicales (complications uronéphrologiques et infectieuses) et fonctionnelles (confort de vie avec suppression des incontinences) étaient résolues. Désormais, des techniques encore plus efficaces de désactivation pharmacologique de la vessie (toxine botulique) enrichissent l’arsenal thérapeutique et des solutions miniinvasives (neuromodulation des racines sacrées) complètent les propositions thérapeutiques. ■ Conclusion Les vessies neurogènes posent avant tout le problème de leur pronostic. C’est grâce à leur traitement que l’espérance de vie de nombreux patients neurologiques, et tout particulièrement des blessés médullaires, a pu singulièrement se rapprocher de la population générale. L’évaluation des facteurs de risque par les EUD, le dépistage précoce des complications par “ . De nombreux progrès sont encore à attendre pour diminuer les risques, améliorer la qualité de vie des patients et réduire les contraintes de soins. C’est dire l’absolue nécessité d’un suivi régulier au mieux en équipe multidisciplinaire et spécialisée. Points forts • Les troubles vésicosphinctériens d’origine neurologique sont fréquents, touchant la plupart des maladies du système nerveux central, périphérique ou végétatif. Ils posent toujours le problème de leur retentissement, qu’il soit médical avec le risque uronéphrologique, ou psychosocial avec altération de la qualité de vie. Leur reconnaissance, leur prise en charge thérapeutique et leur surveillance sont ainsi indispensables. • Ils sont parfois révélateurs de la maladie neurologique et certains éléments sont alors évocateurs d’une étiologie neurogène : association de troubles urinaires à des signes anorectaux et/ou génitosexuels ; apparition brutale du trouble ; caractère sans effort et sans besoin des fuites ou au contraire impériosités mictionnelles, fuites sur urgence ; dysurie avec mictions en plusieurs jets successifs involontairement stoppés ; caractère indolore d’une rétention urinaire ; diminution ou abolition de la perception du besoin et/ou du passage urétral des urines. • L’examen neuropérinéal recherche une abolition du réflexe bulboanal, une diminution de la sensibilité périnéale, une hypotonie du sphincter anal. • Les EUD permettent de mettre en évidence le mécanisme physiopathologique des troubles vésicosphinctériens. La cystomanométrie permet l’étude des pressions intravésicales au cours d’un remplissage progressif de la vessie par du sérum physiologique. L’existence de contractions involontaires survenant à faible volume définit l’hyperactivité détrusorienne, témoignant de la libération de l’automatisme vésical qui se traduit le plus souvent par des impériosités avec fuites sur urgence. À l’inverse, une hypoactivité détrusorienne ou une dyssynergie vésicosphinctérienne (non-instinction de l’activité électromyographique du sphincter strié urétral pendant la miction) peuvent être responsables d’une dysurie, voire d’une rétention. • La surveillance des vessies neurologiques repose sur la réalisation d’un catalogue mictionnel permettant de chiffrer la fréquence des mictions et des fuites, d’une échographie vésicorénale et d’une urodynamique annuelles, et dans les cas de vessie hyperactive, d’une urétrocystographie mictionnelle à la recherche d’un reflux et d’une biologie des fonctions rénales. Le contrôle systématique de l’ECBU est strictement inutile et ne peut conduire qu’à des traitements antibiotiques intempestifs sélectionnant des germes multirésistants. Ces examens biologiques ne se justifient qu’en cas de modification brutale de la symptomatologie urinaire chez un patient bien équilibré, ou d’apparition d’une fièvre associée à des signes urinaires. • Le traitement des troubles vésicosphinctériens neurogènes répond à une double problématique : assurer le confort du patient en évitant des symptômes altérant significativement la qualité de vie tels que l’incontinence urinaire, l’impériosité mictionnelle ou la pollakiurie ; préserver l’avenir uronéphrologique en assurant un drainage vésical correct et un régime à basse pression dans l’intervalle des mictions ou des drainages. En effet, une hyperactivité vésicale, un défaut de compliance, une augmentation longtemps soutenue des pressions mictionnelles induite par une dyssynergie vésicosphinctérienne sont autant de facteurs de risque pour une dégradation de la vessie ou du haut appareil. Diverticules, reflux vésicorénal, insuffisance rénale sont les complications à prévenir qui grèvent le pronostic vital des vessies neurologiques. La rétention chronique, complète ou incomplète, est source d’infections urinaires à répétition avec un risque de dissémination parenchymateuse (pyélonéphrite) dont on connaît les conséquences éventuelles sur la fonction rénale. • Ces traitements sont nombreux. L’hyperactivité vésicale (fuites, urgence mictionnelle) est très constamment accessible à un traitement anticholinergique (les nerfs pelviens déterminant la contraction vésicale par une transmission cholinergique, l’administration de drogues parasympathycolytiques [anticholinergiques atropiniques] induira une diminution d’amplitude des contractions et une augmentation de la capacité maximale vésicale). L’oxybutynine est l’anticholinergique le plus employé avec le trospium. La recherche et le traitement éventuel d’une épine irritative (cutanée, ostéoarticulaire, infection urinaire) sont systématiques ainsi que le traitement d’une possible spasticité (baclofène, dantrolène, tizanidine) et la prise en charge de troubles anorectaux associés. En cas d’échec, l’injection intradétrusorienne de toxine botulique et les techniques chirurgicales (entérocystoplastie d’agrandissement, neuromodulation S3) peuvent être proposées. Le traitement de la dysurie et de la rétention repose sur les alphabloquants qui diminuent les résistances urétrales et les infiltrations parasphinctériennes de toxine botulique, avant de se résoudre à la pratique des autosondages. 20 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Neurologie Vessies neurologiques ¶ 17-012-L-10 . ■ Références [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10] [11] [12] [13] [14] [15] [16] [17] [18] [19] [20] [21] [22] [23] [24] [25] [26] [27] [28] Barrington RJ. The effect of lesions of the hind and midbrain on micturition in the cat. Q J Exp Physiol 1925;15:81-102. Barrington FJ. The nervous control of micturition. Q J Exp Physiol 1915;8:33-47. Barrington FJF. The component reflexes of micturition in the cat. Parts I and II. Brain 1931;54:177-210. Bors E, Comarr AE. Neuroanatomy and neurophysiology. In: Neurological urology. Basel: Schellenberg-Druck; 1971. p. 61-135. 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Toute référence à cet article doit porter la mention : Amarenco G., Kerdraon J. Vessies neurologiques. EMC (Elsevier SAS, Paris), Neurologie, 17-012-L-10, 2006. Disponibles sur www.emc-consulte.com Arbres décisionnels Iconographies supplémentaires Vidéos / Animations Documents légaux 22 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855) Information au patient Informations supplémentaires Autoévaluations Neurologie Cet article comporte également le contenu multimédia suivant, accessible en ligne sur em-consulte.com et em-premium.com : 1 autoévaluation Cliquez ici 1 information au patient Cliquez ici © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 03/04/2015 par Blazquez Luis (21855)