Université Paris Descartes UFR de Mathématiques et Informatique 45, rue des Saints-Pères, 75006, Paris Espaces de Hilbert et analyse de Fourier (L3) Corrigé de l’examen partiel du jeudi 5 avril 2012 Exercice 1. Soit T l’ensemble des polynômes trigonométriques, c’est-à-dire des fonctions de la forme p(x) = N X cn einx n=−N où N ∈ N et cn ∈ C pour tout n ∈ J−N, N K. On considère U ⊂ T l’ensemble des polynômes trigonométriques qui sont des fonctions paires. 1. Montrer que U est un espace vectoriel. N X 2. Soit p(x) = cn einx un polynôme trigonométrique. Montrer que p ∈ U si et seulen=−N ment si pour tout n ∈ J−N, N K, c−n = cn . N N X X inx |cn + c−n |. 3. Pour tout polynôme p(x) = cn e ∈ T , on définit kpk = |c0 | + n=1 n=−N Montrer que l’application p 7→ kpk est une norme sur U. 4. L’application p 7→ kpk définit-elle une norme sur T ? Justifier. 5. Pour les deux fonctions f1 (x) = e−2ix 1 + 3i + e4ix + 3ie2ix (2 + e2ix ) et f2 (x) = 2i| cos(x)| définies sur R répondre à la question suivante : La fonction f appartient-elle à U ? Si oui calculer kf k. Solution de l’exercice 1 1. Correction explicite : Pour montrer que U est un espace vectoriel on montre que U est un sous-espace vectoriel de l’ensemble T des polynômes trigonométriques. La fonction nulle est paire donc elle appartient bien à U. Soient p et q deux polynômes de U et α ∈ C. Alors, p + αq est un polynôme trigonométrique car T est un espace vectoriel. De plus, pour tout x ∈ R, (p + αq)(−x) = p(−x) + αq(−x) = p(x) + αq(x) = (p + αq)(x). Donc p + αq est paire, d’où p + αq ∈ U. Ainsi, U est bien un sous-espace vectoriel de T . Correction rapide : L’ensemble des polynômes trigonométriques est un sous-espace vectoriel de F(R, C). De même, l’ensemble des fonctions paires est un sous-espace vectoriel de F(R, C). Comme l’intersection de deux sous-espace vectoriels est un sous-espace vectoriel, U est un sous-espace vectoriel de F(R, C). 1 2. Sens indirect : Soit p(x) = N X n=−N cn einx tel que pour tout n ∈ J−N, N K, c−n = cn . Alors, en effectuant le changement d’indice k = −n, pour tout x ∈ R, p(−x) = N X cn e−inx = n=−N N X N X c−k eikx = k=−N ck eikx = p(x). k=−N Donc p est bien une fonction paire. N X Sens direct : Soit p(x) = cn einx un polynôme de U. D’après la formule de Fourier, n=−N pour tout n ∈ J−N, N K, 1 cn = 2π 2π Z −inx p(x)e 0 1 dx = 2π Z π p(x)e−inx dx. −π En effectuant le changement de variable y = −x, pour tout n ∈ J−N, N K on a Z π Z π Z π 1 1 1 inx −iny p(x)e dx = p(−y)e dy = p(y)e−iny dy = cn . c−n = 2π −π 2π −π 2π −π Donc pour tout n ∈ J−N, N K, on a bien c−n = cn . Remarque : On peut également faire appel au résultat analogue du cours sur les séries de Fourier en justifiant que les coefficients d’un polynôme trigonométrique sont ses coefficients de Fourier. 3. Montrons que l’application p 7→ kpk est une norme sur U. N X cn einx ∈ U tel que kpk = 0. Comme Soit p(x) = n=−N kpk = |c0 | + N X |cn + c−n |. n=1 est une somme de termes positifs, chaque termes de la somme est nul. On en déduit que c0 = 0 et pour tout n ∈ J−N, N K, cn + c−n = 0. Or d’après la question précédente, comme p ∈ U, cn = c−n . On a donc cn = c−n = 0, le polynôme p est bien nul. N N X X inx Soit p(x) = cn e ∈ U et α ∈ C. Alors, αp(x) = αcn einx , d’où n=−N n=−N kαpk = |αc0 | + N X |αcn + αc−n | = |α| |c0 | + n=1 N X ! |cn + c−n |. = |α|kpk. n=1 Vérifions maintenant l’inégalité triangulaire. Soit p, q ∈ U. Quitte à étendre les coefficients de p ou q par des zéros, p et q s’écrivent sous la forme p(x) = N X inx cn e et q(x) = n=−N N X n=−N 2 γn einx , avec N = max(deg(p), deg(q)). On a alors kp + qk = |c0 + γ0 | + N X |cn + γn + c−n + γ−n |. n=1 Or |c0 + γ0 | 6 |c0 | + |γ0 | et pour tout n ∈ J−N, N K, |cn + γn + c−n + γ−n | = |cn + c−n + γn + γ−n | 6 |cn + c−n | + |γn + γ−n |. En additionnant ces inégalités, on obtient kp + qk 6 kpk + kqk. 4. L’application p 7→ kpk ne définit pas une norme sur T car (par exemple) le polynôme trigonométrique p(x) = eix − e−ix = 2i sin(x) vérifie kpk = 0 bien qu’il soit non nul. 5. En développant on remarque que f1 (x) = e−2ix 1 + 3i + e4ix + 3ie2ix (2 + e2ix ) = e−2ix 1 + 3i + e4ix + 6ie2ix + 3ie4ix = (1 + 3i)e−2ix + 6i + (1 + 3i)e2ix f1 est bien un polynôme trigonométrique et ses coefficients vérifient c−n = cn , donc d’après la question 2) f1 appartient à U. On a √ √ √ kf1 k = 6 + |2 + 6i| = 6 + 40 = 6 + 2 2 5. La fonction f2 (x) = 2i| cos(x)| n’est pas dérivable en x = π2 , ce n’est donc pas un polynôme trigonométrique (car un polynôme trigonométrique est toujours de classe C ∞ ). Donc f2 n’appartient pas à U. Exercice 2. Soit f la fonction 2π-périodique telle que f (x) = |x| pour tout x ∈] − π, π]. 1. Que peut-on dire de la convergence de la série de Fourier de f ? Justifier. 2. Calculer les coefficients de Fourier de f . 3. En déduire les valeurs des séries suivantes : (a) +∞ X p=0 1 (2p + 1)2 et (b) +∞ X p=0 1 . (2p + 1)4 Solution de l’exercice 2 1. La fonction f est continue et C 1 par morceaux, la série de Fourier (SN (f ))N ∈N converge donc normalement vers f d’après le théorème de convergence normale de Dirichlet. 2. f est une fonction paire. Par conséquent, ses coefficients bn (f ), n ∈ N∗ , sont tous nuls. Calculons les coefficients an (f ). Pour n = 0, π Z π Z 1 1 π 1 x2 π a0 (f ) = |x|dx = xdx = = . 2π −π π 0 π 2 0 2 3 Pour n > 1, en utilisant la parité, Z Z 2 π 1 π |x| cos(nx)dx = x cos(nx)dx. an (f ) = π −π π 0 En effectuant une intégration par partie, π Z 2 sin(nx) 2 π sin(nx) an (f ) = x dx − π n π 0 n 0 π 2 cos(nx) =0− − π n2 0 2 = ((−1)n − 1) . πn2 Donc pour tout n > 1, ( − πn4 2 an (f ) = 0 si n est impair, si n est pair. 3. (a) Pour tout P ∈ N, la somme partielle de Fourier de f a pour expression P S2P +1 (x) = 4 π X − cos((2p + 1)x). 2 p=0 π(2p + 1)2 Comme la série de Fourier converge normalement vers f , pour tout x ∈ R, la suite S2P +1 (x) tend vers f (x) quand P tend vers +∞, soit +∞ π X 4 − cos((2p + 1)x) = f (x). 2 p=0 π(2p + 1)2 En particulier en x = 0, on a +∞ π X 4 − = 0, 2 p=0 π(2p + 1)2 d’où +∞ X p=0 1 π2 = . (2p + 1)2 8 (b) On va appliquer l’égalité de Parseval à f . Pour cela on calcule kf k22 . π Z π Z π 1 1 1 x3 π2 2 2 2 kf k2 = |x| dx = x dx = = . 2π −π 2π −π 2π 3 −π 3 L’égalité de Parseval +∞ 1X |a0 (f )| + |an (f )|2 + |bn (f )|2 = kf k22 2 n=1 2 4 devient ici +∞ π2 1 X 16 π2 + . = 4 2 p=0 π 2 (2p + 1)2 3 D’où +∞ X p=0 1 π2 = (2p + 1)2 8 π2 π2 − 3 4 = π4 . 96 Exercice 3. Démontrer que ∀x ∈] − π, π[\{0}, +∞ X n=1 x 8n sin(nx) = sgn(x) cos , π (4n2 − 1) 2 où sgn(x) vaut 1 si x > 0 et −1 si x < 0. Solution de l’exercice 3 On considère f la fonction 2π-périodique définie sur ] − π, π] par ( sgn(x) cos x2 si x ∈] − π, π[\{0}, f (x) = 0 si x = 0 ou x = π. (Remarque : Les valeurs choisies en 0 et π n’ont pas d’importance...) La fonction f est impaire car elle est impaire sur [−π, π] et 2π-périodique. On remarque que f est continue et dérivable en tout point x ∈ R \ πZ = R \ {kπ, k ∈ Z}, bien que f soit discontinue (notamment en x = 0). Montrons que la somme de gauche correspond à la série de Fourier de f . Comme f est paire, ses coefficients an (f ), n ∈ N, sont tous nuls. Pour tout n > 1, déterminons bn (f ). Z Z Z x x 1 0 1 π 1 π f (x) sin(nx)dx = − cos sin(nx)dx + cos sin(nx)dx. bn (f ) = π −π π −π 2 π 0 2 Or en effectuant le changement de variable y = −x, Z Z x y 1 0 1 π − cos sin(nx)dx = cos sin(ny)dy, π −π 2 π 0 2 d’où On a d’où Z x 1 π bn (f ) = 2 cos sin(nx)dx. π 0 2 x x x 2 cos sin(nx) = sin nx + + sin nx − , 2 2 2 Z 1 π x x bn (f ) = sin nx + + sin nx − dx π 0 2 2 " #π − cos nx − x2 1 − cos nx + x2 + = π n + 21 n − 12 0 1 1 1 = + π n + 21 n − 12 2n . = π n2 − 14 5 On a donc bn (f ) = 2n 8n = . 1 2 π (4n2 − 1) π n −4 Les sommes partielles de Fourier ont donc pour expression SN (f )(x) = N X n=1 8n sin(nx). π (4n2 − 1) ce qui est en adéquation avec les termes de la série donnée par l’énoncé. Il reste à justifier la convergence de la série de Fourier. Comme la fonction f est discontinue, il ne peut pas y avoir convergence normale. En revanche, en tout point x0 ∈] − π, π[\{0}, la fonction f est continue et dérivable, et donc le corollaire du théorème de convergence locale de Dirichlet s’applique en x0 . Ainsi, pour tout x0 ∈] − π, π[\{0}, lim SN (f )(x0 ) = f (x0 ), N →+∞ soit +∞ X n=1 x 8n 0 sin(nx ) = sgn(x ) cos . 0 0 2 π (4n − 1) 2 6