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Soins Libéraux
THS (traitement hormonal substitutif)
De la modération à la restriction
La préférence pour un traitement par les hormones naturelles, aux doses
les plus faibles possibles et pendant le moins de temps possible, tout en
informant la femme sur la balance bénéfice/risque, voilà les idées clés de
l’attitude thérapeutique actuelle concernant les troubles du climatère.
L
es données concernant le
cancer du sein chez la femme
qui ont été publiées par le
Bulletin épidémiologique hebdomadaire en 2000 confirment que c’est le
cancer le plus fréquent, avec une incidence qui représente 35,7 % de tous
les cancers féminins, et le nombre de
cas a doublé en 20 ans (de 1980 à
2000). C’est dire qu’il convient d’examiner à la loupe tous les facteurs de
risque, dont le TSH fait partie. L’Afssaps
l’a admis en modifiant ses recommandations sur ce traitement à la lumière
des études récentes de grande envergure qui ont remis en cause le rapport
bénéfices/risques.
Résultat d’études
Infos
...
Étude E3N
« L’étude E3N apporte
les premiers résultats
sur la combinaison
de progestérone
micronisée avec
des estrogènes
percutanés, qui bien
que rassurants ne
peuvent affirmer
actuellement qu’une
voie est préférable à
une autre en termes
de risque de cancer
du sein », estime le
Dr A. Lesur (Nancy).
L’étude américaine WHI portant sur
16 000 femmes et l’étude anglaise
MWS portant sur un million de
femmes ont clairement démontré le
surrisque de cancer du sein (risque
double à 5 ans) chez les femmes utilisant un THS estroprogestatif, et l’absence d’effet protecteur vis-à-vis des
risques coronarien, cérébrovasculaire et
thromboembolique veineux (contrairement à ce que l’on a crupendant
longtemps). À l’inverse, le risque cardiovasculaire semble augmenter. Cela
dit, certains spécialistes français ont
exprimé leur désaccord, en avançant
notamment deux arguments : la population étudiée ne correspondait pas
à la population récemment ménopausée et les hormones utilisées (estrogènes conjugués équins) n’étaient
pas celles le plus souvent prescrites
en France, c’est-à-dire le 17 bêtaestradiol par voie cutanée. On entrevoit qu’il est urgent de disposer de
nouvelles données sur les femmes
françaises, étant donné que, jusqu’à
Professions Santé Infirmier Infirmière N° 59 • novembre 2004
présent, aucune donnée disponible
ne permet de supposer une différence d’effet entre les estrogènes
équins et le 17 bêta-estradiol. Ainsi,
dans l’état actuel des connaissances,
chez la femme ménopausée n’ayant
ni les troubles du climatère invalidants
(bouffées de chaleur, sudations nocturnes, sécheresse vaginale, troubles
urinaires) ni facteurs de risque d’ostéoporose, le risque de cancer du sein
et d’accident cardiovasculaire paraît
plus élevé que le bénéfice de la préservation du capital osseux (d’autant
qu’il existe aujourd’hui d’autres moyens
de prévention de l’ostéoporose). Le
THS n’est donc recommandée qu’en
cas de troubles climatériques, et sa
poursuite doit être reconsidérée tous
les ans, en vérifiant la présence ou la
disparition des symptômes à l’aide de
fenêtres thérapeutiques.
La voie d’administration transdermique
des estrogènes (70 % des prescriptions de THS en France) permet de
restaurer les taux d’estradiol en évitant
les effets du premier passage hépatique (susceptible d’entraîner des perturbations des facteurs de la coagulation) et également de moduler la dose
pour pallier les différents symptômes
sans entraîner de mastodynies. L’importance du choix de la voie d’administration des estrogènes a été confirmée
par l’étude française ESTHER : il en
ressort que les estrogènes oraux peuvent altérer l’équilibre entre les facteurs
procoagulants et les mécanismes antithrombotiques, tandis que les estrogènes transdermiques paraissent n’exercer que peu ou pas d’effet sur
l’hémostase. Autrement dit, contrairement aux estrogènes administrés par
voie cutanée, les estrogènes par voie
orale sont thrombogènes et multiplient
le risque basal par 3, ce qui aboutit à
un risque thromboembolique veineux
multiplié par 15 en présence d’autres
facteurs de risque : mutations génétiques (l’une sur le facteur V Leiden,
l’autre sur la prothrombine) et cliniques (les femmes obèses ou ayant
des varices). Comme le rappelle le
Dr P.Y. Scarabin (INSERM), chez les
femmes à risque de thrombose veineuse, la voie orale est déconseillée et,
avant de prescrire un THS, il est fondamental d’évaluer de façon individuelle
le rapport bénéfice/risque. Concernant
le progestatif associé aux estrogènes
transdermiques, on recommande désormais le recours à la progestérone
micronisée, de structure chimique
identique à la progestérone naturelle.
Selon le Pr M. Modena (Italie), la progestérone naturelle a un effet positif ou
neutre sur le profil lipidique et vasculaire.
Étude française
Les premiers résultats d’une autre
étude française, l’étude E3N portant
sur 54 548 femmes (cohorte de la
MGEN suivie depuis 1990), confirment le surrisque pour les traitements
associant les estrogènes, qu’ils soient
oraux ou transdermiques, aux progestatifs de synthèse (on observe une
augmentation du risque relatif de 1,3
à 1,9 pour des durées d’utilisation
supérieures à 4 ans). Concernant le
traitement par les estrogènes seuls
faiblement dosés (par voie vaginale),
les auteurs concluent à l’absence d’effet probable. Quant à la combinaison
de progestérone naturelle micronisée
avec des estrogènes transdermiques,
les premiers résultats de l’étude E3N
ne mettent pas évidence d’augmentation du risque de cancer du sein
(risque relatif 0,9 à 2 ans de traitement) ; toutefois ces résultats doivent
être confirmés par un suivi à long
terme.
Ludmila Couturier
7es Journées européennes de la Société
française de gynécologie
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