Chapitre 1
Prérequis de physique et de
statistique
Ce chapitre commence par un résumé des notions essentielles de mécanique classique
et une présentation comparative des formalismes de Newton, de Lagrange et de Hamilton
- ceci dans le but d’introduire l’espace des phases. Les apports majeurs de la mécanique
quantique sont ensuite rappelés pour faciliter la comphension de certains aspects de la
physique statistique ; on se borne à donner la solution de l’équation de Schrödinger d’une
particule libre dans une boite parallépipédique pour définir la notion de dégénérescence
des états énergétiques. Puis les principaux résultats de thermodynamique classique sont
fournis dans la suite du chapitre, qui se termine par un aperçu général des méthodes
statistiques indispensables au développement de la physique statistique.
1.1 Mécanique classique
1.1.1 Formalisme de Newton
La mécanique classique repose sur l’équation de Newton :
Fi=md2ri
dt2,(1.1)
dans laquelle Fiest la force qui agit sur la i-ième particule d’un système qui en contient
N, m est la masse de la particule et rison rayon vecteur. Cette équation, qui permet de
décrire le mouvement de la particule, se réduit à 3 équations différentielles du second ordre
dont les solutions xi(t), yi(t)et zi(t)sont déterminées lorsque la force Fiet les conditions
initiales sont connues.
Par exemple, pour étudier le mouvement de l’oscillateur harmonique linéaire, on utilise
l’équation différentielle :
md2X
dt2=kX, (1.2)
13
14 CHAPITRE 1. PRÉREQUIS DE PHYSIQUE ET DE STATISTIQUE
X(= xx0)représente l’allongement proportionnel à la force F(= kX).La solu-
tion de l’équation différentielle est X=X0cos(ωt +ϕ).La pulsation ω=k
m1/2pend
des caractéristiques du système, tandis que X0et ϕsont les deux constantes d’intégra-
tion déterminées avec les conditions initiales. Cette solution correspond, par exemple, au
mouvement oscillatoire d’une masse msans frottement attace à un ressort de rigidité
k.
Pour comparer utilement les différents formalismes de la mécanique classique, considé-
rons le mouvement d’une particule de masse mdans un champ central. L’énergie poten-
tielle est U(r) = k
ret la force qui en dérive F=gradU=kr
r3,de sorte que l’équation
de Newton qui régit le mouvement de la particule est :
md2r
dt2=kr
r3.(1.3)
Si la trajectoire est située dans le plan (xy),les projections de cette équation vectorielle
sont :
md2x
dt2=kx
(x2+y2)3/2,
md2y
dt2=ky
(x2+y2)3/2.
La nature du problème et la forme des équations imposent d’employer les coordonnées
polaires (ret θ)pour résoudre ce système d’équations différentielles. Après avoir effectué
les changements de variables x=rcos θet y=rsin θ, le système d’équations différentielles
précédent s’écrit :
m(¨rr˙
θ2) + k
r2cos θm(r¨
θ+ 2 ˙r˙
θ) sin θ= 0,(1.4)
m(¨rr˙
θ2) + k
r2sin θ+m(r¨
θ+ 2 ˙r˙
θ) cos θ= 0.(1.5)
Pour simplifier ces équations effectuons successivement leur somme, après avoir mul-
tiplié la première équation par cos θet la seconde par sin θ, et leur différence après avoir
multiplié la premre équation par sin θet la seconde par cos θ. On aboutit ainsi aux deux
relations suivantes :
m(¨rr˙
θ2) + k
r2= 0,(1.6)
m(r¨
θ+ 2 ˙r˙
θ) = 0.(1.7)
La seconde relation est une différentielle totale exacte qui s’intègre immédiatement sous
la forme :
mr2˙
θ=l. (1.8)
Il est évident que la quantité mr2.
θ=lcorrespond au moment cinétique de la particule et
que c’est une constante du mouvement. En éliminant ˙
θentre les relations (1.6) et (1.8),
on obtient l’équation radiale, soit :
m¨r=k
r2+l2
mr3.(1.9)
1.1. CANIQUE CLASSIQUE 15
On notera que la solution r(t)de cette équation différentielle peut s’exprimer, tout au
moins en principe, en fonction des constantes ket l. On notera également, en comparant
les relations (1.9) et (1.3), la présence du terme supplémentaire l2
mr3dans la relation (1.9)
qui doit être interprété comme une force fictive (force centrifuge) ne traduisant aucune
liaison extérieure mais provenant uniquement du mode de représentation adopté. La force
centrifuge et la force de Coriolis qui apparaissent dans les systèmes de coordonnées en
rotation sont deux exemples de forces fictives.
1.1.2 Formalisme de Lagrange
Le mouvement d’une particule, ou plus généralement d’un système matériel, peut être
également étudié avec le formalisme de Lagrange. Ce formalisme est utilisé lorsque les
variables sont des angles ou des fonctions compliquées des coordonnées conventionnelles,
plutôt que les coordones cartésiennes des particules individuelles. Dans ce formalisme,
un système de Nparticules interagissant les unes avec les autres est défini par ses 3Ncoor-
données généralisées qi,i= 1,2, ..., 3N. Or, pour décrire le mouvement des particules,
on doit préalablement calculer la fonction suivante, appelée lagrangien du système :
L(q1, q2, ..., q3N; ˙q1,˙q2, ..., ˙q3N;t) = TU, (1.10)
qui dépend des coordonnées généralisées qi,des vitesses généralisées ˙qiet éventuellement
du temps t. Dans le membre de droite de la relation (1.10), Test l’énergie cinétique et U
l’énergie potentielle du système. L’énergie cinétique Test une fonction quadratique des
vitesses généralisées :
T=1
2
N
k=1
mk˙q2
k,
et l’énergie potentielle Une dépend que des coordonnées généralisées quand le système
est conservatif. Si l’on connaît l’énergie cinétique et l’énergie potentielle du système, on
peut calculer les équations du mouvement en utilisant les équations de Lagrange qui se
présentent sous la forme suivante :
d
dt L
˙qiL
qi
= 0 i= 1,2, ..., 3N. (1.11)
A titre d’illustration, retrouvons avec le formalisme de Lagrange les équations du
mouvement des deux systèmes traités avec le formalisme de Newton. Ici il est inutile
de connaître les forces appliquées. Pour l’oscillateur harmonique linéaire utilisons comme
coordonnée généralisée q1=X. L’énergie cinétique de la masse mest T=1
2m˙
X2et
l’énergie potentielle est U=(kX)dX =1
2kX2, de sorte que le lagrangien a pour
expression :
L(X, .
X) = 1
2m˙
X21
2kX2.(1.12)
Quant à l’équation du mouvement, elle est fournie par l’équation de Lagrange (Rel. 1.11)
qui s’écrit :
d
dt L
˙
XL
X = 0,
soit d
dt(m˙
X) + kX = 0,
16 CHAPITRE 1. PRÉREQUIS DE PHYSIQUE ET DE STATISTIQUE
et qui coïncide avec la relation (1.2).
Considérons à présent la particule, de masse m, dans un champ central. Son énergie
potentielle est U=k
ret son énergie cinétique T=1
2mv2s’exprime en fonction des
coordonnées généralisées q1=ret q2=θ. Puisquavec les coordonnées polaires le car
de la vitesse a pour expression :
v2= ˙r2+r2˙
θ2,
le lagrangien correspondant s’écrit :
L(r, θ, ˙r, ˙
θ) = 1
2m( ˙r2+r2˙
θ2) + k
r.
Avec les coordonnées ret θ, l’utilisation des équations de Lagrange conduit directement
à :
d
dt L
˙rL
r = 0,
d
dt L
˙
θL
θ = 0,
soit :
d
dt (m˙r)mr ˙
θ2+k
r2= 0,
d
dt mr2˙
θ= 0.
Ces deux équations coïncident avec les relations (1.8 et 1.9). Contrairement au for-
malisme de Newton, elles ne requièrent la connaissance ni des forces réelles ni des forces
fictives. En particulier, la force centrifuge mr ˙
θ2=l2
mr3apparaît naturellement à partir
du lagrangien, ce qui constitue un avantage sur le formalisme de Newton dans lequel la
présence des forces fictives complique la mise en équation du mouvement.
Un autre avantage du formalisme de Lagrange est la mise en évidence de quantités
qui se conservent durant le mouvement et que l’on appelle intégrales premières. Une
intégrale première particulièrement importante est celle où le lagrangien ne dépend pas
explicitement du temps. Montrons le en calculant la dérivée totale de Lpar rapport au
temps : dL
dt =
i
L
qi
qi
t +
i
L
˙qi
˙qi
t +L
t .(1.13)
D’après l’équation de Lagrange, d
dt L
˙qi=L
qi, et la relation qi
t = ˙qi,la relation (1.13)
s’écrit encore :
dL
dt =
i˙qi
d
dt L
˙qi+L
˙qi
˙qi
t +L
t ,
dL
dt =
i
d
dt ˙qi
L
˙qi+L
t ,
L
t =d
dt
i
˙qi
L
˙qiL.
1.1. CANIQUE CLASSIQUE 17
Or, si le lagrangien ne dépend pas explicitement du temps (L
t = 0), la relation précédente
se réduit à :
H=
i
˙qi
L
˙qiL=Cte. (1.14)
La quantité Hqui se conserve lorsque Lne dépend pas explicitement du temps est une
intégrale première très importante de la mécanique analytique. De manière analogue, si le
lagrangien Lest indépendant d’une coordonnée généralisée, qjpar exemple, la variation
de Lpar rapport à ˙qjest une constante conformément à l’équation de Lagrange (Rel. 1.11)
car, en effet, L
qj= 0 entraîne d
dt L
˙qj= 0 ou encore L
˙qj=Cte. De manière générale, à
chaque coordonnée généralisée qion associe son moment conjugué L
˙qi=pidont l’emploi
conduit à un nouveau mode de description : le formalisme de Hamilton.
1.1.3 Formalisme de Hamilton
Dans le formalisme de Lagrange les variables indépendantes sont les coordonnées géné-
ralisées qiqui définissent l’état du système à tout instant. Ce sont des fonctions du temps,
solutions d’un système de 3Néquations différentielles du second ordre. Par contre, dans
le formalisme de Hamilton, on choisit comme variables indépendantes les coordonnées
néralisées qiet les moments conjugués pi=L
˙qi.Le fait d’introduire les moments conju-
gués pidans la relation (1.14) n’apporte pas d’avantage évident si ce n’est de définir une
nouvelle fonction H, appelée hamiltonien, qui a les mêmes dimensions que L, c’est-à-dire
celles d’une énergie :
H(qi, pi, t) =
i
˙qipiL. (1.15)
L’hamiltonien doit son intérêt au fait d’être une intégrale première lorsque le lagrangien
ne dépend pas explicitement du temps (Rel. 1.14) et de représenter, le plus souvent,
l’énergie totale du système. En effet, si le système est conservatif, l’énergie potentielle
U(=TL)n’est fonction que des coordonnées généralisées, ce qui permet d’écrire les
moments conjugués sous la forme :
pi=L
˙qi
=(TU)
˙qi
=T
˙qi
.(1.16)
Par ailleurs, l’énergie cinétique Tétant toujours une fonction quadratique des vitesses
néralisées, il est possible d’écrire :
i
˙qi
T
˙qi
= 2T, (1.17)
en vertu du théorème d’Euler. Rappelons que le théorème d’Euler stipule que si une
fonction f(λx1, λx2, ...λxi)est un polynôme homogène de degmdesxi,soit :
f(λx1, λx2, ...λxi, ...) = λmf(x1, x2, ..., xi, ...),(1.18)
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