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Défaut de déclaration de créance : décharge de la
caution
le 27 février 2013
AFFAIRES | Entreprise en difficulté
Lorsque le créancier a omis de déclarer sa créance, peu important la nature de celle-ci, la caution
est déchargée de son obligation si cette dernière avait pu tirer un avantage effectif du droit d’être
admise dans les répartitions et dividendes, susceptible de lui être transmis par subrogation.
Com. 19 févr. 2013, F-P+B, n° 11-28.423
Parfaitement anticipées par la doctrine dès l’avènement de la réforme de 2005, les conséquences
pour la caution de la suppression de la sanction par l’extinction du défaut de déclaration d’une
créance ont été consacrées en 2011 par la Cour de cassation (Com. 12 juill. 2011, n° 09-71.113,
Bull. civ. IV, n° 118 ; D. 2011. Actu. 1894, obs. A. Lienhard ; ibid. 2012. Pan. 1573, obs. P. Crocq ;
RTD civ. 2011. 782, obs. P. Crocq ; RTD com. 2011. 625, obs. D. Legeais ; ibid. 2012. 405, obs. A.
Martin-Serf ). La fin de « l’âge d’or des cautions, 1985-2005 », bien sûr, comme l’a résumé
Françoise Pérochon (Entreprises en difficulté, LGDJ, 2012, 9e éd., n° 1384) mais, en réalité, de cette
décision de principe résultaient deux solutions, la seconde, tout aussi attendue que la première,
laissant quand même quelques miettes d’espoir aux cautions. Car, bien qu’il soit acquis que la
seule exclusion du titulaire de la créance des répartitions et dividendes, autrement dit
l’inopposabilité de celle-ci à la procédure, ne saurait être regardée comme une exception inhérente
à la dette, susceptible d’être opposée par la caution, le bénéfice de cessions d’actions, prévu par
l’article 2314 du code civil, n’en demeure pas moins invocable : « si la caution est déchargée de
son obligation, lorsque la subrogation dans un droit préférentiel conférant un avantage particulier
au créancier pour le recouvrement de sa créance ne peut plus, par le fait de celui-ci, s’opérer en
faveur de la caution, pareil effet ne se produit que si cette dernière avait pu tirer un avantage
effectif du droit d’être admise dans les répartitions et dividendes, susceptible de lui être transmis
par subrogation ». C’est ce qu’avait alors énoncé la chambre commerciale, tout en rejetant, en
l’espèce, ce moyen de défense des cautions, au motif que, dans la liquidation judiciaire en cause,
les créanciers chirographaires n’ayant pas été réglés, les cautions n’eussent pas été
désintéressées.
Mais restait encore à comprendre la portée de cette affirmation, à supposer que l’arrêt fût vraiment
ambigu, point sur lequel les avis des commentateurs variaient du tout au tout, certains estimant
que la Cour ne s’était prononcée qu’en considération de l’absence de préjudice (V., par ex., D.
Robine, Les conséquences du défaut de déclaration de créance sur les garanties dont dispose le
créancier, Journ. sociétés mars 2012, p. 22, spéc. p. 28), tandis que d’autres concluaient
qu’implicitement mais nécessairement elle avait tranché la question de fond relative aux créances
chirographaires (V., par ex., JCP 2011. 901, note N. Dissaux). Deux lectures, donc, ce qui n’a rien
d’étonnant, puisque cette dualité n’était que le reflet ponctuel de la controverse doctrinale
préexistante quant au potentiel de la condition jurisprudentielle classique de « perte d’un droit
préférentiel » : vision restrictive et classique, d’un côté, dans laquelle s’opposent irréductiblement,
presque ontologiquement, les notions de « droit préférentiel » et de « créance chirographaire » (V.,
not., L. Aynès et P. Crocq, Les sûretés. La publicité foncière, Defrénois, 2012, 6e éd., n° 283), vision
plus large et dynamique, de l’autre, admettant que le concept de droit préférentiel « embrasse
toute situation dans laquelle est perdu un droit susceptible de procurer à la caution un avantage
par voie de subrogation », de sorte que la mise à l’écart de la participation aux répartitions et
dividendes suffirait à constituer la perte d’un tel droit, perte préjudiciable pour peu que le créancier
chirographaire eût pu effectivement bénéficier un tant soit peu de celle-ci (P. Simler,
Cautionnement, garanties autonomes, garanties indemnitaires, Litec, 2008, 4e éd., nos 721 et 823).
Le présent arrêt du 19 février 2013 met fin à cette incertitude et, partant, à la discussion aussi en
lui ôtant tout intérêt pratique. Plus de doute dorénavant grâce à cette décision de cassation limpide
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