Les résultats de la colectomie pour RCH ont été publiés
par des centres référents. Les conséquences de cette
intervention sont sans doute moins bonnes dans la
réalité. D’après une grande série américaine ayant inclus
7 108 malades colectomisés pour RCH entre 1995 et
2005, la mortalité de la colectomie en urgence était de
5,4 contre 0,7 % quand elle était réalisée « à froid » [4].
Plusieurs facteurs augmentant la mortalité ont été identifiés
en analyse multivariée. Ils sont pour partie liés au terrain : âge
du patient supérieur à 60 ans et existence de comorbidités.
L’expérience de l’équipe où le malade est opéré est égale-
ment déterminante sur le pronostic de l’intervention : le
taux de mortalité fait plus que doubler dans les unités où la
colectomie pour RCH est pratiquée moins de quatre fois
par an. Cette étude délivre aussi un message à l’adresse
des gastroentérologues : plus la durée de l’hospitalisation
préopératoire est longue, plus la morbimortalité de la
chirurgie est élevée, et ce dès le sixième jour d’hospitalisation
préopératoire.
En fait, toute la difficulté est de confier le malade au chirur-
gien au bon moment : trop précocement, la colectomie
peut être abusive ; trop tardivement, le risque de décès post-
opératoire est élevé. L’âge du patient et le terrain, l’ancien-
neté de la maladie, un doute sur la présence de dysplasie ou
sur le diagnostic de MC, un désir de grossesse et surtout le
retentissement de la poussée sur l’état général et le choix du
patient sont des critères décisionnels à prendre en compte
au sein d’équipes médicochirurgicales entraînées.
Appliquer une corticothérapie
dans les règles
Le traitement de la poussée sévère de RCH, également
appelé « régime de Truelove », est bien codifié [5]. Il repose
avant tout sur la corticothérapie intraveineuse à forte dose
(au moins 0,8 mg/kg par jour d’équivalent méthylpredniso-
lone en une à deux fois par jour), pour une durée maximale
de 5-7 jours (recommandation ECCO de grade B) [7].
Les autres éléments du traitement intraveineux intensifs
sont la mise au repos du tube digestif, la prescription
d’héparine de bas poids moléculaire à dose préventive et
de lavements de corticoïdes. L’antibiothérapie et la nutri-
tion parentérale totale n’améliorent pas les performances
du traitement et ne sont donc pas systématiques.
L’objectif thérapeutique est l’obtention d’une réponse
clinique rapide. Elle est définie par un score de Lichtiger
inférieur à 10, deux jours consécutifs et une baisse supé-
rieure ou égale à trois points par rapport au score départ.
Environ 60 % des malades traités avec corticoïdes intra-
veineux sont en rémission au cinquième jour [1, 13]. Le taux
d’échec de ce traitement de première ligne, aux alentours
de 40 %, est donc élevé. Si l’échec du traitement est
officialisé à j5, celui-ci peut et doit être anticipé afin de
permettre l’instauration, le cas échéant, d’un traitement
de deuxième ligne dans les meilleurs délais. Dès le troisième
jour de corticoïdes intraveineux, la persistance d’un nombre
élevé d’évacuations par 24 heures –au moins huit –et
d’une augmentation de la protéine C réactive (CRP) –
supérieure à 45 mg/L –peut prédire l’échec du traitement
[14, 15]. Le délai de cinq jours de corticoïdes intraveineux
permet également la réalisation des examens préalables
au traitement de deuxième ligne.
En l’absence de réponse à la corticothérapie intraveineuse,
ou bien si celle-ci est insuffisante, il est non seulement
inutile, mais surtout dangereux de poursuivre ce traitement
au-delà de la première semaine.
“
60%desmaladestraitésavec
des corticoïdes intraveineux sont
en rémission au cinquième jour
”
Recourir à un traitement médical
de deuxième ligne sans délai
Comme nous l’avons vu, la prise en charge d’une CAG
compliquant une RCH est une course contre la montre :
au-delà du sixième jour d’hospitalisation préopératoire,
la mortalité de la colectomie augmente [4]. L’échec des
corticoïdes doit donc être anticipé, afin d’envisager, soit
une colectomie précoce, soit un traitement médical de
deuxième ligne qui devra être débuté au cinquième jour
d’hospitalisation au plus tard (figure 1).
Après échec de la corticothérapie intraveineuse, trois
options médicamenteuses sont envisageables à ce stade
selon le consensus ECCO : la ciclosporine (grade B), l’inflixi-
mab (grade B) ou le tacrolimus (grade B) [7]. En France, les
deux premiers traitements sont les plus utilisés.
Les remarquables résultats de la ciclosporine intraveineuse
observés dans l’essai princeps de Lichtiger et al. ont depuis
été largement confirmés : une rémission clinique est
obtenue chez environ 80 % des patients en une semaine,
dans un délai rapide, en médiane de quatre jours [8, 16, 17].
De nombreux effets indésirables, parfois sévères, peuvent
survenir : insuffisance rénale, hypertension artérielle,
convulsions ou infections opportunistes potentiellement
létales. Malgré une posologie initiale réduite à 2 mg/kg
par jour, un passage plus précoce à la voie orale, une
surveillance biologique régulière et une prévention systé-
matique de la pneumocystose pulmonaire [18], ces effets
secondaires limitent l’utilisation de la ciclosporine qui ne
doit être envisagée que comme un traitement d’attaque
dans l’attente de l’efficacité d’un traitement de fond par
azathioprine/6-mercaptopurine [19, 20]. À distance, les
résultats de la ciclosporine sont moins bons. Ainsi, le taux
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vol. 17 supplément 4, septembre 2010
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