Cours L1, Mathématiques Générales 1 Pierre Puiseux Université de Pau et des Pays de l’Adour 19 octobre 2012 3 Table des matières Chapitre 1. Fonctions, applications 1.1. Vocabulaire, rappels 1.1.1. Ensembles, quantificateurs 1.1.2. Un peu de logique élémentaire 1.2. Fonctions et applications 1.2.1. Relation binaire 1.2.2. Fonctions 1.2.3. Domaine de définition 1.2.4. Application 1.3. Injectivité, surjectivité 1.4. Fonctions composées, inverse d’une fonction 1.4.1. Fonctions composées 1.4.2. Application réciproque 5 5 5 6 6 6 7 8 8 9 12 12 14 Chapitre 2. Nombres complexes 2.1. Le corps des nombres complexes 2.1.1. Définitions 2.1.2. L’ensemble C est un corps 2.1.3. Conjugué et module d’un complexe 2.1.4. Forme exponentielle et trigonométrique d’un nombre complexe 2.2. Résolution d’équations dans C 2.2.1. Équations du second degré dans C 2.2.2. Racines n-ièmes d’un nombre complexe 2.3. Applications trigonométriques des formules d’Euler et de Moivre 2.3.1. Expression de cos nx et sin nx en fonction de cos x et sin x 2.3.2. Linéarisation de cosn x et sinn x 2.3.3. Somme de cosinus et de sinus 2.3.4. Expression de tan nx en fonction de tan x 2.4. Applications à la géométrie Exercices 17 17 17 18 19 20 23 23 25 27 27 28 28 29 29 29 Chapitre 3. Polynômes et Fractions rationnelles 3.1. Polynômes 3.1.1. Définitions 3.1.2. Dérivées d’un polynôme 3.1.3. Racines d’un polynôme 3.1.4. Formule de Taylor 3.1.5. Divisibilité et racines 3.1.6. Factorisation sur R et C 3.1.7. Division suivant les puissances croissantes 3.2. Fractions rationnelles, pratique de la décomposition en éléments simples 3.2.1. La forme générale de la décomposition A 3.2.2. Partie entière de F = B 3.2.3. Factoriser B 33 33 33 34 34 34 35 36 37 37 37 38 38 Pierre Puiseux 4 Chapitre 0. Table des matières 3.2.4. Simplifier la fraction 3.2.5. Si F est paire ou impaire 3.2.6. Les différentes méthodes de calcul des coefficients 38 38 38 Chapitre 4. Matrices 4.1. Définitions et notations 4.1.1. Matrices 4.1.2. Matrices carrées 4.2. Opérations sur les matrices 4.2.1. Addition de deux matrices 4.2.2. Produit de deux matrices 4.2.3. Produit d’une matrice par un scalaire 4.3. Propriétés 4.3.1. Distributivité 4.3.2. Associativité 4.3.3. Commutativité 4.3.4. Elément neutre pour l’addition 0m,n 4.3.5. Elément neutre pour la multiplication : Im,n 4.3.6. Divers 4.3.7. L’espace vectoriel (Km,n , +, .) 4.3.8. L’anneau des matrices carrées d’ordre n 4.3.9. Matrice d’une application linéaire 4.3.10. Matrice d’un système linéaire 4.4. Inverse d’une matrice 41 41 41 42 43 43 43 45 45 45 45 45 45 46 46 46 46 46 47 47 Bibliographie 51 1.1 Vocabulaire, rappels 5 CHAPITRE 1 Fonctions, applications 19 octobre 2012 1.1. Vocabulaire, rappels 1.1.1. Ensembles, quantificateurs. Un ensemble est une collection d’objets mathématiques... Exemple 1.1. A = {a, b, c, e} , E = {2, 3, 4, 5} = {x ∈ R, 2 6 x 6 5} • • • • ∅ désigne l’ensemble vide. x ∈ A se lit x appartient à l’ensemble A, ou x est élément de l’ensemble A x∈ / A se lit x n’appartient pas à l’ensemble A, ou x n’est pas élément de l’ensemble A ∀x ∈ E, P (x) se lit : pour tout (ou bien quel que soit) x dans l’ensemble E, la propriété P (x) est vérifiée. Par exemple E = {6n, n ∈ N} la propriété ∀x ∈ E, x est pair est une propriété vraie. Pour démontrer que ∀x ∈ E, P (x), on prend un élément x quelconque de E, on démontre qu’il vérifie la propriété P . Autrement dit, on ne prend pas de x en particulier. Par exemple soit E = {6n, n ∈ Z}, pour montrer la propriété ∀x ∈ E, x est pair, on procède ainsi : soit un élément quelconque de E, appelons-le w, (on peut aussi l’appeler Georges, y,s12 ou x, peu importe) alors w = 6n = 2 × 3n est multiple de 2, donc w est pair. Donc la propriété ∀x ∈ E, x est pair est vraie. • ∃x ∈ E, P (x) se lit : il existe un élément x dans l’ensemble E vérifiant la propriété P (x). Par exemple dans l’ensemble E des nombres pairs, il existe des multiples de 3, ce que l’on écrit : E = {2n, n ∈ N} , ∃m ∈ E tel que est un multiple de 3 par exemple m = 6 est un tel élément. Pour démontrer que ∃x ∈ E, P (x), on exhibe un élément x particulier de E, qui vérifie bien sûr la propriété P . Par exemple soit E = {6n, n ∈ Z}, pour montrer la propriété ∃x ∈ E, x est multiple de 7, on procède ainsi : hum...., voyons, peut-on trouver un élément de E qui soit multiple de 7 ? ..... Ah, oui, bien sûr 42 = 6 × 7 est dans E et multiple de 7. La propriété ∃x ∈ E, x est multiple de 7 est donc vraie. • E et F sont deux ensembles, E ⊂ F se lit E est inclus dans F ou bien E est un sous ensemble de F , ce qui signifie que tout élément de E est aussi dans F . Pour démontrer que E ⊂ F , on prend un élément quelconque de E, on démontre qu’il est dans F . Autrement dit, on montre la propriété : ∀x ∈ E, x ∈ F , qui peut également s’énoncer :∀x, x ∈ E =⇒ x ∈ F • E = F signifie que les ensembles E et F sont égaux, c’est à dire qu’ils ont les mêmes éléments, c’est à dire vérifient la double inclusion : E ⊂ F et E ⊂ F . Pour démontrer que deux ensembles E et F sont égaux on procède toujours par double inclusion. Exemple 1.2. E = {2, 3, 4, 5} et F = {n ∈ N, 2 6 n 6 5} On a bien E = F car : • ∀x ∈ E on a : x ∈ N et 2 6 x 6 5 donc x ∈ F , ce qui prouve E ⊂ F Pierre Puiseux 6 Chapitre 1. Fonctions, applications • ∀y ∈ F on a y est un nombre entier compris entre 2 et 5 donc y = 2, ou y = 3, ou y = 4, ou y = 5, dans tous les cas y est élément de E ce qui démontre que F ⊂ E. Définition 1.1. Produit cartésien de deux ensembles : E et F étant deux ensembles, le produit cartésien de E par F est l’ensemble des couples (x, y) formés d’un élément x de E et d’un élément y de F . Il est noté E × F . E×F = {(x, y) , x ∈ E, y ∈ F } Exemple 1.3. E = {1, 2}, alors E×N = {(1, 0) , (2, 0) , (1, 1) , (2, 1) , (1, 2) , (2, 2) , . . . , (1, 100) , (2, 100) , . . . } 1.1.2. Un peu de logique élémentaire. P et Q sont des propriétés mathématiques • P ⇒ Q se lit : P implique Q ce qui signifie si la propriété P est vrai, alors Q l’est également. • Démontrer P ⇒ Q, est équivalent à démontrer nonQ ⇒ nonP (raisonnement par l’absurde). Par exemple P (n) est la propriété n est premier, Q (n) est la propriété n est impair. Pour montrer que ∀n ∈ N, P (n) ⇒ Q (n), on raisonne par l’absurde : soit n ∈ N. Supposons que n n’est pas impair (non Q (n)) alors n est pair donc n est multiple de 2, donc il n’est pas premier (non P (n)). Et voila ! Démontrer par l’absurde la propriété P ⇒ Q consiste à démontrer la contraposée : non Q ⇒ non P • Pour démontrer la propriété ∃x ∈ E, P (x) (il existe un x dans E vérifiant la propriété P (x)), il faut exhiber un élément x particulier vérifiant P (x). Par exemple, ∃x ∈ N, x nombre premier est une proposition vraie car 3 est premier et 3 ∈ N. Pour démontrer que ∃x ∈ E, P (x), on exhibe un élément x particulier de E, qui vérifie bien sûr la propriété P . Par exemple soit E = {6n, n ∈ Z}, pour montrer la propriété ∃x ∈ E, x est multiple de 7, on procède ainsi : hum...., voyons, peut-on trouver un élément de E qui soit multiple de 7 ? ..... Ah, oui, bien sûr 42 = 6 × 7 est dans E et multiple de 7. La propriété ∃x ∈ E, x est multiple de 7 est donc vraie. • Démontrer que la proposition : (∀x ∈ E, P (x)) est fausse, équivaut à démontrer que la proposition suivante est vraie : (∃x ∈ E, tel que P (x) est fausse). En d’autres termes : La négation de « tous les éléments de E vérifient la propriété P » est : « il existe un élément de E ne vérifiant pas la propriété P . » non (∀x ∈ E, P (x)) ⇐⇒ ∃x0 ∈ E, non (P (x0 )) Par exemple : tous les entiers sont pairs (∀n ∈ N, n est pair) est une proposition fausse car 3 n’est pas pair, c’est à dire : il existe un entier (n = 3) qui n’est pas pair. • Démontrer que la proposition : (∃x ∈ E, P (x)) est fausse, équivaut à démontrer que la proposition suivante est vraie : (∀x ∈ E, P (x) est faux). En d’autres termes : La négation de : « il existe un élément de E vérifiant la propriété P » est : « tous les éléments de E vérifient non P » ou « aucun élément de E ne vérifie P ». non (∃x ∈ E, P (x)) ⇐⇒ ∀x ∈ E, non (P (x)) Par exemple, la négation de la propriété P : « il existe un entier dans l’intervalle ]0, 1[ » est « ∀x ∈ ]0, 1[ , x ∈ /N» 1.2. Fonctions et applications 1.2.1. Relation binaire. Soient E et F deux ensembles. On appelle graphe de E vers F toute partie de E × F . Soit G un graphe de E × F . On définit la relation binaire R associée à G par : x ∈ E est en relation avec y ∈ F si et seulement si (x, y) ∈ G, auquel cas, on note xRy. 1.2 Fonctions et applications 7 G est le graphe de la relation R et pourra être noté Gr (R). Et on a la propriété Gr (R) {(x, y) ∈ E × F, xRy} = Exemple 1.4. • E = F = R et xRy ⇐⇒ y = x2 est une relation binaire. – 1R1, −1R1 sont vrais et – 2R2 est faux – Le graphe de la relation R est la parabole d’équation y = x2 • E = F = R et xRy ⇐⇒ y = x1 est une relation binaire sur R × R, dont le graphe peut être représenté par l’hyperbole d’équation y = x1 • E = F = R et xRy ⇐⇒ y 6 x est une relation binaire dont le graphe est le demi-plan situé en dessous de la droite d’équation y = x 1.2.2. Fonctions. Définition 1.2. Une fonction définie d’un ensemble E vers un ensemble F est un triplet f = (E, R, F ), où R est une relation binaire de E vers F telle que tout élément x de E est en relation avec un ou zéro élément y de F . S’il existe, y est noté f (x). Une telle fonction est notée → 7 → f :E x F y = f (x) ou parfois aussi de manière plus synthétique f : (x ∈ E) 7→ (y ∈ F ). Exemple 1.5. • Soit R la relation définie par xRy ssi x + y est pair. L’écriture f :N x → N 7→ y tel que xRy ne définit pas une fonction car x = 2 est en relation avec plusieurs entiers : 2R2, 2R4 1 • Par contre la relation xRy ssi y = 1−x , permet d’écrire f :R → R 1 1−x qui définit une fonction car pour x ∈ R il existe un ou zéro élément y ∈ R tel que xRy. On notera que 1 est en relation avec aucun élément de R. x 7→ Remarque 1.1. • Dans une fonction f = (E, R, F ) si l’on change E, R ou F , il s’agit d’une autre fonction. Par exemple f :R → R x 7→ 1 1−x n’est pas la même fonction que f : R \ {1} → R 1 1−x • Pour définir une fonction, il est donc essentiel de bien définir les ensembles de départ, d’arrivée et la relation de la fonction. x 7→ Définition 1.3. (Vocabulaire) Soit f = (E, R, F ) une fonction et (x, y) ∈ Gr (f ). • E est l’ensemble de départ • F est l’ensemble d’arrivée 8 Chapitre 1. Fonctions, applications Fig. 1. Fonction et application • y est l’image (unique) de x, on le note f (x) • x est un antécédent de y • L’ensemble des antécédents de y est noté f −1 ({y}) plus généralement, l’ensemble des antécédents d’une partie A ⊂ F est noté f −1 (A). On l’appelle également image réciproque de A par f Exemple 1.6. Soit la fonction f :R x → 7 → R x2 9 est l’image de 3, R est l’ensemble de départ, et l’ensemble d’arrivée, −3 et 3 sont des antécédants de 9, et on a {−3, 3} = f −1 ({9}), −2 n’a pas d’antécédent. 1.2.3. Domaine de définition. Définition 1.4. Soit f : E → F une fonction. On appelle domaine de définition de f le sous ensemble Df de E constitué des éléments ayant (exactement) une image. Exemple 1.7. La fonction f :R → R x 7→ 1 1−x a pour domaine de définition Df = R \ {1} 1.2.4. Application. Définition 1.5. Une fonction f : E → F est une application si et seulement si E ⊂ Df . Ou, de manière équivalente, f est une application de E vers F ssi tout élément x de E a exactement une image f (x) Exemple 1.8. La fonction f : x ∈ R 7→ 1 x ∈ R est une application. 1 x ∈ R n’est pas une application tandis que g : x ∈ R∗ 7→ 1.3 Injectivité, surjectivité 9 Plus généralement, si l’on sait trouver le domaine de définition Df d’une fonction f : E → F , alors on peut lui associer l’application g : Df → F construite en remplaçant simplement E, par Df . 1.3. Injectivité, surjectivité Un premier point de vue : soit f : E → F une fonction et y ∈ F donné. On considére l’équation { x∈E (1) f (x) = y et on note ny le nombre de solutions de cette équation. Définition 1.6. On dit que f est : • surjective si ∀y ∈ F, ny ≥ 1 • injective si ∀y ∈ F, ny ≤ 1 • bijective si ∀y ∈ F, ny = 1 Remarque. Il est fondamental de bien comprendre dans cette définition, que la propriété demandée à ny doit être vraie pour tous les y de F . Par exemple : • si un seul ny est égal à 2 alors f n’est pas injective. • Si l’un des ny est égal à 0, alors f n’est pas surjective. • Pour que f soit bijective il faut que {ny , y ∈ F } = {1}. Définition 1.7. On dit qu’une application f : E → F est une surjection ou est surjective ssi f vérifie l’une des trois propriétés équivalentes : (1) Tout élément y ∈ F admet au moins un antécédent dans E. (2) Pour tout élément y ∈ F , l’équation { x∈E f (x) = y admet au moins une solution (3) ∀y ∈ F, ∃x ∈ E tel que y = f (x) Pour déterminer si une application f : E → F est surjective, on se donne un élément quelconque y ∈ F et on résoud l’équation { x∈E f (x) = y où x ∈ E est l’inconnue. S’il y a au moins une solution (éventuellement plus d’une) pour tous les y, alors f est surjective. Pour montrer qu’une fonction f n’est pas surjective, il faut exhiber un élément y0 ∈ F telle que l’équation { x∈E f (x) = y0 n’a pas de solution x ∈ E. Exemple 1.9. 10 Chapitre 1. Fonctions, applications Fig. 2. Surjection (1) L’application f : R∗ x → R 1 7→ x2 n’est pas surjective car f (x) = 0 n’a pas de solution, c’est à dire 0 n’a pas d’antécédent (Tout nombre négatif est également orphelin d’antécédant). (2) L’application g : R∗ → ]0, +∞[ 1 x2 x 7→ est surjective car ∀y ∈ ]0, +∞[, l’équation y = 1 x2 admet les deux solutions ± √ 1 y (3) Soit E un ensemble et P (E) l’ensemble des parties de E. L’application h : P (E) A → P (E) 7 → E\A est surjective car pour B ∈ P (E), B admet A = E \ B comme antécédent car h (A) = E \ A = E \ (E \ B) = B Remarque 1.2. Le procédé utilisé ci-dessus se généralise : si f : E → F n’est pas surjective, il est toujours possible de construire une application g : E → G surjective en restreignant l’ensemble d’arrivée aux éléments G qui ont un antécédent (voir figure 2). Définition 1.8. On dit qu’une application f : E → F est une injection (on dit aussi f est injective) ssi f vérifie l’une des quatre propriétés équivalentes suivantes : (1) Tout élément y ∈ F admet au plus un antécédent. (2) Pour tout élément y ∈ F , l’équation { x∈E f (x) = y admet au plus une solution (3) ∀x ∈ E, ∀x′ ∈ E f (x) = f (x′ ) ⇒ x = x′ (4) ∀x ∈ E, ∀x′ ∈ E x ̸= x′ ⇒ f (x) ̸= f (x′ ) 1.3 Injectivité, surjectivité 11 Fig. 3. Injection et surjection Pour démontrer qu’une application f : E → F est injective, on se donne un élément y ∈ F quelconque, et on montre que l’équation { x∈E f (x) = y admet une ou zéro solution, pas plus. Ou bien on se donne x et x′ deux éléments quelconques de E, vérifiant l’égalité f (x) = f (x′ ) et on montre que x = x′ . Pour démontrer qu’une application f : E → F n’est pas injective, on exhibe un élément y0 ∈ F qui admet deux antécédants. C’est à dire tel que l’équation { x∈E f (x) = y0 admet deux (ou trois, ou quatre...) solutions distinctes x1 ̸= x2 Exemple 1.10. (1) L’application f : R∗ → R 1 x 7→ x2 n’est pas injective car 1 a pour antécédants 1 et −1. (2) L’application f :R → R x 7→ x3 est injective car pour x ∈ R et x′ ∈ R, si x3 = x′3 alors x = x′ Proposition 1.1. Une application f : R → R strictement monotone est injective. 12 Chapitre 1. Fonctions, applications Démonstration. Supposons f strictement croissante. Soient x ̸= x′ deux réels. On appelle x le plus petit des deux : x < x′ donc f (x) < f (x′ ) donc f (x) ̸= f (x′ ) donc f est injective. Si f est strictement décroissante, le raisonnement est analogue. Définition 1.9. Une application f : E → F est une bijection ou est bijective si et seulement si elle est injective et surjective, c’est à dire si elle vérifie l’une des deux propriétés équivalentes suivantes : (1) Tout élément de F admet un antécédent et un seul. (2) Pour tout élément y ∈ F , l’équation f (x) = y admet une solution et une seule. Pour démontrer que f est bijective, on se donne un élément y ∈ F et on montre l’équation y = f (x) admet une solution unique dans E. Ou bien, on montre que f est injective et surjective. Exemple 1.11. (1) L’application f :N → n 7→ N 2n n’est pas bijective car 3 n’a pas d’antécédent (2) L’application f :R → R ex − e−x x 7→ 2 est bijective car ∀y ∈ R, l’équation y = f (x) admet une solution unique dans R : posons X = ex > 0 √ ex − e−x y= ⇐⇒ X = y ± y 2 + 1 2 ( ) √ √ comme X > 0, seule la solution X = y + y 2 + 1 convient, donc x = log y + y 2 + 1 est l’unique solution de l’équation y = f (x). (3) L’application f : R2 → R2 (x, y) 7→ (x + y, x − y) est bijective car pour (a, b) ∈ R2 l’équation (a, b) = f (x, y) admet pour unique solution (x, y) = 1 2 (a + b, a − b). 1.4. Fonctions composées, inverse d’une fonction 1.4.1. Fonctions composées. Définition 1.10. E, F, G sont trois ensembles, f : E → F et g : F → G deux applications. La composée de f et g est l’application g ◦ f : E → G définie pour x ∈ E par (g ◦ f ) (x) = g (f (x)). L’ensemble de définition de g ◦ f est déterminé par les deux conditions : Dg◦f Exemple 1.12. = {x ∈ E tel que x ∈ Df et f (x) ∈ Dg } 1.4 Fonctions composées, inverse d’une fonction 13 (1) Pour on a f :R → R g:R → 1 x 7→ x−2 Df = R \ {2} et Dg = R \ {1} donc Dg◦f x 7→ { = x ∈ R, x ̸= 2 et 1 ̸= 1 x−2 = {x ∈ R, x ̸= 2 et x ̸= 3} = R \ {2; 3} R 2x + 1 x−1 } et pour tout x ∈ Dg◦f , on peut calculer (g ◦ f ) (x) = = g (f (x)) 2 x−2 + 1 −1 x = 3−x Attention, si x = 2 on ne peut pas faire ce calcul car f (x) n’existe pas. Par contre en posant { (g ◦ f ) (x) si x ̸= 2 h (x) = 2 si x = 2 1 x−2 on définit une nouvelle application qui est un prolongement de g ◦ f par continuité. Remarque 1.3. (1) Même si g ◦ f est défini, il n’y a aucune raison pour que f ◦ g le soit. (2) Même si f ◦ g est défini, on a en général f ◦ g ̸= g ◦ f . Dans l’exemple ci-dessus, (a) au niveau des domaines de définition, on vérifie que Dg◦f = R \ {2; 3} ̸= Df ◦g = R \ {1}, ce qui suffirait à conclure. x (b) De surcroît, pour x ∈ Df ◦g ∩ Dg◦f , on a f ◦ g (x) = x−1 3 et g ◦ f (x) = 3−x Définition 1.11. On appelle application identité de E, et on note IdE l’application de E dans E définie par ∀x ∈ E, IdE (x) = x. Proposition 1.2. • Soit f : E → F , alors f = f ◦ IdE = IdF ◦ f f g • Etant données trois applications E → F → G (h ◦ g) ◦ f h → H on a1 = h ◦ (g ◦ f ) Démonstration. La première assertion est évidente. Les deux applications (h ◦ g) ◦ f et h ◦ (g ◦ f ) ont même ensemble de départ E et même ensemble d’arrivée H. De plus pour tout x ∈ E ((h ◦ g) ◦ f ) (x) = (h ◦ g) (f (x)) = h (g (f (x))) (h ◦ (g ◦ f )) (x) = et h ((g ◦ f ) (x)) = h (g (f (x))) ce qui prouve le résultat. Proposition 1.3. Soient f : E → F et g : F → G. (1) Si f et g sont injectives, alors g ◦ f est injective 1On dit que ◦ est une opération associative 14 Chapitre 1. Fonctions, applications (2) Si f et g sont surjectives, alors g ◦ f est surjective (3) Si f et g sont bijectives, alors g ◦ f est bijective Démonstration. (1) Supposons f et g injectives. Soient x et x′ dans E tels que f ◦ g (x) = f ◦ g (x′ ). Alors f (g (x)) = f (g (x′ )) donc, par injectivité de f , on a g (x) = g (x′ ). L’injectivité de g donne alors x = x′ (2) Supposons f et g surjectives. Soient z dans G. Comme g est surjective, il existe y ∈ F tel que z = g (y), de même par sujectivité de f , l’élément y de F a un antécédent x ∈ E qui vérifie y = f (x). Donc z = g (f (x)) = (g ◦ f ) (x) ce qui prouve le résultat. (3) Conséquence des deux points précédents. 1.4.2. Application réciproque. Définition 1.12. Si u est une application bijective de E dans F , alors tout élément y ∈ F admet un antécédant unique, que l’on note x = u−1 (y). On définit ainsi une application de F dans E : y ∈ F 7→ u−1 (y) qui associe à tout élément y de F son unique antécédent x ∈ E. Cette application s’appelle l’application réciproque de u et se note u−1 . On a donc ∀ (x, y) ∈ E × F, y = u (x) (2) ⇐⇒ x = u−1 (y) Remarque 1.4. (1) Dans la définition ci-dessus, la bijectivité de u est essentielle, afin de définir sans ambiguité u−1 (y) : l’antécédant de y doit exister (donc u doit être surjective) et doit être unique sinon, u−1 n’est pas une fonction( (donc u) doit être injective). (2) Pour tout élément x ∈ E, u−1 ◦ u (x) = x car u (x) a pour unique antécédent x par u. Donc u−1 ◦ u = IdE ( ) (3) De même pour tout élément y ∈ F, u ◦ u−1 (y) = y c’est à dire u ◦ u−1 = IdF (4) Si E ̸= F alors u ◦ u−1 ̸= u−1 ◦ u Exemple 1.13. { (1) L’application notée √ R+ x → 7 → R+ x2 est bijective et la fonction réciproque est la fonction racine, Proposition 1.4. (1) Soient u : E → F et v : F → E deux applications vérifiant u ◦ v = IdF et v ◦ u = IdE . Alors u et v sont bijectives et réciproques l’une de l’autre : u = v −1 et v = u−1 . ( )−1 = u. Autrement dit l’inverse (2) Soit u : E → F une bijection. Alors u−1 est bijective et u−1 de l’inverse de u, lorsqu’elle existe, est u elle même Démonstration. (1) On fait le raisonnement pour u, on procèderait de manière analogue pour v. (a) Soient x ∈ E et x′ ∈ E tels que u (x) = u (x′ ) alors v (u (x)) = v (u (x′ )), donc x = x′ donc u est injective. (b) Soit y ∈ F , l’équation y = u (v (y)) montre que y admet v (y) pour antécédent par u. Donc u est injective. (c) Donc pour tout y ∈ F il existe un unique x ∈ E, noté x = u−1 (y) tel que y = u (x). Comme x est unique et comme y = u (x) = u (v (y)), on en déduit que x = v (y) = u−1 (y) donc v = u−1 . (2) Résulte immédiatement de la formulation 2 1.4 Fonctions composées, inverse d’une fonction 15 Proposition 1.5. Soient u : E → F et v : F → G deux bijections. Alors v ◦ u est une bijection et −1 (v ◦ u) = u−1 ◦ v −1 Démonstration. u ◦ v est une bijection comme le montre une proposition précédente. Soit z ∈ G quelconque, soit y ∈ F son unique antécédent par v, et soit x ∈ E l’unique antécédent de y par u. On a donc x = u−1 (y) et y = v −1 (z) donc ( ) x = u−1 v −1 (z) ( ) = u−1 ◦ v −1 (z) −1 Ce qui montre également que (v ◦ u) (x) = z c’est à dire x = (v ◦ u) (z), d’où l’égalité annoncée. Proposition 1.6. Si u : E → F admet une réciproque u−1 F → E, alors u−1 est bijective et ( −1 )−1 u = u. ( )−1 ( )−1 c’est a dire u◦IdE = = IdF ◦ u−1 Démonstration. u◦u−1 = IdF donc u◦u−1 ◦ u−1 ( −1 )−1 ( −1 )−1 IdF ◦ u donc u = u 2.1 Le corps des nombres complexes 17 CHAPITRE 2 Nombres complexes 19 octobre 2012 Extrait de [wikipedia] « En mathématiques, les nombres complexes forment une extension de l’ensemble des nombres réels. Ils permettent notamment de définir des solutions à toutes les équations polynomiales à coefficients réels. Les nombres complexes furent introduits au XV I e siècle par les mathématiciens italiens Jérôme Cardan, Raphaël Bombelli, Nicolo Fontana, dit Tartaglia, et Ludovico Ferrari afin d’exprimer les solutions des équations du troisième degré [...], en utilisant notamment des nombres de carré négatif, ainsi que les solutions des équations du quatrième degré (méthode de Ferrari). L’ensemble des sommes et produits de nombres réels et du nombre imaginaire i (les nombres de la forme a + ib) satisfait les propriétés d’une structure de corps commutatif qui contient le corps des réels. Il est appelé corps des nombres complexes et se note C. Il est muni de l’application module qui généralise la valeur absolue des nombres réels, mais ne peut pas être ordonné totalement de façon compatible avec sa structure de corps. Ce n’est qu’à partir du XIX e siècle que se développe l’aspect géométrique des nombres complexes, vus comme des éléments ou des transformations du plan, sous l’impulsion de l’abbé Buée et de Jean-Robert Argand (plan d’Argand), puis avec les travaux de Gauss et de Cauchy. En algèbre, le théorème de d’Alembert-Gauss identifie le degré d’un polynôme complexe non nul au nombre de ses racines comptées avec leur ordre de multiplicité. Le corps des nombres complexes est donc algébriquement clos. En analyse, l’exponentielle complexe permet de simplifier l’étude des séries de Fourier, puis de définir la transformée de Fourier. La branche de l’analyse complexe concerne l’étude des fonctions dérivables au sens complexe, appelées fonctions holomorphes. En physique, les nombres complexes sont utilisés pour décrire le comportement d’oscillateurs élec( ) triques ou les phénomènes ondulatoires en électromagnétisme (R eiωt représentant une onde). » 2.1. Le corps des nombres complexes Il n’existe pas de nombre réel x tel que x2 = −1, certaines équations, comme x2 + 1 = 0 n’ont donc pas de solution. C’est pour y remédier que l’on introduit les nombres complexes. 2.1.1. Définitions. Soit E un ensemble. Définition 2.1. On appelle loi de composition interne ou opération dans E toute application de E 2 à valeurs dans E. Définition 2.2. On appelle ensemble des nombres complexes et on note C, l’ensemble R2 , muni des deux lois de composition internes (ou opérations) : • L’addition ⊕, définie par : ∀ (x, y) ∈ C, ∀ (x′ , y ′ ) ∈ C, (x, y) ⊕ (x′ , y ′ ) = (x + x′ , y + y ′ ) • la multiplication ⊗, définie par ∀ (x, y) ∈ C, ∀ (x′ , y ′ ) ∈ C, (x, y)⊗(x′ , y ′ ) = (xx′ − yy ′ , xy ′ + x′ y) Remarque 2.1. Pierre Puiseux 18 Chapitre 2. Nombres complexes • Si l’on restreint ces deux opérations à l’ensemble des complexes de la forme (x, 0) , x ∈ R, alors on a ∀x ∈ R, ∀x′ ∈ R, • • • • • (x, 0) ⊕ (x′ , 0) = (x + x′ , 0) (x, 0) ⊗ (x′ , 0) = (xx′ , 0) ce qui exprime que ⊕ et ⊗ prolongent de manière naturelle l’addition et la multiplication dans R. Ceci nous suggère, pour tout x ∈ R, d’identifier le nombre complexe (x, 0) ∈ C avec le nombre réel x. On peut alors considérer R comme un sous ensemble de C : R ⊂ C Le nombre complexe (0, 1) vérifie (0, 1) ⊗ (0, 1) = (−1, 0), on le note i = (0, 1), et moyennant l’identification ci-dessus, on a i2 = −1 Dans la suite, nous abandonnons le symbole ⊕, et par abus de notation, utiliserons la même notation + pour désigner l’addition dans R et dans C. De même pour la multiplication, que l’on notera × ou . ou sans signe particulier. Pour x et y ∈ R, on vérifie par un calcul élémentaire que l’on peut écrire (x, y) = (x, 0)+i. (y, 0). Moyennant l’identification x = (x, 0) indiquée ci-dessus, tout nombre complexe se met donc sous la forme (x, y) = x + iy, cette notation sous entend usuellement que x et y sont réels. Un complexe z ∈ C mis sous la forme z = x + iy est dit sous forme canonique ou forme algébrique. Les nombres complexes admettent une représentation géométrique directement liée à leur définition. À tout nombre complexe z = (x, y) on associe le point M (z) du plan R2 de coordonnées (x, y). Le complexe z est appelé affixe du point M (z) et M (z) est appelé l’image de z. Définition 2.3. Soit z = (x, y) ∈ C. Alors z = x + iy est appelée forme algébrique ou canonique de z. x = R (z) ou x = Re (z) est la partie réelle de z y = I (z) ou y = Im (z) est la partie imaginaire de z On a bien sûr l’équivalence z ∈ R ⇐⇒ I (z) = 0. z est dit imaginaire (pur) si et seulement si R (z) = 0, on note iR l’ensemble des imaginaires purs. On note C∗ l’ensemble C privé du complexe (0, 0) 2.1.2. L’ensemble C est un corps. Proposition 2.1. (C, +, ×) est un corps, c’est à dire : • (C, +) est un groupe commutatif c’est à dire : – + est associative – + est commutative – + admet un élément neutre : (0, 0) – tout élément (x, y) admet un inverse (−x, −y) pour la loi + • (C∗ , ×) est un goupe commutatif d’élément neutre (1, 0) • La loi × est distributive par rapport à la loi + Démonstration. L’égalité ∀ (x, y) ∈ C, (x, y) × (1, 0) = (x, y) montre que (1, 0) est élément neutre pour la loi ×. Lorsque z = x + iy est non nul, l’inverse de z est donné par car (x, y) × ( x x2 +y 2 y , − x2 +y 2 ) 1 x + iy = x2 x y −i 2 2 +y x + y2 = (1, 0). La démonstration des autres propriétés sera faite à titre d’exercice. 2.1 Le corps des nombres complexes 19 2.1.3. Conjugué et module d’un complexe. Définition 2.4. Soit z = x + iy un nombre complexe. On appelle conjugué de z le nombre complexe, noté z, définit par z = x − iy Interprétation géométrique : le point d’affixe z est le symétrique par rapport à l’axe Ox, du point d’affixe z. Proposition 2.2. On vérifie aisément les quelques propriétés suivantes pour tous complexes z et z′ : • • • • • • z=z z−z Rz = z+z 2 , Iz = 2 z + z ′ = z + z(′ ) zz ′ = z.z ′ et zz′ = zz′ z ∈ R ⇐⇒ z = z z ∈ iR ⇐⇒ z = −z Définition 2.5. On appelle module du nombre complexe z = x + iy le réel positif défini par √ |z| = zz √ = x2 + y 2 Proposition 2.3. Pour tout complexe z : |z| = 0 |z| ⇐⇒ = z=0 |z| et Re (z) ≤ |Re (z)| ≤ |z| Im (z) ≤ |Im (z)| ≤ |z| Pour tout complexes z1 , z2 on a les deux inégalités triangulaires : (3) (4) |z1 + z2 | 6 |z1 | + |z2 | ||z1 | − |z2 || 6 |z1 − z2 | Et enfin |z1 z2 | = |z1 | |z2 | z1 = |z1 | si (z2 ̸= 0) z2 |z2 | Démonstration. |z| = 0 si et seulement si zz = 0 si et seulement si x2 + y 2 = 0 si et seulement si x = y = 0. La démonstration de |z| = |z| est immédiate. De manière évidente, on a Re (z) ≤ |Re (z)|, puis en posant z = x + iy, l’inégalité x2 ≤ x2 + y 2 2 2 montre que |Re (z)| ≤ |z| d’ù on déduit la deuxième inégalité. On raisonne de manière analogue pour la partie imaginaire. L’inégalité |z1 + z2 | 6 |z1 | + |z2 | est évidente si z2 = 0. On peut donc supposer z2 ̸= 0. En posant u = zz21 , l’inégalité est équivalente à (5) |1 + u| 6 1 + |u| 20 Chapitre 2. Nombres complexes 2 2 2 2 que l’on démontre maintenant : (5) ⇐⇒ |1 + u| 6 (1 + |u|) ⇐⇒ |1 + u| − (1 + |u|) 6 0 mais ( ) 2 2 2 |1 + u| − (1 + |u|) = (1 + u) (1 + u) − 1 + 2 |u| + |u| ( ) ( ) 2 2 = 1 + |u| + u + u − 1 + 2 |u| + |u| = 2 (Re (u) − |u|) et comme Re (u) ≤ |u| on obtient le résultat. La deuxième inégalité triangulaire se montre en écrivant z1 comme z1 = (z1 − z2 ) + z2 et en lui appliquant la première inégalité :|z1 | ≤ |z1 − z2 |+|z2 | d’où |z1 |−|z2 | ≤ |z1 − z2 |. Puis en permutant les rôles de z1 et z2 on obtient |z2 |−|z1 | ≤ |z2 − z1 | d’où la double inégalité − |z2 − z1 | ≤ |z2 |−|z1 | ≤ |z2 − z1 | qui démontre le résultat. La démonstration des deux dernières égalités ne présentent pas de difficulté. Remarque 2.2. • Le module d’un nombre complexe est un nombre réel positif. • si a est réel, alors le module de a est la valeur absolue de a. • L’inégalité triangulaire est une égalité |z1 + z2 | = |z1 | + |z2 | si et seulement si il existe un scalaire λ ∈ R+ tel que z2 = λz1 . ′ ′ • Si z ′ ̸= 0 alors pour mettre zz′ sous forme algébrique (ou canonique), on écrit zz′ = zzz = |zzz′ |2 ′ z′ qui est un complexe sous forme algébrique puisque |z ′ | est réel. Exemple 2.1. Pour mettre sous forme algébrique le complexe z = z 1+i 1−i , on écrit (1 + i) (1 + i) (1 − i) (1 + i) 1 + 2i + i2 = 12 + 12 = i = 2.1.4. Forme exponentielle et trigonométrique d’un nombre complexe. Forme exponentielle, formule d’Euler. Les propriétés des fonctions sinus et cosinus sont supposées connues. En particulier les formules trigonométriques ordinaires ainsi que l’équivalence { cos t = cos s ⇐⇒ s = t [2π] sin t = sin s Pour t ∈ R on pose (6) eit = cos t + i sin t L’ensemble des complexes de module 1 est noté U : U = {z ∈ C, |z| = 1} Proposition 2.4. L’ensemble (U, ×) est un groupe, sous-groupe de (C∗ , ×) et on a { it } U = e ,t ∈ R Démonstration. U est un sous-groupe de C∗ : Si z et z ′ sont dans U alors |zz ′ | = |z| |z ′ | = 1 donc zz ′ est dans U 1 ∈ U dont U admet 1 comme élément neutre. si z ∈ U alors son inverse z1 = |z|z 2 = z est également dans U. La commutativité et l’associativité sont héritées de C. { } On montre maintenant que U = eit , t ∈ R • • • • 2.1 Le corps des nombres complexes 21 { } • on a tout d’abord eit , t ∈ R ⊂ U car eit = 1. • Réciproquement, si z ∈ U alors z = x + iy avec x2 + y 2 = 1 donc |x| 6 1 et on peut trouver u ∈ [0, π] tel que cos u = x donc y 2 = 1 − cos2 u = sin2 u donc y = ± sin u. Donc z = cos u + i sin u = eiu{ ou bien z} = cos u − i sin u = cos (−u) + i sin (−u) = eiv avec v = −u, ce qui montre que z ∈ eit , t ∈ R .. Proposition 2.5. (Formules d’Euler) pout t ∈ R : cos t = sin t = eit + e−it 2 eit − e−it 2i Démonstration. sans difficulté en utilisant 6. Proposition 2.6. Pour tous réels s et t, on a : • • • • ei(s+t) = eis eit e−it = e1it ( )n ∀n ∈ Z, eit = eint eis = eit ⇐⇒ s = t + 2kπ, k ∈ Z que l’on écrit aussi s ≡ t [2π] Démonstration. Pour s et t réels, on peut écrire : ei(s+t) = cos (s + t) + i sin (s + t) = cos s cos t − sin s sin t + i (sin s cos t + cos s sin t) = (cos s + i sin s) (cos t + i sin t) = eis eit en prenant s = −t dans la relation précédente, on obtient : 1 = ei(t−t) = eit e−it d’où le résultat. La puissance n-ème s’obtient à partir de la première égalité par récurrence si n ≥ 0 et en utilisant la seconde égalité pour n < 0. D’autre part l’égalité eis = eit équivaut à cos s = cos t et sin s = sin t c’est à dire à s ≡ t [2π]. Remarque 2.3. Cette importante propriété s’écrit également sous une forme plus développée : cos (s + t) + i sin (s + t) = (cos s + i sin s) (cos t + i sin t) et permet en particulier de mémoriser de manière commode et condensée certaines formules trigonométriques usuelles. En effet, si l’on développe le membre de droite de cette équation, on obtient : cos (s + t) + i sin (s + t) = cos s. cos t − sin s. sin t + i (cos s. sin t + sin s. cos t) On identifie ensuite les partie réelles des deux membres de l’égalité : cos (s + t) = cos s. cos t − sin s. sin t puis on identifie les partie imaginaires des deux membres de l’égalité : sin (s + t) = cos s. sin t + sin s. cos t 22 Chapitre 2. Nombres complexes Formule de( Moivre. A partir de la formule précédente, on calcule par récurrence, pour tout )n n ∈ N : eint = eit , puis en passant aux inverses, pour tout n ∈ Z. Proposition 2.7. Formule de Moivre. Pour tout t ∈ R et pour tout n ∈ Z on a : (cos t + i sin t) n = cos (nt) + i sin (nt) Remarque 2.4. La formule de Moivre permet également de retrouver certaines formules trigonométriques, voir page 27 et suivantes. Argument d’un complexe non nul. Soit z ∈ C∗ , alors z existe t ∈ R tel que |z| = eit . z |z| est un complexe de module 1, donc il Définition 2.6. Soit z ∈ C∗ . On appelle argument de z tout nombre réel t tel que z = |z| eit . On appelle forme exponentielle de z la forme z = |z| eit , on appelle forme trigonométrique de z la forme z = |z| (cos t + i sin t). Proposition 2.8. Tout nombre complexe z ̸= 0 admet une infinité d’arguments. Si t0 est l’un d’entre eux, alors l’ensemble des arguments de z est1 arg (z) = ≡ {t0 + 2kπ, k ∈ Z} t0 + 2πZ Démonstration. Le réel t est argument de z si et seulement si z = |z| eit = |z| eit0 c’est à dire si et seulement si cos t = cos t0 et sin t = sin t0 d’où t = t0 + 2kπ, k ∈ Z. Remarque 2.5. Par abus de notation, arg (z) désignera souvent un des arguments de z. Mettre un nombre complexe sous forme trigonométrique ou exponentielle. Soit z = a + ib un nombre complexe non nul. (1) Calculer le module |z| de z ; (2) trouver, lorsque c’est possible un argument de z, c’est à dire un réel t vérifiant a cos t = |z| b sin t = |z| (3) la forme trigonométrique ou exponentielle de z est alors z = |z| (cos t + i sin t) = |z| eit Exemple 2.2. Calculons une forme trigonométrique de z = 1 + i : √ (1) |z| = 2 (2) On cherche t tel que √ 1 2 cos t = √ = 2 2 √ 2 1 sin t = √ = 2 2 t = π4 convient (3) On a donc z = √ iπ 2e 4 (4) l’ensemble des arguments de z est donc arg (1 + i) = π 4 + 2πZ 1Si t est un réel et A est un ensemble de nombres, t + A désigne l’ensemble des nombres obtenus en additionnant un élément de A à t. Autrement dit t + A = {t + a, a ∈ A}. 2.2 Résolution d’équations dans C 23 Proposition 2.9. Si z, z1 et z2 sont des nombres complexes non nuls, n ∈ Z, alors 2 arg (z1 z2 ) = arg (z1 ) + arg (z1 ) ( ) z1 arg = arg (z1 ) − arg (z1 ) z2 arg (z n ) = n arg (z) Démonstration. Soient z1 = r1 eit1 et z2 = r2 eit2 les formes exponentielles de z1 et z2 . Alors z1 z2 = r1 r2 eit1 eit2 = r1 r2 ei(t1 +t2 ) ce qui montre que arg (z1 z2 ) = {t1 + t2 + 2kπ, k ∈ Z} = {t1 + 2kπ, k ∈ Z} + {t2 + 2kπ, k ∈ Z} (à vérifier en exercice). On raisonne de manière analogue pour zz12 et z n . Définition 2.7. Parmi tous les arguments de z, on appelle argument principal celui qui est dans l’intervalle ]−π, π], et on le note Arg (z). Ainsi {Arg (z)} = arg (z) ∩ ]−π, π] 2.2. Résolution d’équations dans C 2.2.1. Équations du second degré dans C. Racine carrée d’un nombre complexe. Définition 2.8. Soit a ∈ C. On appelle racine carrée de a tout nombre complexe z vérifiant z2 (7) = a Proposition 2.10. Tout nombre complexe non nul admet deux racines carrées opposées. Démonstration. Soit a = reit , r > 0 un complexe non nul. Le complexe z = ρeiθ est une racine de a si et seulement si z 2 = a c’est à dire ρ2 e2it = reit soit : ρ2 = r et ≡ t [2π] 2θ cette dernière relation peut s’écrire : θ = + kπ, k ∈ Z {d’où deux valeurs possibles pour z : √ it √ i( t +π) √ it √ it } 2 2 2 2 z1 = re et z2 = re re , − re . = −z1 d’où le résultat : z ∈ t 2 Remarque 2.6. La recherche des racines carrées d’un complexe a peut se faire de deux manières : √ t (1) Mettre le a sous forme exponentielle : a = reit , dans ce cas les racines carrées sont z0 = rei 2 et z1 = −z0 (2) résoudre l’équation z 2 = a sous la forme algébrique : en posant z = x + iy et a = α + iβ, on doit trouver x, y ∈ R tels que x2 − y 2 + 2ixy et en séparant partie réelle et imaginaire, trouver x2 − y 2 xy = α + iβ on obtient (x, y) ∈ R2 tel que =α =β que l’on résoud dans R2 (et non pas dans C). Exemple 2.3. 2Si A et B sont deux ensembles de nombres, A + B désigne l’ensemble des nombres obtenus en additionnant un élément de A et un élément de B. Autrement dit A + B = {a + b, a ∈ A et b ∈ B}. De même, A − B = {a − b, a ∈ A et b ∈ B} et pour z ∈ C on définit zA = {za, a ∈ A} 24 Chapitre 2. Nombres complexes √ (1) a ∈ ]−∞, 0[, a pour racines carrées ±i |a| (2) Trouver les racines carrées de a = −3 + 4i. Avec la seconde méthode on doit résoudre z 2 = −3 + 4i. En posant z = x + iy cette équation s’écrit x2 − y 2 + 2ixy = −3 + 4i c’est à dire : 2 trouver (x, y) ∈ R tel que 2 2 (8) x −y = −3 xy =2 { y = x2 8 ⇐⇒ x2 − x42 = −3 { y = x2 , X = x2 ⇐⇒ X − X4 = −3 { y = x2 , X = x2 ⇐⇒ X 2 + 3X − 4 = 0 L’équation en X est du second degré, dans R, ses solutions sont −4 et 1. Comme X = x2 est positif (car x ∈ R), on ne garde que la solution X = 1 donc x = 1 ou x = −1. Cas 1. Cas 2. Si x = 1 alors y = 2, ce qui donne la solution z0 = 1 + 2i. Si x = −1 alors y = −2 qui donne l’autre solution z1 = −1 − 2i. Résolution d’une équation du second degré. Proposition 2.11. Soient a ̸= 0, b et c trois nombres complexes et l’équation du second degré : az 2 + bz + c = 0 (9) Soit ∆ = b2 − 4ac le discriminant de (9) et soit δ l’une des deux racines carrées complexes de ∆, c’est à dire l’une des solutions de l’équation : δ2 = ∆ • Si ∆ ̸= 0, alors (9) admet 2 racines distinctes : −b + δ z1 = 2a −b − δ z2 = 2a • si ∆ = 0, alors (9) admet la racine unique : b z0 = − 2a Démonstration. On réécrit (9) sous une ( (9) ⇐⇒ a z 2 + (( ⇐⇒ ⇐⇒ En posant Z = z + b 2a , forme altérée : ) b c z+ =0 a a ) )2 b c b2 a z+ =0 − 2+ 2a 4a a ( )2 b ∆ z+ = 2 2a 4a l’équation ci-dessus est de la forme ∆ 4a2 ∆ dont l’inconnue est Z. Les solutions sont donc les deux racines carrées de 4a 2 , c’est à dire, puisque b δ δ δ est une racine carrée de ∆ : Z = ± 2a . On en déduit z + 2a = ± 2a puis z = −b±δ 2a . Z2 = 2.2 Résolution d’équations dans C 25 Pratiquement, pour résoudre l’équation (9), on procède en trois étapes : (1) Calculer le discriminant ∆ = b2 − 4ac (2) Calculer les racines carrées de ∆ en résolvant δ 2 = ∆ (utiliser avec une des méthodes exposées en (2.2.1)). Cette étape donne souvent lieu à des calculs longs. { } −b−δ (3) L’ensemble des solutions de (9) est alors : S = −b+δ 2a , 2a Remarque 2.7. Si le coefficient b est nul, alors l’équation (9) s’écrit c z2 = − a dont les solutions sont simplement les deux racines carrées de − ac . Les trois étapes pour le calcul des solutions de (9) sont les mêmes que pour une équation à coefficients réels. L’étape 2. a simplement été reformulée pour s’adapter au cas complexe. 2.2.2. Racines n-ièmes d’un nombre complexe. Soit n, un entier naturel non nul. Définition 2.9. On appelle racine n-ième d’un complexe z0 tout nombre complexe z tel que zn (10) = z0 3 Exemple 2.4. 2i est une racine 3-ième (ou cubique) de −8i car (2i) = −8i Racines n-ièmes de l’unité. On considère un entier n > 0. Proposition 2.12. (racines n-ième de l’unité) L’équation (11) zn = 1 admet exactement n solutions complexes, appelées racines n-ième de l’unité. L’ensemble des solutions est : { 2kπ } Un = ei n , k = 0, 1, . . . , n − 1 Démonstration. Soit z = reit avec r > 0 réel, et t réel. Deux complexes sont égaux lorsque leurs modules sont égaux et leurs arguments sont égaux à 2kπ près, donc : { rn = 1 z n = 1 ⇐⇒ et nt ≡ 0 [2π] { r ∈ R+ , rn = 1 ⇐⇒ et ∃k ∈ Z, nt = 2kπ { r=1 ⇐⇒ et ∃k ∈ Z, t = 2kπ n { 2kπ } 2π Donc l’ensemble des solutions de (11) est S = ei n , k ∈ Z . Posons ω = ei n , de sorte que pour { } 2kπ k ∈ Z, on a ω k = ei n et S = ω k , h ∈ Z . Montrons que S = Un , et contient n éléments exactement : (1) L’inclusion Un ⊂ S est évidente. (2) Montrons l’inclusion S ⊂ Un : soit s = ω k , k ∈ Z un élément quelconque de S. Divisons k 2(nq+p)π par n : il existe deux entiers q et p, 0 6 p < n tels que k ={nq + p. Alors ω k = ei }n = 2pπ 2pπ i2qπ i n i n p 0 1 2 n−1 e e =e = ω avec 0 ≤ p < n ce qui prouve que s ∈ 1 = ω , ω , ω , . . . , ω = Un . 2kπ 2πl (3) Les ω k = ei n , 0 ≤ k < n sont tous distincts car pour 0 ≤ k < l < n, on a 0 ≤ 2πk < n n < 2π. } { 2ikπ Exemple 2.5. Les racines 5-ième de 1 sont U5 = e 5 , 0 ≤ k < 5 . Graphiquement, elle sont équiréparties sur le cercle unité, voir 1 page suivante 26 Chapitre 2. Nombres complexes Fig. 1. Les racines 5-ième de l’unité (points rouges) Proposition 2.13. Pour tout entier n > 0, (1) L’ensemble des racines n-ièmes de l’unité, noté Un est un groupe pour la multiplication. (2) Pour tout ξ ∈ Un , ξ ̸= 1 ⇒ 1 + ξ + ξ 2 + · · · + ξ n−1 =∑0 (3) La somme des racines n-ièmes de l’unité est nulle : ξ∈Un ξ = 0 Démonstration. (1) L’associativité et la commutativité sont hérités de C. L’élément neutre 1 est dans Un . Si ω n et ξ sont dans Un alors le produit ξω est dans Un car (ξω) = ξ n ω n = 1 et ω1 ∈ Un car ( 1 )n 1 ) = ( 2ikπ n = 1. ω e n (2) La somme est géométrique de raison ξ ̸= 1 donc vaut i 2π n (3) On pose ω = e · · · + ω n−1 = 0. 1−ξ n 1−ξ k =0 alors les éléments de Un sont ξ = ω , 0 6 k < n et ∑ ξ∈Un ξ = 1 + ω + ω2 + Racines n-ièmes d’un nombre complexe. Rappelons que trouver les racines n-ièmes d’un complexe z0 ∈ C∗ consiste à résoudre l’équation zn (12) = z0 Proposition 2.14. Soit z0 ∈ C∗ et soit α une racine n-ième de z0 , particulière. Alors l’ensemble des racines n-ième de z0 est αUn ≡ {αξ, ξ ∈ Un } Démonstration. Soit α une racine n-ième de z0 , particulière. L’ensemble des racines n-ième de z0 est l’ensemble des solutions de (13) zn = αn 2.3 Applications trigonométriques des formules d’Euler et de Moivre 27 ( z )n Cette équation est équivalente à α = 1 et c’est à dire Z n = 1 après avoir posé Z = solutions sont αz = Z ∈ Un d’ou le résultat. z α. Les Calcul pratique des racines n-iémes d’un complexe. Soit z0 ∈ C∗ , pour calculer les racines n-iémes de z0 , c’est à dire pour résoudre zn (14) = z0 (1) mettre z0 sous forme exponentielle : z0 = reit avec r > 0 et t ∈ R ; 1 t (2) une racine n-iéme particulière est α = r n ei n ; (3) l’ensemble des solutions de (10) est alors : { } 2kπ S = αei n , 0 ≤ k ≤ n − 1 { 1 t+2kπ } = r n ei n , 0 ≤ k ≤ n − 1 Exemple 2.6. Les racines 5-ièmes de z0 = 1 + i : 1 π (1) on calcule aisément 1 + i = 2 2 ei 4 ; ( 1 π ) 51 1 π (2) α = 2 2 ei 4 = 2 10 ei 20 est donc l’une des racines cinquièmes de z0 ; { 1 1+8k } (3) l’ensemble des racines 5-ièmes de 1 + i est donc S = 2 10 ei 20 π , 0 ≤ k ≤ 4 c’est à dire : { 1 π } 1 9 17 25 33 1 1 1 S = 2 10 ei 20 , 2 10 ei 20 π , 2 10 ei 20 π , 2 10 ei 20 π , 2 10 ei 20 π 2.3. Applications trigonométriques des formules d’Euler et de Moivre 2.3.1. Expression de cos nx et sin nx en fonction de cos x et sin x. Exemple 2.7. Pour calculer cos 3x en fonction de sin x et cos x, on peut développer la formule de Moivre pour n = 3 ce qui donne, en posant s = sin x et c = cos x : cos 3x + i sin 3x = (c + is) 3 2 = c3 + 3c2 (is) + 3c (is) + (is) ( ) ( ) = c c2 − 3s2 + is 3c2 − s2 3 en identifiant les parties réelles et imaginaires des deux membres de l’égalité ci-dessus, on en déduit : ( ) cos 3x = cos x cos2 x − 3 sin2 x ( ) sin 3x = sin x 3 cos2 x − sin2 x Remarque 2.8. En remplaçant sin2 x par 1−cos2 x dans les égalités ci-dessus, on peut exprimercos 3x comme un polynôme en cos x ( ) cos 3x = cos x 4 cos2 x − 3 Plus généralement, pour n ∈ N, on développe la formule de Moivre : einx (15) n = (c + is) ∑ ( n ) = cn−k ik sk k 06k6n • Les termes de cette somme correspondant à un indice k pair sont réels. Ces pairs sont { indices[k ]} [ ] ceux de la forme k = 2p, avec p 6 n2 et p entier, ce qui peut s’écrire p ∈ 0, 1, . . . , n2 où n2 désigne la partie entière du nombre réel n2 . En identifiant parties réelles des deux membres de l’égalité (15) on obtient ∑ ( n ) p cos nx = (−1) cosn−2p x sin2p x 2p 06p6[ n 2] 28 Chapitre 2. Nombres complexes • Les termes de cette somme correspondant à un indice k impair sont imaginaires. indices { [Ces ]} n−1 impairs sont k = 2p + 1 avec p 6 n−1 et p entier, ce qui peut s’écrire p ∈ 0, 1, . . . , . En 2 2 identifiant parties imaginaires des deux membres de l’égalité (15) on obtient ) ( ∑ n p (−1) cosn−(2p+1) x sin2p+1 x sin nx = 2p + 1 06p6[ n−1 2 ] 2.3.2. Linéarisation de cosn x et sinn x. Linéariser cosn x et sinn x, c’est exprimer ces quantités en fonction de cos kx et sin kx avec k ∈ N. Méthode très utile pour calculer des primitives. Exemple 2.8. Linéarisation de cos6 x. La formule d’Euler s’écrit : ( ix )6 e + e−ix 6 cos x = 2 On développe le second membre de cette égalité, et on obtient : cos6 x = ) 1 ( −6ix e + 6eix e−5ix + 15e2ix e−4ix + 20e3ix e−3ix + 15e4ix e−2ix + 6e5ix e−ix + e6ix 64 On regroupe les termes en eikx et e−ikx et en utilisant a nouveau les formules d’Euler, il vient : cos6 x = = ) ( ) ( ) ) 1 (( −6ix e + e6ix + 6 e4ix + e−4ix + 15 e2ix + e−2ix + 20 64 1 (cos 6x + 6 cos 4x + 15 cos 2x + 20) 32 2.3.3. Somme de cosinus et de sinus. Pour x ∈ ]0, 2π[, posons Cn (x) = ∑ et Sn (x) = 06k6n sin kx. On a donc einx ∑ 06k6n cos kx = Cn (x) + iSn (x) ∑ = eikx 06k6n d’après la formule de Moivre. Cette dernière somme est la somme des n + 1 premiers termes d’une suite géométrique de raison eix ̸= 1, sa somme est connue : ∑ eikx 1 − ei(n+1)x 1 − eix = 06k6n que l’on met sous forme algébrique : 1 − ei(n+1)x 1 − eix ei(n+1) 2 e−i(n+1) 2 − ei(n+1) 2 × x x x i e 2 e−i 2 − ei 2 x x sin (n + 1) 2 = ein 2 sin x2 x x x = en séparant partie réelle et partie imaginaire, on obtient la somme des cosinus mais aussi la somme des sinus : ∑ cos kx = cos n x sin (n + 1) x2 2 sin x2 sin kx = sin n x sin (n + 1) x2 2 sin x2 06k6n ∑ 06k6n 2.4 Exercices 29 2.3.4. Expression de tan nx en fonction de tan x. Exemple 2.9. pour exprimer tan 3x en fonction de tan x, on part des formules : ( ) cos 3x = cos x cos2 x − 3 sin2 x ( ) sin 3x = sin x 3 cos2 x − sin2 x ce qui donne tan 3x = ( ) sin x 3 cos2 x − sin2 x ( ) cos x cos2 x − 3 sin2 x puis en divisant numérateur et dénominateur par cos3 x on trouve : ( ) tan x 3 − tan2 x tan 3x = 1 − 3 tan2 x 2.4. Applications à la géométrie Exercices Exercice 2.1. Mettre sous forme algébrique : (1) (2) (3) (4) z z z z = (1 + i)(1 − 2i), = 1−3i 3−i , 1+i = 1−i , 1 1 = 1+i + 1−i . Exercice 2.2. Mettre sous forme trigonométrique : (1) z = 1 + i, √ (2) z = −1 + i 3, (3) z = − 52 i, ( √ )20 3 (4) z = 1+i . 1−i Exercice 2.3. Résoudre dans C les équations suivantes : (1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) z 2 + z + 1 = 0, z 2 + 2z + 7 = 0, z 2 = −7 + 24i, z 2 = −3 − 4i, z 2 − 2(2 + i)z + 6 + 8i = 0, iz 2 + (4i − 3)z + i − 5 = 0, z 2 − z̄ + 2 = 0. Exercice 2.4. Déterminer l’ensemble des points M du plan complexe dont l’affixe z vérifie : (1) z + z̄ = |z| ; (2) z−1−i z+1 ∈ R ; Exercice 2.5. (1) (2) (3) (4) Donner sous forme trigonométrique les racines cubiques de l’unité. 2π On pose j = ei 3 . Établir que les racines cubiques de l’unité sont : 1, j, j 2 . Montrer que j 2 = j̄. Écrire j et j 2 sous forme algébrique. Etablir que 1 + j + j 2 = 0. Exercice 2.6. Soit u = e i2π 5 . (1) Calculer 1 + u + u2 + u3 + u4 . Calculer u + u4 , puis u2 + u3 . (2) En déduire la valeur de cos 2π/5. 30 Chapitre 2. Nombres complexes (3) Application : trouver une construction à la règle et au compas d’un pentagone régulier. Exercice 2.7. Soit n ∈ N, n ≥ 2. Soit wk = e2iπk/n pour k = 0, 1, . . . , n − 1. ∑n−1 (1) Montrer que k=0 wk = 0, ∏n−1 (2) et que k=0 wk = (−1)n−1 . Exercice 2.8. Résoudre dans C, les équations : (1) z 5 = 1 − i, (2) iz 6 − (1 + i)z 3 + 1 = 0, (3) z 2 = −7 − 24i, en déduire les solutions de z 4 = −7 − 24i. Exercice 2.9. Résoudre dans C l’équation : (z 2 + 1)n − (z − i)2n = 0, n ∈ N∗ . Exercice 2.10. Calculer les sommes : n ∑ (1) S1 = cos(kx) (2) S2 = (3) S3 = k=0 n ∑ sin2 (kx) k=0 n ( ) ∑ n k cos(kx) k=0 Exercice 2.11. Posons E = C \ {−i}. Soit f : E → C l’application définie par f (z) = que soit z ∈ E. (1) (2) (3) (4) (5) z−i z+i quel Montrer que l’application f est injective. Montrer que pour tout z ∈ E, on a 1 − f (z) ̸= 0. Démontrer l’égalité f (E) = C \ {1}. ℑz Soit z ∈ E. Montrer que 1 − |f (z)|2 = 4 |z+i| 2. Notons U l’ensemble des nombres complexes de module 1. Montrer que l’on a f (R) = U \ {1}. 2π ∗ Exercice 2.12. Posons z = cos( 2π n ) + isin( n ), où n ∈ N, n ≥ 2. Soient a ∈ C et α une racine n-iéme de a. (1) (2) (3) (4) (5) Montrer que les racines n-iémes de a sont α, zα, ..., z n−1 α. Montrer que la somme des racines n-iémes de a est égale à 0. Soit k ∈ N. Montrer que z k = 1 si et seulement si k est un multiple de n. Posons ω = z n(n−1)/2 . Calculer ω 2 . En déduire que l’on a ω = (−1)n−1 . Montrer que le produit des racines n-iémes de a est égal à (−1)n−1 a. Exercice 2.13. Exercices complémentaires (1) Résoudre dans √ C les équations suivantes : (a) z 2 + z 3 − i = 0 (b) x4 = 1, (c) z−2 =z (z−1 )2 =i (d) z−2 z−1 (2) Soit z ∈ C vérifiant 1 + z 4 ∑ + z 8 = 0. Montrer que z ∈ U12 . (3) On étudie la suite Sn = sin kπ n 0≤k≤n ∑ π in (a) on pose, pour n ≥ 2, z = e . Calculer zk (b) montrer que pour n ≥ 2, 2 1−z (c) en déduire que pour n ≥ 2, Sn = (d) étudier la suite un = (4) Soient a et b deux réels. Sn n 0≤k≤n−1 i π tan 2n 1 π tan 2n =1+ 2.4 Exercices 31 (a) Montrer qu’il existe deux réels r et t, avec r > 0, tels que ∀x ∈ R, a cos x + b sin x = r cos (x − t) (b) Application : résoudre cos x + sin x = 1. 3.1 Polynômes 33 CHAPITRE 3 Polynômes et Fractions rationnelles 3.1. Polynômes On désigne par K l’ensemble R ou l’ensemble C. Les élements de K sont les scalaires. 3.1.1. Définitions. Définition 3.1. Soient a0 , a1 , . . . an n + 1 scalaires. Toute fonction de la forme P : x 7→ P (x) = n ∑ ak xk = an xn + an−1 xn−1 + · · · + a1 x + a0 k=0 est appelée fonction polynômiale où polynôme. Les scalaires a0 , a1 , . . . an sont les coefficients du polynome. Le degré du polynôme P est le plus grand entier i tel que ai ̸= 0. Par convention, le degré du polynôme nul est −∞. Le degré de P est noté deg P . La valuation du polynôme P est le plus petit entier i tel que ai ̸= 0. Exemple 3.1. P : x 7→ x3 + 2x2 est de degré 3 et de valuation 2. Proposition 3.1. Le degré de la somme de deux polynômes P et Q vérifie ≤ max (deg P, deg Q) deg (P + Q) Le degré du produit de deux polynômes est deg (P Q) = deg P + deg Q Démonstration. todo Remarque. Attention, le degré de la somme P + Q peut être strictement inférieur au plus grand degré. Exemple 3.2. P (x) = x2 + x − 1, Q (x) = −x2 + 2x + 3 sont deux polynômes de degré 2, la somme est (P + Q) (x) = 3x + 2 de degré 1 < 2. Définition 3.2. L’ensemble des polynômes sur K est noté K [X] (ou K [Y ], ...) L’ensemble des polynômes P ∈ K [X], de degré deg P ≤ n est noté Kn [X] (ou Kn [Y ], ...). Pour tout entier k, la fonction polynômiale (ou polynôme) x 7→ xk est notée X k (ou Y k , ...). ∑n Le polynôme P : x ∈ K 7→ k=0 ak xk peut donc être noté P ∑n = n ∑ ak X k k=0 et sa valeur en x ∈ K est P (x) = k=0 ak x . Il est important de distinguer P qui est un polynôme et P (x) qui est un nombre réel ou complexe, valeur du polynôme en x : P ∈ K [X] et P (x) ∈ K k Pierre Puiseux 34 Chapitre 3. Polynômes et Fractions rationnelles 3.1.2. Dérivées d’un polynôme. Définition 3.3. Pour tout entier k ∈ N, on désigne par P (k) la dérivée d’ordre k du polynôme P . Proposition 3.2. Pour tous entiers positifs n et p, on a : { n! n−p si p ≤ n (p) (n−p)! X (X n ) = 0 si p > n Démonstration. Par récurrence sur n. 2 Proposition 3.3. Soit (P, Q) ∈ K [X] et n ∈ N. Alors ∑ (n) (n) (P Q) = P (k) Q(n−k) k 0≤k≤n Démonstration. Par récurrence sur n. 3.1.3. Racines d’un polynôme. Définition 3.4. (Racines) (1) On appelle racine du polynôme P tout scalaire α ∈ K vérifiant P (α) = 0 (2) On dit que la racine α est d’ordre k ∈ N si P (α) = P ′ (α) = · · · = P (k−1) (α) = 0 et P (k) (α) ̸= 0 Exemple 3.3. P = X 3 − 4X 2 + 5X − 2 admet 1 comme racine d’ordre 2 et 2 comme racine d’ordre 1. 3.1.4. Formule de Taylor. Théorème 3.1. (Taylor) Soient P ∈ K [X] un polynôme de degré n et x0 , h ∈ K. Alors ∑ P (k) (x0 ) P (x0 + h) = hk k! 0≤k≤n Démonstration. Les scalaires x et h sont fixés dans K. Considérant φh (x) = il nous faut établir que (16) P (x + h) = ∑ 0≤k≤n P (k) (x) k h , k! φh (x) (1) On voit facilement que φh : K → K est linéaire, c’est à dire pour tout (x, y) ∈ K2 pour tous (a, b) ∈ K2 , on a φh (ax + by) = aφh (x) + bφh (y). On en déduit qu’il suffit d’établir la relation 16 pour les polynômes de la forme P = X p , 0 ≤ p ≤ n. (2) Pour p ≤ n fixé, et P = X p , on a ∑ X (k) (x) φh (x) = hk k! 0≤k≤n = ∑ X (k) (x) hk k! 0≤k≤p = = ∑ 0≤k≤p p! X p−k (x) k h (p − k)! k! 0≤k≤p p! xp−k hk (p − k)!k! ∑ p = (x + h) = X p (x + h) 3.1 Polynômes 35 3.1.5. Divisibilité et racines. Théorème 3.2. Soient A et B deux polynômes, B ̸= 0, alors il existe un unique couple de polynômes (Q, R) tel que { A=BQ+R deg(R) < deg(B) Q est le quotient et R le reste de la division euclidienne de A par B. Si le reste R est le polynôme nul, on dit que B divise A et on note B|A. Démonstration. Unicité, puis existence par récurrence sur le degré de A. Exemple 3.4. on divise A (x) = x2 − 3x + 2 par Q (x) = x + 1 on vérifie que B (x) = x − 4 et R (x) = 6. A= R= X2 X2 −3X +X −4X −4X +2 X X +1 = B −4 = Q +2 −4 6 Théorème 3.3. Divisibilité et racines (1) P est divisible par X − α ⇔ P (α) = 0 ; p (2) α est une racine d’ordre ≥ p de P si et seulement si P est divisible par (X − α) . Démonstration. (1) Si P est divisible par X − α alors P = (X − a) Q donc P (α) = 0. Réciproquement si P (α) = 0, effectuant la division de P par X − α on obtient : P = (X − α) Q + R avec deg R < 1, donc R = c (constante). Donc P = (X − α) Q + c et comme P (α) = 0, on obtient c = 0. p p (2) Si P est divisible par (X − α) alors il existe un polynômeQ tel que P = (X − α) Q. Donc ( ) ∑ p (l) (n−l) l pour 0 ≤ l ≤ p on a P (l) = Q ...todo k [(X − α) ] 0≤k≤l Théorème 3.4. Le polynome P divise le polynome Q (on note P |Q) si et seulement si l’une de ces propriétés équivalentes est vraie : (1) le reste de la division euclidienne de Q par P est nul ; (2) toutes les racines de P sont racines de Q avec au moins le même ordre de multiplicité. Démonstration. todo Exercice 3.1. effectuer la division euclidienne du polynôme A par le polynôme B dans les cas suivants : (1) A = 4X 5 + X 4 + 8X 3 − X 2 + 2X + 2 et B = X 3 + 2 (2) A = X 4 + 3X 2 + aX + b et B = X 2 − 2aX + 2 avec a, b ∈ R (3) A = 4X 3 + 2 et B = X + 1 + i 2n Exercice 3.2. déterminer le reste de la division euclidienne de A = (X − 2) par : n + (X − 1) − 2 (1) B = (X − 1) (X − 2) 2 (2) B = (X − 1) 2 (3) B = (X − 1) (X − 2) Exercice 3.3. effectuer la division suivant les puissances croissantes de A par B dans les cas suivants : 36 Chapitre 3. Polynômes et Fractions rationnelles (1) A = 1 − X 2 et B = 1 − 2X + X 2 à l’ordre 3 puis à l’ordre n. (2) A = 1 + X 2 et B = 1 + X 4 à l’ordre 5. (3) A = 1 + abX 2 et B = 1 − (a + b) X + abX 2 à l’ordre 3. Exercice 3.4. soit P = X 3 − 3bcX + b3 + c3 où bc et b3 + c3 sont réels. (1) montrer que P est divisible par X + b + c et en déduire une factorisation de P dans R. (2) Donner la factorisation de P dans C (en fonction du nombre complexe j ∈ U3 ). Exercice 3.5. Soit n un entier, n > 3. Montrer que le polynôme P = (1 + X) (1 − X n ) − 2 3 2nX n (1 − X) − n2 X n−1 (1 − X) est divisible par (1 − X) . Exercice 3.6. pour n entier, on pose Pn = aX n+1 + bX n + 1. (1) Déterminer les entiers a et b pour que le polynôme Pn admette 1 comme racine double. 2 (2) Dans ce cas justifier l’existence d’un polynôme Qn vérifiant Pn = Qn (1 − X) . (3) Montrer par récurrence que Qn = 1 + 2X + · · · + nX n−1 3.1.6. Factorisation sur R et C. Soit P ∈ Kn [X]. Définition 3.5. Un polynôme P ∈ K [X] est dit irréductible s’il n’est pas le produit de deux polynômes. Théorème 3.5. Sur R [X] les polynômes irréductibles sont les polynomes de degré 1 et les polynômes de degré 2 à discriminant strictement négatif. Sur C [X] les polynômes irréductibles sont les polynomes de degré 1. Démonstration. Todo Théorème 3.6. Sur C, le polynôme P admet une factorisation de la forme P (x) = an (x − x1 ) (x − x2 ) · · · (x − xn ) Démonstration. todo Théorème 3.7. Sur R le polynôme P admet une factorisation de la forme ( ) ( ) P (x) = an (x − x1 ) (x − x2 ) · · · (x − xp ) · · · x2 + α1 x + β1 · · · x2 + αm x + βm avec n = 2m + p, et tous les polynômes du second degré irréductibles (c’est à dire de discriminant négatif ∆k = αk2 − 4βk < 0, pour 1 6 k 6 m) Démonstration. todo Théorème 3.8. Un polynôme de degré inférieur ou égal à n qui a au moins n+1 racines distinctes ou confondues est nul. Démonstration. Un tel polynôme se factorise dans C [X] : P = (X − x1 ) (X − x2 ) . . . (X − xn ) (X − xn+1 ) Q où xi(, 1 ≤ i ≤ n) + 1 sont les n + 1 racines et Q ∈ C [X]. Mais alors en développant on a P = X n+1 + . . . Q donc degP = degQ + n + 1 ≤ n donc degQ ≤ −1 donc degQ = −∞, donc Q = P = 0. 3.2 Fractions rationnelles, pratique de la décomposition en éléments simples 37 3.1.7. Division suivant les puissances croissantes. Il s’agit d’une forme de division autre que la classique division euclidienne : si A et B sont deux polynômes, le terme constant de B étant non nul, et si n est un entier strictement positif, alors il existe des polynômes Q et R (déterminés de manière unique) tels que : { A = BQ + X n+1 R deg (Q) 6 n Démonstration. todo On pose cette division un peu comme la classique division euclidienne, mais en écrivant les polynômes suivant les puissances croissantes, et en cherchant à éliminer d’abord les termes constants, puis les termes en X, etc... Exemple. A = 1 + X, B = 1 − X, on trouve à l’ordre 2 : Q = 1 + 2X + 2X 2 et R = 2 Exercice 3.7. dans R [X], trouver tous les polynômes P de degré inférieur ou égal à 4 vérifiant : (1) P (1) = P ′ (1) = 0 et P (0) = 0. (2) P (0) = P ′ (0) = P ” (0) = 0 et P (1) = P ′ (1) = 0. (3) P (1) = P ′ (1) = 0, P (−1) = P ′ (−1) = 0 et P (0) = 1. Exercice 3.8. Factoriser au maximum, dans R puis dans C, (i.e. mettre sous forme de produits de facteurs irréductibles) les polynômes suivants : ( )( ) (1) P = X 2 + X + 1 X 2 + 2X + 1 2 2 (2) P = (X − i) (X + i) 5 4 3 (3) P = X + X − 2X + X 2 + X − 2 3.2. Fractions rationnelles, pratique de la décomposition en éléments simples A Soit F = B une fraction rationnelle sur K [X]. On cherche à décomposer F sous la forme d’une somme de fractions rationnelles les plus simples possibles, en particulier dans la suite, pour pouvoir 4 trouver une primitive de F . Par exemple pour F = (X−1)(X+3) on ne connaît pas explicitement 1 1 de primitive de F tandis que si l’on décompose F en éléments simples : F = X−1 − X+3 . On ∫ X−1 trouve facilement F = log X+3 . 3.2.1. La forme générale de la décomposition. Considérons donc une fraction rationnelle A F =B ou A et B sont dans K [X], avec K = R ou K = C Si deg A > deg B, on peut effectuer la division euclidienne de A par B : A = BQ + R avec R deg R < deg B et on a donc F = Q + B . Le polynôme Q est appelé partie entière de F . On se R ramène donc à calculer la décomposition de B avec deg R < deg B. Un théorème (dont nous ne donnerons pas la forme générale) dit que : si deg A < deg B alors F peut se décomposer en éléments simples : k • Si B est un produit d’éléments de premier espèce comme par exemple B = (X − a) (X − b) ..., (a et b dans K), alors il existe des coefficients a1 , b1 , . . . , bβ ∈ K tels que : F = b1 b2 bk a1 + + ··· + + ... k X − a X − b (X − b)2 (X − b) • Si B est un produit d’éléments de deuxième espèce ( )( )p B = X 2 + aX + a′ X 2 + bX + b′ ... alors la décomposition de F peut s’écrire : F = bp X + b′p a1 X + a′1 b1 X + b′1 b2 X + b′2 + + + · · · + p + ... 2 X 2 + aX + a′ X 2 + bX + b′ (X 2 + bX + b′ ) (X 2 + bX + b′ ) 38 Chapitre 3. Polynômes et Fractions rationnelles • Si B est un produit d’éléments de première et de deuxième espèce, alors les décompositions en éléments simples se combinent. Par exemple, si )2 3( B = (X − a) X 2 + bX + b′ alors le décomposition de F est de la forme : F = a1 a2 a3 b1 X + b′1 b2 X + b′2 + + + 2 + 2 3 2 X − a (X − a) X + bX + b′ (X − a) (X 2 + bX + b′ ) Les étapes à suivre pour calculer la décomposition de F sont résumées ci-dessous, et décrites en détail dans les paragraphes suivants. (1) Extraire, si nécessaire, la partie entière de F pour se ramener au cas où deg A < deg B (division euclidienne de A par B) (2) Factoriser A et B en un produit de termes irréductibles (degré 1 dans C, degré 1 ou 2 dans R). (3) Si A et B ont des racines communes, simplifier la fraction. (4) Écrire la forme générale de la décomposition cherchée avec des constantes à déterminer. (5) Regarder si l’on peut éliminer des inconnues par parité. (F doit être paire ou bien impaire pour pouvoir faire quelque chose) (6) Déterminer les coefficients de la décomposition en utilisant une ou plusieurs des trois méthodes : (a) valeurs particulières ; (b) division euclidienne ; (c) division suivant les puissances croissantes. 3.2.2. Partie entière de F = A B. • Si on a deg A < deg B, alors la partie entiere de F est 0, cette étape est inutile. • Sinon, la division de A par B fournit A = BQ + R avec deg R < deg B, donc F = R , la partie entière de F est Q. Q+ B BQ+R B = 3.2.3. Factoriser B. • Si on décompose F sur C alors B est un produit de termes du premier degré. • Si on décompose F sur R alors B est un produit de termes du premier degré et du second degré. 3.2.4. Simplifier la fraction. pour cela, on cherche si les racines complexes de B sont aussi des racines de A, si c’est le cas, on peut simplifier par X − α ou α est la racine en question. Ou bien on factorise A et on simplifie. 3.2.5. Si F est paire ou impaire. et seulement dans ce cas, on peut déterminer certaines relations entre les coefficients inconnus. Par exemple : F = X 2 +1 X(X 2 −X+1)(X 2 +X+1) est impaire car F (−X) = −F (X). De plus F a une décomposition de la forme a bX + c dX + e F = + 2 + X X − X + 1 X2 + X + 1 ( ) b(−X)+c d(−X)+e a bX+c dX+e a a + (−X) + = − + + Donc (−X) 2 2 2 2 X X −X+1 X +X+1 ce qui donne : − X + −(−X)+1 (−X) +(−X)+1 −bX+c X 2 +X+1 a −bX−c −dX−e + X−dX+e 2 −X+1 = − X + X 2 −X+1 + X 2 +X+1 et en comparant terme à terme les deux membres de cette égalité, on obtient : b = d, c = −e ce qui diminue notablement la quantité de calculs à effectuer. 3.2.6. Les différentes méthodes de calcul des coefficients. 3.2 Fractions rationnelles, pratique de la décomposition en éléments simples 39 Méthode des valeurs particulières. A utiliser dans les cas simples, (que des termes de première espèce), ou bien s’il ne reste que quelques (un ou deux) coefficients à calculer. On donne des valeurs particulières à X (penser à ∞) et on en déduit des égalités entre coefficients inconnus de la décomposition en éléments simples. Quelques exemples : a b = X+3 + X−1 • on multiplie par X + 3 les deux membres de cette égalité puis on fait X = −3. On obtient a = − 41 • on multiplie par X − 1 les deux membres de cette égalité puis on fait X = 1. On obtient b = 14 a b c 1 (2) Pour (X+3)(X−1) 2 = X+3 + X−1 + (X−1)2 • on multiplie par X + 3 les deux membres de cette égalité puis on fait X = −3. On obtient 1 a = 16 2 • on multiplie par (X − 1) les deux membres de cette égalité puis on fait X = 1. On obtient 1 c= 4 • on multiplie par X − 1 les deux membres de cette égalité puis on fait X → +∞. On 1 obtient 0 = a + b donc b = − 16 1 c d aX+b (3) Pour (X 2 +X+1)(X−1)2 = X 2 +X+1 + X−1 + (X−1) 2 (1) 1 (X+3)(X−1) 2 • on multiplie par (X − 1) les deux membres de cette égalité puis on fait X = 1. On obtient d = 13 • on multiplie par X − 1 les deux membres de cette égalité puis on fait X → +∞. On obtient 0 = a + c • les valeurs X = 0 et X = −1 fournissent les relations 1 = b − c + d et 41 = b − a − 2c + d4 finalement X +1 1 1 F = − + 2 3 (X + X + 1) 3 (X − 1) 3 (X − 1)2 Division euclidienne. A utiliser lorsqu’on a une partie polaire de seconde espèce, de multiplicité élevée. Par exemple : F = X 4 −1 (X 2 +X+1)3 a une décomposition de la forme F = a1 X+b1 X 2 +X+1 + a2 X+b2 (X 2 +X+1)2 + a3 X+b3 (X 2 +X+1)3 ( )( ) • La division de X 4 − 1 par X 2 + X + 1 fournit X 4 − 1 = X 2 + X + 1 X 2 − X + X − 1 . • Donc ( 2 )( ) X + X + 1 X2 − X + X − 1 F = 3 (X 2 + X + 1) X2 − X X −1 = 2 + 3 2 2 (X + X + 1) (X + X + 1) ce qui fournit le troisième terme de la décomposition de F : a3 = 1, b3 = ( −1 ) • On recommence : la division de X 2 −X par X 2 +X +1 fournit X 2 −X = X 2 + X + 1 −2X −1 2 −X 1 2X+1 • donc (X X 2 +X+1)2 = X 2 +X+1 − (X 2 +X+1)2 qui sont les termes 1 et 2 de la décomposition de F • Finalement F = 1 X 2 +X+1 − 2X+1 (X 2 +X+1)2 + X−1 (X 2 +X+1)3 Division suivant les puissances croissantes. A utiliser si la décomposition comprend des termes de première espèce de degré élevé. ∑ ai aX+b • Par exemple F = X 10 (XX 2 −X+1) a une décomposition de la forme X 2 −X+1 + 16i610 X i . On effectue la division suivant les puissances croissantes de X par X 2 − X + 1, à l’ordre 9 (c’est à dire, jusqu’à ce que X 10 soit en facteur dans le reste) : ( )( ) X = 1 − X + X 2 X + X 2 − X 4 − X 5 + X 7 + X 8 − X 10 40 Chapitre 3. Polynômes et Fractions rationnelles donc ( ) X + X 2 − X 4 − X 5 + X 7 + X 8 − X 10 F = X 10 (X 2 − X + 1) 2 4 X + X − X − X5 + X7 + X8 1 = − 2 10 X X −X +1 1 1 1 1 1 1 1 =− 2 + 2+ 3− 5− 6+ 8+ 9 X −X +1 X X X X X X • F = (X−1)10X−1 : dans ce cas on fait le changement de variable Y = X − 1, soit (X 2 −3X+3) 1 − X + X2 )( X = Y + 1, donc F = Y 10 (Y 2Y−Y +1) et on est ramené au cas précédent, avec Y au lieu de X. Donc 1 1 1 1 1 1 1 F = − 2 + 2+ 3− 5− 6+ 8+ 9 Y −Y +1 Y Y Y Y Y Y 1 1 1 1 1 1 1 = − 2 + + 3 − 5 − 6 + 8 + 9 X − 3X + 3 (X − 1)2 (X − 1) (X − 1) (X − 1) (X − 1) (X − 1) Exercice 3.9. Décomposer dans R [X] les fractions rationnelles suivantes : (1) Par la méthode des valeurs particulières, en utilisant les éventuelles propriétés de parité : ( ) 3 X X6 − 1 (X − 1) X +2 X2 − 2 ; ; ; 3 X2 − 4 X 2 (X 2 + X + 1) 4X 2 (2X 2 + 3) (X 2 − 1) (2) Par la méthode dela division euclidienne : X4 − 1 (X 2 + X + 1) ; 3 X5 + 2 X 4 + 4X 2 + 4 (3) Par division suivant les puissances croissantes : X3 + 4 (X 2 + 2) X3 ; 1 5 (X − 1) (X 2 − X + 1) ; 1 (X − 1) 10 (X 2 − 2X + 4) Exercice 3.10. Décomposer dans C [X] les fractions rationnelles : X 2 + 2X + 1 X2 + 1 ; (X 2 X2 − 1 + 2iX + 1) (X − 1) ; 1 2 (X 2 + X + 1) − X 2 ; X2 + 1 X (X 2 − 1) 2 4.1 Définitions et notations 41 CHAPITRE 4 Matrices 4.1. Définitions et notations On désigne par K un des deux ensembles R ou C et par n et p deux entiers strictement positifs. 4.1.1. Matrices. Définition. On appelle matrice à coefficients dans K à n lignes et p colonnes, toute application de [1, n] × [1, p] à valeurs dans K. On parle aussi de matrice (n, p) ou matrice n × p à coefficients dans K. Les entiers n et p sont les dimensions de la matrice. On note Kn,p ou Mn,p (K) l’ensemble des matrices n × p à coefficients dans K. Cette définition n’est que la formalisation mathématique de la notion de tableau à n lignes et p colonnes, à coefficients dans K. Comme pour les suites, on utilisera un double indice plutôt que la notation fonctionnelle pour représenter les éléments de la matrice : si A est une matrice n × p, alors l’élément de la i-ème ligne j-ème colonne est noté ai,j et on notera A ou bien A a1,1 a2,1 .. . = ai,1 . .. an,1 = (ai,j ) 1 6 i 6 n 16j6p a1,2 a2,2 .. . ... ... a1,j a2,j .. . ... ... a1,p a2,p .. . ai,2 .. . ... ai,j .. . ... ai,p .. . an,2 ... an,j ... an,p • On appelle – i-ème ligne de A le vecteur (ai,1 , ai,2 , . . . , ai,p ) de Kp , – j-ème colonne de A le vecteur (a1,j , a2,j , . . . , an,j ) de Kn , que l’on notera le plus souvent a1,j a2,j sous forme de colonne . .. an,j • si n = 1 on dit que A est une matrice ligne, si p = 1 on dit que A est une matrice colonne. • La transposée de A, notée At ou bien t A, est une matrice (p, n) dont l’élément générique bi,j est aj,i . Elle est obtenue à partir de A en permutant les lignes et colonnes. On a bien sûr t – (At ) = A Pierre Puiseux 42 Chapitre 4. Matrices Fig. 1. Différentes régions d’une matrice 4.1.2. Matrices carrées. • si n = p on dit que A est une matrice carrée. Lorsque A est une matrice carrée, on dit qu’elle est : • triangulaire inférieure si ∀ (i, j) , i < j ⇒ ai,j = 0 ; elle est de la forme : a1,1 0 ... 0 .. .. .. .. . . . . A = . . .. .. 0 an,1 . . . . . . an,n • triangulaire supérieure si ∀ (i, j) , i > j ⇒ ai,j = 0 ; elle est de la forme : a1,1 . . . . . . a1,n .. .. 0 . . A = . .. . . .. .. .. . 0 ... 0 an,n • diagonale si ∀ (i, j) , i ̸= j ⇒ ai,j = 0 ; elle est de la forme λ1 0 . . . 0 .. 0 ... ... . A = . . . .. .. 0 .. 0 ... 0 λn et on la note Diag (λ1 , . . . , λn ). • Pour k ∈ [−n, n], la k-ème diagonale de A est le vecteur (éventuellement vide) de coordonnées (ai,i+k )max(1−k,1)6i6min(n−k,p) • • • • A est symétrique si et seulement si A est carrée et si A = At , A est antisymétrique si et seulement si A est carrée et si At = −A La matrice In = Diag (1, . . . , 1) ∈ Kn,n est appelée matrice identité La matrice 0 ∈ Kn,n qui ne contient que des zéros est appelée matrice nulle On pourra démontrer à titre d’exercice les propriétés suivantes : • Une matrice A est diagonale si et seulement si elle est triangulaire supérieure et triangulaire supérieure. • A est triangulaire supérieure si et seulement si At est triangulaire inférieure. 4.2 Opérations sur les matrices 43 • La k-ème diagonale de A est également l’ensemble des coefficients {ai,j , 1 6 i 6 n, 1 6 j 6 p, j − i = k} 4.2. Opérations sur les matrices 4.2.1. Addition de deux matrices. Définition. Soient A = (ai,j ) 1 6 i 6 n ∈ Kn,p et B = (bi,j ) 1 6 i 6 n ∈ Kn,p deux matrices de 16j6p mêmes dimensions. On définit la somme C = A + B par C 16j6p = (ci,j ) 1 6 i 6 n 16j6p ( Exemple. ci,j 1 0 2 5 = ai,j + bi,j ) ( ) ( 4 1 0 −2 2 2 + = 1 0 −3 1 0 2 2 2 ) 4.2.2. Produit de deux matrices. Définition. Etant données deux matrices A = (ai,k )1 6 i 6 m ∈ Km,n 16k6n et B = (bk,j ) 1 6 k 6 n ∈ Kn,p 16j6p le produit A × B est la matrice C = (ci,j ) 1 6 i 6 m ∈ Km,p avec ci,j 16j6p ∑ = ai,k bk,j 16k6n Remarque. (1) Comme on le fait pour le produit de deux réels, en l’absence d’ambiguïté, on notera AB au lieu de A × B. (2) Pour pouvoir effectuer le produit de deux matrices A et B, il faut que les dimensions soient compatibles. Un moyen efficace pour mémoriser la règle : le produit de deux matrices (m, n) × (n, p) est une matrice (m, p), le produit “mange” la dimension intermédiaire, cette dimension doit être comestible ! (3) Même si les deux produits sont définis, en général A × B ̸= B × A (4) Si A = (ai,k )1 6 i 6 m ∈ Rm,n et X = (xi,1 )1≤i≤n ∈ Rn,1 , alors en notant xi au lieu de xi,1 la i16k6n ème coordonnée de X, le produit A×X est la matrice A×X = a11 x1 + a12 x2 + · · · + a1n xn a21 x1 + a22 x2 + · · · + a2n xn .. . am1 x1 + am2 x2 + · · · + amn xn de Rm,1 que l’on peut confondre avec le vecteur de Rm de même coordonnées. 44 Chapitre 4. Matrices (5) Pour des raison typographiques de commodité, les vecteurs colonne,c’est x1 x2 T de Rn,1 , seront souvent notés X = (x1 , x2 , . . . , xn ) plutôt que X = . .. àdire les éléments . xn (6) Pratiquement, pour calculer le produit de deux matrices, on dispose les deux matrices de la manière suivantes : Exemple. ( ) 1 2 1 4 5 1 2 3 (1) 1 3 × = 1 5 6 0 1 1 2 5 7 2 1 1 2 3 1 ( ) 0 0 (2) 0 × 1 2 3 = 0 −1 −2 −3 −1 1 ( ) (3) 1 2 3 × 0 = (−2) à comparer avec le résultat précédent −1 ( ) ( ) 1 2 1 3 (4) Vérifier que AB ̸= BA : A = B= 3 4 2 4 (5) Soit Dn (pour être complet il faudrait parler de Dn (K)) l’ensemble des matrices diagonales (à coefficients dans K) et soient A ∈ Dn et B ∈ Dn . Montrer ∑ que AB ∈ Dn 1 et que AB = BA2 n,n Posons AB = C ∈ K . Pour 1 6 i, j 6 n, on a ci,j = 16k6n ai,k bk,j . Or les seuls termes ai,k [resp.bk,j ] non nuls sont ceux pour lesquels i = k [resp.k = j]. Par conséquent, si i ̸= j alors au moins un des deux termes ai,k ou bk,j est nul donc ci,j = 0. Si i = j, il ne subsiste dans la somme que le terme ci,i = ai,i bi,i . D’où le résultat. (6) Soit Tn (K) (Tn en abrégé) l’ensemble des matrices triangulaires supérieures (à coefficients dans K) et soient A ∈ Tn et B ∈ Tn . (a) Montrer que AB ∈ Tn . (Difficile) (b) Donner un exemple montrant que la multiplication n’est pas commutative dans Tn . (7) Le produit de deux matrices symétriques est-il symétrique ? t Non car (AB) = B t At = BA ̸= AB 1On dit que la multiplication est une opération interne sur D n 2On dit que la multiplication des matrices est une opération commutative sur D n 4.3 Propriétés 45 ( ) 1 2 (8) Soit A = trouver une matrice B ∈ R2,2 , non nulle, telle que AB = 0. Calculer BA. 0 0 ( ) ) ) ( ( 2 −2 0 0 2 4 • La matrice B = convient car AB = et BA = −1 1 0 0 −1 −2 Théorème 4.1. Si u et v sont deux applications linéaires u : Rn → Rm et v : Rp → Rn de matrices A ∈ Rm,n et B ∈ Rn,p dans les bases canoniques, alors l’application linéaire u ◦ v : Rp → Rm a pour matrice A × B dans la base canonique de Rm,p . Démonstration. X désignant les coordonnées du vecteur x dans la base canonique de Rp , on a u ◦ v (x) = u (v (x)) = u (B × X) = A × (B × X) et par associativité de ×, on obtient le résultat. 4.2.3. Produit d’une matrice par un scalaire. Définition. Soit λ ∈ K et A = (ai,j ) 1 6 i 6 m une matrice de Km,n . Le produit du scalaire λ 16i6n par la matrice A est la matrice λ.A = (λaij ) 1 6 i 6 m 16j6n Remarque. Comme pour le produit de deux matrices, on notera souvent λA au lieu de λ.A 1 1 1 2 2 Exemple. 12 . 2 1 = 1 12 1 1 0 0 2 4.3. Propriétés A, B et C désignent trois matrices quelconques dont les dimensions sont compatibles avec les égalités écrites. λ et µ sont deux scalaires de K 4.3.1. Distributivité. (1) (2) (3) (4) A × (B + C) = A × B + A × C, A ∈ Rm,n , B et C ∈ Rn,p (A + B) × C = A × C + B × C, A et B ∈ Rm,n , C ∈ Rn,p λ. (A + B) = λ.A + λ.B, A et B ∈ Rm,n (λ + µ) .A = λ.A + µ.A, A ∈ Rm,n 4.3.2. Associativité. (1) A + (B + C) = (A + B) + C, A, B et C ∈ Rm,n (2) A × (B × C) = (A × B) × C, A ∈ Rm,n , B ∈ Rn,p , C ∈ Rp,q (3) A × (λ.B) = (λ.A) × B = λ. (A × B) , A ∈ Rm,n , B ∈ Rn,p 4.3.3. Commutativité. (1) A + B = B + A, A et B ∈ Rm,n (2) A × B ̸= B × A, A ∈ Rm,n , B ∈ Rn,p 4.3.4. Elément neutre pour l’addition 0m,n . La matrice nulle 0m,n ∈ Km,n est la matrice ne contenant que des zéros. Elle est élément neutre pour l’addition des matrices dans Km,n , c’est à dire ∀A ∈ Km,n , A + 0m,n = 0m,n + A = A 46 Chapitre 4. Matrices 4.3.5. Elément neutre pour la multiplication : Im,n . (1) La matrice identité, In ∈ Kn,n est élément neutre (à droite et à gauche) pour la multiplication des matrices dans Kn,n , c’est à dire ∀A ∈ Kn,n , A × In = In × A = A (2) Pour les matrices de K : In est élément neutre à droite et Im élément neutre à gauche pour la multiplication. C’est à dire : ∀A ∈ Km,n m,n A = A × In = Im × A 4.3.6. Divers. (1) Le produit de deux matrices diagonales D = Diag (d1 , d2 , . . . , dn ) et D′ = Diag (d′1 , d′2 , . . . , d′n ) est la matrice diagonale D × D′ = Diag (d1 d′1 , d2 d′2 , . . . , dn d′n ) t (2) Transposition (AB) = B t At , A ∈ Rm,n , B ∈ Rn,p 4.3.7. L’espace vectoriel (Km,n , +, .). Certaines propriétés de l’ensemble des matrices Km,n peuvent être résumées en Théorème 4.2. (Km,n , +, .) est un espace vectoriel, c’est à dire : • (Km,n , +) est un groupe commutatif ; • le produit par un scalaire vérifie ∀λ, µ ∈ K et ∀A, B ∈ Km,n : – λ. (µ.A) = (λµ) .A – λ. (A + B) = λ.A + λ.B 4.3.8. L’anneau des matrices carrées d’ordre n. Pour les matrices carrées d’ordre n, les propriétés précédentes peuvent se résumer en : Théorème 4.3. (Kn,n , +, ×) est un anneau (unitaire), c’est à dire : • (Kn,n , +) est un groupe commutatif d’élément neutre 0n • La loi × est interne, associative, et distributive par rapport à +, et elle admet un élément neutre In . 4.3.9. Matrice d’une application linéaire. Soit u : Rn → c’est à dire une application de la forme : x1 a11 x1 + a12 x2 + · · · + a1n xn x1 a21 x1 + a22 x2 + · · · + a2n xn u . = .. .. . xn Rm une application linéaire ∈ Rm am1 x1 + am2 x2 + · · · + amn xn T On peut l’écrire sous forme condensée u (x) = A.x avec A = (ai,j ) 1 ≤ i ≤ m et x = (x1 , x2 , . . . xn ) . 1≤j≤n La matrice A est appelée la matrice de l’application linéaire u (sous entendu dans les bases canoniques de Rn et Rm ). Le « point » dans cette écriture correspond au produit matriciel. On voit que les vecteurs colonnes de la matrice A sont les coordonnées des images des vecteurs de la base canonique de Rn : pour ei = (δij )1≤j≤n , i-ème vecteur de la base canonique de Rn , on a T u (ei ) = (a1i , a2i , . . . , ami ) qui est bien le i-ème vecteur colonne de A. 4.4 Inverse d’une matrice 47 4.3.10. Matrice d’un système linéaire. Un système d’équations linéaires (ou plus simplement système linéaire) à n inconnues x1 , x2 , . . . , xn et m équations est une système d’équations de la forme : a11 x1 + a12 x2 + · · · + a1n xn a21 x1 + a22 x2 + · · · + a2n xn .. . am1 x1 + am2 x2 + · · · + amn xn (17) = = b1 b2 .. . = bm n m On peut écrire ce système F (X)= B où F est une application linéaire de R dans R , de matrice a11 a12 . . . a1n a21 a22 . . . a2n T A= . .. .. ∈ Rm,n , où X est le vecteur colonne X = (x1 , x2, . . . , xn ) ∈ .. . . am1 am2 . . . amn T Rn et B est le vecteur colonne B = (b1 , . . . , bm ) ∈ Rm . Le système linéaire (17) s’écrit donc matriciellement : A.X = B dans cette écriture, le point correspond à la multiplication des matrices A et X. 4.4. Inverse d’une matrice Définition 4.1. Une matrice carrée A ∈ Kn,n est dite inversible s’il existe une matrice B ∈ Kn,n vérifiant AB = BA = In Si elle existe l’inverse de A ∈ Rn,n est unique, elle est notée A−1 , et appartient elle aussi à l’ensemble Rn,n . Démonstration. Supposons que A admette deux inverses B et B ′ alors AB = AB ′ = In En posant C = B − B ′ , et en utilisant les propriétés de distributivité, on obtient AC = 0n . On multiplie cette équation à gauche par B et il vient B (AC) = (BA) C = 0n et comme (BA) C = In C = C on en déduit C = 0n c’est à dire B = B ′ , ce qui prouve l’unicité. Exemple. (1) La matrice In est( inversible, ) elle est sa propre inverse car ( In In =)In 1 2 1 −2 (2) La matrice A = admet pour inverse A−1 = 0 1 0 1 T T Proposition 4.1. Soient A ∈ Rn,n une matrice, x = (x1 , x2 , . . . xn ) ∈ Rn,1 et b = (b1 , b2 , . . . bn ) ∈ R1,n deux vecteurs. On considère le système linéaire de n équations à n inconnues A.x = b Si A est inversible, alors ce système admet la solution unique x = A−1 .b Démonstration. Si A.x = b et A est inversible, alors A−1 .A.x = A−1 b donc In .x = A−1 .b donc x = A−1 .b. Réciproquement si x = A−1 .b alors Ax = A.A−1 .b = In .b = b. 48 Chapitre 4. Matrices Proposition. Une matrice A ∈ Kn,n est inversible si et seulement si ∀x ∈ Kn , Ax = 0 ⇒ x=0 Une matrice diagonale D = Diag (d1 , d2 , . . . , dn ) est inversible si et seulement si( ses coefficients ) diagonaux sont tous non nuls, c’est à dire d1 d2 . . . dn ̸= 0. Dans ce cas D−1 = Diag d11 , d12 , . . . , d1n y1 Remarque. Soit A ∈ Rn,n une matrice inversible. On se donne Y = ... ∈ Rn,1 quelconque. yn Considérons l’équation AX = Y dont l’inconnue est la matrice X ∈ Rn,1 . Comme A est inversible, peut) écrire A−1 (AX) = A−1 Y c’est à dire, en utilisant l’associativité de la multiplication : (on −1 A A X = A−1 Y soit finalement Démonstration. admis. Y = AX X = A−1 Y ⇐⇒ Donc si l’on sait calculer une solution X de l’équation AX = Y , cette solution dépend de Y , et cette dépendance fournit très précisément la matrice A−1 comme le montre l’équivalence ci dessus. ) ( 1 2 Exemple. Soit A = . 0 1 (1) A est inversible car { =⇒ AX = 0 =⇒ (2) Calculons son inverse : x1 + 2x2 = 0 x2 = 0 ( ) 0 X= 0 { AX = Y ⇐⇒ { ⇐⇒ ⇐⇒ ( on en déduit que A−1 = 1 0 −2 1 ) x1 + 2x2 x2 = y1 = y2 y1 − 2y2 y2 ( ) 1 −2 X= Y 0 1 x1 x2 = = (3) On vérifie (facultatif) que l’on a bien trouvé l’inverse : ( ) ( ) 1 2 1 0 = 0 1 0 1 ( 1 2 0 1 ) ( ) ( ) 1 −2 1 −2 × = × 0 1 0 1 Pour calculer l’inverse d’une matrice ∈ Rn,n , on résoud le système d’équa A y1 .. tions linéaires AX = Y où Y = . ∈ Rn,1 est quelconque. La solution yn x1 est X = ... ∈ Rn,1 dépend linéairement des yi , une dépendance de la xn forme matricielle X = BY . On obtient alors A−1 = B Méthode du pivot de Gauss pour le calcul de l’inverse d’une matrice : on écrit côte à côte la matrice carrée à inverser et la matrice identité. 4.4 Inverse d’une matrice 49 Par des combinaisons linéaires de lignes, on introduit des 0 dans la partie triangulaire inférieure de la matrice A. On effectue les mêmes opérations sur la matrice identité. On procède colonne par colonne. Par exemple : ( ) ( ) 2 1 1 0 , 1 2 0 1 on normalise les lignes l1 des deux matrices en les divisant par 2, de sorte à avoir 1 sur la diagonale principale de A : ) ( ) ( 1 0 1 12 2 , 0 1 1 2 on remplace la ligne l2 par l2 −l1 dans les deux matrices, de sorte à mettre un zéro dans la première colonne de A : ( ) ( 1 ) 1 12 0 2 , 0 32 − 12 1 On continue à introduire des zéros sur toute la première colonne, puis sur la seconde colonne, dans la partie triangulaire inférieure de A. Pour la colonne j, on utilise la ligne j, après l’avoir normalisée, afin que le terme diagonal ajj soit égal à 1. On normalise la ligne l2 de A en la multipliant par 13 = 23 de sorte qu’apparaisse un 1 sur la 2 diagonale principale de A : ) ( ) ( 1 0 1 21 2 , 0 1 − 13 23 A finir 1 2 1 −1 0 1 2 3 Soient les matrices A = B = 5 C = 2 3 et D = 0 −1 0 2 3 0 4 −4 (a) Calculer, s’ils ont un sens les produits suivant : A.B ; B.A ; A.C ; C.A ; A.D ; D.A ; B.C ; B.D ; D.B ; C.D ; D.C t t (b) calculer(A.C) ; (C.A) ; C t .At ; 1 0 5 0 3 −1 3 −2 et B = 1 4 2 . Soient A = 2 −4 −1 7 0 6 0 (a) Calculer A2 , B 2 , 2AB et enfin A2 + 2AB + B 2 2 (b) Calculer A + B puis (A + B) . Remarque ? 1 0 5 x 3 −2 et X = y . Calculer X t AX. Soient A = 2 −4 −1 2 z ( )( ) 1 1 1 ) 1 1 ) ( ( x1 x x x x x 1 1 1 Calculer S2 = , puis S3 = 1 2 1 2 3 1 1 x2 1 1 1 2 En déduire une écriture matricielle de la somme Sn = (x1 + x2 + · · · + xn ) . 2 4,4 Ecrire in extenso la matrice A ∈ R dont le terme général est Ai,j = (j + i + 1) n,n Soit D ∈ R une matrice diagonale. (a) Montrer que D est inversible si et seulement si ∀i, 1 ≤ i ≤ n, dii ̸= 0. (b) Calculer l’inverse de D. 1 0 1 Calculer l’inverse de la matrice A = 0 3 1 −1 2 0 √ ) ( 3 3 √ Soit M = − 3 −1 (a) Calculer M 2 et montrer qu’il est de la forme λM , déterminer λ. ( (1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) ) 6 3 2 1 0 −5 . 7 −2 x1 x2 . x3 50 Chapitre 4. Matrices (b) Calculer M 3 et M 4 en fonction de M et λ, puis en déduire la valeur de M n en fonction de M, ( λ et n. ) 0 1 (9) Soit A = −1 0 (a) Calculer A2 , A3 et A4 ; 4p 4p+1 (b) pour , A4p+2 , A4p+3 tout p ∈ N,calculerA ,A . 2 4 3 3 −10 −1 8 2 . Calculer A.B et en déduire que B est (10) Soient 0 1 1 = et B = −2 2 2 −1 2 −4 −2 inversible, etcalculer B −1 . 1 1 0 (11) Soient A = 0 1 1 . Calculer B = A − I3 et B n pour n ∈ N. 0 0 1 √ (12) (13) (14) (15) 0 1 − 23 f: R → R3,3 1 2 0 Soit A = −1 et l’application 2 √ x 7→ I3 + xA + x2 A2 3 1 0 − 2 2 (a) Calculer A3 . (b) Comparer f (x + y) et f (x) .f (y) (c) Calculer f (x) f (−x) et f (−x) f (x), en déduire que f (x) est une matrice inversible, calculer son ( inverse. )−1 (d) Calculer I3 + 4A + 8A2 Montrer que toute matrice carrée est somme d’une matrice symétrique et d’une matrice antisymétrique. ′ a a On considère deux matrices U = b et V = b′ vérifiant V t U = 0. c c′ 2 (a) calculer U t V et U V t . Montrer que (U V t ) = 0. (b) On pose A = I3 + U V t . Calculer A2 et A3 en fonction de I3 , U et V t . En déduire An pour n ∈ N. −1 (c) Calculer le produit (I3 + U V t ) (I3 − U V t ).Montrer que A est inversible et calculer A . −1 1 1 −2 0 0 0 1 1 −1 −2 1 0 0 1 0 Soient les matrices A = et J = 1 −2 −1 1 0 1 0 0 −2 1 1 −1 1 0 0 0 (a) Montrer que A et J commutent, calculer J 2 et en déduire J −1 . (b) Soit B = A + 2I4 + 3J. Calculer B 2 et trouver une relation simple entre B et B 2 . (c) En déduire une relation entre A2 , AJ et I4 . Donner alors la valeur de A−1 . (d) Résoudre le système linéaire : −x +y +z −2t = −5 x −y −2z +t = 0 x −2y −z +t = 10 −2x +y +z −t = 10 51 Bibliographie [wikipedia] http://fr.wikipedia.org/wiki/Nombre_complexe 17 Pierre Puiseux