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Jeudi 13 octobre 2016
AMBASSADE DE FRANCE EN BULGARIE
LA PRESSE BULGARE 4259
Le débat
Quatre politologues échangent leurs
analyses sur le poids du facteur sécuritaire
et migratoire dans la campagne
présidentielle
L’hypertrophie
La décentralisation bulgare est en panne
L’analyse
Turkish Stream, premier succès du projet
« Privons l’Ukraine du transit du gaz »,
mais pari à haut risque pour Gazprom
Cette revue de presse, qui ne prétend pas à
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publiés dans les médias bulgares. Elle ne reflète en
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de France en Bulgarie
Le débat
Quatre politologues échangent leurs
analyses sur le poids du facteur sécuritaire
et migratoire dans la campagne
présidentielle
Moins d’un mois avant l’élection
présidentielle, la Bulgarie entre en
campagne électorale sous le signe de la
crise des migrants. Et bien que la menace
ne soit pas tangible au quotidien, les
Bulgares, ne serait-ce qu’en regardant la
télévision et en écoutant les messages
politiques, restent convaincus de son
existence. « Les réfugiés et le terrorisme
sont la source principale de tension au sein
de la société bulgare et le contexte
international est plus à même de rendre les
Bulgares anxieux que les problèmes de
politique intérieure », avait conclu les
sociologues d’Alfa Research en septembre.
« Il est fort possible que pendant la
campagne électorale, ce nouvel agenda
politique repousse en arrière les thèmes de
la corruption aux hauts échelons du
pouvoir, l’absence de réformes »,
concluent de manière unanime Boriana
Dimitrova, d’Alfa Reserach, Parvan
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Simeonov de Gallup International, Boris
Popivanov de l’institut Ivan Hadjiïski et
Dimitar Betchev, analyste et professeur
d’université, interrogés par la journaliste
Polina Paounova de Mediapool.
D’une part, c’est plutôt normal, car les
migrants constituent une nouvelle donne
pour la Bulgarie, alors que les autres sujets
sont connus depuis des décennies (Parvan
Simenov). Cependant, il serait dommage
que ces sujets soient répartis entre les
différentes formations politiques en
fonction de leurs projets électoraux
respectifs. Des questions aussi sensibles
que les réfugiés, les migrants et la sécurité
ne doivent pas devenir l’otage de positions
populistes et nationalistes. Il n’y a pas de
raison pour que les formations de droite et
du centre-droit ne puissent pas formuler de
politiques intéressantes, sensées et
appropriées sur la base du droit
international et des intérêts nationaux. Et il
n’est pas normal que la sécurité soit
l’apanage des généraux, de la gauche, des
nationalistes et partiellement du GERB, et
que la lutte contre la corruption et la
réforme judiciaire soit celui de la droite
(Boriana Dimitrova).
En effet, la classe politique se limite à
brandir de manière superficielle le thème
de la crise des réfugiés pour insinuer la
peur et démontre son incapacité de gérer
problème en profondeur (Boris
Popivanov). Ces menaces imaginaires
détournent l’attention des vrais problèmes.
Le silence au sujet des milliards emportés
dans le naufrage de la KTB est sidérant
dans un contexte l’on brandit les
subsides que Jean-Claude Juncker a eu la
bienveillance d’octroyer pour sauver la
Bulgarie et l’UE d’une invasion
imminente. Les abus à propos de la KTB et
des millions engloutis de la centrale
nucléaire de Belene « mettent la trouille » à
Borissov à l’approche des élections
(Dimitar Betchev).
Mais ces nouvelles priorités de « situation
de guerre » ne risquent-elles pas devenir le
cœur de la campagne électorale ? Certes,
une présentation apocalyptique de la crise
des réfugiés ne peut qu’alimenter les idées
nationalistes et populistes. En même
temps, c’est une réalité qui perdurera
pendant des années et influencera les
problèmes de politique intérieure. Tenter
donc de l’occulter en l’abandonnant aux
nationalistes serait funeste (Boriana
Dimitrova). En dehors des nationalistes,
ces « nouvelles priorités » font surtout
l’affaire, en l’occurrence, des gouvernants
actuels et de Boïko Borissov (Parvan
Simeonov). Le premier ministre a consenti
beaucoup d’efforts pour se présenter
comme le seul garant de la sécurité de la
Bulgarie. Brandir des menaces à ce sujet
lui permet de se mettre en avant comme
l’incontournable sauveur. Cependant, les
solutions qu’il apporte ne représentent que
des pas incohérents, des compromis, de la
communication, des promesses, qui
trahissent surtout son ambition « de plaire
à tous les chefs » (Boris Popivanov). Il ne
serait pas étonnant que le thème du
contrôle de la frontière et des réfugiés
gagne en vitesse pendant la campagne
électorale afin de permettre au GERB
d’attirer vers lui une partie de l’électorat du
Front patriotique (Dimitar Betchev).
Relevant de la politique étrangère, cette
problématique n’est pas comprise par le
Bulgare ordinaire, obnubilé par les
publications médiatiques (Parvan
Simeonov et Poriana Dimitrova). Les
études démontrent que les peurs des gens
se renforcent proportionnellement à
l’intensité des publications. Cependant, la
bonne nouvelle, c’est que les Bulgares,
bien qu’inquiets, ne se radicalisent pas,
leur instinct se substituant à l’absence
d’informations (Boriana Dimitrova) à la
désinformation. Dans les conditions
médiatiques qui prévalent, il est en tout état
de cause impossible que les Bulgares aient
une opinion informée, assènent Boris
Popivanov et Dimitar Betchev.
Dans un tel contexte, exagérer des menaces
dans les messages que feraient passer les
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candidats à la présidentielle pourrait avoir
diverses conséquences. Cela risque de
détourner les électeurs de qui les menacera
trop et au profit du candidat qui s’efforcera
de les rassurer (Parvan Siméonov). Mais il
reste que l’art de semer la peur est très
efficace : les gens sont prêts à se contenter
de la pauvreté et supporter la violation de
l’Etat de droit, la stagnation, à renoncer à
tous les luxes de la vie au nom de la
sauvegarde de celle-ci. (Boris Popivanov).
Il y a tout de même le risque que
l’impuissance des hommes et des femmes
politiques à faire face aux menaces donne
lieu à la baisse du seuil de tolérance de la
société bulgare, à la création de formations
paramilitaires et à des règlements de
comptes (Boriana Dimitrova et Dimitar
Betchev). (Mediapool.bg)
L’hypertrophie
La décentralisation bulgare est en panne
Une nouvelle stratégie de décentralisation
pour la période 2016-2025 a été adoptée il
y un mois par le Conseil des ministres. Ce
document qui a être corrigé après son
adoption pour tenir compte des
observations de certains ministres livre un
triste bilan de l’état de la décentralisation
en Bulgarie.
« Le processus de décentralisation suit un
rythme lent et contradictoire et parfois
stagne. Par conséquent, en 2015, les
caractéristiques de la décentralisation en
Bulgarie sont loin de la moyenne
européenne des indicateurs. Les résultats
de la mise en œuvre de la stratégie de
décentralisation pour la période 2006-2015
sont insatisfaisants dans la mesure seuls
39% des mesures sont mis en œuvre.
Aucun des objectifs stratégiques n’a été
entièrement atteint. Les actions n’ont pas
contribué à atteindre l’objectif principal
consistant à décentraliser les services, les
pouvoirs et les ressources », souligne le
document. Celui-ci précise que pendant la
période 2010-2013, sous le premier
gouvernement Borissov, une tendance à la
recentralisation a été même observée.
Augmenter les recettes des communes par
le transfert d’une partie de l’impôt sur les
revenus ou par les taxes foncières,
renforcer les pouvoirs d’investissement des
communes, déléguer des pouvoirs de
gestion des services délégués, renforcer la
capacité d’élaboration de politiques locales
: autant d’objectifs qui n’ont pas été
atteints jusqu’à présent.
La décentralisation financière est
pratiquement inexistante. Les décisions
prises par les communes ne concernent
qu’une infime partie des recettes et des
dépenses dans les budgets locaux. Les
sources propres de recettes sont
extrêmement limitées. Les collectivités
territoriales ne sont pas compétentes pour
décider des privilèges fiscaux et les droits
d’usage.
Les tout premiers pouvoirs en matière
d’impôts des communes, consistant à «
déterminer les impôts locaux dans les
limites définies par la loi », datent de 2007,
à la suite d’une révision de la Constitution
qui met fin à une période de 60 ans de
centralisation absolue dans le domaine des
finances publiques. Les politiques de
dépenses locales sont fortement
dépendantes de la politique fiscale de
l’Etat, de celle de l’Union européenne et en
dernier lieu des décisions des conseils
municipaux, souligne dans un rapport Emil
Savov, directeur adjoint de l’Association
nationales des communes de Bulgarie.
Selon les données consignées dans ce
rapport, les recettes fiscales propres des
communes constituent 40% de leurs
recettes, 16% des recettes générales et 4%
de tous les impôts en Bulgarie. Selon une
étude réalisée par l’Association des
communes, pas moins de 111 actes gaux
et réglementaires délèguent des obligations
aux communes sans leur assurer les
financements correspondants. Cela
constitue une dépense supplémentaire
annuelle relevant des recettes propres des
communes qui s’élèvent à environ 230
millions de leva. L’Etat leur verse 100
millions de moins au titre du financement
des services délégués.
4/5
Et le programme adopté il y a un mois pour
la mise en œuvre de la nouvelle stratégie
de décentralisation est tout sauf ambitieux :
des objectifs clés ont être supprimés
avant l’adoption du nouveau document,
concernant notamment le transfert d’une
partie de l’impôt sur le revenu et l’adoption
d’une nouvelle loi sur les impôts et les
taxes locaux. Le nouveau programme se
limite donc à la mise en place d’une
conception locale de vidéosurveillance, le
changement du statut des activités
déléguées en activités locales, la cession
par l’Etat de biens immobiliers aux
communes : autant d’objectifs difficiles à
mettre en œuvre dans un contexte marqué
par l’échec du programme précédent.
Les hommes politiques impliqués dans le
processus de décentralisation ne sont pas
convaincus de la nécessité de sa mise en
place. Ce processus est considéré plutôt
comme un problème politique que
technique et n’intéresse pas l’opinion
publique, concluent les auteurs du
document. (Mediapool)
L’analyse
Turkish Stream, premier succès du projet
« Privons l’Ukraine du transit du gaz »,
mais pari à haut risque pour Gazprom
Andreï Gourkov, commentateur
économique de Deutsche Welle, examine
de près le dernier rapprochement entre
Moscou et Ankara dans le domaine de
l’énergie pour apporter une explication
politique, en l’absence d’arguments
économiques, au projet Turkish Stream.
L’accord intergouvernemental russo-turc
signé le 10 octobre dernier à Istanbul et
portant sur la construction d’un gazoduc,
Turkish Stream, est une victoire politique
importante pour le Kremlin, qui deviendra
toutefois un fardeau financier sérieux pour
Gazprom. Si cette dernière était une
entreprise orientée exclusivement vers le
profit, elle n’aurait pour rien au monde
investi dans un tel projet. Mais ici les
considérations économiques ne comptent
pas. Il s’agit de pure géopolitique.
Pour le Kremlin, l’objectif est clair : arrêter
complètement à la fin de 2019,
lorsqu’expirera l’accord de dix ans signé
avec Kiev, le transit de gaz russe à travers
le territoire ukrainien. Un objectif suprême
dans lequel s’inscrivent toutes
les initiatives de gazoducs lancées par
Moscou en direction de l’Europe ces dix
dernières années. Au début, c’était South
Stream : quatre tuyaux d’une capacité
totale de 63 milliards de m3 par an.
Lorsque ce projet s’est trouvé bloqué en
raison de violations du droit européen,
Vladimir Poutine a gocié avec Recep
Tayyip Erdoğan, en décembre 2014, la
construction d’un gazoduc contournant
l’Ukraine via la Turquie. Ainsi est
Turkish Stream.
Mais M. Erdoğan a vite perdu de l’intérêt
et, de quatre tuyaux, on a commencé à
parler d’un ou deux. Il est vite apparu qu’il
serait impossible de transporter à travers la
Turquie tous les volumes actuellement
transités via l’Ukraine. Après quoi, en juin
2015, en partenariat avec des entreprises
occidentales, Moscou a relancé, lors du
forum économique international de Saint-
Petersbourg, le projet North Stream-2,
d’une capacité de 55 milliards de m3,
auquel l’UE avait précédemment renoncé,
le jugeant inutile. En conséquence, au lieu
d’un seul projet coûteux, Gazprom devra
maintenant en réaliser deux : l’un en mer
Noire, l’autre en mer Baltique. En outre,
concernant Turkish Stream, Gazprom sera
amenée à financer toute seule le projet qui
est estimé à non moins de 10 milliards
d’euros.
Ce ne sera pas tout. A l’avenir, il y aura un
troisième projet de transport de gaz russe à
réaliser. Si Turkish Stream est mis en
œuvre conformément à l’accord signé le 10
octobre dernier, il y aura un tuyau pour les
consommateurs turcs et un autre pour les
consommateurs européens qui amènera le
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gaz russe à la frontière grecque. Pour
l’heure, il n’existe pas d’infrastructure
appropriée susceptible de transporter ce
gaz en direction de l’Europe. Si l’idée de
construire ce second tuyau échoue (une
issue que Gazprom n’exclut pas,
puisqu’elle a spécialement prévu dans
l’accord une clause de non construction),
tout le projet Turkish Stream sera réduit à
un seul tuyau d’une capacité de 15,75
milliards de m3. Et son rôle sera
uniquement d’approvisionner la partie
européenne de la Turquie, l’Anatolie
recevant déjà du gaz russe via le gazoduc
Blue Stream.
Ce serait l’option la plus désastreuse pour
Gazprom, qui dépensera des milliards
seulement pour remplacer un tuyau fiable
et en bon état, qui fournit depuis des
années du gaz russe à la partie ouest de la
Turquie via l’Ukraine, la Moldavie, la
Roumanie et la Bulgarie. Oui, on pourra
faire des économies sur le nouveau trajet
plus court, mais qui paiera les énormes
investissements pour la pose des conduites
dans les eaux particulièrement profondes
de la mer Noire ? Sans parler du rabais
promis par M. Poutine au président turc sur
le prix du gaz.
Du point de vue du maître du Kremlin,
l’accord signé est un succès majeur. En
fait, c’est son premier véritable succès en
vue de la mise en œuvre de son grand
projet « Privons l’Ukraine du transit de
gaz ». Si tout se passe comme prévu (mais
rien n’est jamais sûr dans les relations avec
la Turquie), le 30 décembre 2019, les
volumes transités à travers le territoire
ukrainien diminueront d’au moins 15,75
milliards de m3. Et si l’on ajoute les 55
milliards de m3 de Nord Stream-2,
l’objectif géopolitique sacro-saint sera
atteint. On peut donc raisonnablement
supposer qu’après la percée à Istanbul,
Moscou mettra toutes ses forces dans la
mise en œuvre rapide du projet en mer
Baltique. Théoriquement, il y a des
chances que ce projet aboutisse avant la fin
de 2019. Sauf que le président russe aura à
convaincre les pays de l’UE que son seul
objectif, pour contourner l’Ukraine, est de
faire des économies sur le transit du gaz et
de garantir la sécurité des
approvisionnements, alors que même au
plus fort des tensions russo-ukrainiennes,
le transit du gaz était maintenu.
Evidemment, il y a quelque chose d’autre.
Il peut s’agir tout simplement pour M.
Poutine d’un désir de priver son voisin
récalcitrant de recettes importantes. Mais
une lecture plus complexe montre que tant
que les exportations de gaz, garantissant
des recettes en devises pour le trésor russe
vide, passent par l’Ukraine, le Kremlin
n’aura pas intérêt à déstabiliser ce pays, ni
ses voisins. Une fois Kiev privé de cette
garantie, la situation changera. (Deutsche
Welle)
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