Microprogramme de soins palliatifs et de fin vie (SFV 980) La dyspnée en fin de vie administrer ou non de l’oxygène? Annick Larose., infirmière. Introduction : En fin de vie, plusieurs symptômes sont présents et incommodants. La dyspnée est l’un des symptômes des plus difficiles à traiter et le plus redouté et ce autant chez les patients que chez les soignants. Contexte et problématique : Handfield (2005), décrit la dyspnée comme étant une sensation désagréable de difficulté à respirer, le plus souvent accompagnée d’anxiété. L’oppression thoracique, sensation de suffoquer, manque d’air, peur d’étouffer sont des descriptions faites par les patients souffrant de dyspnée en fin de vie. La prévalence de la dyspnée en fin de vie varie entre 10 et 90 % selon les différents auteurs (Lamoureux et Turcot, 2013). Toutefois, elle peut toucher de 50 à 70 % des patients en phase terminale (Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec, 2008), et jusqu’à 90 % des patients souffrant d’un cancer du poumon (Xue et Abertnethy, 2010). Mme Kabir est âgée de 68 ans, elle souffre depuis plusieurs années d’une maladie pulmonaire obstructive chronique (mpoc), selon les stades de Gold, Mme Kabir serait au stade IV de la maladie. De plus, elle est atteinte d’un cancer du poumon secondaire au tabagisme avec métastases osseux et hépatiques. Parmi plusieurs symptômes respiratoires tels la toux, l’hémoptysie, la dyspnée est l’un des principaux symptômes qui l’incommodent. Mme Kabir, refuse régulièrement l’oxygénothérapie, la lunette nasale l’incommode et rapporte que cela ne l’aide pas à mieux respirer. Dernièrement, le personnel a été témoin d’échanges corsés entre la patiente et sa famille. La famille rapporte à leur mère et au personnel soignant que l’oxygène peut guérir et refuse catégoriquement que celle-ci l’enlève. La famille fait des crises de colère à leur mère et au personnel lorsque Mme n’a pas son oxygène. L’état de Mme Kabir se détériore SFV-980.Cohorte 2014-2015 rapidement, l’agitation est présente et la dyspnée est de plus en plus importante. L’agitation n’aide pas au maintien de l’oxygénothérapie, car elle retire sans cesse son oxygène. L’équipe de soins se questionne sur le traitement de la dyspnée et l’oxygénothérapie en fin de vie. L’équipe fait donc une demande à l’infirmière clinicienne afin de venir répondre à leurs questions et les aider à mieux répondre aux besoins du patient/famille. Les symptômes respiratoires en fin de vie et les traitements L’infirmière clinicienne va donc rencontrer l’équipe. Celle-ci relève que l’équipe a un besoin d’apprentissage sur la dyspnée et les traitements appropriés. La dyspnée peut provoquer la panique chez le patient, la famille et les soignants, elle indique que la vie est menacée et l’instinct de survie fait donc surface (Handfield, 2005). Il est donc primordial d’outiller l’équipe de soin à faire face à ces situations cliniques. De par son rôle, l’infirmière doit être en mesure d’identifier rapidement les problèmes respiratoires et intervenir, elle se doit de garder son calme, ce qui permettra de rassurer le patient et sa famille (Handfield, 2005). La littérature démontre comment il est important de bien savoir évaluer la dyspnée. Bausewein et al. (2007), recense les échelles les plus utilisées pour mesurer la dyspnée. Parmi celles-ci nous retrouvons l’échelle visuelle analogique (VAS), l’échelle numérique (1-10) et l’échelle de Borg modifiée (1-10). Marin 2005, propose que la première ligne de traitement de la dyspnée, soit le traitement d’un mécanisme physiopathologique identifié. Il est primordial de démontrer aux soignants comment une meilleure évaluation de la dyspnée ainsi que la recherche des causes de celle-ci permettront de choisir le meilleur traitement selon la condition du patient. Les causes de dyspnée sont multiples. Selon Karmal et al. dans Lamoureux (2013), La Page 1 Microprogramme de soins palliatifs et de fin vie (SFV 980) La dyspnée en fin de vie administrer ou non de l’oxygène? Annick Larose., infirmière. dyspnée résulte de trois anomalies principales : un effort respiratoire accru en cas d’obstruction par exemple, un effort musculaire plus important présent en cas de faiblesse musculaire, cachexie et un besoin de ventilation augmenté lors des états d’anémie, fièvre ou effort physique. Quels sont les traitements disponibles pour traiter la dyspnée en fin de vie ? Plusieurs auteurs proposent en premier lieu des moyens non-pharmacologiques pour le traitement de la dyspnée. Parmi ces moyens nous retrouvons, le positionnement du patient, c’est la position semi-assise ou assise qui est à privilégier, l’aération de la pièce, les techniques de respiration, de relaxation et plusieurs autres méthodes alternatives sont souvent efficaces. Il a été démontré que l’air d’un ventilateur dirigé sur la joue du patient aurait des effets bénéfiques et diminuerait la dyspnée aussi efficacement que l’administration d’oxygène. Il est important de savoir que les patients souffrant de dyspnée ne sont pas nécessairement hypoxémique. De ce fait, il est intéressant de savoir que l’oxygénothérapie peut avoir des effets sur l’hypoxémie, mais ne fera pas nécessairement effet sur la dyspnée sans hypoxémie. Plusieurs études ont été effectuées afin de voir l’utilité de l’oxygénothérapie palliative en cas de dyspnée. Les études démontrent que l’oxygénothérapie est peu utile pour améliorer la sensation subjective de dyspnée chez les patients en soins palliatifs sans désaturation en oxygène, on dénote également que l’air ambiant administré via canule nasale aurait le même effet que l’oxygène (Clément, 2011). Selon Bausewin, 2007 les opioïdes sont les traitements de première ligne contre la dyspnée et sont les seuls appuyés par les données probantes. L’effet principal étant au niveau de l’action centrale du système nerveux central. Ils abaissent également la SFV-980.Cohorte 2014-2015 sensibilité des centres respiratoires à l’hypercapnie et à l’hypoxémie, ils induisent également une certaine sédation et diminuent la ventilation, la consommation d’oxygène et l’anxiété (Lamoureux, Trucot, 2013). L’oxygène peut être bénéfique pour certains patients, mais nous devons revoir son utilité en fonction du confort du patient. Dans le cas de Mme Kabir l’oxygène l’incommode et nous voyons très peu d’effet bénéfique. Les données probantes viennent supporter les équipes et sont un guide dans les interventions, il ne faut par contre jamais oublier qu’une approche individualisée est toujours à préconiser. Conclusion : L’aide de l’infirmière clinicienne a sans aucun doute aidé à outiller l’équipe face à cette situation. L’évaluation de la dyspnée sera désormais plus complète et le traitement de la dyspnée pourra être choisi en fonction de l’évaluation et des causes sous-jacentes Le renforcement des connaissances et des compétences permettront d’accompagner de manière optimale le patient/famille dans leur cheminement et leur compréhension face à l’oxygénothérapie. Références bibliographiques Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec. Guide de pratique des soins palliatifs : gestion de la douleur et autres symptômes. 4e éd. Montréal : L’Association;2008.p.223-39. Bausewein C, Farquhar M, Booth S et coll. Measurement of breathlessnessin advanced disease: A systematic review. Respir Med 2007101 (3) : 399-410. Site Internet : Clément P. (2011). L’utilité d’une oxygénothérapie palliative en cas de dyspnée. Minerva vol.10 (8) p.99-100 Global strategy for the diagnosis, management, and prevention of chronic obstructive pulmonary disease (GOLD), updated 2011. Gomutbutra P,O’Riordan DL,Pantilat SZ. Management of moderate-to-severe dyspnea in hospitalized patients receiving palliative care. J Pain Symptom Manag 2013;45(5) :885-91. Handfield, L. (2005), Le traitement de la dyspnée et de la détresse respiratoire chez les personnes en fin de vie. L’avant-Garde vol.6 (1) p.8-10. Lamoureux. M., Turcot, J. (2013) Les symptômes respiratoires en fin de vie. Si c’était plus souffrant que la douleur ? Le Médecin du québec, Vol.48 (6) Marin, I., 2004. Traitement de la dyspnée en fin de vie. Rev Mal Repi; 21 :46572. Xue D,Abernethy AP. 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