Manuel cardiologique
Réseau
«
Clinique du Coeur»
Ce manuel reprend une synthèse des recommandations actualisées en Cardiologie et Chirurgie
Cardiaque
à
la date d'édition du présent manuel (juin 2013) et ne dispense pas les médecins
d'adapter leur pratique en fonction de l'évolution de celles-ci.
Principes généraux de la prise en charge des patients cardiaques.
La philosophie qui guide le choix d'une revascularisation et de la technique utilisée repose sur une
approche individuelle du patient.
Ladécision tient compte de la présentation clinique, des co-morbidités du patient, de son anatomie
coronaire, de l'expérience des équipes médicales et chirurgicales, ainsi que de l'avis du patient.
L'importance du dialogue médico-chirurgical et de l'approche multidisciplinaire est stigmatisée dans
toutes lesrecommandations.
L'information éclairée du patient sur les risques, inconvénients et avantages des différents choix
thérapeutiques possiblesest également primordiale.
Eléments d'orientation thérapeutique.
Lebut premier de la revascularisation myocardique et de la prise en charge des maladies valvulaires
est d'améliorer lasurvie du patient au prix d'un minimum de complications.
Afin de préciser les risques des différentes options de revascularisation myocardiques, différents
scores prédictifs intégrant les aspects anatomiques des lésions coronaires et les comorbidités des
patients (pathologies cardiovasculaires associées,rénales, respiratoires, neurologiques, ...) ont été
développés. II est indispensable de se référer
à
ces différents scores pour mieux comprendre les
risques et les bénéfices des différentes alternatives thérapeutiques.
Le score SYNTAX(www.syntaxscore.com/) peut être utilisé pour prédire les résultats
à
5 ans de
l'angioplastie par comparaison
à
la chirurgie lorsque l'on envisage la revascularisation d'un patient
présentant des lésions sur plusieurs vaisseaux ou au niveau du tronc commun gauche. Ce score est
basé sur une analyse détaillée de l'anatomie coronaire.
L'EuroScore (ainsi que d'autres modèles tels que le STSscore aux Etats Unis)a été développé pour
évaluer le risque vital de la revascularisation chirurgicale et secondairement des autres interventions
cardiaques. II est utile de s'y référer pour orienter la décision thérapeutique. (www.euroscore.org).
Les guidelines Européennes et Internationales des différentes Sociétés Scientifiques Cardiologiques
et Chirurgicales sont mises
à
jour régulièrement et font l'objet de publications dans les plus grandes
revues internationales. Elles constituent également un point de référence indispensable dans les
prises de décision pour les patients présentant des pathologies coronariennes, valvulaires ou
rythmiques.
La décision thérapeutique finale doit donc faire l'objet d'une discussion pluridisciplinaire incluant
tous les acteurs médicaux responsables de la prise en charge du patient (Heart Team) et le patient
doit en être dûment informé.
Pathologies coronariennes
Suivant les guidelines, il existe des situations urgentes pour lesquelles une revascularisation par
angioplastie s'impose dans les plus brefs délais (infarctus aigus, avec ou sans sus décalage du
segment ST, ou les états de choc consécutifs
à
une ischémie ou
à
une nécrose myocardique).
L'angioplastie réalisée dans la foulée d'un cathétérisme diagnostique est également admise chez les
patients stables présentant une ou deux lésions coronaires aisément accessiblespar angioplastie, en
particulier en l'absence de lésion de I'IVA proximale.
A. Indications de revascularisation pour les syndromes coronariens
instables
A 1. Infarctus avec sus décalage ST.
Actuellement, la thrombolyse n'est recommandée que pour les situations où le transfert du patient
vers une salle de cathétérisme interventionnel est impossible endéans les 120 minutes. Chez les
patients traités initialement par thrombolyse, un cathétérisme coronaire, avec angioplastie si
nécessaire, est recommandé endéans les 24 heures, ou le plus rapidement possible si le patient
conserve des signesd'ischémie ou une instabilité hémodynamique.
Danstous les autres cas, l'angioplastie primaire est le traitement de choix de l'infarctus avec sus
décalage ST dont les symptômes ont débutés 6
à
12 heures auparavant. L'angioplastie s'indique
également chez les patients avec signesd'ischémie persistante 12
à
24 heures après le début de la
douleur, ainsi que chez les sujets admis plus de 12 heures après une nécrose étendue. Parcontre, il
n'existe pas d'indication de revascularisation d'une artère obstruée depuis plus de 24 heures et
responsable d'un infarctus chez un patient stable, en l'absence de signes objectifs d'ischémie.
Cette intervention doit s'effectuer après une préparation pharmacologique adéquate comprenant
l'administration d'antiagrégants plaquettaires (Aspirine + ticlopidine ou prasugreljticagrelor) et
d'antithrombine (héparine, HBPM ou bivalirudine). L'intervention se limite généralement à
l'angioplastie du vaisseau responsable de l'infarctus. Une revascularisation plus complète et la
dilatation d'une autre artère s'indique cependant chez les patients présentant en état de choc
cardiogénique. La place de la revascularisation chirurgicale urgente est limitée aux rares cas
d'infarctus compliqués de rupture d'une structure cardiaque ou d'évolution vers un choc
cardiogénique secondaire à un échec d'angioplastie.
A2. Infarctus sans sus-décalage du segment ST
Les données épidémiologiques ont révélé le pronostic péjoratif de ces patients traités de manière
conservatrice. Plus récemment, on a démontré que ce pronostic pouvait être amélioré de manière
significative par l'usage des traitements antiplaquettaires combinés à une éventuelle
revascularisation. L'angioplastie occupe donc une place centrale dans la prise en charge de ces
patients.
Dèsque le diagnostic de souffrance myocardique aiguë est posésur la based'au moins deux destrois
critères que sont: une élévation des troponines >3 fois la limite supérieure des valeurs normales,
une douleur thoracique suspecte et/ou des modifications ischémiques du segment
STIT
de I'ECG,un
traitement antiagrégant (aspirine+ ticagrelor ou plavix), anticoagulant (héparine, HBPM, bivalirudine
ou fondaparinux) et antiischémique doit etre instauré. Une mise au point par cathétérisme en vue
d'une revascularisation peut ensuite être envisagée.Lastratégie du traitement médicamenteux et de
revascularisation est cependant dictée par une évaluation préalable du risque ischémique (score
GRACE)et hémorragique (score CRUSADE),éventuellement après confirmation d'une élévation
anormale du taux des troponines 3 à 6 heures après le premier dosage. II est donc recommandé que
chaque médecin puisse déterminer rapidement le profil de risque du patients par le calcul des scores
mentionnés plus haut, aisément disponibles sur lessites suivants:
www.outcomes-umassmed.org/grace/
et www.crusadebleedingscore.org/
L'urgence du cathétérisme est essentiellement dictée par la sévérité du score GRACE,tandis que le
type de traitement antiagrégantlanticoagulant est dicté par le score CRUSADE.Sile score GRACEest
>
140, le patient est considéré à haut risque de complications ischémiques précoces et il doit être
revascularisé endéans les 24 heures. Lespatients à très haut risque ischémique (douleurs angoreuses
subintrantes, insuffisance cardiaque, instabilité hémodynamique, arythmie ventriculaire maligne)
doivent etre évalué rapidement «2heures) par cathétérisme. Une évaluation invasive précoce doit
être considérée endéans les 72 heures chez les patients à risque intermédiaire, c'est-à-dire ceux dont
le score GRACEest <140 et qui présentent au moins l'un des facteurs de risque repris au tableau 1 :
Tableau
1:
Indications de cathétérisme précocepour nonSTEMI
Urgente «2heures) Douleur angoreuse récurrente, instabilité hémodynamique,
insuffisance cardiaque, arythmie ventriculaire maligne.
Semi-Urgente «24heures) GRACEScore> 140 (avec ou sans critères d'indication précoce)
Précoce «72heures) Modification pathologique des troponines, fluctuations ECG de la
repolarisation (cliniques ou silencieuses},GRACE Score 109-140,
diabète, insuffisance rénale (MDRD<60ml/min), FEVG<40%, angor
post infarctus récent, antécédents d' angioplastie < 9 mois ou de
pontage aortocoronarien
Si le patient admis pour nonSTEMI ne remplit pas les critères d'évaluation invasive précoce (score
GRACE<109, sans facteur de risque mentionné sur le tableau 2), le traitement médical est privilégié
et l'indication d'une revascularisation repose alors sur les résultats de l'évaluation fonctionnelle.
L'algorithme de traitement décrit plus haut doit être réévalué chez les patients âgés (>75 ans) qui
présentent des risques hémorragiques accrus et différentes co-morbidités. La stratégie
thérapeutique doit donc être individualisée chez ces patients en tenant compte de ces différents
facteurs.
B: Indications de revascularisation pour angor stable ou ischémie
silencieuse.
Lediagnostic non invasif d'une maladie coronaire repose sur des tests évaluant l'anatomie (MDCTet
MRI) ou l'ischémie (ECGd'effort, échographie ou scintigraphie de stress). La valeur prédictive de
l'imagerie MDCT pour exclure une maladie coronarienne est bien établie. Par contre, cet examen
peut tendre
à
surestimer la sévérité anatomique des sténoses et n'apporte pasd'information sur la
répercussion fonctionnelle des lésions. De même, l'imagerie par résonnance magnétique ne permet
pas de définir avec précision l'anatomie coronaire. Cesexamens ne sont donc pas prioritaires pour
diagnostiquer une maladie coronarienne justifiant une revascularisation. L'indication de
cathétérisme diagnostic repose donc essentiellement sur les résultats destests fonctionnels et sur la
démonstration d'une ischémie de préférence par échographie ou scintigraphie.
Lacoronarographie demeure l'examen indispensable pour décider l'indication de revascularisation.
Celle-ci se basesur des critères anatomiques et/ou fonctionnels qui sont présentés sur le tableau 2 :
Tableau 2 : Indication de revascularisation pour angor stable ou ischémie silencieuse:
Caractéristiques Niveau d'évidence
Critères anatomiques Tronc commun gauche>50%* lA
IVAproximale >50%* lA
2 ou 3 Vx avec FEVG<35%* lB
Largezone d'ischémie (>10%) lB
SeulVx perméable avecsténose>50%* IC
lVx avec ischémie limitée «10%) IliA
*FFR<0.80 pour les sténoses de 50-90%
Critères fonctionnels Sténose>50% et angor réfractaire au traitement lA
médical optimal
Dyspnée ou insuffisance cardiaque et zone lia B
d'ischémie ou de viabilité>lO% menacée par une
sténose>SO%
Situation stable contrôlée par traitement médical III C
l'indication de revasculariser repose donc essentiellement sur des critères fonctionnels objectivant
une ischémie suffisamment étendue ou
à
risque vital. On retiendra que le traitement médical
optimal est prioritaire chez les patients dont la maladie se limite
à
un seulvaisseausauf si ce dernier
est I'IVA proximale ou irrigue une zone étendue du myocarde. Dans les autres situations, une
revascularisation peut être considérée. la mesure invasive de la répercussion fonctionnelle de la
sténose (FFR) aide au choix de la stratégie de revascularisation. Cette évaluation est
particulièrement utile en cas de lésion proximale modérée de I'IVA et en cas de maladie
pluritronculaire. les résultats de l'étude FAME ont en effet montré que, chez les patients
pluritronculaires, la revascularisation limitée aux seules lésions coronaires fonctionnellement
significatives (FFR<80)présentait moins de risques pour le patient qu'une revascularisation baséesur
l'aspect anatomique (sténose>SO%).
l'usage de stents médicamenteux et l'amélioration des techniques d'angioplastie ont permis
d'élargir les indications de cette technique aux patients présentant des lésions du tronc commun
gauche ou de 2/3 vaisseaux coronaires. Ces nouvelles indications sont inspirées des résultats de
l'étude SYNTAXet plus particulièrement du score anatomique qui fut développé pour la circonstance.
Ainsi, il est raisonnable de proposer une angioplastie comme technique de revascularisation chez les
patients dont le score anatomique SYNTAXest <22. la chirurgie, par contre est formellement
conseillée dans les autres circonstances. l'avantage de la chirurgie réside essentiellement dans la
réduction du risque de ré-intervention et d'infarctus, particulièrement chezles patients diabétiques.
(http://www.thelancet.com/journals/la ncet/article/PIIS0140-6736(13)60141-S/abstra...)
C.
La revascularisation chirurgicale
Malgré l'usage des stents médicamenteux et des techniques d'angioplastie contemporaines, la
supériorité de la revascularisation chirurgicale est bien démontrée chezlespatients pluritronculaires,
si le traitement alternatif par angioplastie concerne des situations complexes (ScoreSYNTAX>22) ou
ne permet pas une revascularisation complète. le risque de ré-intervention et d'infarctus est
nettement moindre après chirurgie et le pronostic vital meilleur
à
moyen et long terme,
particulièrement chez lespatients diabétiques.
Comme mentionné plus haut, le choix de la technique de revascularisation la plus appropriée au
patient stable doit donc impérativement faire l'objet d'une discussionmédico-chirurgicale.
les recommandations thérapeutiques décrites plus haut peuvent être consultées sur les différents
sites internet des hopitaux du réseau.
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