des soins de réanimations, l’état clinique du patient se
dégrade. Il majore son insuffisance hépatocellulaire. Une
transplantation hépatique en urgence est prévue mais les
signes neurologiques s’aggravent. Le patient décède le 13
avril.
Le point de vue du clinicien
Les hépatites fulminantes représentent l’une des premières
causes d’insuffisance hépatique aiguë grave observées
chez l’enfant. Elles ne concernent en France qu’une ving-
taine d’enfants par an. Leur pronostic est très sévère car
elles évoluent spontanément vers la mort dans 60 à 80 %
des cas. Elles sont caractérisées par l’apparition rapide
d’une encéphalopathie hépatique qui peut aller de la sim-
ple obnubilation jusqu’au coma. Celle-ci conditionne en
grande partie le pronostic [1].
Les hépatites virales représentent 40 à 70 % des insuffi-
sances hépatiques aiguës. L’hépatite virale B domine en
France l’ensemble des étiologies [2]. L’hépatite fulmi-
nante à EBV est exceptionnelle [3]. En effet, l’EBV est un
herpèsvirus ubiquitaire. Il infecte 95 % de la population
mondiale, le plus souvent de façon inapparente. Il est
l’agent causal de la mononucléose infectieuse qui est la
forme clinique symptomatique la plus fréquente et la plus
caractéristique de la primo-infection à EBV. La mononu-
cléose infectieuse est une pathologie généralement béni-
gne et extrêmement répandue [4]. Cependant, des compli-
cations variées peuvent survenir de façon peu fréquente :
rupture de la rate, thrombopénie, agranulocytose,
encéphalite, pneumopathie interstitielle. Quelques cas ont
été rapportés de myocardite, de péricardite, de syndrome
hémophagocytaire... [5].
Bien qu’une augmentation modérée des transaminases soit
retrouvée de façon quasi constante au cours de la primo-
infection, l’hépatite aiguë fulminante en est une complica-
tion très rare [6].
L’hépatite fulminante survient plus volontiers chez les
jeunes garçons atteints du syndrome de Purtilo [4]. Le
syndrome de Purtilo, ou syndrome lymphoprolifératif lié
au chromosome X, est un déficit immunitaire cellulaire
primitif, caractérisé par une susceptibilité sévère et sélec-
tive pour l’EBV. Il s’agit d’une forme grave de la primo-
infection à EBV. Les patients atteints peuvent développer
une mononucléose infectieuse gravissime caractérisée par
une hépatite nécrotique fulminante, un syndrome d’activa-
tion lymphohystiocytaire, une aplasie médullaire ou
encore une vascularite du systène nerveux central. Le gène
incriminé est responsable d’un défaut de régulation de la
réponse immune vis-à-vis de l’EBV [7]. Dans notre obser-
vation, la primo-infection à EBV compliquée d’une hépa-
tite fulminante fatale fait suspecter un syndrome de Pur-
tilo. Néanmoins, le diagnostic formel de ce syndrome est
génétique. Il consiste à rechercher une mutation ou une
délétion dans le gène SH2D1A (SH2-domain containing
gene 1A) [7]. Il n’a pu être réalisé dans notre observation.
Le point de vue du biologiste
L’EBV appartient à la famille des herpesviridae. La trans-
mission d’un individu à un autre s’effectue essentielle-
ment par la salive dans les conditions naturelles (maladie
du baiser) et plus rarement au cours d’une transfusion
sanguine, lors d’une greffe de moelle osseuse ou d’organe
[4].
Les lymphocytes B sont les principales cellules cibles de
l’EBV. Le virus possède la propriété remarquable
d’induire leur prolifération continue. Au cours de la
primo-infection à EBV, la réponse immunitaire de type
cellulaire, qui fait intervenir les lymphocytes T cytotoxi-
ques, joue un rôle capital pour limiter l’infection primaire.
Les signes cliniques de la mononucléose infectieuse sont
provoqués par l’intensité de cette réaction immunitaire.
Les lymphocytes hyperbasophiles, mis en évidence par la
cytologie sanguine, correspondent aux lymphocytes T
cytotoxiques produits en réponse à la stimulation induite
par les lymphocytes B infectés. Le sujet immunocompé-
tent maintient une délicate balance entre la prolifération
des lymphocytes B infectés de façon latente et la réponse
immunitaire. L’équilibre se rompt en cas d’altération de
cette réponse immunitaire cellulaire [4, 8].
Le diagnostic de primo-infection à EBV repose sur les
sérologies : MNI test et sérologie spécifique. Le MNI test
Figure 1. Biopsie hépatique (Coloration HES. Grossissement
× 200). Au centre, l’espace porte présente un infiltrat inflamma-
toire lymphocytaire. Les lobules hépatiques comportent des
hépatocytes nécrosés : cytoplasme en rétraction acidophile et
noyaux picnotiques.
Hépatite fulminante
Ann Biol Clin, vol. 64, n° 2, mars-avril 2006 171
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