Chapitre 2
Séries numériques
2.1 Définition et convergence de séries numériques
2.1.1 Définitions de base
Soit (an)nune suite de nombres réels ou complexes. Dans le premier chapitre nous nous sommes intéressés à
l’opération ‘prendre la limite’. Elle n’est pas toujours définie (pour les suites n’ayantpas de limite), mais faisais
intervenir l’ensemble de la suite. Dans ce chapitre nous nous intéressons àune autre opération très naturelle àtenter.
Additionner tous les éléments de la suite. C’est-à-dire, nous nous intéressons au sens àdonneràla somme infinie
+
X
n=n0
an.
On découvre de suite que quelque soit sa définition, la valeurdevra être très dépendante des quelques premiers termes,
car l’on devrarespecter
n0<n1,=(an0+an0+1 +··· +an11)+
+
X
n=n1
an=
+
X
n=n0
an.
Définition 2.1.1 Soit (an)nune suite numérique (complexe). Alors la somme formelle Pn=n0anest dite une série
numérique.Lasuite (an)nest la suitede ses termes.Ce n’est rien d’autreque la suite elle même, plus l’information
que l’on se propose d’étudier la somme, et ce à partir de son n0-ième terme. L’on écriraPansuccinctement, si ce
dernier point est remis àplus tard, et l’on considèredes sommes à partir de n0=0.
On diraque la série est réelle, si ses termes sont des nombres réels.
Exemple 2.1.1 P1est une série, ce seraune série divergente, la somme de tous ses termes ne peut êtreun nombre.
P(1
3)nest une série, et l’on auraP+
n=n0(1
3)n=3
2×3n0
Définition 2.1.2 Soit Panune série. Alors sa suite associée (An)nest définie par An=Pn
k=0 akpour n>0.On
l’appelleraaussi sa suite des sommes partielles associée. Si l’on s’intéresse àPn=n0an;alors sa suite des sommes
partielles àpartir de n=n0associée (A
n)n=n0est définie par A
n=Pn
k=n0akpour n>n0.
Le symbole Aest choisit pour attirer l’attention sur le fait que la suite de sommes partielles est calculée àpartir d’un
indice autre que 0.Nous avons An=An01+A
n,si nn0.
La donnée de la suite associée détermine complètementla série, car an=AnAn1.
Définition 2.1.3 Soient Panune série et (An)nsa suite des sommes partielles associée. Alors on dit que Pan
converge si (An)nconverge, et dans ce cas on finit la somme de la série Panpar
+
X
n=0
an=lim
n+An.
Si la suite (An)nne converge pas, on diraque la série diverge.
Si la série Pandiverge, mais limn+Anexiste (et alors obligatoirement on aque c’est une série réelle et
limn+An{−∞,+∞})on définit P+
n=0 an=limn+An.
En effet, le seul cas l’on adéfinit une limite pour une suite qui n’est pas convergente, est la cas réel, avec limite
infinie.
13
CHAPITRE 2. SÉRIES NUMÉRIQUES 14
Ainsi :Panest une suite avec une information. Pour chaque N,AN=PN
n=0 anest un nombre. Et (lorsqu’il
existe) P+
n=0 anest aussi un nombre. On peut écrire,
+
X
n=0
an=lim
N+
N
X
n=0
an.
On dira que deux séries Panet Pbnsontde même nature si elles sontsimultanémenttoutes deux convergentes,
ou toutes deux divergentes. Leursnature est alors définie comme étantsoit ‘convergentes’ soit ‘divergentes’. Lorsque
leur nature est divergente, mais leur somme est définie, c’est-à-dire ±∞,il est utile de préciser, le cas échéant:‘les
séries sontde même nature, divergentes vers +’. Souvent, lorsqu’une série est divergente, mais on sait que sa suite
de sommespartielles associées aplusieurs valeurs d’adhérence, on dis que c’est une série oscillante. Ce sontdes façons
de parler bien commodes.
Exemples 2.1.1 P
n=0 0=0,P
n=0 1= +,P
n=0 1
2n=2.Lasérie la plus importante sera pour nous, Prnpour
rK,dite série ométrique, une section ultérieureles crit.
Lemme 2.1.1 Quelque soit la façon de définir les premierstermes :a0,a1,...,an01,les séries Panet Pn=n0an
sont de même nature. Et on a+
X
n=0
an=An01+
+
X
n=n0
an
avecla convention ±∞ +α=±∞,pour tout αR.
Ce qui est clair par la formule AN=An01+A
N.
Remarque 2.1.1 De façon similaire, on peut définir des séries Pfn,les fnsont des éléments d’un espace vectoriel
muni d’une norme.
Lorsqu’il s’agit d’un espace vectoriel de dimension finie le traitement se fait ‘composante àcomposante’ et il ne
présentera pas de difficultés, une fois que l’on aurabien compris les relations entreles séries de nombres complexes,
et les séries des parties réelles et imaginaires associées.
Dans ce texte, on mentionnera à l’occasion des résultats non évidents sur les séries de matrices, si importantes dans
les applications et aux équations différentielles et àl’analyse numérique. Ce sont des affirmations ‘hors programme’.
Dans ce chapitrenous étudions les séries numériques. Plus tardnous regarderons des séries de fonctions, et ce sera
les seuls cas d’espaces de dimension infini que l’on aborderacette année.
Proposition 2.1.1 (Linéarité) Si séries Panet Pbnconvergent,alors pour tous λ, µCla série P(λan+µbn)
converge et (n0)
X
n=n0
(λan+µbn)=λ
X
n=n0
an+µ
X
n=n0
bn.
Ànouveau, clair car la suite des sommes partielles associée àP(λan+µbn)n’est autre que (λA
N+µB
N)N,et l’on
ala linéarité de la limite des suites.
Corollaire 2.1.1 Si Panconverge mais Pbndiverge,alors P(an+bn)diverge.
Attention. La série P(an+bn)peut être convergente, même si Panet Pbndivergent. Par exemple, P2net
P(1
2n2n)divergent, mais leur somme, converge, sasomme est 2.
Proposition 2.1.2 (Comparaison des sommes) Si deux séries réelles Panet Pbnconvergent,et si pour tout
nn0,anbn,alors
X
n=n0
an
X
n=n0
bn.
Proposition 2.1.3 (Convergence d’une série complexe) Une série complexe Panconverge si et seulement si
les séries PRe(an)et PIm(an)convergent toutes les deux,et dans ce cas
X
n=n0
an=
X
n=n0
Re(an)+i
X
n=n0
Im(an).
En effet, notons AN=PN
n=0 an;BN=PN
n=0 Re(an); CN=PN
n=0 Im(an).Nous avons BN=Re(An)et CN=
Im(AN).La proposition affirme donc que la suite (AN)Nest convergente si et seulementsi ses paries réelle et
imaginaires convergent, auquel cas la limite de (AN)Nàpour partie réelle la limite de (BN)Net pour partie imaginaire
la limite de (CN)N.Mais cela est bien le cas pour toute suite de nombres complexes !
CHAPITRE 2. SÉRIES NUMÉRIQUES 15
2.1.2 Les restes d’une série
Définition 2.1.4 Si Panest une série convergente, alors son reste àl’indicen0est la somme de la série
(convergente) :P+
k=nak.Ainsi Rn=P+
k=nakest pour chaque nun nombre(comme justifié dans la proposition qui
suit) et Rn)nest la suite des restes de la série Pan.
Bien entendu, on ne peut définir la suite des restes d’une série divergente.
Proposition 2.1.4 (Les restes d’une série convergente) Soit Panune série convergente et soit pour tout n
0,Rn=P+
k=nak.Alors Rnest bien défini, et
lim
n→∞ Rn=0.
Preuve. Soit Ala somme de P+
n=0 anet (AN)Nla suite associée. Notons R(n)
M=PM
k=nakla suite associée àla série Pk=nak.
Pour Nassez grand et nfixé, nous avons AN=An1+R(n)
Nc’est-à-dire
N
X
k=0
ak=
n1
X
k=0
ak+
N
X
k=n
ak.
Le terme An1ne dépend pas de N,on peut calculer la limite, lorsque N+,et obtenir, que Rnest bien définit, puis
l’égalité numérique :A=An1+Rn,valable pour chaque n>0.Puisque limn+An1=A, on aA=A+limn+Rn,
ainsi limn+Rnexiste et sa valeur est 0.
2.1.3 Critère deCauchy
Définition 2.1.5 On dit que la série Panvérifie le critère de Cauchysi
ε>0NNtel que pNqpon a
q
X
n=p
anε.
Autrementdit, lasérie Pansatisfait le critère de Cauchysi et seulementsila suite associée (An)n,An=Pn
k=0 ak,
est une suite de Cauchy.Comme une suite numérique converge si et seulementsi elle est de Cauchy,on en déduit la
preuvedu théorème suivant.
Théorème 2.1.1 (Critère de Cauchy) Une série numérique Panest convergente si et seulement si elle vérifie le
critèrede Cauchy.
Dans le cas de divergence, on ne peut avoir d’autres renseignements, divergence versl’infini, ou oscillation. En
faisantp=q=non a
Corollaire 2.1.2 Une condition cessairepour que la série Panconverge est que limn→∞ an=0.
Définition 2.1.6 Une rie Panest dite grossièrementdivergente si la condition limn→∞ an=0n’est pas satisfaite.
Exemple 2.1.2 Lasérie harmonique P1
ndiverge car pour tout n1,P2n
k=n+1 1
k1
2.
2.1.4 Convergence absolue
Définition 2.1.7 Une série Pan(réelle ou complexe) est dite absolumentconvergente si et seulement si la série
P|an|converge.
Théorème 2.1.2 (Convergence absolue impliqueconvergence) Si Panconverge absolument,alors elle converge
et pour tout n0,
X
n=n0
an
X
n=n0|an|.
Preuve. L’inégalité triangulaire
q
X
n=p
an
q
X
n=p
|an|
permetde déduire que Panvérifie le critère de Cauchydès que c’est le cas pour P|an|.Avec p=n0et q=N,la continuité
du module (valeur absolue) permet, par un passage àla limite, N+,d’obtenir l’importante majoration de l’énoncé.
Ceci peut fonctionner comme un critère de convergence, et justifie pleinementl’attention que l’on portera aux
séries àtermes positifs.Par exemple P(1)nn
2nconverge, car elle converge absolument. Sa somme, àpartir de 1,est
inférieure ou égal à1.Quelle est sa valeur ?
CHAPITRE 2. SÉRIES NUMÉRIQUES 16
2.1.5 Séries àtermes positifs
Une série numérique est dite àtermes positifs, si ses termes sonttous des nombres réels positifs ou nuls.
Théorème 2.1.3 (Convergence de sériespositives) Une série àtermes réels positifs converge si et seulement si
la suite associéeest majorée,et dans ce cas la somme de la série est la borne supérieurede la suite associée.
Lasérie est divergente si et seulement si AN+.Ladivergenced’une série àtermes positifs est toujours vers
+.
Corollaire 2.1.3 Soient Panet Pbndeux séries àtermes positifs.Alors la série somme P(an+bn)converge si
et seulement si les deux séries Panet Pbnconvergent.
2.2 Étude de la convergence absolue
2.2.1 Comparaison de deux séries
Théorème 2.2.1 (Comparaison par majoration) Soient Panet Pbndeux séries àtermes réels.Si Pbn
converge et s’il existe n0tel que pour tout nn0,0anbn,alors Panconverge.
Preuve. Soient(An)
n=n0et (Bn)
n=n0le suites associées àpartir de n=n0de Panet Pbnrespectivement. Alors, puisque
l’on sommedes termes positifs, ce sontdes suites croissantes et nn0,AnBn.
Corollaire 2.2.1 (Comparaison par O)Soient Panet Pbndeux séries.Si Pbnconverge absolument et si
an=O(bn),n→ ∞,alors Panconverge absolument.
Preuve. SoientMet Ntels que nN,|an|M|bn|.Comme P|bn|converge, PM|bn|converge aussi, et donc, par le
théorème précédent, P|an|converge.
Corollaire 2.2.2 (Comparaison par équivalence) Soient Panet Pbndeux séries àtermes positifs.Si an
bn,n→ ∞,alors Panet Pbnsont de même nature.
Preuve. De l’équivalence asymptotique nous déduisons an=O(bn)et bn=O(an),n→ ∞.Puisquela convergence absolue
pour des suites àtermes positifs coïncide avecla convergence, c’est bien un corollaire immédiat.
Proposition 2.2.1 (Convergence absolue d’une série complexe) Une série complexe converge absolument si
et seulement si sa partie réelle et sa partie imaginairetoutes les deux convergent absolument.
Preuve. Si zC,alors
max|Re z|,|Im z||z||Re z|+|Im z|.
2.2.2 Séries géométriques
Définition 2.2.1 Toute série complexe de la forme Pqn,qC,(en utilisant ici la convention 00=1), est dite série
géométrique.
Proposition 2.2.2 (Somme d’une série géométrique) Si |q|1,alors la série P
n=0 qndiverge (grossière-
ment). Si |q|<1,alors la série converge et
X
n=0
qn=1
1q.
Preuve. Dans le cas |qn|1le terme général ne converge pas vers 0,la divergence est grossière. Pour q6=1et pour tout N1,
N1
X
n=0
qn=1qN
1q.
Ceci permet, parpassage àla limite, de prouver la convergence dans le cas |q|<1,et decalculer lasomme àpartir de 0.
CHAPITRE 2. SÉRIES NUMÉRIQUES 17
Remarque 2.2.1 Puisque PN
n=n0qn=qn0PNn0
n=0 qn,on en duit, pour |q|<1,
+
X
n=n0
qn=qn0
+
X
n=0
qn.
Dans les deux sections suivantes on énonce deux critères de convergence, obtenus par la comparaison àune série
géométrique. Leur usage constantleur donne le nom de ”règles”.
2.2.3 Règle de Cauchy
Rappel :
lim inf
n→∞ an=lim
n→∞ inf
knak=sup
n
inf
knak,
lim sup
n→∞
an=lim
n→∞ sup
kn
ak=inf
nsup
kn
ak.
Pour toute suite (an),lim infn→∞ anet lim supn→∞ anexistentcomme éléments de [−∞,],et lim infn→∞ an
lim supn→∞ an.Enfin, si limn→∞ anexiste, alors lim infn→∞ an=lim supn→∞ an=limn→∞ an.
Théorème 2.2.2 (Règle de Cauchy) Soit Panune série numérique.On pose
λ=lim sup
n→∞ |an|1/n .
Alors
1. si λ<1,la série Panconverge absolument,
2. si λ>1,la série Pandiverge grossièrement.
Preuve. (1) Supposons λ<1.Soit µ<1tel que λµ <1.Soit Ntel que nN|an|1/n µ.Alors nN|an|µnet l’on
peut majorer la série quinous intéresse par une série géométrique convergente.
(2) Supposons λ>1.Il existe une suite extraite (donnée par k7→ nk)de (|an|1/n)ndontla limite est λ. Soit Ktel que
kK|ank|1/nk1.Alors kK|ank|1,la suite (|an|)nne peut converger vers 0.
2.2.4 Règle de d’Alembert
Théorème 2.2.3 (Règle de dAlembert) Soit Panune série numérique vérifiant an6=0pour tout nn0.
Posons
L=lim sup
n→∞
|an+1|
|an|,l=lim inf
n→∞ |an+1|
|an|.
Alors
1. si L<1,la série Panconverge absolument,
2. si l>1,la série Pandiverge grossièrement.
Preuve. (1) Supposons L<1.Soit µtel que L<µ<1.Soit Ntel que nN|an+1 |
|an|µ.Alors en multipliantces inégalités,
on démontre par récurrence sur n,nN|an||aN|µnN=|aN|
µNµn.On peut majorer la série qui nous intéresse par une
série géométrique convergente.
(2) Supposons λ>1.Soit Nn0tel que nN|an+1|
|an|>1.Alors par currence sur n,nN|an||aN|>0.
2.2.5 Comparaison d’une série et d’une intégrale
Pour ce paragraphe, il faudra serapporter àl’appendice.
1– Pour un rappel de la définition de l’intégralede Riemann etde ces propriétés.
2– La définition de la convergence de l’intégrale impropre, ou généralisée :
Z+
a
f(x)dx =lim
X+ZX
a
f(t)dt.
L’avantage des intégrales, par rapport aux séries, est que lorsque l’on peut calculer explicitementune primitive,
l’on aura
F=f=Z+
a
f(x)dx =lim
X+F(X)F(a),
chose qu’il serait difficile àmettre en oeuvre pour le calcul des sommes des séries.
1 / 13 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !