Fonctions polynomiales, racines

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Fonctions polynomiales, racines
Ici, K est un corps commutatif quelconque.
I Fonction polynomiale
Définition :
Soit P  K [ X ] , P   ak X k où les a k sont nuls à partir d’un certain rang.
kN
La fonction polynomiale associée à P est la fonction :
~
P : K  ~K
x P ( x )   ak x k
kN
Attention :
~
P  K [ X ] , c’est un polynôme formel, P  F(K , K ) , c’est une fonction polynomiale.
Théorème :
Soit x  K . Alors, pour tous P1 , P2  K [ X ] et tout   K :
~
~
~
P1  P2 ( x)  P1 ( x)  P2 ( x)
~
~
~
P1  P2 ( x)  P1 ( x)  P2 ( x)
~
~
P1 ( x)  P1 ( x)
~
1 ( x )  1K
(Démonstration immédiate)
On en tire alors le théorème :
~
~ ~
P1  P2  P1  P2
~
~ ~
P1  P2  P1  P2
~
~
P1  P1
~
1  1F ( K ,K )
~
~ ~
(Car x  K , P1  P2 ( x)  ( P1  P2 )( x) , et de même pour les autres)
Ainsi, l’application K [ X ]  F(K , K ) est un morphisme de l’anneau (K [ X ],,) vers
~
PP
l’anneau (F(K , K ),,) .
II Racines
A) Définition et caractérisation formelle
Soit P  K [ X ] et   K .
~
On dit que  est une racine (dans K) de P lorsque P ( )  0K
Théorème :
Soit P  K [ X ] et   K .
Alors  est racine de P si et seulement si ( X   ) divise P.
Démonstration :
Déjà, ( X   ) est non nul.
On peut donc faire la division euclidienne de P par ( X   ) :
P  ( X   )Q  R , où Q  K [ X ] et R  K 0 [ X ] , soit R  r  K .
Donc P  ( X   )Q  r
~
~
~
~
~
Donc P  ( X   )Q  ~
r d’où P ( )  0K  Q ( )  r  r .
Donc  est racine de P si et seulement si r  0 soit si ( X   ) divise P.
B) Multiplicité
Soit P K [X ] \ 0K .
Soit  un scalaire. On suppose que  est racine de P. La multiplicité de  dans P
est, par définition, m  max k  N , ( X   ) k divise P .
La définition est bien correcte car l’ensemble est non vide (contient 1) et est
majoré (par deg( P) )
On peut convenir que  est de multiplicité 0 lorsque  n’est pas racine de P.


C) Le premier théorème de factorisation
Théorème :
Soit P K [X ] \ 0K . Soient 1 , 2 ,... p des racines distinctes de P de multiplicités
au moins égales à 1 ,  2 ,... p .
p
Alors
 ( X   )
i
i
divise P.
i 1
Démonstration :
Les polynômes ( X  i ), i  1, n  sont irréductibles dans K [ X ] (car de degré 1).
 
Ils tous distincts et unitaires, donc les ( X  i )i , i  1, n sont premiers entre eux. De
plus, ils divisent tous P. Donc leur produit divise P.
Conséquence :
Soit P K [X ] \ 0K  de degré n  N . Alors le nombre de racines de P (en les
comptant selon leur multiplicité) est inférieur ou égal à n.
Démonstration :
Si P admet les racines 1 , 2 ,... p distinctes avec les multiplicités 1 ,  2 ,... p ,
p
alors
 ( X  i )i , de degré
i 1
n

k 1
n
k
, divise P donc

k 1
k
n.
Conséquence pratique :
Si P  K n [X ] , et si on a trouvé n  1 racines distinctes à P, alors P  0 .
Conséquence :
On suppose K infini.
Alors l’application K [ X ]  F(K , K ) est injective :
~
PP
~ ~
~ ~
~
~
Si P  Q , alors P  Q  0 K , soit P  Q  0K , c'est-à-dire x  K , P  Q ( x)  0K
.
~
Donc P  Q a une infinité de racines. Donc P Q  0K . Donc P  Q .
Dans la suite du chapitre, K est un sous corps de C. K est donc infini (car il contient au
minimum Q puisqu’il contient 0 et 1 et est stable par +,  et passage à l’inverse)
~ ~
Ainsi, on a l’équivalence, pour tout P, Q  K [ X ] : P  Q  P  Q .
On peut donc retirer les ~ mais on distinguera P   ak X k et la fonction x  P (x) .
kN
III Dérivation formelle
A) Définition
Soit P  K [ X ] , P   ak X k où les a k sont nuls à partir d’un certain rang.
kN
Alors le polynôme dérivé de P est par définition le polynôme :
P'   kak X k 1
kN *
On définit par récurrence le polynôme dérivé n fois de P :
P ( 0)  P

( n 1)
 ( P ( n ) )'
n  N *, P



Remarque : si on considère la fonction P : R  C , on remarque que ( P)'  P'
x P ( x )
B) Propriétés
 Si deg P  n , alors P (n ) est constant, non nul si et seulement si deg P  n .
En effet :
Si P  an X n  an 1 X n 1  ...  a1 X  a0 ,
Alors P'  nan X n 1  (n  1)an 1 X n 2  ...  a1
Donc si deg P  n  1 , alors deg P '  n  1 , d’où par récurrence deg P ( n )  0 .
 0
Et si deg P  
, alors P' 0 .
 
 ( P  Q)'  P'Q'
 ( P  Q) ( k )  P ( k )  Q ( k )
 (.P)'  .P'
 (.P) ( n )  .P ( n )
k
 ( P  Q)'  P' Q  PQ'  ( PQ) ( k )   Cki P (i )Q ( k i )
i 0
m 1
 ( P )'  mP' P (m  1)
 ( P(Q))'  Q'P' (Q)
m
Démonstration :
(1) On a : x  R , ( P  Q)' ( x)  P' ( x)  Q' ( x)
Donc ( P  Q)' P'Q' a une infinité de racines, donc ( P  Q)'  P 'Q' .
De même, (2), (3), (4), puis par récurrence pour les dérivées k-ièmes.
Pour (5), la démonstration ne convient pas si Q n’est pas à coefficients réels.
Dans ce dernier cas (et aussi dans les autres) :
P(Q)   ak Q k
kN
 a kQ' Q
Soit ( P(Q))'  Q'  a kQ
Donc ( P(Q))' 
kN *
k 1
k
k 1
kN *
k
(d’après (1), (2), (4))
 Q' P' (Q) .
Remarque :
0 si i  p

p (i )
( X )   p!
X p i si 0  i  p
 ( p  i)!
0 si i  p
Ainsi, D (i ) ( X p )(0)  
 p! si i  p
C) Formule de Taylor pour les polynômes
Théorème :
Soit P un polynôme, soit n  N tel que n  deg P .
Alors pour tout a, b  K :
P(a  b)  P(a)  bP' (a)  b2! P' ' (a)  ...  bn! P( n) (a)
Démonstration :
- Si a  0 :
n
On veut montrer que x  K , P( x)  P(0)  xP' (0)  ...  xn! P( n) (0)
2
n
n
P   ak X k .
k 0
Donc pour tout p  N :
n
D ( p ) ( P )   ak D ( p ) ( X k )
k 0
Donc D( p ) ( P)(0)  p!a p . Donc a p 
D ( p ) ( P)(0)
.
p!
- Cas général :
On pose Q( X )  P(a  X ) .
Alors k  N , Q( k ) ( X )  P ( k ) (a  X ) (car (a  X )'  1 )
Q ( k ) (0) k
x
k!
k 0
n
P ( k ) (a) k
Soit x  K , P(a  x)  
x
k!
k 0
n
Donc x  K , Q( x)  
Théorème (plus général) :
Soit P  K [ X ] . Soit n  N tel que n  deg P . Alors, pour tous A, B  K [ X ] :
P ( k ) ( A) k
B .
k!
k 0
Démonstration :
Pour tout x  K , on a :
n
P( A  B)  
P ( k ) ( A( x))
k!
k 0
(d’après le théorème précédent avec a  A(x) et b  B (x ) )
n
P( A( x)  B( x))   ( B( x)) k
D’où l’égalité des polynômes formels P ( A  B )
n
et
 Bk
k 0
P ( k ) ( A)
puisqu’ils
k!
coïncident sur K.
D) Application à la multiplicité
Théorème :
Soient P  K [X ] \ 0 ,   K et k  N * . Alors  est racine d’ordre au moins k
de P si et seulement si : P (0) ( )  P (1) ( )...  P ( k 1) ( )  0
Par conséquent,  est racine de P d’ordre exactement k si et seulement si :
P (0) ( )  P (1) ( )...  P ( k 1) ( )  0 et P ( k ) ( )  0 .
Démonstration :
Soit n  N tel que n  deg P et n  k . Alors :
P( X )  P(  ( X   ))
( X   ) k 1 ( k 1)
( X   )n (n)
 P( )  ( X   ) P' ( )  ... 
P
( )  ... 
P ( )
(k  1)!
n!





k
polynôme R de degré  k 1
polynôme divisiblepar ( X   )
Donc R est le reste dans la division euclidienne de P par ( X   ) k .
On a donc les équivalences :
 est racine d' ordre au moins k de P  ( X   ) k divise P
R0
P ( i ) ( )
  ( X  )
0
i!
i 0
k 1
i
P ( i ) ( )
0
i!
Pour la dernière équivalence (l’un des sens étant évident) :
k 1
k 1
P (i ) ( )
P (i ) ( )
Si  ( X   )i
 0 , alors x  K ,  ( x   )i
0,
i!
i!
i 0
i 0
 i   0, k  1 ,
P ( i ) ( )
0.
i!
i 0
k 1
P (i ) ( )
P ( i ) ( )
Ainsi,  X i
0.
 0 , d’où i   0, k  1 ,
i!
i!
i 0
k 1
donc y  K ,  y i
IV Polynôme scindé
A) Définition
Soit P  K [ X ] , de degré n  1.
On dit que P est scindé (dans K) lorsque P a toutes ses racines dans K, ce qui
équivaut à dire que P admet exactement n racines dans K en comptant les multiplicités
et aussi à dire qu’il existe p  N * , des éléments 1 ,  2 ,... p de K distincts, des éléments
p
1 ,  2 ,... p de N * et a  K * tels que P  a ( X  i )i (théorème de factorisation),
i 1
n
ou à dire qu’il existe n éléments 1 ,  2 ,... n de K et a  K * tels que P  a X   i .
i 1
Exemple :
X 3  1 est scindé dans C[ X ] mais pas dans R [ X ]
B) Relations entre coefficients et racines pour un polynôme scindé
1) Fonctions symétriques élémentaires
Soit n  N * . On définit les fonctions  1 ,  2 ,... n de K n dans K par les
formules :
n
 1 (1 , 2 ,...n )  1  2 ...  n   i
i 1
 2 (1 , 2 ,...n )  12  13 ...  1n  23  ...  2n  ...n 1n   i  j
i j
 3 (1 , 2 ,...n ) 
  
i j k
i
j
k
n
 n (1 , 2 ,...n )   i
i 1
Pour k  1, n ,  k (1 , 2 ,...n ) 
 
i1 i2
i1 i2 ... ik
...ik
Ces fonctions sont symétriques, c'est-à-dire :
Etant donnée f : K n  K , on dit que f est symétrique lorsque :
( x1 , x2 ,...xn )  K n , s  Sn , f ( xs (1) , xs ( 2) ...xs ( n) )  f ( x1 , x2 ...xn ) .
Ce sont les fonctions symétriques élémentaires sur n éléments en vertu d’un
résultat (hors programme) : toutes les fonctions symétriques rationnelles sur n
éléments sont fonctions rationnelles des  k .
2) Le résultat
Soit P un polynôme scindé de degré n  1 de K [ X ] , d’écriture développée
n
n
k 0
i 1
P   ak X k et d’écriture factorisée P  an  ( X  i ) .
Pour alléger, on notera  k pour  k (1 , 2 ,...n ) , pour tout k  1, n .
Les formules suivantes donnent un lien entre les  k et les a k :
 a n 1  a n 1
a n 2  a n  2
...(1) k a n k  a n  k
En effet :
n
(X   )  X
i
i 1
n
 (1   2 ...   n ) X n 1   i  j X n  2 
...  (1) k
i j

i1
i1  i2 ...  ik
i ...i X n  k  ...  1 2 ... n
2
k
3) Réciproque
Soient u1 , u2 ,...un  K . Alors les solutions du système suivant, d’inconnues
x1 , x2 ,...xn dans K :
  1 ( x1 , x2 ,...xn )  u1
 ( x , x ,...x )  u

n
2
(S ) :  2 1 2


 n ( x1 , x2 ,...xn )  un
sont exactement les racines du polynôme :
P  X n  u1 X n 1  ...  (1) k uk X n  k  ...(1) n un
Démonstration :
- Si x1 , x2 ,...xn sont racines de P, alors ( x1 , x2 ,...xn ) est solution de (S)
d’après le 2).
n
-
Si ( x1 , x2 ,...xn ) est solution de (S), alors le polynôme P   ( X  xi )
i 1
s’écrit sous forme développée X n  u1 X n 1  ...  (1) n u n .
V Factorisation dans C[ X ]
et R [ X ] .
A) Dans C[ X ] .
Théorème d’Alembert :
Tout polynôme de degré  1 à coefficients dans C a au moins une racine. Par
conséquent, les polynômes de C[ X ] de degré  1 sont tous scindés dans C[ X ]
(démonstration par récurrence)
Enoncé équivalent :
Les polynômes irréductibles unitaires de C[ X ] sont exactement les polynômes
X  ,   C .
On dit que C est algébriquement clos.
B) Dans R [ X ] .
Soit P  R [ X ] .
Soit   C , racine de multiplicité  . Alors  est aussi racine de P, et avec la
même multiplicité  .
Démonstration :
n
-
Si  est racine de P, où P   ak X k , alors :
k 0
P( )  an   an 1
n 1
n
 ...  a0   0
0
Donc P ( )  0 , et :
P( )  a n n  a n 1n 1  ...  a0 0
 a n  n  a n 1 n 1  ...  a0  0
 P ( )
Soit P( )  0 . Donc  est racine de P.
- Si  est racine de multiplicité   1 de P, alors :
P( )  P' ( )  ...  P ( 1) ( )  0 et P ( ) ( )  0 .
Donc P( )  P' ( )  ...  P ( 1) ( )  0 (étape précédente appliquée aux P (k ) ), et
P ( ) ( )  0 car sinon P ( ) ( )  P ( ) ( )  0 .
Soient P  R [ X ] et  une racine de P. Peut-on affirmer que ( X   )( X   )
divise P ?
C’est vrai uniquement si   R , car sinon dans ce cas là    et donc on peut
avoir ( X   ) qui divise P mais pas forcément ( X   ) 2 .
Théorème :
Les irréductibles de R [ X ] sont exactement les polynômes de degré 1 et de degré 2
sans racine réelle. Ainsi, tout polynôme P à coefficients réels de degré  1 s’écrit de
m
manière unique P  a Pi où a  R * et où Pi  R 2 [ X ] \ P  R 2 [ X ], ( P)  0.
i 1
Démonstration :
- Déjà, si P  aX  b ( (a, b)  R * R ), alors P est irréductible.
(a, b, c)  R * R  R
Si P  aX 2  bX  c avec  2
, alors P est irréductible dans
b  4ac  0
R [ X ] (sinon il s’écrirait ( . X   )( '.X   ' ) et aurait deux racines réelles)
- Soit maintenant P un polynôme de degré  2 .
Selon le théorème d’Alembert, il y a au moins une racine   C .
 Si   R , alors P  ( X   )Q où deg Q  n  1  1 , donc P n’est pas
irréductible.
 Si   C \ R , alors  est aussi racine de P, et    donc ( X   )( X   )
divise P.
Or, ( X   )( X   )  X 2  (   ) X    R[ X ] .
Donc P  ( X 2  sX  p)Q où Q  R [ X ] , s  R et p  R .
Donc deg Q  n  2 .
Donc soit n  2 et P est irréductible, soit n  3 et P n’est pas irréductible.
Il n’y a donc pas d’autres polynômes irréductibles.
Plus précisément :
Soit P  R [ X ] , de degré n  1 et de coefficient dominant a. Alors P admet n
racines dans C, regroupées ainsi :
1 ,  2 ,... p racines réelles de multiplicités 1 ,  2 ,... p .
1 , 1 ,  2 ,  2 ,... p ,  p racines complexes de multiplicités 1 , 1 ,  2 ,  2 ... q ,  q .
Avec
p
q
i 1
p
i 1
 i   i  n . Alors :
P  a ( X  i )
i
 a ( X  i )
i 1
(X   ) (X   )
i
i
i 1
p
q
i
i
i 1
i
q
(X
2
 si X  pi ) i
i 1
Où i  1, q , si   i   i  2 Re(  i )
pi   i  i   i
2
Algorithme de Horner :
n
Soit P : x   ak x k
k 0
L’algorithme permet de calculer la valeur d’une fonction polynomiale en un point
de K avec un minimum d’opérations élémentaires :
(...((( an x  an1 ) x  an2 ) x  ...) x  a1 ) x  a0
On a ainsi au pire n multiplications et n additions.
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