Des chiffres et des lettres (1) Fabienne Bergmann Compter est un

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Des chiffres et des lettres (1)
Fabienne Bergmann
Compter est un jeu d'enfant. Sachons toutefois que les chiffres en hébreu ont un genre
et s'accordent avec le nom qui les suit. On dit ‫( עשרה שקלים‬assara shekalim), dix
shekels, au masculin et ‫( שלוש מחברות‬chaloch mahbarot), trois cahiers, au féminin. Si
le chiffre n'est pas suivi d'un nom, il sera toujours au féminin. Vous prendrez la ligne
‫( תשע‬técha), le neuf pour venir chez moi au ‫( חמישים וחמש‬hamichim vehamech), au 55,
de ma rue, mais s'il le faut, vous prendrez ‫( שני אוטובוסים‬chné autobusim), deux
autobus. Compliqué ? Commençons donc par compter jusqu'à trois.
Un se dit ‫( אחת‬éhat) au féminin, ‫( אחד‬éhad) au masculin. Ce chiffre a engendré les
mots ‫( אחדות‬ahdout), unité, ‫( אחידות‬ahidout), uniformité, ‫( אחיד‬ahid), uniforme,
constant, ‫( יחד‬yahad), ensemble, simultanément, conjointement, et également ‫יחיד‬
(yahid), seul, unique. Pour commander une chambre d'hôtel pour une seule personne
on demandera ‫( חדר ליחיד‬heder leyahid), ‫( מיטת יחיד‬mitat yahid) est un lit pour une
personne et une prière qu'on dit seul, sans participer à un quorum (minyan) est ‫תפילת‬
‫( יחיד‬tefilat yahid). Les ‫( יחידים‬yehidim) sont les quelques rares, ceux qu'on compte sur
les doigts d'une main. ‫( ייחוד‬yihoud) est la singularité, la particularité, la
caractéristique et le mot désigne dans le langage de la Loi le fait pour un homme et
une femme de se trouver seul dans un espace fermé. ‫( חדר ייחוד‬héder yihoud) est la
pièce où se retrouvent les mariés après la Houpa. Le mot ‫( התייחדות‬hityahadout),
isolement, solitude a un sens très proche. Il s'emploie pour désigner la permission
pour un prisonnier de "s'isoler" avec sa femme et peut aussi prendre le sens mystique
de communion avec Dieu. Quant au mot ‫( יחידה‬yehida), unité, ce peut être une unité
militaire ou le département d'une société ou d'une administration.
Le chiffre deux, ‫( שתיים‬chtayim) au féminin, ‫( שניים‬chnayim) au masculin, sans oublier
la forme d'état construit ‫( שתי בנות‬chté banot), deux filles, ou ‫( שני בנים‬chné banim),
deux garçons, a engendré le mot ‫( שנייה‬chniya), la seconde, ainsi nommée parce
qu'elle est le résultat d'un deuxième partage du cadran après celui des minutes, comme
c'est également le cas en français ou dans d'autres langues. Rappelons que le verbe
‫( לִ ְשנֹות‬lichnot), signifie répéter, étudier ou citer une seconde fois.
Le chiffre trois, ‫( שלוש‬chaloch) a donné le mot ‫( שליש‬chalich), qui dans la Bible (Isaïe
40 : 12) désigne une mesure non déterminée ou un officier de "troisième" ordre et
dans le Talmud un fiduciaire ou un médiateur. C'est aujourd'hui un adjudant dont la
fonction est purement administrative, la ‫( שלישות‬chalichout) étant l'administration
militaire. ‫( ְשליש‬chlich) est le tiers ou le trimestre.
De la forme araméenne du chiffre trois, ‫( תלתא‬talata) dérive le mot ‫( תלתן‬tiltan), le
trèfle.
Le lien entre le chiffre trois et l'expression fleurie ‫( בדמעות שליש‬bedmaot chalich),
pleurer amèrement, reste mystérieux. L'expression, traduite par: un déluge de larmes,
apparaît dans Psaumes 80 : 6.
La suite au prochain numéro…
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