Pessah, matza, maror
Fabienne Bergmann
Que veulent dire, ces mots que nous évoquons le soir du Séder ?
Pessah vient du verbe (passah), passer par-dessus, laisser de côté, sauter une
étape. Dieu passa par-dessus les portes des Hébreux et aujourd'hui, le tribunal peut,
dans certaines circonstances, décider (lifsoah al chelav
haédouyot), supprimer l'étape des témoignages, par exemple, s'il le juge superflu.
On pourrait croire que pour sauter une étape, passer d'une chose à une autre, une
bonne constitution athlétique est indispensable. Mais l'hébreu, souvent paradoxal,
semble nous détromper là-dessus puisque la racine se retrouve dans le mot
(pisséah), le boiteux.
Le verbe (passah) apparait dans l'expression (lifsoah al chté
haseifim) – littéralement : passer sur les deux pensées – signifiant : être inconsistant
ou indécis, ne pas trancher entre deux possibilités contraires et adhérer tantôt à l'une,
tantôt à l'autre.
(matza) est la galette de Pessah, pain de misère et de liberté. La même racine, à la
forme piyel, a donné le verbe (mitza), exploiter, user au maximum. On peut donc
(lematzot kichourim), mettre ses dons à profit, les user à fond ; le
chercheur peut (lematzot èt kol haemtzaim
chéamdou lerechouto), utiliser tous les moyens dont il disposait. Le verbe peut aussi
prendre le sens d'épuiser : (mitzinou èt hanossé), on a épuisé le sujet ;
et de celui qui, ayant déjà tout donné ou tout reçu, ne vibre plus dans le cadre où il se
trouve – lequel peut être travail, hobby, lien personnel, etc. – on dira
(hou mitza èt atzmo). Le mot peut aussi signifier extraire, sortir l'essence de quelque
chose en le pressant à fond. Par exemple, (ha
rokéah mitza èt hanozlim chel hatsémah harefoui), le pharmacien a extrait les liquides
de la plante médicinale. Le terme s'applique aussi au juge ou à l'appareil judiciaire
dans l'expression (mitza èt hadin), signifiant donner la peine maximale,
juger sévèrement.
(maror) est un légume (herbes amères, raifort ou autre) que nous devons
consommer au Séder pour nous rappeler
(chémirerou hamitzrim èt hayé avoténou bemitzrayim), soit : que les Egyptiens ont
rendu amère la vie de nos ancêtres en Egypte. Le mot (maror) apparait aussi dans
l'expression châtiée (heékhil / hisbia oto merourim),
signifiant: lui a rendu la vie amère, lui a causé du chagrin et qu'on pourrait traduire,
presque littéralement par : lui a fait manger de la vache enragée.