T U M E U R S U R O L O G I Q U E S Tumeurs urologiques P. Beuzeboc* CANCER DE LA PROSTATE Le cancer de prostate a été particulièrement à l’honneur avec, en session plénière, les résultats des études de phase III montrant l’impact du docétaxel sur la survie des cancers hormonorésistants. Curiethérapie Les résultats de la plus ancienne cohorte de 223 patients traités par curiethérapie par implantation d’iode 125 ou de palladium 103 associée à une radiothérapie externe (1987-1994) ont été mis à jour (abstract 4567), montrant, avec un suivi de 15 ans, une survie sans récidive biologique respectivement de 86 %, 72 % et 47 % pour les formes à bas risque (PSA 10 ng/ml, Gleason < 7 et stade < T2c), à risque intermédiaire (PSA > 10 ou Gleason 7 ou T T2c) et à haut risque (deux ou plus de deux facteurs intermédiaires). Ces résultats sont encourageants sur le contrôle à distance dans les formes à bas risque, qui sont les seules indications de la curiethérapie. Radiothérapie Deux communications orales étaient particulièrement importantes du fait de leur impact potentiel sur les pratiques. R. Nguyen (abstract 4503) s’est intéressé au risque potentiel du retard à la mise en place d’une radiothérapie à visée curative sur le devenir du PSA par l’étude de 460 patients traités dans trois institutions par radiothérapie conformationnelle (70,4 Gy), sans hormonothérapie, pour un cancer localisé de la prostate classé T1c-T2. Le critère de jugement principal était l’échec biologique défini selon les critères de l’ASTRO. Il a pu être montré, avec un suivi médian de 4,3 ans (1,5-9,8 ans), qu’un retard d’approximativement 3 mois affectait significativement l’évolution du PSA chez les patients classés à haut risque. Pour les 161 patients de cette catégorie, la survie sans récidive biologique était estimée à 53 % quand le délai était inférieur au délai moyen (2,5 mois), versus 38 % en cas contraire (p = 0,037). Pour les patients à bas risque, la différence n’était pas significative (p = 0,23). On peut néanmoins se poser la question, pour ces formes, du délai tolérable… M. Bolla (abstract 4504) a présenté les résultats en termes de survie sans progression d’une très importante étude de phase III de l’EORTC posant le problème de l’intérêt d’une radiothérapie postopératoire immédiate après prostatectomie radicale dans les * Institut Curie, Paris. La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - no 3 - mai-juin 2004 stades à fort risque de rechute locale (invasion capsulaire, marges chirurgicales envahies, envahissement des vésicules séminales). La limite d’âge était fixée à 75 ans. Mille cinq patients ont été randomisés entre une radiothérapie conventionnelle de 60 Gy en 6 semaines (41 patients ont reçu une dose différente) et une surveillance. Le PSA médian postopératoire était de 0,2 ng/ml. Avec un suivi médian de 5 ans, la survie sans progression biologique était significativement en faveur du bras radiothérapie (deux dosages supérieurs au nadir) : 72,2 % (IC 95 % : 67,7-76,8 %) versus 51,8 % (IC 95 % : 46,8-56,8 %) (HR = 0,52, p < 0,0001). La survie sans récidive clinique à 5 ans était également améliorée de 74,8 % à 83,3 % (IC 95 % : 0,52-0,89 %, HR = 0,68, p = 0,004). Il est nécessaire d’attendre les résultats à distance pour mesurer l’impact sur la survenue des métastases et la survie globale. Hormonothérapie Hormonothérapie immédiate ou différée Messing et al. (abstract 4570) ont actualisé les données de l’étude randomisée EST3886 (N Engl J Med 1999;341:1781) comparant, chez des patients traités par prostatectomie N+ sur le curage ganglionnaire, une castration immédiate (dans les 3 mois) à une castration différée à l’apparition des métastases. Ils ont pu conclure que le bénéfice constaté à 7 ans se retrouvait à 10 ans, avec des différences significatives en termes de survie globale (72,4 % versus 49 %, p = 0,025) et spécifique (87,2 % versus 56,9 %, p = 0,001) en faveur du traitement précoce. Déprivation hormonale et risque fracturaire M.R. Smith (abstract 4507) a comparé une cohorte de 3 887 patients traités par déprivation hormonale pour un cancer de prostate non métastatique, dont le traitement avait débuté entre 1992 et 1994, à un groupe de 7 774 patients présentant également un cancer de prostate non métastatique, mais non traités par déprivation hormonale. Il a montré que l’incidence des fractures la dernière année de l’analyse était de 83 % dans le premier groupe versus 56 % pour le groupe contrôle et qu’un traitement par agoniste de la LH-RH donné plus de 3 ans augmentait plus fortement le risque qu’un traitement d’un an. Chimiothérapie Ont été présentées en session plénière les deux études de phase III comparant le docétaxel associé ou non au phosphate d’estramustine au schéma de référence de Tannock mitoxantrone-prednisone. L’étude internationale TAX327 (abstract 4) a servi à l’enregistrement récent du docétaxel par la FDA. Elle comparait, chez 119 T U M E U R S U des patients présentant un cancer de prostate hormonorésistant en progression (20 % des patients ont même reçu du phosphate d’estramustine), un bras docétaxel 75 mg/m2/21 jours et un bras docétaxel hebdomadaire (30 mg/semaine, 5 semaines sur 6) au schéma de référence mitoxantrone-prednisone. La suppression gonadique était maintenue alors que tous les autres traitements hormonaux étaient arrêtés. L’objectif principal était la survie globale, les objectifs secondaires étant le taux de réponse sur la douleur, la diminution du PSA supérieure ou égale à 50 %, la réponse des cibles mesurables (RECIST) et la qualité de vie. L’hypothèse statistique d’un hazard-ratio de 0,75 avec une puissance de 90 % avait prévu 1 006 patients analysés après 535 décès. Comme attendu, la toxicité hématologique est plus importante dans le bras “toutes les 3 semaines” (32 % de neutropénies grades 3-4), sans s’accompagner de neutropénies fébriles (3 %) (figure 1). La survie globale est significativement augmentée dans le bras docétaxel tous les 21 jours (18,9 mois versus 16,4 mois, p = 0,009), alors qu’elle ne l’est pas pour le schéma hebdomadaire. Le docétaxel améliore de plus le contrôle des douleurs (35 % versus 22 %, p = 0,01), la réponse biologique (45 % versus 32 %, p < 0,0005) et la qualité de vie. Le docétaxel à la dose de 75 mg/m2 toutes les trois semaines devient la nouvelle référence dans le traitement du cancer de prostate hormonorésistant. Figure 1. Courbe de survie de l’étude TAX327. L’étude SWOG Intergroup 99-16 (abstract 3) avait également comme critère de jugement principal l’amélioration de la survie, les critères de jugement secondaires étant la survie sans progression, le taux de réponse objective et la réponse biologique sur le PSA. Elle s’adressait également à des tumeurs hormonorésistantes (il était permis une ligne de chimiothérapie, à l’exception des taxanes, du phosphate d’estramustine et des anthracyclines). Sept cent soixante-dix patients ont été randomisés dans le but de montrer 33 % d’amélioration de la survie avec une puissance de 80 % (test unilatéral) entre docétaxel 60 mg/m2/21 jours (dose pouvant être augmentée lors des cycles suivants à 70 mg/m2) associé au phosphate d’estramustine (280 mg x 2/j 5 jours débuté à J-1) et le schéma de Tannock. Les patients étaient stratifiés en fonction du type de progression (mesurable ou évaluable versus 120 R O L O G I Q U E S biologique seule), d’une échelle de douleur (NCI CTC “Pain scale”) et du PS. La survie globale s’est montrée significativement meilleure dans le bras docétaxel-estramustine (18 mois versus 16 mois, HR : 0,80, p = 0,01), de même que la survie sans progression (6 mois versus 3 mois, p < 0,0001) et le taux de réponse biologique (50 % versus 27 %, p < 0,0001). Par contre, il faut relever 15 % de complications cardiovasculaires malgré l’utilisation préventive de coumadine (2 mg/j) après un amendement en cours d’essai. Néanmoins, il n’y a pas eu plus de décès toxiques. Il faut relever deux autres études contrôlées importantes concernant le docétaxel. L’étude de phase II randomisée de J.C. Eymard (abstract 4603) comparant, chez 92 patients chimio-naïfs présentant un cancer de prostate hormonorésistant, une association de docétaxel (70 mg/m2/21 jours) et de phosphate d’estramustine (560 mg per os pendant 5 jours, démarré la veille du docétaxel) au docétaxel seul (75 mg/m2/21 j), a montré un taux de réponse biologique en intention de traitement deux fois supérieur (68 % versus 27,3 %) dans le bras combiné, avec également une amélioration de la médiane du temps jusqu’à progression (5,7 mois versus 2,9 mois). Il faut noter que tous les patients étaient traités par dexaméthasone (8 mg/j) et que, avec une couverture anticoagulante préventive par warfarine (1 mg/j), le taux de complications thromboemboliques a été de 2,1 % (un seul patient). Birch et al. (abstract 4522) ont comparé, dans une étude de phase II randomisée ayant inclus 62 patients chimio-naïfs, deux schémas d’association docétaxel-estramustine : – bras A : estramustine 280 mg/m2 de J1 à J5 et de J22 à J25 + docétaxel 36 mg/m2 J2, J9, J16, J23, J30, J37 toutes les 8 semaines ; – bras B : estramustine 280 mg/m2 de J1 à J5 + docétaxel 70 mg/m2 toutes les 3 semaines. Les taux de réponse biologique (52 % et 66 %, p = 0,35) et les médianes de survie (16,4 mois et 13,2 mois, p = 0,42) ne sont pas significativement différents. Seules les leuconeutropénies diffèrent (4 % versus 40 %, p = 0,0022). Ces résultats sont superposables à ceux de l’étude rapportée par S. Oudard à l’ASCO 2002. Concernant les autres associations avec docétaxel : Kasimis et al. ont rapporté un taux de réponse biologique de 41 % avec une association de docétaxel hebdomadaire (30 mg/m2 3 semaines suivi d’une semaine de repos) et de célécoxib à fortes doses (400 mg x 2/j, 28 jours) chez 22 patients, et Ferrero un taux de réponse de 56 % sur les 19 premiers patients évaluables avec une association tous les 28 jours de docétaxel (35 mg/m2 J1, J8, J15) et de capécitabine (1 250 mg/m2 de J5 à J18). Parmi les nouveaux cytotoxiques potentiellement actifs, deux communications orales ont concerné l’épothilone B (BMS-247550). Les épothilones représentent une nouvelle classe d’agents non taxanes agissant sur la polymérisation de la tubuline, avec une activité dans des modèles expérimentaux à la fois sensibles et résistants aux taxanes. Deux études présentées en session orale ont montré l’efficacité potentielle de l’épothilone B. L’étude de phase II du SWOG (abstract 4510) a retrouvé, avec un schéma d’utilisation de l’épothilone B à la dose de 40 mg/m2 La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - no 3 - mai-juin 2004 T U M E U R S U R O L O G I Q U E S tous les 21 jours, un taux de réponse de 34 % (14/41) chez des patients hormonorésistants chimio-naïfs. Vingt-neuf pour cent des patients sont sortis de l’étude pour toxicité. Les toxicités de grades 3/4 les plus fréquentes ont été, en dehors de la toxicité hématologique, la fatigue (3 patients) et les neuropathies périphériques sensitives (3 patients). La survie sans progression a été de 8 mois (IC 95 % : 6-11 mois). Kelly (abstract 4509) a présenté les résultats d’une étude de phase II randomisée ayant inclus 99 patients et comparant l’épothilone B (35 mg/m2 à J2, toutes les 3 semaines) seule ou associée au phosphate d’estramustine (280 mg x 2/j, 5 jours) sous couverture de coumadine (2 mg/j). Le taux de réponse biologique obtenu a été de 48 % (21/44 patients, IC 95 % : 32,9-63,5 %) avec l’épothilone et de 69 % pour la combinaison (31/45 patients, IC 95 % : 55,2-82,3 %). La tolérance a été dominée par la toxicité neurologique apparaissant après une médiane de trois cycles. Cancer de la vessie localement avancé ou métastatique chez des patients “unfit” Dans la pratique quotidienne, le standard thérapeutique gemcitabinecisplatine des carcinomes avancés de la vessie n’est pas applicable, en particulier en raison des altérations fréquentes de la fonction rénale et de l’âge, expliquant la nécessité de disposer d’alternatives thérapeutiques efficaces dans cette population dite “unfit”. Alors que l’oxaliplatine ne s’est pas montré efficace en seconde ligne métastatique, un groupe espagnol (abstract 4544) a testé, chez 47 patients “unfit” (la plupart en raison d’une clairance de la créatinine inférieure à 50 ml/mn), un protocole non néphrotoxique associant gemcitabine (1 200 mg/m2 J1 et J8) et oxaliplatine (100 mg/m2 à J1 toutes les 3 semaines). Les taux de réponse objective préliminaire (62 % sur les 24 premiers patients évaluables) sont encourageants. Notons que le GETUG, en France, vient d’activer un protocole GEMOX multicentrique dans cette indication. Traitements ciblés L’atrasentan est un inhibiteur spécifique du récepteur A de l’endothéline 1. Dans une étude (M96-594) de phase II randomisée contre placebo dans les cancers de prostate métastatiques hormonorésistants publiée par Carducci (J Clin Oncol 2003;21:679-89), il avait été rapporté une amélioration en termes de temps jusqu’à progression. L’étude de phase III MOO-211 (abstract 4508) ayant randomisé 809 patients (408 traités par atrasentan 10 mg/j, 401 par placebo) devait permettre de le vérifier. Les deux groupes étaient bien équilibrés. En intention de traiter, la différence en termes de temps jusqu’à progression n’est pas significativement différente (p = 0,123). Par contre, en poolant ces résultats dans une méta-analyse (1 097 patients), l’atrasentan permet de retarder le temps jusqu’à progression (196 jours versus 129 jours, p = 0,021) et d’améliorer la qualité de vie avec un très bon profil de tolérance, les effets secondaires étant souvent limités à une rhinite, des céphalées et des œdèmes périphériques. Lors de la discussion, cette présentation a été critiquée. Cette métaanalyse sur deux études ne permet pas de tirer de conclusion. Il faudra attendre les résultats de l’étude de phase III (MOO-244) conduite dans les cancers hormonorésistants non métastatiques pour mieux évaluer l’intérêt thérapeutique de l’atrasentan… Chimiothérapie de deuxième ligne En deuxième ligne métastatique, il n’existe pas de standard, et il paraissait logique de tester un protocole de paclitaxel hebdomadaire, l’association paclitaxel-carboplatine ayant démontré une certaine efficacité en première ligne métastatique. Les résultats d’une étude française de phase II du GETUG (abstract 4619) chez 45 patients utilisant le paclitaxel à la dose de 80 mg/m2 en une heure J1, J8, J15/28 jours ont montré un taux de réponse très faible, avec seulement deux réponses objectives sur 37 patients évaluables, mais peut-être un bénéfice clinique en termes de qualité de vie. CANCER DE LA VESSIE Le cancer de la vessie a été le parent pauvre, avec une seule communication orale. Radiothérapie dans les cancers de la vessie localisés Chung et al. (abstract 4519) ont rapporté l’expérience rétrospective du Princess Margaret Hospital de Toronto sur une série de 131 patients présentant une tumeur vésicale classée T2-T3a N0 M0 : 108 patients traités par radiothérapie seule, 20 par radiothérapie et chimiothérapie concomitante par cisplatine, 3 par chimiothérapie néoadjuvante. Les survies globale, spécifique et sans récidive à 5 ans étaient respectivement de 44 %, 58 % et 49 %. Au total, rien de bien neuf… La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - no 3 - mai-juin 2004 Nouveaux traitements ciblés Machiels et al. (abstract 4615) ont rapporté une analyse intermédiaire d’une étude européenne de phase II évaluant un traitement oral de deuxième ligne par lapatinib (GW57016), un inhibiteur double, puissant et sélectif d’erbB1 et erbB2, pris oralement à la dose de 1 250 mg par jour. Dans les cancers de la vessie, la surexpression d’erbB1 et erbB2 a été corrélée à un stade évolué et à un grade élevé. Ils sont exprimés respectivement dans 72,2 % et 44,5 % des cas, avec une expression combinée des deux dans 33,9 % des cas. Cinquante-cinq patients ayant une tumeur exprimant en immunohistochimie erbB1 ou erbB2 (99 patients screenés), en progression après une première ligne avec platine, ont été inclus. L’analyse sur les 30 premiers patients a retrouvé un bénéfice clinique (PR plus stabilisation) chez 37 % d’entre eux (11/30). À suivre… CANCER DU TESTICULE Chimiothérapie des séminomes de petits stades Un cycle de carboplatine fait aussi bien que la radiothérapie dans les stades I Le traitement de référence des stades I de séminomes du testicule fait appel à une radiothérapie postorchidectomie (20-25 Gy). La surveillance étroite peut être une alternative, sachant que le taux de rechute sera alors de l’ordre de 20 %. R.T. Oliver ( a b s121 T U M E U R S U tract 4517) a présenté les résultats d’une très importante étude MRC/EORTC ayant randomisé 1 477 patients entre juin 1996 et mars 2001 : 904 patients traités par radiothérapie, 573 par carboplatine (AUC = 7). Les deux groupes étaient bien équilibrés. Avec une médiane de suivi de 4 ans, il n’existe en intention de traiter aucune différence en termes de survie sans rechute (figure 2). Néanmoins, même si un cycle unique de carboplatine apparaît comme une alternative, il faudra s’assurer de l’absence de rechute tardive avant d’en faire un standard… R O L O G I Q U E S 3 ans. Même si 4 EP reste une alternative, en France, dans les TGNS, le standard reste 3 BEP suite aux résultats de l’essai contrôlé du GETUG. Place du curage L’équipe de L. Bérard (abstract 4589) a, dans une étude rétrospective de 153 patients, retrouvé la présence de tératome dans 40 à 50 % des pièces histologiques de curage ganglionnaire, même pour des maladies minimales, et recommande un curage dans tous les cas où existent des anomalies radiologiques détectables. Traitements des rechutes C. Théodore et al. (abstract 4534) ont rapporté les résultats d’une étude de phase II multicentrique de paclitaxel (175 mg/m2) et d’oxaliplatine (130 mg/m2) chez 26 patients (16 réfractaires, 10 avec multiples rechutes). Il faut relever une réponse partielle, et deux patients en rémission à 13 et 23 mois après chirurgie de sauvetage. Figure 2. Étude MRC/EORTC comparant radiothérapie et carboplatine dans les séminomes de stade I. Courbe de survie sans récidive. Dans le même registre, Aparicio (abstract 4518) a rapporté les données préliminaires d’une expérience multicentrique espagnole sur 300 patients présentant un séminome de stade I. Quatre-vingtseize patients (32 %) n’ayant pas de facteur de risque ont été simplement surveillés. Les autres, 125 sujets (42 %) avec une tumeur de plus de 4 cm, 31 avec une atteinte du rete testis (10 %), 48 (16 %) avec les deux, ont reçu deux cycles de carboplatine à 21 jours d’intervalle (AUC 7). Avec un recul médian de 20 mois, il a été constaté quatre rechutes (4,2 %) dans le groupe surveillance et cinq (2,4 %) dans le groupe traité, aucun décès. Toutes les récidives étaient rétropéritonéales, avec une médiane de 8 mois (4 à 19 mois). Le même groupe espagnol (abstract 4530) a traité 71 patients présentant un séminome de stade IIA/B avec une chimiothérapie par 3 à 4 cycles à base de platine (EP : 62 patients, BEP : 9 patients). Avec un suivi médian de 46 mois, les survies sans progression et globale étaient respectivement de 91 % (IC 95 % : 83-98 %) et de 98 % (IC 95 % : 89-100 %). TGNS. Formes à bon pronostic G.V. Kondagunta (abstract 4533) a repris les données du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (MSKCC) concernant le traitement par 4 EP des tumeurs germinales classées à bon pronostic (séminomes et tumeurs non séminomateuses) selon la classification internationale (IGCCCG). Sur 291 patients, avec un recul médian de 7,5 ans, 16 (5 %) sont décédés (7 d’autres causes). Sur les 144 patients traités entre novembre 1982 et décembre 1990 (suivi médian : 12,9 ans), il n’a été constaté aucune récidive après 122 Séquelles à distance Les autres présentations concernaient essentiellement les séquelles à distance des traitements. Il n’a pas été mis en évidence de différence notable entre les groupes en ce qui concerne la sexualité dans une série de 1 224 patients norvégiens (abstract 4526) surveillés ou traités par curage, chimiothérapie standard ou radiothérapie. Pour la fertilité, dans une enquête également norvégienne (abstract 4527) par questionnaire portant sur 1 433 patients, dont 556 espéraient une paternité, 361 (65 %) ont eu un à sept enfants. Pour les patients sans troubles de l’éjaculation, le taux actuel de paternité avec 3 à 4 cycles de chimiothérapie standard à base de platine est de 82 % à 15 ans ; il n’est que de 14 % en cas d’anéjaculation. Seuls 12 patients (2 %) ont eu recours au sperme congelé pour y parvenir. Au total, il n’y a pas de séquelles s’il n’y a pas de trouble de l’éjaculation au curage avec les traitements habituels. Par contre, pour les patients ayant eu un traitement intensifié, l’expérience allemande rapportée par Kollmansberger (abstract 4537) montre que, après le traitement, seulement 48 % des patients se montrent très satisfaits de leur sexualité, que 27 % ont une vie sexuelle pauvre, avec un manque de libido dans 34 % des cas. Seuls deux patients ont eu des enfants au décours… CANCER DU REIN Traitements ciblant VEGF, son récepteur et d’autres récepteurs à tyrosine kinase Fondé sur un rationnel biologique fort, trois études ont démontré l’efficacité d’une inhibition ciblée du récepteur du VEGF et d’autres récepteurs à tyrosine kinase dans les cancers du rein métastatiques, ouvrant de nouvelles et importantes perspectives thérapeutiques. VEGF et son récepteur représentent une cible privilégiée pour des traitements spécifiques dans les cancers du rein. Chez les mutants VHL, il existe une stabilisation de HIF-1, véritable “chef d’orchestre” de gènes activés par l’hypoxie. Il se fixe notamment sur la région régulée par l’hypoxie des gènes VEGF et PDGF, représentant la base du traitement ciblé de molécules comme le SU 11248 et le BAY 43-9006, qui ont pour substrat les tyrosine kinases des récepLa Lettre du Cancérologue - Volume XIII - no 3 - mai-juin 2004 T U M E U R S U teurs de VEGF, PDGF et c-KIT. Dans la première communication, Motzer (abstract 4500) a présenté les résultats d’une étude multicentrique de phase II ayant inclus 63 patients après échec d’une première ligne utilisant une cytokine et traités par du SU 11248 oral à la dose de 50 mg par jour selon un schéma 4 semaines de traitement/2 semaines sans traitement. Le SU 11248 est un inhibiteur de tyrosine kinase présentant une activité à la fois sur les récepteurs de VEGF, de PDGF, de KIT et de FLT3. Ce traitement s’est révélé être bien toléré et actif, avec un taux de réponse partielle (RECIST) de 33 % (plus 37 % de stabilisation supérieure à 3 mois). Il faut également insister sur un temps médian jusqu’à progression de 8,3 mois, particulièrement élevé en comparaison des contrôles historiques du MSKCC publiés récemment (J Clin Oncol 2004;22:454). “Pendant les 15 dernières années, j’ai conduit plusieurs études sur le cancer du rein, mais aucune d’entre elles n’a démontré ce degré d’activité avec un agent en monothérapie”, a déclaré R.J. Motzer. Pour confirmer son intérêt thérapeutique, une étude de phase III doit comparer en première ligne métastatique le SU 11248 à l’interféron. La deuxième communication (abstract 4501) concernait le BAY 43-9006 (sorafenib), un nouvel inhibiteur de RAF kinase et de VEGFR. Il a été récemment démontré qu’il inhibait aussi d’autres cibles (VEGFR, PDGFR ß, FLT-3, c-KIT). Cette étude avait pour but de déterminer si le sorafenib inhibait la croissance de patients présentant une tumeur solide stable après un traitement de 12 semaines. Les patients étaient randomisés entre BAY 43-9006 et placebo. Un intérêt à la fois en termes de réponse, avec une présentation nouvelle mieux adaptée (figure 3) aux traitements ciblés, et en termes de durée de contrôle de la maladie a été souligné. R O L O G I Q U E S poursuivi en cas de réponse ou de progression. Le taux de réponse rapporté avec le bévacizumab seul étant de 10 %, l’hypothèse statistique était d’obtenir un taux de réponse supérieur ou égal à 20 %, avec une survie sans progression supérieure ou égale à 9 mois. Soixante-deux patients (68 % traités en première ligne) ont été inclus (métastases pulmonaires 77 %, hépatiques 32 %, osseuses 27 %, surrénaliennes 18 %, ganglionnaires 18 %). Cinquante-sept patients (92 %) ont reçu au moins deux cycles (8 semaines). Le taux de réponse objective a été de 21 % (58 patients évaluables), avec, de plus, 45 % de stabilité ou de réponse mineure. Avec une médiane de suivi de 11 mois (5 à 16 mois), la survie sans progression à 6 mois et un an était respectivement de 67 % et de 50 %. La tolérance a été globalement bonne. Les effets secondaires ont été essentiellement de grade 1/2, cutanés (rash 89 %), digestifs (diarrhées 71 %, nausées-vomissements 32 %) et une hypertension (27 %). Par contre, il faut relever seulement 5 % d’hémorragies de grade 3/4. Les auteurs ont conclu que cette combinaison apparaît comme plus efficace que chacun des traitements utilisés seuls et comme étant l’un des traitements les plus actifs et les mieux tolérés dans la prise en charge du cancer du rein métastatique. Si l’on résume les données de ces trois présentations, avec les temps de survie sans progression rapportés s’ouvre une nouvelle ère thérapeutique justifiant, dans un premier temps, confirmation dans le cadre d’études de phase III. Dans les prochaines années, il faudra s’attacher à essayer de prolonger cette survie sans progression par de nouveaux essais d’association de traitements ciblant spécifiquement les différents récepteurs des voies de transmission du signal de prolifération et de l’angiogenèse. D’autres traitements ciblés en sont à des stades de développement plus précoces, comme le CCI-779, un inhibiteur de m-TOR (abstract 4513), ou l’infliximab, anticorps monoclonal anti-TNF (abstract 4514). La thalidomide Une étude randomisée américaine (abstract 4616) portant sur 353 patients a montré que l’addition de thalidomide (escalade de dose de 200 mg/j à 1 000 mg/j maximum) à de l’interféron à faible dose (1 000 000 unités x 2/j) augmente de façon modeste la survie sans progression (3,8 mois versus 2,8 mois, p = 0,04), mais pas la survie globale (10,8 mois versus 12,2 mois, p = 0,93). Elle diminue par contre la qualité de vie. Figure 3. Étude BAY 43-9006 dans les cancers du rein métastatiques. Évaluation de la réponse. P O U R E N S A V O I R P L U S … Prostate La troisième communication (abstract 4502) évaluait, dans un essai de phase II, l’association du bévacizumab (10 mg/kg toutes les deux semaines) et d’erlotinib (Tarceva®, 150 mg/j) dans des cancers exclusivement à cellules claires, en première ou deuxième ligne métastatique (après immunothérapie ou chimiothérapie). Une évaluation était faite à la neuvième semaine, et le traitement était La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - no 3 - mai-juin 2004 Sylvester JE, Blasko JC, Grimm PD et al. Fifteen year follow up of the first cohort of localized prostate cancer patients treated with brachytherapy. Proc ASCO 2004;Abstr.4567. Nguyen PL, Whittington R, Koo S et al. The impact of a delay in initiating radiation therapy on prostate-specific antigen outcome for patients with clinically localized prostate cancer. Proc ASCO 2004;Abstr.4503. Bolla M, Van Hoppel H, Van Cangh P et al. Does post-operative radiotherapy after radical prostatectomy improve progression-free survival in pT3N0 prostate cancer (EORTC 22911). Proc ASCO 2004;Abstr.4504. 123 T U M E U R S U Messing EM, Manola J, Sarosdy M et al. Immediate hormonal therapy versus observation after radical prostatectomy and pelvic lymphadenectomy for node positive prostate cancer: at 10 years results of EST3886. Proc ASCO 2004; Abstr.4570. Smith M, Lee W, Krupsi T et al. Association between androgen deprivation therapy and fracture risk: a population-based cohort study in men with nonmetastatic prostate cancer. Proc ASCO 2004;Abstr.4507. Petrylak DP, Tangen C, Hussain M et al. SWOG 99-16: randomized phase III trial of docetaxel/estramustine versus mitoxantrone/prednisone in men with androgen-independent prostate cancer. Proc ASCO 2004;Abstr.3. Eisenberger MA, De Wit R, Berry W et al. 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