Chimiothérapie du cancer Un nouveau standard ? de la prostate hormonorésistant.

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3 questions à. ..
Chimiothérapie du cancer de la prostate
hormonorésistant. Un nouveau standard ?
Entretien avec P. Beuzeboc (Service d’oncologie, Institut Curie, Paris)
> Réalisé par G. Mégret
À un stade métastatique, le cancer de la prostate hormonorésistant
reste difficile à traiter compte tenu
d’une chimiorésistance importante.
Au mois d’octobre 2004, les résultats
de deux études de phase III ont été
publiés dans le New England Journal
of Medicine. Une étude a comparé
l’association docétaxel-estramustine
à l’association mitoxantrone-prednisone, et l’autre a comparé le docétaxel et la mitoxantrone associés à
de la prednisone. Dans ces deux études,
la survie globale est augmentée chez
les patients traités par docétaxel.
Le Dr Philippe Beuzeboc, oncologue
médical à l’Institut Curie, a accepté
de nous détailler les résultats de ces
études qui ont, ou auront, un impact
sur nos pratiques quotidiennes.
» (Petrylak DP, Tangen CM et al. Docetaxel
and estramustine compared with
mitoxantrone and prednisone for advanced
refractory prostate cancer. N Engl J Med
2004;351(15):1513-20;
» Tannock IF, de Wit R, et al. Docetaxel plus
prednisone or mitoxantrone plus
prednisone for advanced prostate cancer.
N Engl J Med 2004;351(15):1488-90.
Pourriez-vous commenter les résultats de l’essai clinique
de D.P Petrylak et al (N Engl J Med, octobre 2004) sur l’association docétaxel + estramustine versus mitoxantrone +
prednisone dans le cancer de la prostate métastatique
hormonorésistant ?
Une seconde étude (I.F. Tannock) compare l’association
docétaxel + prednisone à mitoxantrone + prednisone
sur le même type de malades. Y a-t-il une différence
significative sur le critère principal d’évaluation, à
savoir la durée de survie ?
Cet essai SWOG - Intergroup 99-16 avait comme critère de
jugement principal une amélioration de la survie. Sept cent
soixante-dix patients ont été randomisés entre docétaxel
60 mg/m2/21 j (dose pouvant être augmentée lors des
cycles suivants, jusqu’à 70 mg/m2) associé au phosphate
d’estramustine (280 mg x 2/j 5 jours débuté à J-1) et
la combinaison de référence mitoxantrone + prednisone.
La survie globale s’est montrée significativement
meilleure dans le bras docétaxel-estramustine (17,5 mois
versus 15,6 mois, HR : 0,80 ; p = 0,02), de même que
la survie sans progression (6,3 mois versus 3,2 mois,
p < 0,0001) et le taux de réponse biologique (50 % versus 27 %, p < 0,0001) mais au prix d’une toxicité plus
importante notamment cardiovasculaire (15 % versus
7 %, p = 0,001).
La seconde étude TAX-327 internationale, qui a inclus
1 006 patients, avait aussi la survie globale pour critère
de jugement principal. Celle-ci est significativement
augmentée dans le bras docétaxel à la dose de 75 mg/m2
tous les 21 jours (18,9 mois versus 16,4 mois, p = 0,009),
alors qu’elle ne l’est pas pour le schéma hebdomadaire.
(30 mg/m2, 5 semaines sur 6). Cette amélioration de la survie en intention de traiter a été retrouvée quels que soient
le groupe d’âge, l’existence ou non de douleurs, l’indice de
performance. Le docétaxel améliore en outre le contrôle des
douleurs (35 % versus 22 %, p = 0,01), la réponse biologique (45 % versus 32 %, p < 0,0005) et la qualité de vie.
La médiane de survie du groupe docétaxel-estramustine
confirme ce qui était attendu à partir des données des
études de phase II (c’est-à-dire une survie aux alentours
de 18 mois) ; celle du groupe mitoxantrone s’est révélée,
en revanche, supérieure à celle rapportée dans les précédentes études de phase III (11-12 mois). Les explications
n’en sont pas claires (20 % des patients asymptomatiques,
traitements croisés…).
La principale critique à formuler concerne le choix de la
dose de docétaxel qui n’est pas optimale.
Ces deux études ne souffrent pas de discussion sur la preuve
apportée de la supériorité du docétaxel par rapport à la
mitoxantrone, confirmant les données des études de phase II
en termes de réponse biologique, de meilleur contrôle des douleurs et d’amélioration de la qualité de vie. Elles l’imposent
comme le nouveau standard selon le schéma “tous les 21 jours
à la dose de 75 mg/m2 “, le schéma hebdomadaire n’apportant
pas de bénéfice significatif en termes de survie, et l’association avec le phosphate d’estramustine étant grevée d’un taux
de complications cardiovasculaires trop élevé.
■
Ces deux études permettent-elles de conclure définitivement à la supériorité du docétaxel sur la mitoxantrone ?
La Lettre du Cancérologue - Suppl. Les Actualités au vol. XIV - n° 3 - juin 2005
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