QUALITÉ DE VIE, OU COMMENT TENIR COMPTE
DU PROBLÈME HUMAIN
Le questionnaire de qualité de vie QLQ C 30-LC 13, issu d’un
travail de recherche de la European organization for research
and treatment of cancer, s’est progressivement imposé comme
le principal questionnaire d’autoévaluation de la qualité de vie
(31). Comme toutes les échelles psychométriques, l’évaluation
de la qualité de vie est imparfaite. Cependant, le questionnaire
reste un outil de référence et sa réalisation est considérée par
beaucoup de revues scientifiques comme un critère de qualité
des études menées dans le traitement des cancers bronchiques.
Son utilisation reste limitée, car la plupart des études qui l’ont
utilisé ont observé une grande difficulté pour maintenir une sur-
veillance de la qualité de vie avec cet outil. La raison en est,
bien évidemment, qu’il est difficile d’imposer à un malade
affecté par une détérioration évidente de son état clinique de
remplir un questionnaire qui ne ferait que souligner la dure réa-
lité des faits. Il est frappant d’observer, dans une étude récem-
ment rapportée par Raphaël Rossel, que le nombre médian de
questionnaires de qualité de vie remplis est proportionnel au
temps jusqu’à la progression. Cela suggère que l’évaluation de
la qualité de vie est limitée à la période sans progression.
Un autre moyen d’analyse de la qualité du résultat d’une chi-
miothérapie existe : l’étude du temps sans symptôme et sans
toxicité (TWiST) (32). Cette approche propose de considérer
que la survie globale d’une cohorte de malades recevant un
même traitement se décompose en trois états différents :
– l’état tox, qui correspond à la période de temps consacrée par
les malades à leur traitement ou au temps de survie gâché par
une toxicité notoire (telle qu’une réhospitalisation pour sepsis) ;
– l’état REL, qui correspond à l’état de récidive ou de progres-
sion de la maladie ;
–l’état WiST, qui correspond à une période de bien-être, sans
symptôme et sans toxicité. C’est l’état d’utilité réelle du traitement.
Il ressort parfois d’une analyse de qualité TWiST qu’un traite-
ment A, apparemment supérieur à un traitement B en termes de
survie globale, perd de son intérêt en analyse TWiST si ladite
amélioration de survie globale s’est accompagnée d’une aug-
mentation de la toxicité.
PEUT-ON SE PASSER DU CISPLATINE AUJOURD’HUI ?
Il n’y a pas d’argument suffisant pour proposer une alternative
aux doublets fondés sur le cisplatine dans le traitement des
CBNPC localement avancés ou métastatiques. Dans l’attente, il
faut donc soigneusement gérer et prévenir la toxicité résultant
de ce cytotoxique pivot. Le tableau III regroupe un certain
nombre de propositions susceptibles de limiter les effets
toxiques immédiats ou retardés et de rendre le traitement plus
acceptable.
Des études de phase III comparant un schéma classique fondé
sur le cisplatine à un nouveau schéma ayant démontré une
bonne tolérance en phase I et une bonne activité en phase II
sont nécessaires. L’association gemcitabine-docétaxel pourrait
être ce type de nouveau schéma. L’intégration de la notion de
qualité doit faire partie des études futures. ■
Les auteurs remercient Mme A. Mas pour son aide à la préparation
du manuscrit.
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109
La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 3 - juin 1999
Tableau III. Règles d’administration du cisplatine limitant la toxicité.
✓
Hyperhydratation
✓
Reconstitution du CDDP dans du NaCl 3 %
✓
Débit 1 mg/min
✓
Mannitol
✓
Contrôle de l’émésis immédiat et retardé
✓
Prise en compte de la clairance