mise au point m ise au point Les anévrysmes intracrâniens : diagnostic et traitement endovasculaire Intracranial aneurysms: diagnosis and endovascular treatment ● ● L. Picard*, R. Anxionnat*, S. Bracard* ▶ points forts ▶ Le diagnostic clinique précoce de l’hémorragie par rupture d’un anévrysme intracrânien reste l’élément essentiel, seul capable de réduire la mortalité et la morbidité fonctionnelle. ▶ À la phase aiguë, la scanographie associée à l’angioscanner permet, dans d’excellentes conditions, de poser le diagnostic de l’hémorragie et de dépister l’anévrysme responsable. L’IRM associée à l’angio-IRM donne des résultats comparables. ▶ De plus en plus d’anévrysmes sont découverts avant rupture, alors qu’ils sont asymptomatiques. Cela incite à réaliser des traitements préventifs chez des sujets normaux. Le risque thérapeutique doit par conséquent être très faible. ▶ L’anévrysme intracrânien est la conséquence d’une lésion de la paroi vasculaire dont les étiologies sont multiples. Les indications doivent être adaptées à l’étiologie. Le traitement endovasculaire est dominé par l’occlusion endosacculaire par microcoils, mais l’occlusion du vaisseau porteur et l’inversion de flux gardent des indications. Le traitement neurochirurgical par clip reste indiqué lorsque le traitement endovasculaire n’est pas possible en raison de l’angioarchitecture ou lorsque l’évacuation d’un hématome associé à la rupture est impérative. ▶ Le vasospasme, fréquente conséquence du saignement, bénéficie de moyens de prévention efficaces grâce à la nimodipine. Si, malgré cela, le vasospasme devient symptomatique, l’angioplastie doit alors être réalisée en extrême urgence. ▶ Le risque de récidive est apprécié de façon variable. Un traitement complémentaire est réalisé dans une proportion qui varie de 10 à 30 % des cas. mots-clés : Anévrysmes intracrâniens – Diagnostic – Traitement – Embolisation. * Service de neuroradiologie diagnostique et thérapeutique, pôle neuro-tête et cou, CHU de Nancy. 212 ▶ summarY Because of the risk of brain hemorrhage due to its rupture, intracranial aneurysm remains a serious disease involving major vital and functional risks. The hemorrhage unfortunately is not always diagnosed at the time of the first acute episode of headache, often evocative but sometimes very misleading. The indication of CT scan or MRI must be extensive in order to avoid any diagnostic delay. More and more asymptomatic aneurysms are fortuitously discovered; this raises the problem of the therapeutic indication to prevent rupture and its justification. Despite the progress related to improvment of endovascular treatments, the therapeutic risk cannot be neglected. The embolisation using microcoils replaced 80% of the classical neurosurgical indications. The indications must be discussed according to angioarchitecture and etiology as well as the patient’s personality. Associated with a better prevention of vasospasm, the new techniques improved the vital and functional prognosis in a disease whose screening must be carried out with discernment. Keywords: Intracranial aneurysms – Diagnosis – Treatment – Embolization. L es anévrysmes intracrâniens ont bénéficié des progrès techniques réalisés au cours des dernières décennies, tant dans le domaine de la réanimation médicale que dans celui des techniques d’imagerie. Bien sûr, l’hémorragie intracrânienne par rupture anévrysmale continue d’être responsable d’un lourd taux de mortalité et de morbidité. En dehors de la mort subite, il existe encore des retards au diagnostic qui expliquent les états cliniques plus graves secondaires à la deuxième, voire à la troisième hémorragie. Cela pose le problème des indications de la scanographie dans les céphalées brutales. La multiplication des examens de dépistage scanographiques ou IRM augmente le nombre des anévrysmes de découverte fortuite. Le schéma thérapeutique de base reste identique : traiter La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 les conséquences de l’hémorragie, ce qui ressort de la réanimation au sens large, et traiter parallèlement le plus vite possible l’anévrysme responsable afin d’éviter la récidive de l’hémorragie. La neurochirurgie à crâne ouvert laisse de plus en plus de place au traitement endovasculaire. Mais, si les progrès ont permis d’améliorer le pronostic, il persiste des risques thérapeutiques qui expliquent la difficulté des indications dans les anévrysmes asymptomatiques. définition : anatomie pathologique, épidémiologie (1) Un anévrysme correspond à une dilatation artérielle localisée. Les anévrysmes ne sont pas des malformations congénitales, mais des lésions acquises dont l’origine se situe au niveau de défauts de la média, plus fréquents chez les sujets âgés. Ces lésions sont favorisées par une dégénérescence de la limitante élastique interne provoquée par l’athérosclérose et/ou par une prédisposition génétique. D’autres facteurs favorisants sont d’ordre hémodynamique ; s’y ajoutent l’hypertension et les angiodysplasies. Il est classique d’opposer les anévrysmes sacculaires aux anévrysmes fusiformes. Les anévrysmes sacculaires, caractérisés par leurs différents paramètres (taille, forme, localisation…), se retrouvent préférentiellement au niveau des bifurcations artérielles, au sommet de l’angulation d’une courbe ou en regard d’un flux dominant. Ils se développent au niveau d’une zone de fragilité de la paroi vasculaire, qui devient alors particulièrement fine. Ces sacs anévrysmaux communiquent avec le vaisseau porteur par l’intermédiaire d’un orifice, appelé collet, dont la taille par rapport au diamètre du sac anévrysmal va conditionner les possibilités, les difficultés et les risques du traitement endovasculaire. Les parois des anévrysmes ont une architecture anatomique altérée : l’analyse microscopique y retrouve l’intima et l’adventice alors que, à partir du collet, la média et la limitante élastique interne ont souvent disparu. Dans les anévrysmes anciens ou géants, on retrouve une prolifération fibrohyaline, des calcifications et parfois des phénomènes de thrombose intrasacculaire. classification des anéVrYsmes sacculaires La classification des anévrysmes sacculaires, souvent considérés à tort comme congénitaux, est un élément majeur de la stratégie thérapeutique. Elle repose sur la taille, la forme, la localisation et l’étiologie. La taille est facile à déterminer en raison de la grande précision des techniques modernes d’imagerie. La classification la plus simple distingue trois groupes en fonction du diamètre : les petits anévrysmes, inférieurs à 10 mm ; les gros, de 10 à 25 mm ; les géants, supérieurs à 25 mm. Certains distinguent quatre groupes : les petits anévrysmes, inférieurs à 7 mm de La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 diamètre ; les moyens, de 7 à 12 mm ; les gros, de 13 à 24 mm ; les géants, au-dessus de 25 mm. Les anévrysmes géants s’expriment par leur effet de masse, mais leur paroi joue un rôle actif, responsable de microhémorragies intrapariétales et de réactions œdémateuses du tissu cérébral périanévrysmal. Ces anévrysmes peuvent générer des microthromboses périanévrysmales, justifiant parfois un traitement antiagrégant. mise au point m ise au point La forme d’un anévrysme sacculaire, difficile à classer, permet parfois de localiser la rupture. Un anévrysme arrondi ou ovalaire récemment rompu présente souvent une petite protubérance distale correspondant au lieu de la rupture. En présence d’une hémorragie sous-arachnoïdienne et d’anévrysmes multiples, l’aspect irrégulier d’un anévrysme sera un argument en faveur de la responsabilité de cet anévrysme vis-à-vis du saignement. La localisation exacte, intra- ou extradurale, d’un anévrysme constitue un élément fondamental. Au niveau carotidien, il faut déterminer si l’anévrysme est intra- ou extracaverneux, en sachant qu’un anévrysme intracaverneux peut déborder les limites du sinus caverneux et entraîner une hémorragie sousarachnoïdienne. Parmi les anévrysmes sacculaires intraduraux, environ 90 % siègent au niveau de la circulation antérieure, sur le cercle de Willis ou à proximité immédiate. La localisation la plus fréquente reste l’artère communicante antérieure (30 à 35 % des cas). On trouve ensuite la partie distale de la carotide interne (30 %), incluant l’origine de la communicante postérieure, puis les anévrysmes carotido-ophtalmiques (5 % des cas). Les anévrysmes du siphon carotidien sont bilatéraux dans 20 % des cas. Par ordre de fréquence décroissant, on trouve ensuite la trifurcation de l’artère cérébrale moyenne, puis la fosse postérieure, avec en premier lieu l’extrémité supérieure du tronc basilaire, et enfin l’artère cérébelleuse postéro-inférieure. Le lieu d’implantation de l’anévrysme sur la paroi vasculaire participe à la compréhension de la forme du sac anévrysmal et parfois de la physiopathologie. Les anévrysmes sacculaires se développent souvent au niveau des bifurcations artérielles ainsi qu’en regard de courbures particulièrement marquées, ce qui correspond au maximum des contraintes hémodynamiques qui s’exercent sur des zones de fragilité pariétale. Les étiologies. Les anévrysmes se développant au niveau d’un tronc vasculaire, indépendamment de toute bifurcation, sont plus fréquemment fusiformes, ce qui constitue un argument en faveur de leur origine athéromateuse ou disséquante. Cependant, d’authentiques dissections peuvent avoir l’apparence d’un anévrysme sacculaire. Dans le doute, l’angiographie ne suffira pas toujours, et il faudra savoir recourir à l’IRM pour tenter de préciser l’étiologie. L’anévrysme disséquant est la conséquence d’une rupture de l’intima et de la limitante élastique interne, responsable d’un hématome intrapariétal. Si la rupture s’étend à la média et à l’adventice, elle peut entraîner une hémorragie sous-arachnoïdienne, puis, secondairement, la formation d’un faux anévrysme. Tout ce qui peut léser la paroi artérielle peut 213 mise au point m ise au point entraîner des lésions anévrysmales de nature, de localisation et de forme très variées : artériosclérose, hypertension artérielle, traumatismes, artérites, infections, angiodysplasies, etc. Les anévrysmes infectieux, regroupés sous le terme de “mycotiques”, sont rares (2 à 4 % des cas). Secondaires à des emboles septiques, ils se rencontrent dans certaines pathologies telles les endocardites infectieuses. L’infection est favorisée par le syndrome d’immunodéficience acquise. L’embolie septique sera souvent distale au niveau des artères de très fin calibre, ce qui va provoquer une inflammation avec nécrose des différentes tuniques, aboutissant à la formation d’un sac anévrysmal. Le traitement repose sur l’antibiothérapie, parfois associée à l’occlusion sélective. Les anévrysmes métastatiques sont exceptionnels, en relation soit avec des myxomes cardiaques soit avec des choriocarcinomes. Les anévrysmes traumatiques, rares chez l’adulte (1 % des cas), sont plus fréquents chez l’enfant (15 % des cas). Étant donné la variété des anévrysmes traumatiques, le traitement doit être adapté à la lésion : l’occlusion vasculaire totale de l’axe principal reste parfois la meilleure solution. diagnostic neuroradiologique (2) De nombreux examens permettent de détecter la présence d’un anévrysme intracrânien : les ultrasons, la scanographie, l’IRM et l’angiographie sélective. Leurs indications ne sont pas les mêmes s’il s’agit de rechercher un anévrysme rompu ou de détecter un anévrysme non rompu. Il importe d’utiliser l’examen qui permettra à la fois de détecter tous les anévrysmes existants et de déterminer au mieux la stratégie à proposer aux patients : abstention, approche endovasculaire ou neurochirurgie à crâne ouvert ? L’ultrasonographie Doppler n’est ni un examen de dépistage ni un examen de première intention. Le scanner X reste le meilleur examen de première intention pour le diagnostic de l’hémorragie méningée en situation d’urgence : non invasif, en dehors de l’injection d’un contraste iodé, il ne nécessite ni sédation ni anesthésie générale. L’angioscanner associé permet d’obtenir rapidement une excellente étude angioarchitecturale du ou des anévrysmes présents. Lorsqu’une hémorragie méningée est certaine et que la scanographie reste négative, l’indication d’une angiographie reste valable, car seule cette dernière est capable de détecter les quelques rares lésions qui échappent encore au scanner. L’IRM, dont l’acquisition est relativement longue, est plus difficile à utiliser en urgence chez des patients parfois agités ou confus. Elle peut donc nécessiter une sédation, voire une anesthésie générale. Le diagnostic d’une hémorragie discrète est plus difficile qu’au scanner. La présence de l’hypersignal dû à l’hémorragie sous-arachnoïdienne au moment de la période subaiguë peut masquer certains petits anévrysmes. En revanche, l’angio-IRM (3D TOF) est un excellent examen de dépistage des anévrysmes non rompus : sa sensibilité et sa spécificité sont supérieures à 85 % pour les anévrysmes de diamètre supérieur à 3 mm. L’angiographie 3D représente toujours le gold standard de l’exploration des anévrysmes. Le patient doit être totalement immobile, ce qui nécessite une sédation ou une 214 anesthésie générale. Les quatre pédicules artériels doivent être explorés, car des anévrysmes multiples sont décelés dans 20 à 30 % des cas. La série 3D permet d’obtenir toutes les informations nécessaires (implantation exacte, mensurations précises du sac et du collet, relations du sac avec les autres vaisseaux, etc.), puis de déterminer la meilleure incidence de travail pour traiter l’anévrysme. Même s’il est faible, le risque angiographique persiste, car l’angiographie reste une méthode invasive et le risque zéro n’existe toujours pas. Les principales complications restant les accidents thromboemboliques et les dissections, il persiste un risque cumulé variable, de 0,3 % à 1,8 %, de complications neurologiques transitoires et définitives. Les risques généraux en rapport avec l’injection d’iode (choc anaphylactique, insuffisance rénale…) doivent, autant que faire se peut, être prévenus. diagnostic et stratégie d’approche de la rupture anéVrYsmale Cette rupture va se manifester par la triade symptomatique classique : céphalées, nausées et/ou vomissements, syndrome méningé. Décrites comme un coup de poignard occipital, les céphalées peuvent être frontales, occipitales ou même sacrées, quelle que soit la topographie de l’anévrysme rompu. L’hémorragie peut entraîner des signes neurologiques focalisés, fonction de sa localisation et de son importance. En dehors de la mort subite ou trop rapide pour permettre l’hospitalisation (40 % des cas), le tableau clinique sera très variable. Si certains patients sont pratiquement normaux, d’autres présenteront des troubles de la conscience ainsi que des déficits neurologiques fonctionnels d’intensité variable. Dès la moindre suspicion d’hémorragie sousarachnoïdienne, il faut réaliser en extrême urgence un scanner ou une IRM afin de confirmer le diagnostic d’hémorragie et préciser l’étiologie en détectant l’anévrysme responsable. Stratégie thérapeutique Lorsqu’un anévrysme vient de se rompre, il convient d’agir rapidement sur deux fronts : tout d’abord, lutter contre les conséquences néfastes de l’hémorragie, puis, dans un second temps, en traiter la cause, afin d’éviter la récidive hémorragique. Le traitement initial visera donc la conservation des fonctions vitales (respiration, alimentation, déglutition), tout en luttant contre la fréquente hypertension intracrânienne par la mise en place d’une dérivation ventriculaire externe et en commençant la prévention du vasospasme par l’administration de nimodipine. La tension artérielle sera contrôlée, adaptée aux antécédents du patient. La lutte contre toute forme de stress est extrêmement importante : le repos dans une ambiance calme, silencieuse, avec le minimum de lumière participe à la bonne mise en condition du patient. Ce dernier doit recevoir les informations nécessaires fondées sur le respect de la législation mais aussi sur le bon sens médical. À la période aiguë, il faut savoir répartir les informations, et par conséquent les prises de décision, entre le patient et son entourage. Il s’agit d’éviter d’augmenter l’anxiété La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 du patient, ce qui ne pourrait que lui nuire, en accentuant son stress et donc les risques de complications ou de récidive hémorragique précoce. L’urgence du traitement étiologique s’est modifiée au cours des dernières années. La quasi-totalité des équipes ont arrêté d’intervenir de nuit en extrême urgence au profit d’interventions décalées de 12 à 24 heures, afin de réaliser celles-ci dans les meilleures conditions possible. Ce délai est utilisé pour effectuer une réanimation minimale qui permet souvent de réaliser le traitement étiologique dans de meilleures conditions hémodynamiques. De plus, il est préférable de décaler l’intervention de quelques heures si cela permet de travailler avec une équipe compétente, reposée et au complet plutôt que de se lancer dans une intervention précipitée, effectuée avec une équipe incomplète et fatiguée sur un patient mal préparé. Traitement étiologique endovasculaire ou neurochirurgical Le traitement endovasculaire (3) vise à exclure le sac anévrysmal de la circulation, en le remplissant à l’aide de microcoils. Dans certains cas, l’exclusion se fait par l’intermédiaire d’une occlusion totale du vaisseau porteur ou par l’inversion du flux sanguin (occlusion des deux artères vertébrales pour traiter un anévrysme du tronc basilaire, par exemple). Le développement des microstents participe à des tentatives d’occlusion du collet anévrysmal s’accompagnant ou non de la mise en place de matériel dans le sac anévrysmal. Les coils pharmacologiquement actifs ont pour but d’associer au remplissage du sac anévrysmal la reconstitution d’une paroi endothéliale. Tous ces coils sont “détachables” à l’aide d’un mécanisme électrique, hydraulique ou mécanique… Sur le plan technique, les interventions endovasculaires sont réalisées sous anesthésie générale, non pas parce qu’elles sont douloureuses, mais parce qu’elles sont longues et nécessitent une immobilité absolue en raison de l’utilisation des techniques de soustraction. L’anesthésiste module la tension artérielle en fonction des nécessités peropératoires et adapte au mieux l’indispensable anticoagulation. Les complications thromboemboliques doivent être prévenues par l’anticoagulation systématique, même lorsqu’il s’agit d’une rupture anévrysmale hémorragique récente. L’extrémité d’un microcathéter placée dans la cavité anévrysmale permet d’y introduire un premier coil, choisi en fonction des paramètres angioarchitecturaux. Il conviendra ensuite de remplir au maximum le sac afin de l’exclure de la circulation. Le remplissage doit être suffisant pour éviter une éventuelle recanalisation ultérieure. Indications. Le choix entre clippage neurochirurgical de l’anévrysme et traitement endovasculaire tient à de nombreux paramètres, parmi lesquels l’habitude, les rapports entre les intervenants, leur disponibilité, l’angioarchitecture de l’anévrysme, l’âge du patient, son désir et celui de son entourage. L’angioarchitecture est le paramètre le plus important : la situation, la morphologie, le diamètre du sac et les relations précises de ce dernier avec les vaisseaux adjacents conditionnent les possibilités du traitement endovasculaire. De nombreuse équipes, dont nous faisons partie, traitent actuellement par voie endovasculaire tous les anévrysmes La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007 accessibles à ces techniques. Cela explique pourquoi l’angiographie est utilisée pour l’étude angioarchitecturale, immédiatement après confirmation de l’hémorragie au scanner, sans passer par l’étape angioscanographique. La chirurgie ne reste indiquée que lorsque le traitement endovasculaire est impossible ou trop dangereux pour des raisons techniques. Le choix du patient, auquel les deux méthodes doivent être proposées et expliquées, est essentiel, mais bien peu hésitent entre crâniectomie et ponction fémorale ! mise au point m ise au point Suites opératoires et suivi. En fonction du traitement réalisé, le patient sera placé sous traitement anticoagulant et/ou antiagrégant pour une durée variable au cours de la période postopératoire. La surveillance postopératoire immédiate doit être adaptée à l’état clinique initial du patient ainsi qu’à la qualité du résultat obtenu. Tout cela permet de décider si le patient doit être placé en soins intensifs ou en secteur tiède. En période posthémorragique, il conviendra de surveiller et de gérer la dilatation ventriculaire éventuelle par la mise en place d’une dérivation, voire par la réalisation de soustractions itératives de liquide céphalo-rachidien (LCR) par voie lombaire. De plus, si la surveillance clinique et ultrasonographique des vitesses circulatoires montre que la prévention du vasospasme par la nimodipine est insuffisante, il faudra parfois utiliser la thérapie “triple H” (hypertension, hypervolémie, hémodilution). L’angioplastie sera indiquée lorsque le traitement médical ne permet pas d’empêcher l’apparition de signes neurologiques déficitaires. diagnostic et stratégie d’approche des anéVrYsmes non rompus (4-5) S’ils sont symptomatiques, les anévrysmes non rompus se manifestent essentiellement par un effet de masse, lié à leur taille et à leur localisation. S’ils sont totalement asymptomatiques, la découverte en est alors purement fortuite, à l’occasion d’examens neuroradiologiques réalisés pour d’autres motifs. Ces anévrysmes représentent un problème de santé publique majeur en raison de leur fréquence : 2 à 4 % de la population. Évaluer le risque de rupture d’un anévrysme de découverte fortuite constitue un objectif important afin de déterminer la meilleure stratégie. Il existe une différence entre les patients qui ont des antécédents d’hémorragie sous-arachnoïdienne et ceux qui n’en ont pas : dans ces deux groupes, la taille de l’anévrysme intervient, avec une limite critique qui se situerait à 7 mm de diamètre. Le risque hémorragique est plus important chez les patients ayant des antécédents hémorragiques et dont l’anévrysme a plus de 7 mm de diamètre. La décision finale ne peut être prise qu’après concertation avec le patient et son entourage, car il ne faut pas oublier de prendre en compte les facteurs psychologiques. En effet, la découverte d’un anévrysme intracrânien constitue souvent un traumatisme majeur pour certains patients, qui veulent absolument “s’en débarrasser”, car continuer à vivre avec peut gravement perturber leur vie quotidienne. En dehors de l’indication de principe, les autres paramètres qui participent au choix du type de traitement sont identiques à ceux des anévrysmes rompus. 215 mise au point m ise au point suiVi à long terme La reprise du travail devra être envisagée en fonction de l’état clinique et des éventuelles séquelles. Le suivi ultérieur, qui dépend de la qualité du traitement initial, pourra, le plus souvent, être assuré de façon non invasive : angio-IRM réalisée à un an, puis à 3 ans, et ensuite tous les 5 ans. Le diagnostic de récidive sera porté sur la reperméabilisation du sac, tout en sachant qu’une compaction des coils est fréquente et qu’elle ne justifie le plus souvent pas de traitement complémentaire. Le taux de récidive radio-anatomique se situe entre 10 % et 20 % en fonction des critères retenus. Le risque de récidive hémorragique est faible, se situant entre 0,15 % et 1,6 %. techniques actuels ne nous permettent malheureusement pas encore d’analyser avec précision. La prochaine étape devrait nous faire abandonner les traitements purement mécaniques actuels au profit de traitements étiologiques probablement plus biologiques, plus efficaces et de moins en moins invasifs. ■ RéféRences bibliogRaphiques 1. Biondi A, Castillo M, Mukherji SK. Intracranial aneurysms. Neuroimaging clinics. Philadelphia: Elsevier Saunders, 2006:16-3. 2. Bracard S, Anxionnat R, Picard L. Current diagnostic modalities for intracranial aneurysms. Neuroimag Clin N Am 2006;16:397-411. 3. Spelle L, Piotin M, Mounayer C, Moret J. Saccular intracranial aneurysms: endovascular treatment – devices, techniques and strategies, management of complications, results. Neuroimaging Clin N Am 2006;16:413-51. conclusion Les immenses progrès technologiques réalisés au cours des dernières décennies ont radicalement transformé les conditions de traitement des anévrysmes intracrâniens, et les chances de guérison sans séquelles se sont considérablement accrues. Il s’agit d’une maladie de la paroi artérielle, paroi que nos moyens 4. International Study of Unruptured Intracranial Aneurysms (ISUIA) Investigators. Unruptured intracranial aneurysms: risk of rupture and risks of surgical intervention. N Engl J Med 1998;339:1725-33. 5. Raymond J, Meder JF, Molyneux AJ et al. Unruptured intracranial aneurysms: the unreliability of clinical judgment, the necessity for evidence, and reasons to participate in a randomized trial. J Neuroradiol 2006;33:211-9. La Lettre du Neurologue vous souhaite de tout cœur un bel été et vous remercie de la fidélité de votre engagement 216 La Lettre du Neurologue - Vol. XI - n° 6 - juin 2007