14 Actualité Santé Anévrysme de l’aorte abdominale Quelles orientations thérapeutiques ? Troisième cause de mortalité vasculaire dans les pays industrialisés, la rupture d’anévrysme de l’aorte abdominale représente à la fois une urgence et un véritable problème thérapeutiques de santé publique. L’ Infos ... L’anévrysme de l’aorte C’est une dilatation localisée de l’aorte. L’anévrysme peut siéger sur l’un des cinq segments de l’aorte : – l’aorte thoracique : partie ascendante , portion horizontale, portion descendante, – l’aorte abdominale sus-rénale (au dessus du départ des artères rénales), – l’aorte abdominale sous-rénale (au dessous du départ des artères rénales). atteinte progressive de la paroi artérielle due à la double action du tabac et du cholestérol, provoque à la fois une diminution du calibre interne (accumulation progressive de dépôts d’athérome) et une diminution de l’élasticité, ce qui entraîne une augmentation progressive du calibre sous l’effet de la pression. Cette augmentation de calibre est appelée anévrysme. Si les lésions athéroscléreuses sont très souvent associées à un anévrysme aortique ou aorto-iliaque (lésions coronaires, carotidiennes, artériopathie chronique oblitérante des membres inférieurs), la présence d’une activité élastasique dans les parois aortiques anévrysmales soulève le rôle des protéases dans la disparition progressive des fibres élastiques de la média. L’explication du mécanisme de l’altération primaire de la média reste mal connue ; l’existence de formes familiales fait suspecter dans certains cas une composante étiologique génétique. L’artère la plus touchée est donc l’artère aorte, plus grosse artère de l’organisme, qui part du cœur et se divise plus bas au niveau de l’abdomen pour donner les artères des membres inférieurs. Sa portion abdominale est plus souvent le siège d’anévrysmes dont la principale complication est la rupture. C’est en se fondant sur ce risque que doit être établie l’attitude thérapeutique. La taille de l’anévrysme Cette complication est surtout liée à la taille de l’anévrysme : élément décisionnel essentiel. Ce risque est en effet quasi nul si la taille est inférieure à 4 cm. Il est d’environ un pour cent par an si sa taille est située entre 4 et 4,9 cm. Il atteint 6,5 % pour les anévrysmes entre 5 et 6 cm et plus de 11 % si la taille est supérieure à 6 cm. Cependant, la taille ne doit plus être le seul critère de classement. D’autres éléments doivent être pris en compte (encadré). En face du risque de rupture, qu’elle est, préventivement, la meilleure attitude ? Chirurgie classique ou traitement endovasculaire ? C’est l’analyse du meilleur rapport bénéfice/risque qui permet de trancher, encore faut-il l’apprécier à sa Encadré 1. Il y a un risque de rupture d’AAA si : Diamètre Progression Tabac/BPCO Antécédent familial Hypertension Anatomie Risque faible < 5 cm < 0,3 cm/an Non Non Aucune Fusiforme Risque moyen 5/6 cm 0,3-0,6 cm/an Modéré 1 parent Contrôlée Sacciforme Risque élevé > 6 cm > 0,6 cm/an Sévère Plusieurs parents Non contrôlée Très excentré Encadré 2. Facteurs intervenant dans la mortalité opératoire Âge Femme Existence d’une comorbidité : insuffisance rénale insuffisance cardiaque insuffisance coronaire insuffisance respiratoire Expérience du chirurgien, spécificité du centre de soin Anatomie de l’anévrysme Professions Santé Infirmier Infirmière N° 60 • décembre 2004 juste valeur et ce n’est pas toujours facile. Autant d’éléments retrouvés dans les publications spécialisées existantes. De la méta-analyse de toutes les séries publiées dans les centres habilités, il ressort d’abord que la mortalité à 30 jours en cas de chirurgie élective de l’aorte abdominale, varie entre 1 et 5 % selon les séries. Un taux qui peut cependant grimper jusqu’à 10 %, en fonction de l’existence ou non de facteurs de risque (encadré 2). En tenant compte du tableau des risques, la mortalité peut ainsi varier de 1 à 2 % lorsqu’aucun facteur n’existe, à 40 % chez les personnes présentant une insuffisance rénale, coronaire et respiratoire. Ce qui donne, pour une chirurgie classique, une durée de vie de 18 ans pour un patient de 60 ans, mais seulement de 5 ans pour un opéré de 85 ans. En cas de chirurgie endovasculaire, la mortalité chute de 5 à 1 en moyenne. Une baisse qui porte également sur les taux de complications postopératoires, avec une diminution parallèle de la durée des séjours hospitaliers. Les résultats en termes de durée de vie étant, eux, identiques. Une autre différence entre les deux modes opératoires : la surveillance postprothèse doit être plus attentive afin de surveiller l’évolution de l’anévrysme. En effet, si 35 % d’entre eux régressent, si 40 % demeurent stables, 20 % ont tendance à augmenter. Une augmentation qui alors est souvent liée à une endofuite. En ce cas, une réintervention percutanée est possible, souvent souhaitable. L’amélioration des techniques prothétiques permet d’accroître encore la sécurité et les résultats de cette pratique. Comment, devant tous ces résultats, trancher ? Il convient, en l’état des connaissances actuelles, de réserver les endoprothèses aux patients à haut risque opératoire (> 3 à 5 %). Mais tout peut vite évoluer. JB Entretiens de Bichat Paris 2004