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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XIV - n° 5 - mai 1999
RÉUNIONS
il n’existe pas de corrélation entre la baisse de “fitness” et la
réduction de la charge virale. Cette situation apparemment para-
doxale pourrait résulter du fait que la charge virale reflète le
nombre de cellules infectées et non la vitesse de réplication du
virus. Il semble en outre que la perte de “fitness” s’accompagne
d’une diminution de la réplication et de la pathogénicité dans
le thymus, cela n’étant pas observé dans les lymphocytes san-
guins.
J.F. Delfraissy (Le Kremlin-Bicêtre) et C. Rouzioux (Paris)
ont ouvert la discussion sur les évaluations du traitement anti-
rétroviral. Sur le plan immunologique, la mesure de la réponse
CD4+ ou CD8+ spécifique du VIH serait d’un grand intérêt,
mais la complexité des techniques représente actuellement un
handicap. Sur le plan virologique, la quantification de l’ARN
intracellulaire et de l’ADN proviral permet d’évaluer la per-
sistance du virus chez les patients ayant un contrôle apparent
de la multiplication virale (charge virale indétectable). Les tests
de résistance phénotypique ou génotypique sont en train de se
mettre en place sans que l’on connaisse encore leur valeur pour
la prise en charge individuelle des patients. L’évaluation des
différentes situations et les stratégies thérapeutiques qui en
découlent sont résumées dans le tableau II.
PLACE DU PATIENT DANS L’OPTIMISATION DE LA PRISE
D’UN TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL
L’intérêt et le développement des études sur l’observance se
justifient par la fréquence de la non-observance (toutes patho-
logies confondues) et par ses conséquences sur l’efficacité thé-
rapeutique. M. Morin (Marseille) a développé l’intérêt, les
objectifs et les méthodes d’évaluation de l’observance. L’ob-
servance est une variable mesurable que l’on peut optimiser
pour comprendre et prévoir les résultats d’un traitement ainsi
que pour contrôler les éléments de la non-observance. Son éva-
luation fait appel à des méthodes subjectives qui autonomisent
et responsabilisent le patient (autoquestionnaire, perception des
patients et des médecins) et à des méthodes objectives coû-
teuses, contraignantes mais plus précises (contrôle biologique
et virologique, pilulier, système électronique de monitorage).
La méthode des cohortes (cohorte MANIF 2000 et APROCO)
permet d’améliorer la connaissance de certains facteurs de la
non-observance tels que des facteurs sociodémographiques
(âge, habitat), facteurs de comportement ( alcool, tabac), fac-
teurs psychologiques (état dépressif) et permet d’évaluer les
conséquences à long terme d’un traitement peu ou mal suivi.
Il ressort de ces études qu’une approche ouverte et plurimé-
thodologique de l’observance doit se développer. Les médecins
et les soignants doivent être très attentifs aux représentations
et aux attentes des patients en début de traitement afin d’opti-
miser leur prise en charge. J. Soletti (Paris) ainsisté sur le rôle
déterminant que joue la personne touchée par le VIH dans le
succès thérapeutique. Il paraît donc fondamental d’évaluer le
besoin des personnes pour une meilleure adaptation des actions.
Le patient doit être engagé dans sa propre prise en charge, ce
qui impose d’œuvrer pour une meilleure compréhension de l’in-
térêt d’un traitement et d’améliorer l’intégration du traitement
dans la vie quotidienne, ce qui devrait favoriser l’observance.
Les enquêtes visant à confronter la perception des personnes
en traitement à celle des professionnels de santé aideront pro-
bablement à une meilleure compréhension et donc à une
meilleure prise en charge des difficultés du patient. Soutenir le
désir de se soigner, soutenir le désir de vivre ( nécessité d’une
écoute adaptée et prise en charge multidisciplinaire) sont des
éléments fondamentaux de l’observance. Comme l’a souligné
C. Maslo (Paris), le patient ne doit pas être isolé face à un trai-
tement souvent contraignant aux effets secondaires nombreux,
avec notamment un retentissement métabolique et morphoty-
pique important (lipodystrophie). Les progrès thérapeutiques
d’une part, une meilleure appréciation et une meilleure connais-
sance des attentes et des besoins du patient d’autre part devraient
contribuer à améliorer sa prise en charge globale, et, comme
l’a rappelé J. Reynes (Montpellier), devraient aider la per-
sonne touchée “à mieux vivre avec...”.
J. Fabre, M. Segondy, Montpellier
Tableau II. Évaluation des différentes situations et stratégies
thérapeutiques.
Situation Fréquence Évaluation Stratégie
(%) à envisager
Échec virologique 10 Génotypage ? Méga-HAART
sévère
Patient multitraité Phénotypage ? Arrêt-recyclage
CV > 50 000 copies/ml
Échec virologique 20 Génotypage Adaptation
modéré +++ du traitement
Adhésion Aide à l’adhésion
au traitement
Échec immunologique < 5 Marqueurs IL2 ?
CV < 1 000 copies/ml immunologiques
Succès virologiques 20 Exploration Place des INNRT
avec effets secondaires métabolique par rapport
importants aux IP
Succès virologique 45 0* 0**
stable et prolongé
* Tests à évaluer dans ce contexte : CD4+ spécifiques VIH, ARN cellulaire, ADN
proviral, cellules infectées de manière latente.
** Stratégies à explorer dans ce contexte : renforcement thérapeutique, arrêt
thérapeutique transitoire, immunothérapie : vaccin, IL2.
CV : charge virale ; HAART : highly active antiretroviral therapy (traitement
rétroviral hautement actif) ; INNRT : inhibiteurs non nucléosidiques de la trans-
criptase inverse ; IP : inhibiteurs de protéase.