S Advanced Breast Cancer First Consensus Conference (ABC1)

626 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011
CONGRÈS
RÉUNION
Advanced Breast Cancer
First Consensus Conference
(ABC1)1
Lisbonne (Portugal), 3-5 novembre 2011
V. Diéras*
1 Cet article a été réalisé
avec le soutien institu-
tionnel du laboratoire Eisai
dans le respect total de
l’indépendance scientifi que
et éditoriale.
* Institut Curie, Paris.
S
ous l’égide de Fatima Cardoso s’est tenue
la première conférence de consensus sur le
cancer du sein métastatique. La survie des
patientes atteintes de cancer du sein métasta-
tique augmente, de même que leur qualité de vie.
Cependant, ces progrès ont été lents. La prise en
charge du cancer du sein métastatique – à la diffé-
rence de la prise en charge au stade précoce – a
souffert du manque de collaborations fortes sur le
plan international, tant sur le plan clinique que sur
celui de la recherche de transfert pouvant accélérer
les avancées thérapeutiques. L’European School of
Oncology (ESO) a établi, depuis 2004, un groupe
de réfl exion soulignant la nécessité d’une approche
multidisciplinaire, d’une prise en charge dans des
unités spécialisées dans le cancer du sein, d’une
médecine personnalisée et d’une connaissance des
spécifi cités propres du cancer du sein en situation
avancée. En introduction, Fatima Cardoso a pointé
le besoin urgent de développer des recommanda-
tions fortes, standardisées, reposant sur une base
scientifi que solide et pouvant être appliquées sur le
plan international. La mise en pratique de recom-
mandations de haute qualité dans les cancers du
sein au stade précoce a eu un impact signifi catif
sur la survie des patientes. Le but est le même pour
le stade métastatique. Malgré l’hétérogénéité des
présentations au stade avancé, les recommandations
pourraient faciliter la recherche, avec une meilleure
détermination du pronostic et de l’effi cacité des
traitements, permettant une approche prospective et
une nouvelle génération d’essais cliniques. De plus,
dans certains pays, la publication de ces recomman-
dations peut infl uer sur la prise en charge écono-
mique des patientes.
Après 2 jours de présentations incluant la biologie,
l’imagerie et les approches thérapeutiques multi-
disciplinaires, s’est tenue la session de consensus
incluant un panel international d’une trentaine
d’experts représentatifs de cette multidisciplinarité
ainsi que des représentantes de comités de patientes.
Cet article constitue un compte-rendu immédiat.
Une publication dans The Breast est prévue dans
les mois à venir, et certains points seront proba-
blement revus.
Considérations générales
La multidisciplinarité représente un élément crucial
de la prise en charge : oncologues médicaux, radio-
thérapeutes, chirurgiens, radiologues, pathologistes,
soins de support (psychologues, service social, soins
palliatifs). La prise en charge psychosociale et des
symptômes doit être envisagée dès la première
récidive métastatique. L’incurabilité, toutefois
accompagnée de possibilités de traitement, doit
être expliquée aux patientes en tenant compte des
différences socioculturelles. Un plan de traitement
écrit est souhaitable, mais beaucoup d’experts ont
souligné la diffi culté de le remettre, par rapport au
traitement adjuvant, dans la mesure où la planifi -
cation est particulièrement diffi cile, avec des modifi -
cations thérapeutiques pouvant intervenir tous les
3 mois en fonction des évaluations.
Les patientes doivent intervenir dans la décision
thérapeutique à tous les stades et doivent être
encouragées à se faire accompagner. L’inclusion
dans des essais cliniques après un consentement
éclairé est à privilégier. Cependant, il a également été
souligné une disparité dans la possibilité d’accéder
aux essais cliniques en fonction de la localisation
géographique.
La communauté médicale est consciente des coûts
des traitements, mais, dans la décision thérapeu-
tique, le confort des patientes et l’amélioration de
la survie doivent passer au premier plan.
LK12-2011.indd 626LK12-2011.indd 626 13/12/11 15:0213/12/11 15:02
La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011 | 627
CONGRÈS
RÉUNION
Dans le suivi des patientes, un effort devra être
mené pour pouvoir recueillir les résultats (effi cacité/
tolérance) des traitements selon la perception des
patientes.
Bilan minimal
Le bilan minimal doit comporter une description de
tous les antécédents médicaux, un examen clinique
complet, des examens biologiques de base, des explo-
rations pulmonaire (RX ou scanner) et abdominale
(échographie ou scanner), et une scintigraphie
osseuse. Le PET scan n’est recommandé qu’en cas
d’imagerie discordante, mais ce point a été discuté
(pour 30 % des experts, le PET scan peut être utilisé).
Concernant l’imagerie cérébrale dans les cancers
du sein HER2+ (Human Epidermal growth factor
Receptor 2 positive) et les cancers triple-négatifs,
la plupart des experts ne recommandent pas sa
pratique en routine.
Concernant les marqueurs tumoraux, ils ne
devraient pas être utilisés seuls pour une décision
thérapeutique.
Monitoring de la réponse
au traitement
Le monitoring de la réponse au traitement par
l’imagerie est recommandé tous les 2 à 4 mois
pour l’hormonothérapie et tous les 2 à 4 cycles
de chimiothérapie, intervalles dépendant de la
dynamique de la maladie, ainsi que de la locali-
sation et de l’extension des métastases. Dans le cas
d’une maladie plus indolente, un monitoring moins
fréquent est tout à fait acceptable. Dans tous les
cas, de nouvelles imageries doivent être effectuées
dès qu’une progression est suspectée.
Biopsie de la lésion
métastatique
La biopsie de la lésion métastatique, lorsqu’elle
est facilement accessible et sans risque important,
devrait être réalisée pour confi rmer le diagnostic
de métastases et pour redéterminer le statut des
récepteurs hormonaux (RH) et de HER2, surtout si
cela doit modifi er la décision et l’accès à une théra-
peutique ciblée. Si les résultats de la biologie de la
tumeur et de la métastase sont discordants, l’utili-
sation de la thérapeutique ciblée doit être privilégiée.
Choix de traitement
Les choix de traitement dépendent du statut des
RH et HER2, du traitement adjuvant, de l’intervalle
libre, de l’importance de la maladie tumorale, de
l’âge, du performance status, des comorbidités, du
statut ménopausique, de la prolifération tumorale,
des facteurs socioéconomiques et psychologiques,
de l’accessibilité des traitements dans le pays et
des préférences de la patiente. En aucun cas l’âge
ne représente une raison suffi sante d’exclusion d’un
traitement effi cace.
Maladie oligométastatique
Dans les cas de maladie oligométastatique, il existe
une possibilité de curabilité, et une approche multi-
disciplinaire agressive devrait être discutée. Des essais
cliniques prospectifs dans ces situations spécifi ques
sont souhaités, mais ils restent diffi ciles à réaliser.
Chirurgie
En cas de maladie d’emblée métastatique, les études
rétrospectives, mais avec des biais de sélection impor-
tants, ont démontré un bénéfi ce en survie en faveur de
la chirurgie mammaire. Chez les patientes présentant
une réponse au traitement systémique, la chirurgie
de la tumeur primitive doit être envisagée avec une
optique de résection complète (marges saines). Des
essais cliniques pour confi rmer cette approche et
déterminer les meilleures candidates à la chirurgie
et le meilleur timing sont en cours aux États-Unis.
Cancers du sein RH+ HER2−
L’hormonothérapie est l’option privilégiée, même en
cas de maladie viscérale, mais pas en cas de maladie
rapidement progressive ou lorsqu’une hormono-
résistance est suspectée. Chez les femmes prémé-
nopausées, la suppression ovarienne, associée au
tamoxifène ou à un inhibiteur de l’aromatase, est
le premier choix.
En situation postménopausique, les inhibiteurs de
l’aromatase sont proposés, mais le tamoxifène reste
une option viable dans une population sélectionnée.
En cas de traitement adjuvant avec un inhibiteur
de l’aromatase, les options possibles sont repré-
sentées, entre autre par un inhibiteur de l’aromatase
d’une autre classe (stéroïdien/non stéroïdien), le
tamoxifène, le fulvestrant, l’acétate de mégestrol
mais ne se limitent pas à eux. En cas de résistance
LK12-2011.indd 627LK12-2011.indd 627 13/12/11 15:0213/12/11 15:02
628 | La Lettre du Cancérologue Vol. XX - n° 10 - décembre 2011
CONGRÈS
RÉUNION
à l’hormono thérapie, la question de savoir si l’ajout
d’un inhibiteur de mTOR (mammalian Target Of
Rapamycin), l’évérolimus, peut être considéré a été
débattue. La plupart des experts soulignent l’impor-
tance de disposer de données complémentaires,
notamment toutes les analyses de toxicité, avant
de considérer cette option comme un standard de
traitement.
Hormonothérapie d’entretien
L’hormonothérapie d’entretien après une chimio-
thérapie de première ligne afin d’en maintenir
le bénéfi ce, bien que non étudiée dans les essais
cliniques randomisés, représente une option raison-
nable. L’association chimiothérapie + hormono-
thérapie ne devrait pas être proposée dans la mesure
où il n’existe pas d’avantage en survie. La question de
poursuivre la suppression par des analogues LH-RH
(Luteinizing Hormone-Releasing Hormone) avec la
chimiothérapie a été débattue.
Cancers du sein HER2+
À l’exception de contre-indications formelles, le
ciblage HER2 doit être proposé dès le début de
la maladie métastatique à toutes les patientes.
L’association à une chimiothérapie représente la
meilleure option. En cas de maladie RH+, si l’option
d’hormonothérapie est choisie sur la base de critères
particuliers, un traitement anti-HER2 (trastuzumab
ou lapatinib) doit être associé.
Les patientes progressant sous traitement anti-HER2
doivent recevoir une autre association avec blocage
HER2. La durée optimale du traitement anti-HER2
n’est pas connue, pas plus que le moment approprié
pour interrompre cette thérapeutique ciblée. Après
1 ligne de trastuzumab, l’association capécitabine +
lapatinib ou toute autre chimiothérapie + trastu-
zumab sont des options valides.
En cas de rechute après un traitement adjuvant,
il est nécessaire de réadministrer un traitement
anti-HER2. Le choix dépend de l’intervalle libre, de
la nature du traitement adjuvant (chimiothérapie
et anti-HER2) et du pays. En cas de résistance au
trastuzumab, le double blocage (trastuzumab et
lapatinib) est une option.
Chimiothérapie cytotoxique
La monochimiothérapie est préférée, sauf en cas de
maladie très rapidement progressive, à forte masse
viscérale, et/ou de nécessité d’un contrôle rapide
des symptômes. Les 3 traitements majeurs sont
représentés par les anthracyclines, les taxanes et
la capécitabine. Il n’y a pas eu d’unanimité quant
à la séquence d’administration, le panel d’experts
préférant une fl exibilité et proposer l’intégration de
ces 3 traitements dans la stratégie thérapeutique. La
durée de chaque traitement et le nombre de cycles
sont à adapter à chaque patiente. Généralement,
la chimiothérapie est utilisée jusqu’à progression,
toxicité ou choix de la patiente.
L’association taxane + bévacizumab est une option
dans certains cas. Les résultats de l’association
bévacizumab + capécitabine en deuxième ligne sont
plus faibles et les risques l’emportent sur le bénéfi ce.
Métastases osseuses
Dans les cas de métastases osseuses, les biphos-
phonates doivent être utilisés. En cas de métastases
osseuses douloureuses, une radiothérapie après
avis chirurgical doit être proposée. La compression
médullaire représente une urgence thérapeutique,
et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est
l’imagerie de référence.
Métastases cérébrales
Les patientes présentant une métastase cérébrale
unique potentiellement résécable peuvent être
traitées par radiochirurgie ou chirurgie. Cette
dernière doit être suivie d’une radiothérapie de
l’ensemble de l’encéphale. Les avis ont été plus
partagés pour ce qui est des cas où la lésion n’est
pas unique.
Traitements symptomatiques
L’accent a été remis sur les traitements sympto-
matiques avec un accès à des équipes entraînées et
des antalgiques. L’accès aux morphiniques devrait
être facilité dans certains pays. La discussion sur la
n de vie devrait être entamée plus tôt.
Cancers de l’homme
Concernant les cancers du sein chez l’homme, en
cas de RH+, l’hormonothérapie par tamoxifène est
l’option de référence. Après le tamoxifène, les inhibi-
teurs de l’aromatase peuvent être proposés, mais
la plupart des experts les associent à un traitement
par agoniste LH-RH.
»
Attention, ceci est un
compte-rendu de congrès
et/ou un recueil de résumés
de communications de
congrès dont l’objectif est
de fournir des informations
sur l’état actuel de la
science ; ainsi, les données
présentées sont suscep-
tibles de ne pas être
validées par les autorités
françaises et ne doivent
donc pas être mises en
pratique.
LK12-2011.indd 628LK12-2011.indd 628 13/12/11 15:0213/12/11 15:02
1 / 3 100%