16 logie La place de la bioeutique p dans le suivi théra e de la femm DÉTECTION DES CANCERS Cancer du sein L'heure des marqueurs Aucune discipline n'a peut-être été davantage marquée par l'avènement de la médecine personnalisée que l'oncologie. Le Docteur Heudel, du centre de lutte contre le cancer Léon Bérard, à Lyon, nous explique ici toute l'importance des marqueurs pronostiques et prédictifs dans le traitement du cancer du sein. LES FACTEURS PRONOSTIQUES Les cancers du sein en France 1 • Recommandation : mammographie tous les 2 ans, entre 50 et 74 ans. • 50 000 nouveaux cas par an. • 10 000 décès par an. [1] Binder-Foucard F et coll., Estimation nationale de l'incidence et de la mortalité par cancer en France entre 1980 et 2012, INVS, 2013. Après le bilan clinique et radiologique, puis l'intervention chirurgicale, il est possible d'évaluer le risque de rechute d'un cancer du sein en s'appuyant sur trois facteurs pronostiques : la taille tumorale, l'envahissement ganglionnaire et le grade histologique. Selon cette évaluation, les patientes sont séparées en sous-groupes qui déterminent les choix thérapeutiques, avec un traitement adjuvant par chimiothérapie, radiothérapie ou hormonothérapie, ou l'association de deux ou trois de ces traitements, l'objectif étant de réduire au maximum le risque de rechute locale et métastatique. LES FACTEURS PRÉDICTIFS DES RÉCEPTEURS HORMONAUX… Les facteurs prédictifs permettent, eux, de prévoir la réponse à un traitement spécifique. L'expression des récepteurs hormonaux, présents dans environ 70 % des cancers du sein et identifiés par anatomopathologie, est ainsi un facteur prédictif d'un effet favorable d'une hormonothérapie, par exemple anti-œstrogène ou anti-aromatase. Découverts il y a plus de quarante ans, les récepteurs à l'œstradiol et à la progestérone ont rapidement été reliés à l'efficacité de l'hormonothérapie dans 10 000 BIO - N° 92 - NOVEMBRE 2014 MAG_10MBIO_92_GYNECO_24P_235*300_VF3_BAT_21112014.indd 16 21/11/2014 11:44 17 CAS CLINIQUE Un cancer du sein droit a été découvert chez Mme L., 62 ans, sans antécédent médical ou chirurgical notable, lors d’une mammographie réalisée dans le cadre du dépistage systématique Une chirurgie conservatrice (tumorectomie) a mis en évidence un carcinome canalaire infiltrant de 28 millimètres, SBR 3 (Scarff-BloomRichardson), exprimant les récepteurs aux estrogènes et à la progestérone, et présentant simultanément, ce qui n'est pas le plus fréquent, une surexpression du récepteur HER2 en immunohistochimie. La technique du ganglion sentinelle axillaire (retrait du premier relais ganglionnaire) a trouvé un ganglion envahi, justifiant un curage axillaire. Ce curage a permis de retirer neuf autres ganglions axillaires, dont un également atteint par le cancer. Facteurs pronostiques : Taille tumorale supérieure à 20 millimètres, grade SBR 3 (marqueur histologique d’agressivité tumorale) et surtout envahissement ganglionnaire axillaire (principal facteur pronostique de survie globale). Facteurs prédictifs : Présence simultanée des récepteurs hormonaux et HER2. Options thérapeutiques : Cette patiente bénéficiera de l’hormonothérapie adjuvante, qui réduit le risque relatif de décès de 34 % dans la population où les tumeurs expriment les récepteurs hormonaux, et de la thérapie par trastuzumab, qui réduit le risque de décès d’environ 30 %, quand l’oncogène HER2 est exprimé par les cellules tumorales. … ET CELUI DU RÉCEPTEUR HER2 L'autre facteur prédictif majeur est la surexpression du récepteur HER2 (human epidermal growth factor receptor 2) ou l'amplification de son gène. Présents dans environ 15 % des cancers du sein, ils sont associés à une réponse à une thérapie ciblée appelée trastuzumab, un anticorps monoclonal humanisé bloquant l'homodimérisation de HER2. Le marqueur CA 15-3 est élevé au moment du diagnostic du cancer du sein chez moins de 30 % des patientes et son intérêt diagnostic est donc limité. En revanche, bien que son dosage ne fasse pas l'objet d'une recommandation officielle, il est bien utilisé pour le suivi des patientes atteintes d’un cancer du sein et lors du traitement des cancers avancés. Dans ce contexte, le CA15-3 doit être idéalement mesuré au moment du diagnostic avant d’initier le traitement, pour connaître la valeur de base, puis son évolution pourra être analysée tout au long de la prise en charge. Comme pour la plupart des marqueurs tumoraux, sa variation au cours de la prise en charge est fondamentale : une augmentation significative du taux de CA 15-3 est un marqueur de récidive. Une absence de baisse du marqueur sous traitement est un signe d’échec thérapeutique et pourra motiver un changement d’option thérapeutique. • La radiothérapie et la chimiothérapie, même en l'absence de facteur prédictif • le cancer du sein métastatique. Les résultats d'immunohistochimie, obtenus sur des coupes cellulaires fixées, sont exprimés en pourcentage de cellules tumorales marquées. En France, le seuil de 10 % définit un cancer hormono-dépendant. La réponse à l'hormonothérapie est corrélée à ce pourcentage, mais environ 30 % des tumeurs exprimant ces récepteurs présentent une résistance primaire à un traitement anti-hormonal. ZOOM SUR... CA 15-3, pour le suivi du cancer du sein Cette thérapie offre un bénéfice en termes de survie uniquement chez les patientes dont la tumeur présente une de ces deux caractéristiques. Les techniques de mise en évidence de l'expression de HER2 doivent donc être parfaitement fiables, pour éviter de « sur-traiter » des patientes et éviter des toxicités inutiles. La chimiothérapie associant antracyclines et taxanes reste un traitement complémentaire important, même en l'absence de facteur prédictif de réponse connu, car elle réduit le risque de rechute de 34 % chez les patientes âgées de 50 à 69 ans. Une prise en charge adjuvante complète du cancer du sein inclut également la radiothérapie du sein et des aires ganglionnaires qui diminue d’environ 20 % le risque de rechute locale après un traitement conservateur. • En 2014, l'indication du trastuzumab est assortie de l'obligation d'analyser le statut de HER2 en immunohistochimie. Les résultats sont donnés sous forme de « + » : • 0 ou 1+ : La patiente n'est pas éligible pour le trastuzumab. • 2+ : Une analyse complémentaire par FISH (fluorescence in situ hybridisation) ou SISH (silver in situ hybridisation) est recommandée pour chercher une amplification du gène HER2. • 3+ : La patiente est éligible. Le niveau d'expression de HER2 est le plus souvent inversement corrélé à celui des récepteurs hormonaux. L'IMPORTANCE DE L'ANATOMO-PATHOLOGIE L'anatomo-pathologiste joue ainsi un rôle central aujourd'hui dans l'établissement du diagnostic et dans les choix thérapeutiques du cancer du sein. La caractérisation des cibles est devenue une routine pour toutes les tumeurs malignes du sein. • LE MAGAZINE D’INFORMATION BIOMÉDICALE DE ROCHE DIAGNOSTICS FRANCE MAG_10MBIO_92_GYNECO_24P_235*300_VF3_BAT_21112014.indd 17 21/11/2014 11:44