50 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIV - n° 2 - mars-avril 2011
Résumé
Les micro-ARN (miARN) constituent une classe de petits ARN non codants d’environ 20 nucléotides qui
contrôlent négativement l’expression d’ARNm cibles. Les eucaryotes multicellulaires utilisent les miARN
pour contrôler leurs fonctions vitales telles que la différenciation, la prolifération ou l’apoptose. Leur
diversité et le nombre considérable de leurs ARNm cibles font des miARN des acteurs importants de la
régulation de l’expression génique. Des études récentes ont révélé que l’expression anormale des miARN
représente une caractéristique commune des cellules cancéreuses et que ces miARN peuvent fonctionner
comme des gènes suppresseurs de tumeur ou comme des oncogènes.
Mots-clés
Micro-ARN
Cancer colorectal
Régulation génique
Abstract
MicroRNAs (miRNAs) repre-
sent an abundant class of
endo genously expressed
small RNAs, which is believed
to control the expression
of proteins through specific
interaction with their mRNAs.
MiRNAs are non-coding RNAs
of 18 to 24 nucleotides that
negatively regulate target
mRNAs by binding to their
3’-untranslated regions. Most
eukaryotic cells utilize miRNA
to regulate vital functions such
as cell differentiation, prolifera-
tion or apoptosis. The diversity
of miRNAs and of their mRNA
targets strongly indicate that
they play a key role in the
regulation of protein expres-
sion. The correlation between
the expression of miRNAs and
their effects on tumorigenesis
and on the proliferation of
cancer cells is beginning to gain
experimental evidences. Recent
studies showed that abnormal
expression of miRNAs repre-
sents a common feature of
cancer cells and that they can
function as tumor suppressor
genes or as oncogenes.
Keywords
MicroRNA
Colorectal cancer
Gene expression
gene expression), combinant les aspects de clonage
des miARN et d’analyse d’expression génique dans
des cellules de cancer colorectal, a permis d’iden-
tifier 200 miARN connus et 133 nouveaux miARN
candidats, démontrant que le catalogue des miARN
est en pleine évolution. Dans ce contexte, la connais-
sance des modifications d’expression des miARN qui
ciblent spécifiquement différents gènes impliqués
dans la pathogenèse des cancers colorectaux devrait
permettre de mieux comprendre les mécanismes
moléculaires intimes qui gouvernent la cancéro-
genèse colorectale. ■
La rectocolite hémorragique :
une maladie du mucus ?
La colonisation de la muqueuse colique par notre propre
flore digestive participe à la formation d’une couche de
mucus. Une des particularités de cette barrière est d’isoler
nos cellules épithéliales de l’intrusion par certains micro-
organismes. Au cours de la rectocolite hémorragique, ont
été observées des détériorations de la couche du mucus
au niveau du côlon terminal, alors que la concentration en
bactéries commensales y est la plus importante. Néanmoins,
un déficit en mucus peut-il être responsable d’une colite
plutôt qu’une conséquence de la réaction inflammatoire
persistante caractéristique de ces patients ? Dans la revue
Journal of Clinical Investigation, il vient d’être démontré,
par un groupe américain de l’Université de l’Oklahoma,
que des altérations de la O-glycosylation sont responsables
du développement d’une colite chez l’homme et chez
la souris. En effet, l’absence d’expression par les cellules
épithéliales intestinales de la T-synthase (ou C1galt1), une
enzyme clé du processus d’O-glycosylation du mucus, mime
les circonstances de la rectocolite hémorragique chez la
souris. Dans ce modèle, l’absence de lymphocytes n’in-
fluence pas le déclenchement de ces lésions, alors qu’une
antibiothérapie à spectre large ou un traitement avec un
anticorps neutralisant l’anti-TNFα a montré une efficacité
thérapeutique. Bien qu’une translocation bactérienne
exacerbée ait pu être observée chez ces souris déficientes
pour la T-synthase par rapport aux animaux contrôles, la
réponse inflammatoire induite par les micro-organismes
Commentaire
Les études génétiques récentes ont permis d’iden-
tifier 47allèles de prédisposition à la rectocolite
hémorragique. Cependant, leur influence au
niveau de la formation du mucus reste spécu-
lative. À la lumière de ces résultats, des progrès
thérapeutiques sont également attendus afin
de restaurer la couche de mucus, et ainsi de
limiter l’intrusion de certains micro-organismes
inflammatoires chez ces patients génétiquement
prédisposés.
Référence
Fu J, Wei B, Wen T et al. Loss of intestinal core 1-derived
O-glycans causes spontaneous colitis in mice. J Clin In-
vest 2011 Mar 7. [Epub ahead of print].
de la flore digestive capables de franchir la barrière intesti-
nale est indépendante de MyD88, un adaptateur clé de la
réponse immunitaire innée induite par la plupart des toll-like
receptors. Dans la rectocolite hémorragique, une analyse
génétique a également permis aux auteurs de révéler que
certains des patients étaient porteurs de mutations faux-
sens qui altèrent la fonction de C1galt1C1, une molécule
chaperone dont l’expression est essentielle au processus
d’O-glycosylation contrôlé par C1galt1. De plus, une analyse
histologique a permis d’identifier des altérations de l’ex-
pression de la structure primaire des O-glycans dans les
biopsies coliques de près d’un tiers des patients analysés
rétrospectivement, confortant le rôle pathophysiologique
des aberrations du processus d’O-glycosylation chez ces
patients.
Actualités recherche rédigée par le Dr M. Chamaillard, inserm
U801, CHRU Lille