MicroRNA Analysis: Is It Ready for Prime
Time?
Analyse des microARN : La technologie est-
elle au point ?
Gregory J. Tsongalis, Moderateur
1
,
2
,*, George Calin, Expert
3
,
4
,
5
,
6
, Pierre Cordelier,
Expert
7
,
8
,
9
, Carlo Croce, Expert
10
,
11
,
12
,
13
, Federico Monzon, Expert
14
,
15
,
16
,
17
,
18
et Anna E.
Szafranska-Schwarzbach, Expert
19
Affiliations des auteurs
1
Faculté de médecine de Geisel au Dartmouth College et
2
Centre médical Dartmouth-Hitchcock, Lebanon, NH, USA ;
3
Professeur, Département des thérapies expérimentales et
4
Département de la leucémie,
5
Co-Directeur, Centre d’interférence ARN et d’ARN non-codant, et
6
Expert pour la société des leucémies et lymphomes de Alan M. Gewirtz, Université du
Texas MD Anderson Cancer Center, Houston, TX, USA ;
7
Directeur de recherche, responsable principal associé de la recherche “Marqueurs et
Cibles pour les Biothérapies des cancers digestifs
Institut national de la santé et de la
recherche médicale (INSERM) Unité 1037,
8
Centre de recherche en cancérologie de Toulouse (CRCT), et
9
Université Paul Sabatier III, Toulouse, France ;
10
John W. Wolfe Chaire de génétique des cancers humains,
11
Professeur et Président, Département de virologie moléculaire, immunologie et génétique
médicale, Université de l’État de l’Ohio, Collège de Médicine, Columbus, OH, USA
12
Directeur, Programme de génétique des cancers humains, et
13
Directeur, Institut de génétique, Hôpital James Cancer Hospital et Institut de recherche
Solove (Centre de cancérologie), Columbus, OH, USA ;
14
Directeur de pathologie moléculaire, Laboratoire de génétique des cancers,
15
Professeur, Département de pathologie et immunologie et
16
Département de génétique humaine et moléculaire, et
17
Directeur associé, Programme de bourses de pathologie moléculaire génétique, Faculté de
médecine de Baylor, Houston, TX, USA et
18
Pathologiste, Hôpital des enfants du Texas, Houston, TX, USA ;
19
Directeur des sciences, Asuragen, Inc., Austin, TX, USA.
* Adresse de correspondance de cet auteur : Geisel School of Medicine au Dartmouth
College et Dartmouth-Hitchcock Medical Center, One Medical Center Dr., Lebanon, NH,
USA. Fax 603-650-6120 ; email gregory.j.tsongalis@hitchcock.org.
Depuis leur découverte, les microARN (miARN)
20
ont montré des résultats très prometteurs dans
une large gamme d’applications cliniques. Dans certains cas, l’utilisation des miARN en tant que
nouveaux marqueurs de diagnostic pourrait aider à répondre à certains dilemmes de diagnostic
que les analyses d’expression génique ou d’autres types d’analyses n’ont pas été en mesure de
résoudre de manière satisfaisante. Dans d’autres cas, il est facile de percevoir certains miARN
comme cibles pour de nouvelles thérapies qui régulent gativement une voie tout entière via le
ciblage d’un seul miARN. Quand et la manière dont ce concept se réalisera demeurent flous. Les
scientifiques s’accordent à dire que ce domaine de la biologie est passionnant, qu’il est très
prometteur et présente de nombreux avantages par rapport à des expériences avec d’autres
biomolécules. Dans cet article de Q&R, 5 personnes ayant une grande expérience des miARN
partagent leur vision sur le futur des miARN. La question est de savoir si nous pourrons bientôt
bénéficier de ces avancées dans le laboratoire de biologie médicale.
Quelles sont les caractéristiques les plus importantes des miARN qui augmentent leur
potentiel en tant que cibles de diagnostic ou thérapeutiques ?
George Calin : Une caractéristique importante des miARN qui en fait un biomarqueur potentiel
excitant pour le diagnostic et/ou une cible pour la thérapie est le fait que les miARN spécifiques
ciblent de multiples composants de la même voie. Par exemple, l’agrégat miR-15a/16–1 cible les
gènes de la voie apoptotique : BCL2
21
(LLC B/lymphome 2) et MCL1 [leucémie myéloïde
chronique de séquence 1 (apparentée à BCL2)]. N’importe quel miARB donné peut ainsi réguler
de nombreux gènes, et chaque gène peut être régulé par différents miARN.
Pierre Cordelier : Dans la recherche contre le cancer, les miARN peuvent différencier les tissus
normaux des tissus cancéreux et, plus important encore, peuvent distinguer différents sous-types
de cancer. La grande stabilité des miARN dans les tissus et les fluides est un autre avantage clé
qui augmente leur potentiel en tant que marqueurs de diagnostic par rapport à l’ARN messager
(ARNm). En outre, ils peuvent être quantifiés dans de très faibles quantités de matière et dans
des échantillons fortement dégradés. C’est d’une importance capitale pour prédire leur possible
utilisation en tant que biomarqueurs émergents au niveau clinique. Il est également désormais
bien établi que les miARN ciblent de multiples ARNm avec une grande efficacité. Le ciblage
(ou restauration) d’un seul miARN permettrait de corriger une voie entière, par comparaison
avec les approches de ciblage (ou restauration) d’un seul gène. Ceci est particulièrement
important pour éviter, par exemple, la clonalité des cellules tumorales et rendre les miARN très
attrayants comme agents thérapeutiques.
Carlo Croce
:
Des progrès significatifs ont été réalisés dans les causes génétiques et
épigénétiques du cancer et donc dans l’évaluation des cibles thérapeutiques, mais l’identification
d’autres modifications qui causent ou contribuent à la malignité reste une priorité. À cet égard,
nous avons appris que les miARN sont fortement modulés dans les tumeurs par rapport aux
tissus normaux et, plus important encore, leur expression est liée à des caractéristiques clinico-
biologiques des tissus néoplasiques. Nous avons démontré que l’expression des miARN peut être
utilisée pour stratifier les patients pour d’autres thérapies et que l’expression des miARN peut
également être utile pour détecter le tissu d’origine des cancers d’origine primaire inconnue. La
découverte récente que les miARN peuvent être présents et mesurés dans le sérum/plasma avec
des concentrations reflétant des états pathologiques tels que le diabète, les lymphomes et
plusieurs cancers solides, représente une nouvelle approche pour le dépistage diagnostique. Dans
ce contexte, il est évident de penser que les miARN peuvent aussi être des cibles thérapeutiques
intéressantes en raison de leur multiplicité de cibles : chaque miARN est capable de réprimer en
même temps l’expression de centaines de gènes différents. Si un miARN particulier est là une
tumeur, cette tumeur sera complètement dépendante de son expression. Par conséquent,
l’inhibition de ce miARN particulier peut notamment supprimer le blocage vis-à-vis de
l’expression de nombreuses protéines thérapeutiques. Inversement, l’administration d’un
mimétique d’un miARN peut augmenter la population des miARN endogènes, réprimant ainsi
les gènes nuisibles.
Federico Monzon : Les miARN possèdent 2 caractéristiques très importantes. Tout d’abord, les
miARN sont de petites molécules d’ARN qui sont résistantes aux RNases et sont donc bien
préservées dans des tissus inclus en paraffine et fixés au formol. Par conséquent, cette stabilité
inhérente en fait d’excellents candidats en tant que biomarqueurs qui peuvent être utilisés dans le
traitement d’échantillons pathologiques de diagnostic de routine. Deuxièmement, les régulateurs
de l’expression des gènes des miARN sont conservés dans les lignées cellulaires et souvent
dérégulés dans un cancer. Ainsi, ils peuvent être utilisés pour le diagnostic en détectant une
régulation positive ou négative des miARNs dans les tissus ou les fluides corporels.
Anna Szafranska-Schwarzbach : la caractéristique probablement la plus remarquable des
miARN est l’effet que les miARN ont sur la régulation de la fonction cellulaire, des réseaux de
signalisation et des processus biologiques. Un seul miARN peut guler les taux d’expression de
multiples cibles d’ARNm . En même temps, de nombreux miARN peuvent se lier à un ARNm
cible. Les ARNm ciblés peuvent, à leur tour, causer des changements régulateurs dans la cellule.
Ce modèle complexe de régulation provoqué par les miARN peut conduire à de profonds
changements dans les phénotypes cellulaires, encore plus prononcés que ceux déclenchés par la
modulation d’un ARNm individuel. En conséquence, dans de nombreux cas, la modification de
l’expression des miARN observée dans des échantillons bénins par rapport à des échantillons
affectés par une maladie peut être un meilleur indicateur de l’état pathologique que les ARNm en
fournissant des profils plus simples avec des caractéristiques techniques plus favorables.
La petite taille des miARN associée à leur capacité à cibler les réseaux de gènes cibles à
plusieurs niveaux, par le développement ou la suppression de la tumorigenèse et la métastase, a
donné lieu à un questionnement quant à l’utilisation des miARN comme cibles thérapeutiques
potentielles. Des approches, telles que les antagomirs synthétiques, ont été conçues pour
supprimer ou diminuer l’activité des miARN, tandis que des mimétiques des miARN ont été
conçus pour restaurer ou améliorer l’activité des miARN. Ces stratégies de recherche utilisées
pour moduler l’expression des miARN dérégulés, conjointement avec la récente démonstration
de systèmes d’administration efficaces et sûrs chez les rongeurs, offrent un aperçu de la
promesse des thérapies à base de miARN pour un traitement anticancéreux.
Quelle technologie sera vraisemblablement implantée dans le cadre du laboratoire de biologie
médicale pour l’analyse des miARN et pourquoi ?
George Calin : La PCR transcriptase inverse quantitative en temps réel (PCRq) est facilement
réalisable dans le cadre d’un laboratoire de biologie médicale et donne des données qui sont plus
faciles à analyser que celles de réseaux d’expression génétique et du séquençage approfondi. Elle
est également plus reproductible. Cette technologie offre une grande capacité d’exploitation, car
les échantillons peuvent être analysés dans un format de 384 puits, la rendant relativement peu
onéreuse.
Pierre Cordelier : Je suis d’accord sur le fait que la PCRq surpasse les stratégies de microréseau
pour la quantification des miARN. En effet, la PCRq est une méthode extrêmement sensible et
précise, tout en étant relativement peu coûteuse. D’autre part, l’hybridation in situ, qui est
techniquement difficile, peut fournir des informations supplémentaires d’expression des miARN
au niveau cellulaire.
Carlo Croce : Les dosages par PCRq des miARN et l’hybridation des miARN in situ ont montré
une grande polyvalence dans la recherche des miARN et ont démontré leur capacité à détecter
l’expression des miARN d’une manière très spécifique et sensible. Je crois que ce seront de
puissants outils pour le diagnostic des miARN et la recherche clinique.
Federico Monzon : Comme indiqué par d’autres, très probablement la PCRq est préférable, en
raison du fait qu’elle est déjà utilisée dans un grand nombre de laboratoires de diagnostic.
Cependant, d’autres technologies, telles que le NanoString (NanoString Technologies),
pourraient donner de meilleurs résultats pour développer des tests de diagnostic basés sur les
profils des miARN, en raison de leur capacité à détecter plusieurs miARN en un seul dosage.
Anna Szafranska-Schwarzbach : À court terme, les analyses basées sur la PCRq présentent un
fort potentiel pour faire progresser la transition du « laboratoire au chevet du malade » en
particulier pour l’analyse de petits panels de miARN. La PCRq est une technologie bien établie,
robuste et reproductible, avec un certain nombre d’avantages clés, y compris ses grandes
sensibilité et spécificité, la possibilité de multiplexage des cibles et les faibles besoins de
contribution de l’ARN, qui facilitent tous les analyses d’expression, même dans les échantillons
cliniques avec une faible quantité de matière. Une validation d’un test développé en laboratoire
(TDL) basé sur la PCRq est beaucoup moins complexe que pour un test basé sur d’autres plates-
formes, comme les microréseaux ou le séquençage de nouvelle génération. Cela simplifie l’effort
nécessaire pour maintenir la conformité avec les réglementations de CLIA et du Collège des
pathologistes américains pour la démonstration de l’exactitude, de la précision, de la sensibilité
et de la spécificité. Dans l’avenir, les panels de miARN vont devenir plus grands et plus
complexes, et il est donc probable que ces panels migreront vers d’autres plates-formes avec des
capacités à fort rendement. Il sera intéressant de voir le rôle que les nouvelles technologies, telles
que le séquençage de nouvelle génération et le séquençage de miARN, joueront dans les tests
cliniques sur les miARN.
Y-a-t-il assez de preuves pour soutenir l’utilisation des miARN dans des essais cliniques ?
George Calin : Il existe une pléthore de données pour appuyer l’utilisation clinique des miARN.
Il existe
plusieurs modèles de souris (miR-155, miR-21, miR-15a/16), une très grande quantité
de données de génomique, ainsi qu’un très grand nombre d’études fonctionnelles. Le nombre
d’études traductionnelles a également augmenté de façon exponentielle.
Pierre Cordelier : Les découvertes dans le domaine de la recherche des miARN sont très
encourageantes et prometteuses. Récemment, le premier médicament ciblant les miARN est
entré dans des essais cliniques de phase 2 pour traiter des patients infectés par le virus de
l’hépatite C. Il est tentant de spéculer que les miARN seront utilisés systématiquement dans les
tests cliniques (en tant que biomarqueurs et/ou cibles) dans un avenir proche.
Carlo Croce : Au cours des 8 dernières années, 16 000 travaux de recherche sur les miARN ont
été publiés, et un point est parfaitement clair : les miARN sont impliqués dans tous les aspects de
la biologie de la tumeur. Mon laboratoire ainsi que d’autres a montré que les miARN peuvent
être utilisés comme indicateur de la progression de la tumeur, du comportement métastatique et
de la réponse thérapeutique à la chimiothérapie. Des exemples à cet égard comprennent la perte
de miR-181 au cours de la progression d’une leucémie lymphoblastique chronique, la
modulation positive de miR-335 et miR-26 dans un cancer du sein métastatique, la modulation
positive de miR-221/222 dans les cellules d’un cancer du sein hormonorésistant et la dépendance
des lymphomes sur miR-21. Ce qui nous manque encore sont des analyses plus complètes de
l’expression des miARN dans de très grandes cohortes d’échantillons de patients pour valider
toutes les conclusions que nous avons accumulées au cours de ces années de recherche clinique
et en laboratoire. C’est le secteur clé nous devons concentrer nos efforts pour que les miARN
puissent devenir un nouvel outil en médecine clinique et de diagnostic, car ils peuvent réduire les
résultats à la fois de faux-positifs et faux-négatifs produits par la méthode de diagnostic
conventionnelle.
Federico Monzon : Non. L’utilisation des miARN comme biomarqueurs de diagnostic ou de
pronostic a été étudiée, mais aucune application n’a montré la performance clinique adéquate. Ils
ont été utilisés pour la détermination du tissu d’origine de tumeurs métastatiques, mais le test n’a
pas été validé dans une étude à grande échelle. Une autre application commercialisée est la
distinction entre un carcinome épidermoïde et un adénocarcinome du poumon, mais la valeur
clinique de l’utilisation de ces tests par rapport à l’histopathologie/l’immunohistochimie de
routine n’a pas été démontrée.
Anna Szafranska-Schwarzbach : Les preuves s’accumulent rapidement pour soutenir
l’utilisation des miARN dans les tests cliniques. Le domaine de diagnostic des miARN continue
d’identifier des candidats miARN prometteurs, et ces biomarqueurs sont de plus en plus utilisés
pour générer des tests robustes et reproductibles pour une utilisation dans les décisions de
traitement des patients. Chez Asuragen, nous avons développé et validé le TDL du pancréas
miRInform®, qui est basé sur l’expression différentielle de miR-196a et miR-217. Ce test permet
de faire la distinction entre une pancréatite chronique et un adénocarcinome canalaire
pancréatique dans des échantillons fixés au formol et inclus en paraffine. Nous sommes en train
de finaliser la validation clinique d’un test basé sur l’expression de 7 miARN pour une utilisation
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