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La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no6 - novembre-décembre 2003
les taux de survie sans récidive et de survie globale étaient res-
pectivement de 73 % et 62 % pour les patients avec une tumeur
confinée à la vessie sans atteinte ganglionnaire (n = 217, ≤pT2
N0) et 56 % et 49 % pour les tumeurs non confinées à l’organe
sans atteinte ganglionnaire (n = 166, > pT2 N0).
Une atteinte ganglionnaire a été retrouvée dans 124 cas (24 % des
patients qui ont une survie sans rechute à 5 ans de 33 % et une
survie globale à 5 ans de 26 %). Le taux de récidive locale était
de 3 % pour les tumeurs ≤pT2 N0, de 11 % pour celles > pT2
N0 et de 13 % pour les tumeurs N+. En conclusion, la survie sans
récidive de cette cohorte était de 56 % à 5 ans.
Délai de la cystectomie
Le retard à la chirurgie est associé avec un stade avancé plus
important, notamment quand la cystectomie est réalisée plus de
90 jours après la RTU, comme l’ont montré deux études améri-
caines : la première (5) à partir de données sur 303 patients (81 %
de stade ≥pT3 versus 52 % quand délai > 90 jours, p = 0,01), la
deuxième (6) à partir de l’analyse de 290 patients (84 % de stade
≥pT3 ou N+ versus 48,2 % quand délai > 12 semaines).
Chimiothérapie néoadjuvante
●Trois articles importants sont à prendre en considération.
✓L’excellente revue générale publiée par l’équipe du Princess
Margaret Hospital dans le Lancet Oncology (8) qui fait le point
sur la chimiothérapie des cancers invasifs et insiste sur le fait que
les essais récents montrent une tendance à l’amélioration en sur-
vie quand une chimiothérapie optimale est utilisée, et sur le rôle
de marqueurs moléculaires pour sélectionner les patients pouvant
en bénéficier.
✓Les résultats de l’étude du SWOG (9) ont “enfin” été publiés
dans le New England Journal of Medicine. Trois cent dix-sept
patients présentant une tumeur invasive T2-T4a (stratifiés en
fonction de l’âge et de T) ont été randomisés entre trois cycles
de MVAC néoadjuvant avant cystectomie (n = 153) et cystecto-
mie (n = 154). Tenant compte des critiques méthodologiques
exprimées lors de la présentation initiale à l’ASCO et à l’AUA,
les données rapportées en intention de traitement montrent une
amélioration de la médiane de survie de 46 mois avec la chirur-
gie seule à 77 mois avec la chimiothérapie néoadjuvante à la
limite de la signification statistique en utilisant un test bilatéral
(p = 0,06). Trente-huit pour cent des patients traités par MVAC
(versus 15 %) ne présentaient pas de tumeur résiduelle sur la
pièce de cystectomie.
Rappelons que l’autre critique principale concernait la durée
d’inclusion étalée sur 11 ans, source de biais de sélection poten-
tiels…
✓Surtout la publication dans le Lancet de la meta-analyse (10)
à partir de données individuelles actualisées de dix essais rando-
misés de chimiothérapie néoadjuvante portant sur 2 688 patients
(il faut signaler que les données de l’essai du SWOG ne font pas
partie de la méta-analyse !). Une chimiothérapie à base de pla-
tine apporte un bénéfice significatif (HR : 0,87, IC95 : 0,78-0,98 ;
p = 0,016) en survie globale, avec un bénéfice absolu de 5 % à
5 ans (passant de 45 % à 50 %). Cet effet est observé quel que
soit le traitement local, il ne varie pas en fonction de sous-groupes.
En cas d’utilisation d’une chimiothérapie par platine seul, la dif-
férence n’est pas significative (p = 0,084).
Et Stadler (11), dans l’éditorial, de reposer le problème : faut-il
positionner la chimiothérapie néoadjuvante comme standard ?
Signalons enfin un article de Sternberg et al. (12) sur la possibi-
lité de sélectionner les patients pouvant bénéficier d’une approche
conservatrice basée sur la réponse à la chimiothérapie. Sur une
série rétrospective de 104 patients présentant une tumeur inva-
sive T2-4 N0M0, traitée par trois cycles de MVAC néoadjuvant,
dont 41 (49 %) étaient T0 lors de la RTU post-chimiothérapie, il
a été rapporté que 31 patients traités par chimiothérapie et RTU
seule étaient vivants avec une médiane de suivi de 56 mois, 23
maintenant une vessie normale. Sur les 13 patients répondant
avec des lésions focalisées traitées par cystectomie partielle, un
seul a eu une cystectomie de sauvetage ; le taux de survie à 5 ans
dans ce groupe était de 69 %. Pour les 27 patients âgés de plus
de 70 ans, le taux de survie à 5 ans a été de 67 %, avec un taux
de conservation de 47 %.
La chimiothérapie des formes avancées
Hussain et al. ont fait le point dans le Lancet Oncology (13) sur
l’état de l’art et les études en cours, notamment celle de
l’EORTC, qui compare l’association de paclitaxel, gemcitabine
et cisplatine au schéma classique d’AMM de gemcitabine et de
cisplatine, ainsi que sur les perspectives concernant l’introduc-
tion du trastuzumab pour les formes surexprimant HER2. Un
essai multicentrique de phase II randomisé comparant une chi-
miothérapie par gemcitabine-platine avec ou sans trastuzumab
dans les formes surexprimant HER2 vient de débuter en France.
Nouvelles combinaisons de chimiothérapie
●Concernant la place des taxanes, deux études randomisées
ont été présentées à l’ASCO.
✓L’essai multicentrique randomisé du Groupe coopératif onco-
logique hellénique (14) a inclus entre juin 1997 et mai 2003
224 patients, PS ≤2, présentant un cancer de vessie inopérable
ou métastatique, traités soit par MVAC (109 patients), soit par
docétaxel (75 mg/m2) et cisplatine (75 mg/m2) toutes les trois
semaines avec du G-CSF (111 patients). L’analyse a porté sur
201 patients (DC = 104, MVAC = 97) avec une stratification en
fonction des métastases viscérales et d’une éventuelle chimio-
thérapie néoadjuvante ou adjuvante. Le taux de réponse (55,4 %
versus 36,8 %, p = 0,018), le temps médian jusqu’à progression
(10,59 mois versus 6,43 mois, p = 0,0008) et la médiane de
survie (14,26 mois versus 9,61 mois, p = 0,031) se sont révélés
significativement supérieurs avec le MVAC.
✓L’essai de phase III de l’ECOG (15) comparant le MVAC à
l’association paclitaxel (225 mg/m2en 3 heures)-carboplatine
(AUC 6) tous les 21 jours n’a pu inclure que 85 patients entre sep-
tembre 1998 et juin 2001, et a été arrêtée prématurement de ce
fait. Aussi ne permet-il pas de conclure en termes de survie. Tout
au plus peut-on relever respectivement pour le MVAC et l’asso-
ciation paclitaxel-carboplatine des taux de réponse de 35,9 %