Médecine
& enfance
NEUROLOGIE
Rubrique dirigée par S. Auvin
MOUVEMENTS
ANORMAUX PERMANENTS
LA CHORÉE
La chorée est un mouvement rapide
pouvant toucher toute partie du corps.
Il s’agit de mouvements répétitifs mais
non rythmiques. Les mouvements cho-
réiques sont assez souvent incorporés
dans un mouvement volontaire.
La chorée n’est pas très fréquente à l’âge
pédiatrique. Les causes les plus fré-
quentes sont le lupus, la chorée de Sy-
denham et les causes médicamenteuses.
Parmi les médicaments, il faut recher-
cher la prise d’antiépileptiques ou de
neuroleptiques (y compris cachés). Des
mouvements choréiques peuvent égale-
ment être observés dans un certain
nombre de maladies génétiques et mé-
taboliques. Dans ces cas, les mouve-
ments choréiques ne sont pas isolés.
L’ensemble des symptômes oriente la
démarche diagnostique.
Bien que devenue plus rare, la chorée
de Sydenham est encore observée. Elle
est généralement considérée comme
une complication inflammatoire d’une
infection à streptocoque. Le délai entre
l’infection streptococcique et le début
de la chorée (qui peut atteindre douze
mois) est plus long que pour les autres
manifestations rhumatismales. Le début
est insidieux, marqué par une hypoto-
nie et des modifications de l’humeur
rendant le diagnostic difficile. Il s’agit
avant tout d’un diagnostic clinique. Les
examens paracliniques « neurologi-
ques » sont le plus souvent normaux
(IRM, PL). Les seuls éléments pouvant
aider au diagnostic sont la recherche
d’un syndrome inflammatoire biolo-
gique et des marqueurs d’infection
streptococcique ainsi qu’une échogra-
phie cardiaque. Il est important de pro-
Les mouvements paroxystiques chez l’enfant sont fréquents. Lorsque l’on parle de mouve-
ments anormaux, on sous-entend le plus souvent qu’il ne s’agit pas d’une épilepsie. Les mou-
vements anormaux peuvent être paroxystiques ou permanents. Ce premier élément est déter-
minant pour l’orientation étiologique. Il est souvent difficile ou impossible de faire décrire la
sémiologie des mouvements anormaux par les parents. Aussi faudra-t-il observer soi-même ou
demander aux parents de filmer les mouvements si ceux-ci sont intermittents.
Devant les mouvements anormaux intermittents, une épilepsie est fréquemment évoquée.
L’analyse clinique ne permet pas toujours de se prononcer sur la nature épileptique des événe-
ments. Si un doute persiste malgré l’analyse sémiologique et l’examen clinique, l’enregistre-
ment vidéo-EEG de l’événement permettra d’apporter la réponse. Toutefois, un électro-
encéphalogramme qui n’a pas permis l’enregistrement de l’événement ne permet pas de
conclusion.
Les manifestations paroxystiques non épileptiques de l’enfant peuvent être analysées en fonc-
tion de l’âge de survenue, en fonction de leur relation avec le sommeil et bien entendu selon
les symptômes observés. La nature intermittente ou continue des mouvements anormaux est
également importante. Différents éléments sémiologiques sont ensuite analysés : la ou les
parties du corps concernées, l’amplitude des mouvements, l’aspect rythmique et/ou stéréoty-
pé des mouvements.
Parmi les mouvements anormaux permanents, nous évoquerons la chorée, les dystonies et les
tremblements. Parmi les mouvements anormaux intermittents, nous évoquerons les tics, les
stéréotypies, les myoclonies et les dyskinésies paroxystiques. Notre but dans cet exposé n’est
pas d’être exhaustif. Nous n’aborderons ici que les mouvements anormaux les plus fréquents.
Mouvements anormaux
de l’enfant
S. Auvin, service de neurologie
pédiatrique et des maladies métaboliques,
hôpital Robert-Debré, Paris
Réalisés par E. Mallet et
O. Mouterde (pédiatrie,
CHU de Rouen),
des enregistrements
vidéo de chorée,
dystonie, spasmus
nutans, tics et syndrome
de West sont en ligne
sur le site de la revue :
medecine-et-enfance.net
(cliquer sur « vidéos »
dans la page d’accueil)
mai 2009
page 236
121565 236_COA 25/05/09 9:20 Page 236
poser une prise en charge thérapeu-
tique adaptée.
LA DYSTONIE
La dystonie est un trouble du tonus
musculaire caractérisé par des contrac-
tions musculaires involontaires, prolon-
gées, d’une ou de plusieurs parties du
corps, responsables d’attitudes anor-
males. Les mouvements dystoniques
empêchent la réalisation des mouve-
ments volontaires. On distingue les dys-
tonies primaires, liées à une anomalie
des gènes DYT, des dystonies secon-
daires, qui sont en rapport avec une at-
teinte des noyaux gris centraux.
Toutes les causes d’atteinte des noyaux
gris centraux (atteintes fixées, atteintes
neurodégénératives, toxiques, médica-
menteuses) peuvent induire des mouve-
ments dystoniques. Dans ces cas, l’exa-
men paraclinique fondamental est l’IRM
cérébrale.
Dystonie idiopathique à début
précoce (DYT1)
Il s’agit d’une maladie autosomique do-
minante à pénétrance basse et d’expres-
sion variable. Les symptômes débutent
selon une distribution bimodale (vers
dix ans ou vers quarante-cinq ans). L’at-
teinte dystonique commence au niveau
des membres puis touche le tronc. Chez
l’enfant, ce sont le plus souvent les
jambes qui sont atteintes en premier.
Malheureusement, les mouvements
dystoniques vont progressivement tou-
cher tout le corps. On peut observer une
dysarthrie, une dysphagie ou un trem-
blement postural. Le diagnostic est
confirmé par biologie moléculaire.
Dystonie Dopa-sensible (DYT5)
La dystonie Dopa-sensible ou maladie
de Segawa est une maladie rare de
transmission autosomique dominante.
Elle est caractérisée par un déficit en
enzyme guanosine triphosphate cyclo-
hydrolase I. Ce déficit entraîne une dys-
tonie qui s’améliore de façon spectacu-
laire sous traitement par L-Dopa. Cette
réponse est obtenue avec de faibles
doses et se maintient de manière inalté-
rée tout au long de la vie du patient.
La maladie commence entre quatre et
huit ans. Les premiers symptômes sont
des dystonies localisées aux membres
inférieurs. Un tremblement postural est
fréquemment observé ainsi qu’une fluc-
tuation diurne (aggravation à la fatigue
et amélioration, voire disparition, après
le sommeil). La dystonie se généralise
dans les dix à quinze premières années
de vie mais garde un caractère asymé-
trique. Cette asymétrie est à l’origine
d’erreurs diagnostiques : elle fait sou-
vent évoquer à tort une infirmité motri-
ce cérébrale.
LES TREMBLEMENTS
Les tremblements sont des mouvements
rythmiques, oscillatoires, secondaires à
l’alternance répétitive de contractions et
de détentes musculaires. Le tremble-
ment a une fréquence fixée qui peut être
lente ou rapide. Lorsque le diagnostic
est difficile, un enregistrement électro-
physiologique permet de faire la diffé-
rence entre tremblement et myoclonies.
Tout le monde peut présenter un trem-
blement physiologique. Ce tremble-
ment physiologique peut être aggravé
par le stress, l’anxiété ou les médica-
ments. Dans le cas des hyperthyroïdies,
c’est également le tremblement physio-
logique qui est accentué.
Le tremblement essentiel familial
constitue une entité clinique qui sur-
vient dans l’enfance dans moins de 5 %
des cas et concerne surtout des garçons.
Il s’agit d’un tremblement lent, fin ou
grossier, touchant en général les mains,
la tête et la voix. Ce tremblement est
minime au repos. Il est révélé par cer-
tains gestes fins et peut être intensifié
par tous les facteurs qui augmentent le
tremblement physiologique.
MOUVEMENTS ANORMAUX
INTERMITTENTS
LES TICS
Il s’agit de mouvements très fréquents
puisqu’ils touchent 1 à 5 % des enfants.
Le pic de survenue est situé entre huit et
dix ans. Il s’agit de mouvements stéréo-
typés, brusques, rapides et involontaires.
Ils sont en général bien identifiables,
mais dans certains cas leur diagnostic est
difficile. Ils s’observent le plus souvent
au niveau du visage (clignements
d’yeux, contraction des joues ou succion,
mâchonnement, mordillement et lécha-
ge des lèvres…), du cou (hochements de
tête, rotation…) ou des épaules (hausse-
ments…). La volonté permet de les
contrôler temporairement. Ils sont ag-
gravés par l’émotion, l’angoisse ou la co-
lère. Ils disparaissent durant la réalisa-
tion d’une tâche mettant en jeu la motri-
cité fine et l’attention. La présence de tics
verbaux, notamment d’une écholalie (ré-
pétition des mots entendus) ou d’une co-
prolalie (prononciation de mots ordu-
riers), doit faire évoquer un syndrome de
Gilles de la Tourette et faire demander
un avis spécialisé.
L’évolution des tics simples est le plus
souvent simple. Les tics simples de l’en-
fant sont peu intenses et n’ont pas de re-
tentissement social. Ils finissent très sou-
vent par disparaître. Dans certains cas,
l’évolution est capricieuse : disparition-
réapparition, modification du type de
tics, voire persistance plus ou moins défi-
nitive. Le traitement de première inten-
tion repose surtout sur les explications, la
dédramatisation et la psychothérapie…
LES STÉRÉOTYPIES
Les stéréotypies sont des mouvements
involontaires coordonnés, répétitifs et
rythmiques, comportant une séquence
motrice toujours identique, sans objec-
tif, touchant la tête, le tronc ou les ex-
trémités. Elles sont volontiers augmen-
tées par les émotions et l’excitation,
mais peuvent aussi survenir quand l’en-
fant est calme ou inactif (mouvements
d’extension du cou, grimaces).
Ces stéréotypies peuvent être observées
assez banalement chez des enfants nor-
maux sous la forme de « rythmies d’en-
dormissement ». Il s’agit le plus souvent
d’un balancement horizontal de la tête
(jactatio capitis nocturna), qui peut
prendre des formes extrêmes, l’enfant
pouvant aller jusqu’à se cogner sur les pa-
rois de son lit. Il existe fréquemment des
antécédents dans la famille. La plupart
du temps ces rythmies d’endormissement
disparaissent, mais leur persistance à
l’âge adulte n’est pas exceptionnelle.
Médecine
& enfance
mai 2009
page 237
121565 236-8 19/05/09 22:54 Page 237
Par ailleurs, des stéréotypies sont assez
souvent notées chez les enfants autistes
ou déficients mentaux ; dans ces cas,
elles sont un symptôme parmi d’autres.
LES MYOCLONIES
Les myoclonies sont des contractions
brèves (< 600 msec) et simultanées de
muscles agonistes et antagonistes. Elles
touchent le plus souvent le visage et les
membres supérieurs. Il faut être très
prudent devant une suspicion de myo-
clonies, car elles peuvent être de diffé-
rentes origines. Certaines myoclonies
sont d’origine épileptique, mais nous ne
parlerons ici que des myoclonies non
épileptiques. Seul l’enregistrement des
événements cliniques au cours d’un
électroencéphalogramme permet de
trancher sur leur nature. Si l’origine épi-
leptique est exclue, on recherchera en
première intention les causes bénignes
de myoclonies.
Myoclonus bénin du sommeil
du nouveau-né
Il s’agit de sursauts myocloniques répé-
titifs qui intéressent les membres ou
tout le corps. Ils sont observés quasi ex-
clusivement lors du sommeil, plus rare-
ment à l’endormissement. Les myoclo-
nies sont habituellement présentes dès
les premiers jours de vie. On peut les
observer au cours des six premiers
mois. Le diagnostic est quasiment
confirmé par la disparition des symp-
tômes avec le réveil. L’enregistrement
EEG ne retrouve pas de modification du
tracé lors des sursauts myocloniques.
Myoclonies d’endormissement
Il s’agit d’événements physiologiques
qui existent quasiment chez tous les in-
dividus. Les myoclonies d’endormisse-
ment sont souvent isolées, pouvant être
parcellaires, multifocales ou générali-
sées. De façon non exceptionnelle, l’en-
fant raconte qu’il les ressent. Elles don-
nent alors le plus souvent une sensation
de chute dans le vide. Elles surviennent
toujours à l’endormissement. Il n’est pas
rare qu’elles entraînent un éveil. Elles
sont parfois très intenses, pouvant en-
traîner un saut du plan du lit. Elles
n’existent pas lors de la veille.
Elles sont facilement mal interprétées
chez les patients ayant une épilepsie, du
fait, en particulier, de l’attitude « hyper
attentive » des parents de ces patients.
Les parents sont très souvent inquiets et
observent énormément leur enfant à la
recherche d’une crise épileptique. Cela
leur fait signaler ces événements. Il faut
parfois savoir aller jusqu’à l’enregistre-
ment électroencéphalographique pour
les rassurer sur la nature non épilep-
tique de l’événement. Le tracé élec-
troencéphalographique ne doit pas en-
registrer d’anomalie concomitante à
l’événement. La polygraphie EMG-EEG
apporte une information importante.
Myoclonus bénin du nourrisson
Le myoclonus bénin du nourrisson ap-
paraît entre trois et neuf mois. Sa fré-
quence augmente rapidement à plu-
sieurs épisodes quotidiens, puis il dispa-
raît en quelques mois. Les épisodes se
caractérisent par des sursauts myoclo-
niques de la tête et des épaules, tou-
chant parfois les membres supérieurs.
Ces manifestations surviennent souvent
en série dans les phases d’éveil, parfois
favorisées par l’excitation ou la frustra-
tion. Il existe un équivalent que l’on
nomme « shuddering attacks » (frémis-
sements), qui correspond à un accès de
frissons. Les « shuderring attacks » sont
observés au même âge ; il s’agit dans ce
cas de tremblements de la tête et/ou
des épaules.
Dans ces deux entités, les nourrissons
ont un développement psychomoteur
normal et l’enregistrement EEG est sans
anomalie. Ces enfants sont souvent
adressés en neurologie pour suspicion
de spasmes infantiles. L’évaluation cli-
nique et l’enregistrement permettent
d’écarter une origine épileptique.
LES DYSKINÉSIES PAROXYSTIQUES
Les dyskinésies paroxystiques se carac-
térisent par des accès intermittents de
mouvements anormaux de différents
types (dystonies, chorée, choréo-athé-
tose). Les dyskinésies paroxystiques
sont rares. Il existe probablement un
certain nombre de formes génétiques
qui ne sont pas complètement caractéri-
sées. Il faut savoir que les dyskinésies
paroxystiques peuvent également être
secondaires (maladies métaboliques,
accidents vasculaires cérébraux, patho-
logies inflammatoires du système ner-
veux central). Les deux types les plus
fréquents se différencient en fonction
de leur mode de survenue.
Dyskinésies paroxystiques
non kinésigéniques
Les dyskinésies paroxystiques non kiné-
sigéniques se caractérisent par des ac-
cès de dystonie ou de choréo-athétose
de durée variable, allant de quelques
minutes à plusieurs heures. Ces accès
peuvent être pluriquotidiens.
Les épisodes surviennent spontané-
ment, mais peuvent être favorisés par le
stress et la fatigue. Les premiers épi-
sodes peuvent survenir dans l’enfance
mais sont aussi observés à l’âge adulte.
La prise en charge thérapeutique est
peu satisfaisante car les accès répon-
dent mal aux traitements.
Dyskinésies paroxystiques
kinésigéniques (DPK)
Il s’agit d’accès de dystonie ou de cho-
réo-athétose très courts qui sont déclen-
chés par le mouvement. Les situations
où l’on observe le plus fréquemment ces
accès sont le lever, l’initiation de la
marche, le saut… Plus rarement
d’autres stimulus peuvent déclencher
un accès : le froid, l’hyperventilation…
La fréquence de survenue des accès est
élevée et peut aller jusqu’à plusieurs
centaines par jour.
Les épisodes débutent entre six et seize
ans. Certains patients peuvent avoir des
crises épileptiques. Il peut également
s’agir de cas familiaux. Les DPK peuvent
être sporadiques ou familiales, trans-
mises selon un mode autosomique do-
minant. Les anti-épileptiques sont le
traitement de choix, notamment la car-
bamazépine ou la phénytoïne. L’acéta-
zolamide peut également être utilisé.
Pour en savoir plus
LANDRIEU P., TARDIEU M. : Neurologie pédiatrique, coll. Abré-
gés, Masson, 2
e
édition, 1997.
FENICHEL G.M. : Clinical Pediatric Neurology, Elsevier/Saun-
ders, 2005.
FERNANDEZ-ALVAREZ E., AICARDI J. : Movement Disorders in
Children, Mac Keith Press, London, 2001.
WOLF D.S., SINGER H.S. : « Pediatric movement disorders : an
update », Curr. Opin. Neurol., 2008 ; 21 : 491-6.
Médecine
& enfance
mai 2009
page 238
121565 236-8 19/05/09 22:54 Page 238
1 / 3 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !