N O U V E L L E S T H É R A P I E S Nouvelles thérapies ● M. Saghatchian-d’Assignies* ANTIANGIOGÉNIQUES L’étude la plus intéressante sur les nouvelles molécules antiangiogéniques porte sur un anticorps monoclonal anti-VEGF, le bevacizumab (Avastin®), utilisé dans le traitement des cancers du rein métastatiques. Le bevacizumab est un anticorps monoclonal recombinant humanisé dirigé contre le facteur de croissance vasculaire endothélial VEGF. Le bevacizumab est en cours de développement pour le traitement de différentes tumeurs solides, avec des études de phase III en association à la capécitabine (Xeloda®) pour le traitement des cancers du sein métastatiques, et en association ou non à la chimiothérapie pour les cancers du côlon métastatiques. Des études de phases II-III démarrent actuellement dans le cancer du poumon non à petites cellules et les cancers du sein métastatiques non préalablement traités. Le cancer du rein peut être une cible de choix pour les traitements antiangiogéniques : en effet, il existe une dérégulation et une sécrétion accrue de VEGF dans cette tumeur par ailleurs très vascularisée. Le National Cancer Institute, en association avec la firme Genentech, a donc mené une étude de phase II pour évaluer l’efficacité du bevacizumab en monothérapie dans le cancer du rein métastatique. Les résultats de cet essai randomisé, en double aveugle, contre placebo, ont été présentés par J.C. Yang, du NCI, investigateur principal de l’étude (abstr. 15). En fait, l’étude a été prématurément arrêtée parce que l’objectif primaire d’efficacité (survie sans progression) a été atteint plus tôt que prévu. L’étude incluait des patients présentant un cancer du rein métastatique en échec des traitements conventionnels, ce qui autorisait l’utilisation d’un groupe placebo. Cent seize patients ont été inclus et randomisés en trois groupes : un groupe placebo (39 patients), un groupe traité par le bevacizumab à “faible” dose, dose de charge de 4,5 mg/kg puis 3 mg/kg (37 patients), et un groupe traité par le bevacizumab à “forte” dose, dose de charge de 15 mg/kg puis 10 mg/kg (40 patients) toutes les deux semaines. Un cross-over du groupe placebo vers un groupe avec traitement était autorisé pour les patients progressant sous traitement (avec levée de l’aveugle à ce moment-là). L’objectif primaire était le temps jusqu’à progression et le taux de réponse, la survie étant un objectif secondaire. Les critères de progression dans cette étude étaient très stricts : augmentation d’une seule lésion de plus de 12 % ou * Chef de clinique assistante, service de cancérologie, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75908 Paris Cedex 15. 104 apparition de toute nouvelle lésion. Il y a eu quatre réponses partielles dans le groupe bevacizumab forte dose (taux de réponse objective à 10 %). De façon plus intéressante, on a observé une augmentation très significative de la survie sans progression pour les patients du groupe traité à forte dose comparé au groupe placebo (hazard ratio 2,55, p < 0,0002). La différence entre le groupe faible dose et le groupe placebo était à la limite de la significativité. Le temps médian jusqu’à progression était de 41, 99 et 147 jours pour les patients des groupes placebo, faible dose et forte dose respectivement. Au moment de l’analyse, les données de survie n’étaient pas encore disponibles. En termes de tolérance, il n’y a eu aucune toxicité de grade 4 et seulement quelques toxicités de grades 1-2 : protéinurie asymptomatique, hypertension artérielle, épistaxis de grade 1. Aucune complication thromboembolique, redoutée avec cette classe de médicaments, n’a été observée. Avastin® apporte donc un bénéfice clair en termes de survie sans rechute pour ces patients, même si la dose maximale la plus efficace n’a sans doute pas encore été déterminée. Par ailleurs, cet essai montre bien que ce type d’agents antiangiogéniques inhibe probablement plus la croissance tumorale qu’il ne provoque de véritables régressions tumorales. Dans un poster présenté par V.F. Langmuir, de la firme Genentech (abstr. 32), les effets à long terme d’un traitement par le bevacizumab ont également été présentés. Parmi 302 patients inclus dans les 6 différents essais de phases I-II évaluant la molécule dans différentes tumeurs solides (du sein, du côlon et du poumon), les auteurs ont analysé les résultats d’un sous-groupe de 35 patients (12 %) ayant été traités pendant plus d’un an. Parmi ceux-ci, 23 ont eu une période de surveillance de plus de 6 mois, suivie de progression et de reprise du traitement ; 22 (96 %) de ces patients ont été répondeurs ou stables durant la première partie du traitement (un an) et 13 (57 %) à nouveau pendant la seconde partie (un an supplémentaire). La survie médiane de ces 35 patients n’a pas été atteinte mais dépasse au moins deux ans. Le traitement au long cours est bien toléré, il n’y a pas eu de décès toxique et seul un patient a arrêté le traitement pour toxicité. Les principales toxicités étaient une protéinurie, des épisodes thromboemboliques, des saignements de grades 3-4 et une hypertension artérielle. Ces essais montrent que la molécule est active chez certains patients (stabilisation ou réponse initiale, progression à l’arrêt et à nouveau stabilisation ou réponse sous traitement), et La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 3 - mai-juin 2002 qu’elle peut être administrée sur de longues périodes grâce à son profil de tolérance. L’étude E2200 de l’ECOG (Eastern Cooperative Group) avec le bevacizumab dans le cancer colorectal a également été rapportée par B.J. Giantonio (abstr. 503). Dans cette étude de phase II, le bevacizumab était administré conjointement au traditionnel schéma de traitement hebdomadaire de type Saltz associant irinotécan, 5 fluoro-uracile (5-FU) et leucovorine dès la première ligne. L’objectif primaire de l’étude était la survie sans progression à sept mois. Les objectifs secondaires étaient le taux de réponse et la survie. L’étude a été transitoirement interrompue en raison d’une incidence élevée de thromboses et de complications hémorragiques, et a ensuite été reprise avec une réduction des doses de 5-FU et d’irinotécan et des critères d’inclusion plus stricts. Quatre-vingt-douze patients ont été inclus. La toxicité a été hématologique (20 patients, soit 33 % de neutropénie de grades 3-4 et trois cas de neutropénie fébrile) et non hématologique : 15 % de diarrhée de grade 3 ; 17 patients ont présenté un épisode de saignement (épistaxis de grade 1 surtout et un épisode sévère nécessitant une transfusion) ; trois thromboses asymptomatiques ont été documentées. Ce profil de toxicité est semblable à celui du schéma Saltz seul et le bevacizumab ne semble pas apporter de toxicité supplémentaire. Les résultats en termes d’efficacité n’ont pas été rapportés. INHIBITION DE LA VOIE DE L’ONCOGÈNE RAS Le rôle de la transduction du signal dans le processus de prolifération cellulaire a été largement étudié, aboutissant au développement de différentes molécules agissant sur ces voies comme l’inhibiteur de farnésyltransférase (FTI) R115777 et de la MAPK/ERK kinase (MEK) CI-1040. Les résultats des premiers essais cliniques ont été présentés à l’ASCO 2002 et donnent un aperçu du spectre d’action de ces médicaments. R115777 (Zarnestra®) Les résultats de l’essai de phase 2 du R115777 (Zarnestra®) chez les patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) ont été présentés par A. Adjei, de la Mayo Clinic (abstr. 1156). Le rationnel pour ces traitements était initialement lié au fait que la farnésyltransférase (FT) régule l’activation et la fonction de Ras et que les FTI inhibent donc les oncogènes Ras. Les données actuelles suggèrent cependant que K-Ras (oncogène le plus fréquemment muté dans les CBNPC) est résistant à l’action des FTI, qui serait en fait liée à l’inhibition d’autres protéines que Ras. L’étude a inclus des patients présentant un CBNPC de stades III-IV non opérables, non candidats à une radiochimiothérapie et non prétraités. Les patients recevaient 300 mg, deux fois par jour, de R115777, pendant 21 jours. Une évaluation biologique de l’inhibition de la FT était réalisée sur des échantillons sanguins et de muqueuse de la bouche à J8. Parmi les 45 patients inclus, 43 ont été évalués. Le traitement était bien toléré, avec des toxicités non hématologiques de grades 1-2 : diarrhée, fatigue, anorexie et dyspnée. La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 3 - mai-juin 2002 Les toxicités hématologiques de grade 3 ou 4 étaient une anémie (5 % des patients), une leucopénie (11 %) et une neutropénie (11 %). Il n’a pas été observé de réponse objective ; cependant, 8 patients (19 %) ont été stabilisés par le traitement pendant plus de six mois. La survie médiane était de 7,7 mois et le temps médian jusqu’à progression de 2,7 mois. L’analyse des échantillons biologiques prélevés a montré une inhibition de FT chez 34 patients (83 % des échantillons), sans différence significative entre les patients stables et les autres. Le traitement a donc une activité modeste dans les CBNPC, mais un profil de tolérance permettant les associations avec la chimiothérapie ou la radiothérapie. D. Cunningham a présenté les résultats d’une autre étude avec Zarnestra® dans le cancer colorectal métastatique (CCRM). Dans cette étude multicentrique de phase III randomisée contre placebo, 368 patients présentant un CCRM en échec après deux lignes de chimiothérapie ou plus ont été randomisés selon un ratio 2:1 pour recevoir Zarnestra® 300 mg x 2 par jour pendant 21 jours, suivis d’une semaine d’arrêt (n = 235), ou le placebo (n = 133). Il n’a été observé aucune différence entre les deux groupes en survie sans progression (2,7 mois pour les deux) ou survie globale (6,1 mois pour le groupe placebo versus 5,7 mois dans le groupe Zarnestra®). Le traitement a été dans l’ensemble bien toléré, avec quelques diarrhées et une toxicité hématologique réversible. Zarnestra® a également été évalué dans d’autres tumeurs : – le cancer du sein métastatique (abstr. 138) chez 77 patientes prétraitées, avec des résultats encourageants : neuf réponses partielles (11,6 %) et neuf stabilisations (33,7 %) ; – le cancer bronchique à petites cellules en rechute (abstr. 1275), où aucune efficacité n’a été rapportée ; – le cancer du pancréas métastatique (abstr. 517) dans un essai randomisé en association avec la gemcitabine versus gemcitabine plus placebo, où il ne procure aucun avantage en survie sans rechute ni en survie globale ; – les gliomes en progression (abstr. 317) dans une étude chez 33 patients traités qui a montré trois réponses partielles (9 %) et deux stabilisations (6 %) et offre un espoir de traitement pour ces tumeurs. Il faut également évoquer les résultats, chez les patients atteints de leucémie aiguë myéloïde, de la phase II multicentrique française (abstr. 1056) : cette étude comportait deux cohortes de patients, 74 patients en rechute et 61 patients réfractaires lourdement prétraités. Le traitement était administré à la dose de 600 à 900 mg x 2/j, p.o., J1 à J21 tous les 28 jours. Il y a eu cinq réponses complètes, une réponse partielle et cinq stabilisations au total, avec des survies médianes non atteintes chez ces patients (versus 2,3 et 2,1 mois respectivement dans les deux cohortes, pour les non-répondeurs). Il s’agit donc d’un véritable espoir pour ces patients au pronostic très sévère. Inhibiteur de MEK : CI-1040 Seuls les résultats des études de phase I avec l’inhibiteur de MEK CI-1040 étaient disponibles à l’ASCO 2002. Il s’agit .../... 105 Ethyol N O U V E L L E S T H É R A P I E S .../... d’un inhibiteur hautement sélectif de MEK1 et MEK2 qui prévient la phosphorylation et l’activation de la voie des MAPkinases impliquées dans de nombreuses voies de transduction du signal et qui jouent un rôle important dans la prolifération cellulaire. La dose recommandée par les études de phase I (abstr. 320 et 321) est de 800 mg par voie orale deux fois par jour, avec pour effets secondaires le plus fréquemment observés : diarrhée, fatigue, nausée, œdème périphérique, rash, vomissement et anorexie de grades 1-2. Il y a eu une réponse partielle (cancer du pancréas) et 20 stabilisations d’une durée médiane de 5,4 mois. INHIBITION DU RÉCEPTEUR DE L’EGF Parmi les nouvelles thérapies, les molécules agissant par inhibition du récepteur de l’EGF offrent des perspectives thérapeutiques très intéressantes. Carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou (CETC) Ces tumeurs expriment l’EGF-Rc dans 92 % des cas. Cette surexpression est corrélée à un mauvais pronostic, avec une survie sans rechute et une survie globale diminuées. Cette localisation est donc une cible de choix pour les traitements inhibiteurs de l’EGF-Rc. Nous avions rapporté les résultats de l’OSI 774 (Tarceva®) présentés lors de l’ASCO 2001 ; cette année, ce sont deux autres molécules anti-EGF-Rc pour lesquelles ont été présentés des résultats prometteurs dans cette indication. La première est l’IMC-C225 (Erbitux®, développé par Imclone Systems), anticorps monoclonal humanisé dirigé contre l’EGFRc (abstr. 925). Il s’agit d’une population hétérogène de patients présentant un CETC, stables, progressifs ou en rechute après une ligne de chimiothérapie à base de cisplatine et ayant reçu une dose totale de cisplatine inférieure à 450 mg/m2. Le cisplatine était poursuivi ou repris à la même dose (75 mg/m2 ou 100 mg/m2 selon le protocole utilisé) pour quatre cycles toutes les trois semaines, associé à l’anticorps IMC-C225 administré par voie intraveineuse à 400 mg/m 2 en dose de charge puis 250 mg/m 2 hebdomadaires. L’anticorps était ensuite poursuivi seul chez les patients répondeurs ou stables jusqu’à ce que le patient progresse. L’objectif de l’étude était d’évaluer le taux et la durée de réponse, ainsi que la tolérance de l’association chez les patients ne répondant plus au cisplatine. Les résultats présentés ici concernent uniquement la population homogène de 79 patients ayant progressé malgré la chimiothérapie à base de cisplatine. Au total, 885 perfusions hebdomadaires de l’anticorps ont été administrées aux 79 patients. Trois patients ont été retirés de l’étude en raison d’une réaction d’hypersensibilité à l’anticorps. La toxicité observée correspondait à celle habituellement retrouvée avec cette classe de molécules : nausées et asthénie, mais surtout une toxicité cutanée caractéristique à type d’érythème et de rash acnéiforme. La donnée intéressante concernant la toxicité est la corrélation entre les toxicités cutanées et la réponse au traitement, qui n’a pas été retrouvée avec d’autres molécules anti-EGF-Rc comme l’inhibiteur de tyroLa Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 3 - mai-juin 2002 sine kinase ZD 1839 (Iressa®). De façon intéressante, cette corrélation se retrouve également dans l’étude sur l’IMC-C225 dans le cancer du côlon métastatique, avec un taux de réponse de 29 % chez les patients présentant une toxicité cutanée contre 3 % pour les patients n’ayant pas présenté de toxicité cutanée (p < 0,001). Au total, parmi les 79 patients progressifs traités, neuf ont présenté une réponse (11,5 %) et 13 une stabilisation (16,7 %), soit un “bénéfice clinique” (concept utilisé pour ce type de nouvelle thérapie non conventionnellement cytotoxique et regroupant les réponses et les stabilisations) de 28,2 %. Les patients répondeurs ont progressé après une durée médiane de 155 jours (plus de 5 mois). Le cetuximab est bien toléré et n’augmente pas la toxicité du cisplatine en association. Il permet de rattraper des patients progressifs sous cisplatine, normalement réfractaires aux traitements. La molécule mérite donc d’être évaluée en première ligne de traitement des CETC en association au cisplatine. Un essai a également été présenté dans les CETC avec une autre molécule inhibitrice de la tyrosine kinase intracytoplasmique de l’EGF-Rc, Iressa ® (ZD 1839). Il s’agit ici de 52 patients présentant un CECT métastatique ou en rechute après une première ligne de traitement : chimiothérapie et radiothérapie : 42 patients, chimiothérapie seule : deux patients, radiothérapie seule : sept patients, et un patient vierge de traitement. Les patients ont reçu Iressa® en monothérapie à la dose de 500 mg par jour et ont été évalués après 8 semaines de traitement. Parmi les 40 patients évaluables, il y a trois réponses complètes, cinq réponses partielles (soit un taux de réponse objective de 20 %), 14 stabilisations et 18 progressions. Huit patients sont encore sous traitement à sept mois. La principale toxicité est la survenue d’un rash acnéiforme de grades 1-2 chez plus de la moitié des patients, non corrélé à l’efficacité thérapeutique. Cette étude suggère donc une bonne efficacité de la molécule chez ces patients de mauvais pronostic, avec une bonne tolérance et la possibilité d’améliorer l’efficacité des thérapeutiques en première ligne. Les résultats des essais avec le ZD 1839 (Iressa®). dans le cancer bronchique non à petites cellules (Ideal 1 et 2) ont été présentés à l’ASCO 2002 et sont détaillés dans le chapitre sur les cancers bronchiques. Cancers colorectaux Le cetuximab (IMC-C225) est également développé dans les cancers colorectaux : des résultats très intéressants de l’association de la molécule au CPT-11 avaient été présentés au cours de l’ASCO 2001. Cette année, ce sont les données de traitement en monothérapie qui ont été rapportées par la même équipe (abstr. 504). Dans cet essai réalisé chez 57 patients progressifs après traitement par 5 fluoro-uracile et irinotécan, le cetuximab seul a permis d’obtenir six réponses partielles (10,5 %) et 21 stabilisations (36,8 %) d’une durée minimale de 12 semaines. Le temps médian jusqu’à progression était de 50 jours, et la survie médiane n’est pas encore atteinte. Cette activité en monothérapie d’une molécule supposée cytosta107 N O U V E L L E S tique offre des perspectives d’associations à d’autres nouvelles molécules aux toxicités non croisées. Par ailleurs, dans cette étude, il n’y avait pas de corrélation entre la réponse et l’expression du récepteur de l’EGF, ce qui suggère un mode d’action autre que l’inhibition du récepteur de l’EGF. Erlotinib (Tarceva®) L’actualité concernant l’erlotinib (OSI-774, Tarceva®), inhibiteur oral sélectif de la tyrosine kinase du récepteur à l’EGF, actuellement en essai de phase III dans le CBNPC, est l’étude de phase I d’association au docétaxel chez les patients présentant des tumeurs solides (abstr. 81). Les études précliniques avaient montré une additivité de l’action des deux molécules. Chez les 22 patients traités par 82 cycles d’erlotinib (en mg/j)/docétaxel (en mg/m2 i.v. toutes les trois semaines) aux doses de 100/60, 100/75, 125/75 et 150/75, la combinaison 100/75 a été bien tolérée chez neuf patients. Avec les autres doses, les neutropénies fébriles étaient une toxicité limitante. Les toxicités non hématologiques étaient par ailleurs modérées et habituelles : rash, diarrhée, stomatites, nausées et fatigue. Il y a eu par ailleurs une réponse complète chez un patient présentant un carcinome du nasopharynx lourdement prétraité, une réponse mineure dans un CBNPC, et cinq stabilisations de quatre à plus de sept mois. Les doses recommandées pour l’association sont donc : erlotinib 100 mg/j associé au docétaxel 75 mg/m2 i.v. toutes les trois semaines. Cette association devrait pouvoir être évaluée dans de nombreux types tumoraux. PKI-166 Une molécule émergente de la même famille est le PKI-166, inhibiteur sélectif de la tyrosine kinase du récepteur à l’EGFR (HER1) et du récepteur erb B2 (HER2/neu). Le potentiel thérapeutique de cette molécule est certainement très intéressant dans les tumeurs épithéliales présentant une activation des deux voies de signalisation. Les résultats présentés concernent des essais de phase I aboutissant à des doses recommandées de 450 mg à 750 mg/j par voie orale, avec une toxicité habituelle pour ce type de molécule : nausées, vomissements, diarrhée, fatigue, rash, élévation des transaminases (abstr. 340, 341 et 377). INHIBITEURS DE COX-2 Les enzymes cyclo-oxygénases – COX-1 et COX-2 – sont impliquées dans la synthèse des thromboxanes et prostaglandines. Alors que l’expression des COX-1 est régulée de façon constitutive, celle de COX-2 est inductible par les cytokines, facteurs de croissance et promoteurs de tumeur. En particulier, COX-2 intervient dans : – la transformation des précurseurs de carcinogènes en carcinogènes, et donc dans l’initiation de la carcinogenèse ; – la synthèse de PgE2, impliquée dans la tumorigenèse ; – l’inhibition de l’apoptose ; – l’angiogenèse. Son hyperexpression a été mise en évidence dans les adénomes et cancers coliques, les CBNPC, les cancers ORL, les cancers 108 T H É R A P I E S du sein HER+. D’où l’idée d’utiliser les inhibiteurs sélectifs de COX-2 dans la prévention et le traitement de ces tumeurs. L’étude de N.K. Altorki et al. (abstr. 101) du Weill Medical College of Cornell University, à New York, suggère que le célécoxib (Celebrex ® ), inhibiteur de la cyclo-oxygénase 2 (COX-2), serait capable d’augmenter le taux de réponse à la chimiothérapie néoadjuvante chez les patients présentant un CBNPC opérable. Dans cette étude, les patients recevaient 400 mg de célécoxib deux fois par jour de façon continue entre deux cycles de chimiothérapie néoadjuvante et pendant la cure (paclitaxel 225 mg/m2 et carboplatine AUC 6), jusqu’à la chirurgie. Seize patients ont été traités : 12 d’entre eux ont répondu au traitement (huit réponses partielles, quatre réponses complètes) et les quatre patients restants ont été stabilisés par le traitement. Ces bons résultats suggèrent que le célécoxib augmente de façon simple le taux de réponse à la chimiothérapie, mais, bien sûr, une étude randomisée serait indispensable pour confirmer ces données. Les résultats préliminaires de l’étude de Csiki et al. (abstr. 1187) vont dans le même sens, avec un taux de réponse objective de 15,3 % chez les patients traités par docétaxel plus célécoxib en 2e ligne, soit un taux de réponse supérieur à celui de la monothérapie seule par rapport aux données historiques. L’étude dans le cancer colorectal est davantage sujette à discussion (abstr. 505) : il s’agit d’un essai de phase II d’association du célécoxib au schéma de chimiothérapie de type Saltz associant irinotécan, 5-FU et leucovorine dans le cancer colorectal métastatique. L’inclusion dans cet essai a été freinée par la toxicité associée au schéma de type Saltz et par la cardiotoxicité imputable au célécoxib. Seuls 25 patients ont été inclus, dont 21 ont été évalués en termes d’efficacité. Le taux de réponse partielle a été de 24 %, avec 43 % de stabilisations ; 19 % des patients n’étaient pas évaluables. La durée médiane de réponse était de six mois, la survie médiane de 10,7 mois. Parmi les toxicités de grades 3-4, on retiendra trois événements cardiovasculaires, dont un décès d’AVC et un infarctus du myocarde. Ces toxicités semblent en fait diminuées par le célécoxib. Cependant, on ne peut malheureusement rien conclure de cette étude du fait du faible nombre d’inclusions par rapport à ce qui était prévu et de l’absence de randomisation contre un groupe sans célécoxib. Rappelons que le rôle de la molécule dans la prévention des polypes adénomateux a été par ailleurs établi. VACCINATION Une étude intéressante a été présentée par Timmerman et al. (abstr. 13) chez les patients présentant un lymphome folliculaire de bas grade non prétraité et candidats à une approche de surveillance appelée “watch and wait”. L’objectif chez ces patients est de retarder, voire de prévenir la mise en route de la chimiothérapie. Ce vaccin, nommé GTOP-99, est un vaccin à base de protéine recombinante idiotypique dérivée des biopsies tumorales de La Lettre du Cancérologue - volume XI - n° 3 - mai-juin 2002 chaque patient. Seize patients ont été inclus, et une réponse immunitaire, humorale et cellulaire T ou antitumorale a été mise en évidence chez 87 % d’entre eux. Les patients ont été traités pendant six mois, au terme desquels on a observé huit stabilisations et deux réponses après un suivi moyen de dix mois. Les six autres ont progressé. Le traitement été bien toléré (réactions au point d’injection et syndromes grippaux). Il n’y a pas d’avantage en survie sans rechute pour l’ensemble du groupe recevant Ovarex ® . En revanche, une analyse en sous-groupe retrouve une augmentation significative de la survie sans rechute chez les patientes ayant une plus faible masse tumorale (maladie résiduelle inférieure ou égale à 2 cm, CA 125 élevé au départ et inférieur ou égal à 65 avant le troisième cycle de chimiothérapie, âge supérieur à 50 ans). Le bénéfice lié au traitement est confirmé par une analyse multivariée selon le modèle de Cox (hazard ratio = 0,59, p = 0,0313). Parmi les anticorps monoclonaux nouvellement évalués, le développement d’Ovarex ® dans les cancers de l’ovaire est actuellement le plus avancé (abstr. 31). Ovarex® est un anticorps monoclonal murin anti-CA 125. Dans cet essai de phase III randomisé évaluant Ovarex® versus placebo, 345 patientes atteintes de cancer de l’ovaire stades III-IV en réponse après chirurgie et CT ont été incluses. Le traitement était administré sous la forme d’une perfusion de 20 minutes, aux semaines 0, 4, 8, puis toutes les 12 semaines jusqu’à la rechute pendant deux ans CONCLUSION L’émergence des thérapeutiques ciblées se confirme donc, avec des molécules efficaces et peu toxiques, offrant des perspectives d’association, voire de substitution des thérapeutiques conventionnelles, et, pour certaines, un bénéfice probable sur la survie des patients. ■ ✂ À découper ou à photocopier OUI, JE M’ABONNE AU MENSUEL La Lettre du Cancérologue Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules ❏ Collectivité ................................................................................. à l’attention de .............................................................................. 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