La Lettre du Cancérologue • Vol. XXIV - n° 11 - décembre 2015 | 549
ÉDITORIAL
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Cancer : inégalités et nouveaux progrès
en Europe
Cancer: disparities and new progress in Europe
L’ European Cancer Congress, qui s’est tenu à Vienne récemment, a éclairé
lamarche du progrès contre le cancer. Ce bilan 2015 reste cependant contrasté,
les inégalités côtoyant les innovations les plus spectaculaires.
C’est ainsi que nous avons découvert les derniers résultats de l’enquête EUROCARE,
soutenue par le ministère de la Santé italien et l’Europe, et fondée sur l’étude
desdonnées de plus de 10millions de patients atteints de cancers diagnostiqués
en1995 et 2007, tirées de 107registres du cancer dans 29 pays européens. Lespatients
étaient suivis jusqu’en2008. La bonne nouvelle vient des taux de survie à 5ans,
qui s’accroissent globalement et régulièrement pour la majorité des cancers.
Lesmeilleures performances sont observées dans la leucémie myéloïde chronique,
avec un accroissement de32à54 %, dans le cancer de la prostate, avec des taux
passant de73à82 %, etenfi n dans le cancer rectal, dont les taux de survie à 5ans
passent de52à58 %. Malheureusement, de nombreuses inégalités persistent au sein
del’Europe. Cesvariations régionales sont plus marquées pour les cancers associés
àunbon pronostic. Ainsi, la survie moyenne à 5ans pour le cancer du sein varie de74 %
enEurope de l’Est à 85 % en Europe du Nord ; pour le cancer du côlon, ce taux varie
de49 % en Europe de l’Est à 61 % en Europe centrale ; pour le cancer de la prostate,
letaux passe de 72 % en Europe de l’Est à 88 % en Europe centrale. Ces variations
régionales existent pour les autres cancers associés à un moins bon pronostic, maissont
plus faibles. Il est malheureux de constater que ces taux de survie sont corrélés
auproduit national brut et aux dépenses totales de santé nationales . Il est encore plus
malheureux de constater que 2pays dérogent à cette règle : leDanemark
et laGrande-Bretagne, qui continuent à avoir des performances inférieures
àcelles quel’on pourrait attendre étant donné leur niveau de dépenses de santé.
L’impactd’uncertain nombre defacteurs, tels que le style de vie, le dépistage
etlaprévention, ainsi que des niveaux globaux de santé est aussi souligné.
À côté de cette étude EUROCARE, cette réunion a été l’occasion de s’intéresser
àdespopulations particulièrement vulnérables. L’étude slovaque
de S.Jozef etal. (abstr.1046) porte ainsi sur plus de 11 000 migrants et réfugiés.
Ladistribution descancers observés recouvre les principaux types de cancer :
sein, côlon, poumon , mais à un taux plus élevé que la moyenne de la population.
Plus regrettable encore, 50 % des patients se présentent à un stade tardif.
Enfi n, 50 % ne mènent pas leurtraitement à son terme.
Pr Jean-François
Morère
Département de cancérologie-
hématologie,
CHU Paul-Brousse, Villejuif.