Préparation à l’agrégation
Cyclotomie
ENS Rennes - Année 2014–2015
Romain Basson
Cyclotomie
Table des matières
1 Cyclotomie dans C[Com03,Per96]2
2 Cyclotomie en caractéristique quelconque [Com03,FG95]5
3 Applications 7
3.1 Un pas vers le théorème de la progression arithmétique Dirichlet [Com03]....... 7
3.2 Constructibilité des polygones réguliers ........................... 8
3.3 Ordre des éléments de GLn(Q)[FGN09, ex. 3.17 et 3.18 p. 199] et [Ale99, Thème II] . 9
3.4 Théorème de Wedderburn .................................. 11
3.5 DFT et FFT [Dem09, Chap. 4] ............................... 11
3.6 Codes cycliques et codes BCH [Dem09, Chap. 10 et 11] .................. 11
4 Exercices 11
Références
[Ale99] Michel Alessandri :Thème de géométrie. Groupes en situation géométrique. Dunod, 1999.
[Com03] François Combes :Algèbre et géométrie. Bréal, 2003.
[Dem09] Michel Demazure :Cours d’algèbre. Cassini, 2009.
[FG95] Serge Francinou et Hervé Gianella :Exercice de mathématiques pour l’agrégation, algèbre
1. Masson, 1995.
[FGN08] Serge Francinou, Hervé Gianella et Serge Nicolas :Oraux X-ENS, algèbre 1. Cassini,
2008.
[FGN09] Serge Francinou, Hervé Gianella et Serge Nicolas :Oraux X-ENS, algèbre 2. Cassini,
2009.
[HL12] David Hernandez et Yves Laszlo :Introduction à la théorie de Galois. Editions Ecole
Polytechnique, 2012.
[HW07] Godfrey Harold Hardy et Edward Maitland Wright :Introduction à la théorie des nombres.
Vuibert-Springer, 2007.
[Per96] Daniel Perrin :Cours d’algèbre. Ellipses, 1996.
[Ser70] Jean-Pierre Serre :Cours d’arithmétique. puf, 1970.
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Cyclotomie
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Commençons par un peu d’étymologie ; cyclotomie est construit d’après les racines grecs κύκλος et
τομός 1, soit littéralement « le cercle coupé ».
Pour un corps ket un entier nN, l’ensemble des racines nèmes de l’unité dans k,i.e. les racines
du polynôme Xn1dans k, sera noté µn(k):
µn(k) = {ζk / ζn= 1}.
µn(k)est un sous-groupe fini de k, donc cyclique, d’ordre inférieur à n. On notera µ
n(k)le sous-
ensemble des racines primitives nèmes de l’unité de µn(k),i.e. les générateurs de ce groupe. En l’absence
de précision, ζndésignera une racine primitive nème de l’unité.
1 Cyclotomie dans C[Com03,Per96]
Lorsque kest le corps des nombres complexes C, la situation est bien connue, précisément
µn(C) = 1, ζ, ζ2, . . . , ζn1et µ
n(C) = nζk/pgcd (k, n) = 1o,ζ= exp 2
n.
µn(C)est donc un groupe cyclique d’ordre net, pour tout diviseur dde n, l’unique sous-groupe
d’ordre dde µn(C)est µd(C). Ainsi, en classant les éléments de µn(C)selon leur ordre, on obtient la
partition suivante :
µn(C) = G
d|n
µ
d(C),
µ
d(C)est de cardinal ϕ(d), où ϕdésigne l’indicateur d’Euler. En particulier, on a n=X
d|n
ϕ(d).
Définition 1.1 Le polynôme unitaire Y
ζµ
n(C)
(Xζ), noté Φn, est appelé le nème polynôme cycloto-
mique. Son degré est ϕ(n).
Exemples 1.2 Φ1=X1, car µ
1(C) = {1}.Φ2=X+ 1, car µ
2(C) = {−1}.
Φ3=X2+X+ 1, car µ
3(C) = j, j2.Φ4=X2+ 1 = Φ2(X2), car µ
4(C) = i, i3.
Φ5=X51
X1=X4+X3+X2+X+ 1, car µ
5(C) = µ5(C)\ {1}.
Φ6=X2X+ 1 = Φ3(X), car µ
6(C) = j, j2.
Φ7=X6+X5+X4+X3+X2+X+ 1, car µ
7(C) = µ7(C)\ {1}.
Φ8=X81
X41=X4+ 1 = Φ2(X4), car µ
8(C) = µ8(C)\µ4(C).
Proposition 1.3 Pour nN, on a
Xn1 = Y
d|n
Φd(1)
et le nème polynôme cyclotomique Φnest unitaire à coefficients entiers.
Pour n>2,Φn(0) = 1 et Xϕ(n)Φn1
X= Φn(X).
Pour n>3,Φn(x)>0, pour tout xR, et Φn(x)>(|x| − 1)ϕ(n), pour tout xR,|x|>1.
1. Lire kuklos et tomos.
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Démonstration. L’égalité 1résulte simplement de la décomposition µn(C) = Fd|nµ
d(C). Clairement
Φ1Z[X]et est unitaire, on raisonne alors par récurrence, pour nN, pour montrer que ΦnZ[X].
Précisément, on utilise l’unicité du reste et du quotient de la division euclidienne dans l’anneau euclidien
C[X]et la possibilité de diviser Xn1dans Z[X]par le polynôme unitaire Qd|n,d6=nΦdZ[X].
On a Φ2(0) = 1. Pour n>3, pour tout ζµ
n(C),ζµ
n(C), en outre µ
n(C)R=, ainsi on peut
partitionner µ
n(C) = FiIζi, ζipar paires de conjugués. On en déduit Φn(x) = QiI|xζi|2>0,
pour xR, et Φn(0) = QiIζiζi= 1. De plus, pour x > 1,|xζi|> x 1et, pour x < 1,
|xζi|>|x| − 1(faire un dessin !), d’où la dernière assertion.
Soit Pn=Xϕ(n)Φn1
X, pour n>2. Ayant deg Φn=ϕ(n)et Φn(0) = 1,Pnest de même degré
et unitaire. En outre ζ7−1
ζ=ζinduit une bijection sur µ
n(C)qui est l’ensemble des racines de Φn
et Pn. Ainsi Pn|Φnet, étant unitaires et de même degré, ils sont égaux. QED
Remarque 1.4 La formule 1permet le calcul par récurrence des Φn. Pour d’autres formules concernant
les polynômes cyclotomiques se reporter à l’exercice 4.1.
Théorème 1.5 Le nème polynôme cyclotomique Φnest irréductible sur Qet donc sur Z.
Démonstration. On donne ici la preuve de van der Waerden. Considérons Pun facteur irréductible
unitaire de Φnsur Q,PZ[X]dans la mesure où Zest un anneau factoriel, Q=Frac(Z)et Φnest
unitaire. Montrer que P= Φnrevient à montrer que tous les éléments de µ
n(C)sont des racines de P
et il suffit pour cela d’établir que, étant donné ζune racine de Pet pun nombre premier ne divisant
pas n,P(ζp)=0. Raisonnons par l’absurde, en supposant que pour un tel ζet un tel p,P(ζp)6= 0.
Il existe QZ[X]tel que Φn=P Q et ζpest racine de Q, donc ζde R=Q(Xp). Ainsi Pet R
ont une racine commune, donc un pgcd (unitaire à coefficients entiers) distinct de 1. En particulier les
polynômes Pet R, obtenus par réduction modulo p, ne sont pas premiers entre eux. Il en va donc de
même de Pet Q, puisque R=Qp. En conséquence de quoi Φn=P Q et donc Xn1ont des racines
multiples dans Fp. Or, par hypothèse sur p-n,Xn1est séparable sur Fp, d’où une contradiction.
QED
On en déduit en particulier, pour ζnune racine primitive nème de l’unité dans C, le degré de
l’extension, dite cyclotomique,Q(ζn)/Q.
Corollaire 1.6 πζn,Q= Φnet [Q(ζn) : Q] = ϕ(n).
Corollaire 1.7 Si pgcd (m, n)=1, alors Q(ζm)Q(ζn) = Q.
Démonstration. La démonstration du corollaire repose sur le lemme suivant :
Lemme 1.8 Si Ket Lsont deux corps intermédiaires de l’extension finie M/k, alors [KL :L]6[K:k].
Démonstration. Il suffit de remarquer que si (xi)iIest une base de Ksur k, alors (xi)iIengendre
KL sur L.
QED
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Nous sommes maintenant en mesure de démontrer le corollaire. Posons k=Q(ζm)Q(ζn). On
saît que ϕ(m) = [Q(ζm) : Q]>[Q(ζm) : k]>[Q(ζm)Q(ζn) : Q(ζn)], d’après le lemme. Comme
pgcd (m, n)=1,ζmζnest une racine primitive mnème de l’unité et l’inclusion Q(ζmζn)Q(ζm)Q(ζn),
valable généralement, est une égalité (faire un dessin du treillis des extensions). Alors
[Q(ζm)Q(ζn) : Q(ζn)] = [Q(ζmζn) : Q]
[Q(ζn) : Q]=ϕ(mn)
ϕ(n)=ϕ(m).
Par conséquent [Q(ζm) : Q] = [Q(ζm) : k], d’où la conclusion.
QED
Apparté - L’extension cyclotomique Q(ζn)/Q.Soit ζnune racine primitive nème de l’unité dans
C, dans le cadre de la théorie de Galois, on peut énoncer la proposition suivante.
Proposition 1.9 L’extension Q(ζn)/Qest galoisienne de degré ϕ(n)et le caractère cyclotomique
χ: Gal(Q(ζn)/Q)(Z/nZ),
défini comme l’unique application telle que, pour tout fGal(Q(ζn)/Q)et pour tout ζµn(C),
f(ζ) = ζχ(f), réalise un isomorphisme de groupes.
Démonstration. Q(ζn)est le corps de décomposition dans Cdu polynôme séparable Xn1. Ainsi
l’extension Q(ζn)/Qest galoisienne et son degré a été donné au corollaire 1.6. Pour l’isomorphisme
donné par χ, on pourra consulter [HL12, §6.2].
QED
On peut alors, à l’aide de la correspondance de Galois, généraliser le résultat du corollaire 1.7.
Proposition 1.10 [HL12, Prop. 6.4.1] Pour m, n N, on a
Q(ζn, ζm) = Q(ζppcm(m,n))et Q(ζn)Q(ζm) = Q(ζpgcd(m,n)).
Notons également le résultat important de théorie de Galois suivant, dont une démonstration pour
le cas quadratique est proposée à l’exercice 4.9.
Théorème 1.11 - Kronecker-Weber. Toute extension abélienne finie de Qest un sous-corps d’une
extension cyclotomique.
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2 Cyclotomie en caractéristique quelconque [Com03,FG95]
Pour un corps quelconque, on peut se demander sous quelles conditions ce dernier contient-il des
racines primitives nèmes de l’unité (cf. proposition 2.1) et ce qu’il advient de l’irréductibilité de Φnen
caractéristique positive (cf. théorème 2.3) ?
Soit kun corps de caractéristique pquelconque et fl’homomorphisme d’anneaux
f:
Z[X]k[X]
PiNaiXi7−PiNaiXi
aidésigne la classe de aimodulo p. Notons que si pest nul, fn’est rien d’autre que le morphisme
d’inclusion.
Pour nN, on notera Φn,k l’image de Φnpar f, qui est donc un élément de k0[X], où k0désigne
le sous-corps premier de k. Puisque Φnest unitaire, Φn,k est unitaire et de même degré ϕ(n)que Φn.
En outre, fétant un homomorphisme d’anneaux, la relation suivante subsiste dans k[X]:
Xn1 = Y
d|n
Φd,k.(2)
Proposition 2.1 Soit kun corps et nN, s’équivalent :
(i) il existe un sous-groupe de kd’ordre n;
(ii) le polynôme Xn1est scindé simple dans k;
(iii) Φn,k a une racine dans kqui est une racine simple de Xn1;
(iv) Φn,k a une racine dans ket la caractéristique de kne divise pas n.
Le cas échéant, kpossède un unique sous-groupe d’ordre n, qui correspond à l’ensemble des racines
de Xn1et est cyclique. Ses ϕ(n)générateurs sont les racines de Φn,k. Pour tout diviseur dde n, les
éléments d’ordre dde ce groupe, et donc de k, sont les racines de Φd,k.
Démonstration. (i)(ii)Supposons qu’il existe un sous-groupe Gd’ordre ndans k, alors, d’après le
th. de Lagrange, les éléments de Gsont les nracines distinctes de Xn1dans k.
(ii)(iii)Soit a1,...anles nracines distinctes de Xn1dans k. Pour tout i, il existe un entier
d|ntel que Φd,k (ai)=0. L’égalité n=Pd|nϕ(d)implique alors que Φn,k soit scindé dans k.
(iii)(iv)Soit aune racine de Φn,k dans ket donc de Xn1.aest racine simple de Xn1si
et seulement si nan16= 0, soit n6= 0, puisque a6= 0, ce qui signifie que nn’est pas un multiple de la
caractéristique de k.
(iii)(i)Soit aune racine de Φn,k dans ket mson ordre dans le groupe k, qui divise n. Si
métait un diviseur strict de n, alors, ayant la factorisation Xn1 = Qd|nΦd,k,aserait une racine
multiple de Xn1, ce qui est exclu. Ainsi haiest un sous-groupe d’ordre nde k.
Le cas échéant, les racines de Xn1forment donc l’unique sous-groupe d’ordre nde k. En outre,
Xn1étant scindé simple, Φn,k admet ϕ(n)racines distinctes qui engendrent chacune un groupe
cyclique d’ordre n, ce sont donc les ϕ(n)générateurs de l’unique sous-groupe (cyclique) d’ordre nde
k. Pour tout diviseur dde n, cela s’applique au polynôme Xd1qui divise Xn1et est donc scindé
simple dans k.
QED
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