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Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 4, vol. IV - octobre/novembre/décembre 2004
section fragilise le vagin et compromet sa vas-
cularisation) ou encore l’artifice de Campbell-
Crossen (les ligaments utéro-sacrés et les ligaments
ronds étant par définition peu résistants en cas
de prolapsus) n’ont donné de résultats concluant
sur le long terme : ainsi le taux de récurrence
après colporraphie antérieure varie, de 3 % (8)
à 33 % selon les séries (les résultats varient entre
autres, en fonction du grade de la cystocèle ini-
tiale et de l’association éventuelle à un geste de
colposuspension).
La technique de suspension aux quatre coins
popularisée aux États-Unis par Raz et al. (11) est
entachée d’un taux de récidives, notamment en
cas de cystocèle de grades 3 et 4, qui peut atteindre
59 % pour certains auteurs (12). La technique du
plastron vaginal proposée par Crépin et al. (13)
est à réserver aux patientes ménopausées sans
traitement hormonal substitutif. Elle garde les
limites d’une suspension par fils et reste soumise
à la résistance de l’arc tendineux du fascia pel-
vien. Les tentatives de réparation du défect para-
vaginal par voie basse sont d’évaluation difficile
en termes de statique pelvienne, car leur effica-
cité est surtout jugée sur leur aptitude à guérir
l’IUE (14). Enfin, la greffe de vagin libre proposée
par Zacharin en 1992 n’a pas convaincu dans ses
résultats (15) et les techniques de renforcement
par prothèse autologue après prélèvement de
fascia imposent des délabrements importants
peu compatibles avec les principes d’une chi-
rurgie peu invasive.
C’est donc tout logiquement que l’idée d’utiliser
un renforcement prothétique soit synthétique
(résorbable ou non) (figure 3), soit biologique,
s’est imposée aux spécialistes de la chirurgie
reconstructrice pelvienne.
Ces initiatives restent cependant tempérées par
la crainte des complications propres des prothèses
synthétiques, en particulier le taux d’érosions
vaginales, chiffré en moyenne à 11 % dans la revue
d’Iglesia et al. (16) et situé dans une fourchette plus
large (10-30,3 %) dans la revue plus récente et
plus complète de Debodinance et al. (17).
Une brève étude historique montre que le concept
de renforcement des tissus natifs par un matériel
prothétique n’est pas neuf : les premières tenta-
tives dateraient de 1894 avec l’utilisation de pro-
thèses métalliques (18) !
Plus récemment, on retiendra que c’est Benson (19)
qui, le premier, utilise le polypropylène sous forme
d’une mèche trapézoïdale mise en place par voie
vaginale après un bain dans un mélange genta-
micine-bacitracine. Depuis, les expériences se sont
multipliées et, depuis 1992, plus d’une douzaine
de revues générales sur le thème de la réparation
prothétique par voie vaginale ont été publiées.
Prothèses libres, fixées ou posées selon un prin-
cipe tension free, les variantes techniques sont
nombreuses et les séries rapportées dans la litté-
rature ne font trop souvent état que de résultats
préliminaires avec des échantillonnages limités
ou des reculs insuffisants. La comparaison des
différentes séries se heurte par ailleurs, outre la
variabilité des techniques, à la diversité des maté-
riaux utilisés dont les propriétés respectives sont
parfois très différentes les unes des autres. Ces
réserves faites, il existe plusieurs travaux qui
méritent notre attention.
Contrairement à l’expérience française très diver-
sifiée, la littérature internationale, notamment
américaine, se montre encore assez discrète sur
le sujet, rapportant essentiellement l’utilisation
de prothèses biologiques, conçues notamment
à partir de derme de porc (Pelvicol
®
). Ce type de
prothèse biologique a aussi fait l’objet, en France,
de plusieurs publications : ainsi une étude
récente de Salomon et al. (20) rapporte, sur une
série de 27 patientes ayant bénéficié de la mise
en place d’une prothèse de Pelvicol
®
par voie
transobturatrice, un taux de cystocèles récidi-
vées de 18 % (toutes asymptomatiques) après
un recul moyen de 14 mois. Notre expérience ne
concerne que 15 patientes présentant une cys-
tocèle récidivée, pour la plupart après renfort
synthétique : les résultats sont décevants avec
plus de 33 % de récidives (recul 6 mois-3 ans).
De façon plus surprenante, cette prothèse bio-
logique ne met pas à l’abri de la rétraction
(4 patients sur 15), du retard de cicatrisation
Prolapsus récidivés
Figure 3. Matériel prothétique par voie vaginale : une
solution en cas de cystocèle récidivée ?
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