L. BOULANGER et al. – Chirurgie par voie vaginale : état des lieux Journal Médical Libanais 2013 •
Volume 61 (1)
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des saignements empêchant dès lors son utilisation [16],
ce que nous retrouvons dans notre étude. Seulement 17%
des patientes que nous avons opérées [1] avaient précé-
demment utilisé un pessaire. Ce taux est faible par rapport
aux données de la littérature puisque 55% des patientes
opérées par Schweitzer [17] et 44% par Nieminen [18]
avaient déjà utilisé un pessaire. Notre politique de service
de favoriser une réparation chirurgicale chez toutes les
patientes en bonne santé explique sans doute ces résultats.
Le nombre élevé de prolapsus extériorisés, difficiles à
contrôler avec un pessaire, explique aussi ces chiffres. Les
patientes porteuses d’un pessaire souhaitent un traitement
chirurgical de leur prolapsus si elles sont âgées de moins
de 65 ans, si le prolapsus est supérieur au stade III à l’é-
tage postérieur et si elles désiraient déjà être opérées lors
de la première consultation [16, 19].
Le colpocléisis est une intervention qui ne renforce pas
le plancher pelvien défaillant mais qui oblitère le vagin.
Ses avantages sont la rapidité d’intervention et la réalisa-
tion possible sous anesthésie locale. Mais il compromet
la fonction sexuelle et le diagnostic précoce d’un cancer
utérin [20-21]. Le problème de la préservation de la fonc-
tion sexuelle semble cependant marginal chez les femmes
âgées car dans une population de femmes britanniques,
Barlow relève 4% de femmes actives sexuellement entre
75 et 84 ans et aucune après 85 ans [22]. Il était aussi clas-
siquement reproché au colpocléisis d’augmenter l’incon-
tinence urinaire d’effort, mais cela n’est pas retrouvé dans
des séries récentes [23-25]. Il faut toutefois souligner que
dans ces publications le colpocléisis est souvent associé
à un geste urinaire et une colpopérinéorraphie postérieure
pour en améliorer les résultats fonctionnels. La durée d’in-
tervention moyenne s’élève alors à 75 min pour Denehy
[25] et 101 min pour DeLancey [24], contre 120 min dans
notre série [1] et 93 min dans celle de Nieminen [18] où
toutes les patientes avaient une fixation vaginale au liga-
ment sacrospinal. Le principal avantage du colpocléisis,
c’est-à-dire sa rapidité, est alors discutable. C’est pour-
quoi nous n’en avons plus réalisé dans notre service de-
puis 10 ans. Seule la perte sanguine apparaît plus impor-
tante en cas de traitement conservateur puisque dans sa
série de colpocléisis DeLancey l’estime à 206 ml (± 171)
alors que Nieminen dans sa série de sacrospinofixation
l’estime à 350 ml (± 300).
Dans notre pratique, chez les patientes jeunes, nous
préférons la réalisation d’une voie haute à type de pro-
montofixation par voie cœlioscopique chaque fois que
possible. Chez les patientes plus âgées, en cas de cysto-
cèle volumineuse (grade 3 et 4) associée à une rectocèle,
nous proposons à la patiente soit un traitement par tis-
sus autologues, soit une technique utilisant un renfort pro-
thétique en lui exposant les avantages et les risques de
chaque méthode.
Si la technique autologue est choisie, nous associons
une hystérectomie vaginale, un plastron ou une plicature
sous-vésicale, une intervention de Campbell, une sus-
pension selon Richter et une périnéorraphie postérieure.
Pour les techniques prothétiques, nous utilisons les voies
transobturatrices et transsacrospinales.
En cas de prolapsus récidivant après une première
chirurgie utilisant des techniques autologues ou en cas de
défect vésical latéral, nous utilisons les techniques pro-
thétiques (à condition qu’il n’y ait pas d’allongement du
col).
Si la patiente a encore un désir de grossesse et que sa
gêne la pousse à demander une chirurgie, nous réalisons
l’intervention de Richardson associée éventuellement à
une plicature des fascias.
Enfin, en cas d’incontinence urinaire d’effort ou d’in-
continence masquée, nous associons au traitement du pro-
lapsus une bandelette sous-urétrale transobturatrice dans
le même temps opératoire.
TECHNIQUES CHIRURGICALES
Les interventions de cure de prolapsus génital par voie
basse que nous décrivons sont donc essentiellement des
techniques de suspension avec, à la demande, une hysté-
rectomie, une annexectomie et une cure d’incontinence
urinaire d’effort. Le choix de l’une des techniques repose
sur l’analyse des dégradations anatomiques des différents
étages.
1. Hystérectomie
L’hystérectomie est réalisée en cas d’hystérocèle et de
réalisation de technique autologue. En cas de réalisation
de techniques utilisant des prothèses, l’hystérectomie est
réalisable, mais la conservation utérine doit être privilé-
giée chaque fois que possible, car, si les résultats anato-
miques sont similaires, le risque d’exposition prothétique
est diminué [9]. Si une hystérectomie est réalisée avec
mise en place de prothèse, nous ne réalisons pas de col-
pectomie en T inversé pour la même raison. Enfin, la con-
servation utérine n’est réalisée que s’il n’existe pas d’ano-
malie utérine associée (réalisation systématique d’un frot-
tis cervicovaginal, d’une biopsie de l’endomètre et d’une
échographie pelvienne).
L’hystérectomie peut se faire de très nombreuses
façons. Si nous la réalisons globalement de la même ma-
nière que lorsqu’elle n’est pas associée à un prolapsus
[26], elle présente toutefois certaines particularités. Le
principal risque est lié à l’allongement du col utérin qui
modifie la position de la vessie et nécessite souvent plu-
sieurs prises de ligature sur les ligaments suspenseurs. Il
est ensuite nécessaire d’anticiper les gestes de correction
du prolapsus qui suivent l’hystérectomie.
2. Temps antérieur
La colpopérinéorraphie antérieure sert à la reconstruc-
tion de l’appareil de soutien du plancher vésical après re-
placement de la vessie dans le pelvis.
Concernant les cystocèles, on peut théoriquement dis-
tinguer les cystocèles latérales, correspondant à une désin-
sertion du fascia inter-vésico-vaginal de l’arc tendineux
du fascia pelvien, des cystocèles médianes secondaires
à une dégradation du tissu conjonctif de ce même fascia.