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Santé Éducation - 02 - Avril-Mai-Juin 2014
Santé Éducation
hospitalier ou au sein d’un réseau de santé, l’organisation des soins peut être plus ou moins propice au développement
de pratiques réellement interprofessionnelles. Dans les soins de premier recours, les maisons ou pôles pluridisciplinaires
de santé devraient favoriser le “travailler ensemble”, puisqu’il leur est demandé d’élaborer un projet de santé partagé,
intégrant souvent l’éducation thérapeutique. L’exercice professionnel isolé rend bien sûr plus diffi ciles l’élaboration
et la mise en œuvre de projets éducatifs collectifs.
Quels que soient le mode et le cadre d’exercice, l’interprofessionnalité en éducation thérapeutique ne peut se développer
que s’il existe, entre les soignants de l’équipe, un projet de soin commun qui repose notamment sur des valeurs
partagées, la reconnaissance des compétences spécifi ques de chaque professionnel et la recherche d’une synergie
des interventions. Malheureusement, la formation initiale des futurs soignants éducateurs, cloisonnée et
monoprofessionnelle, ne facilite pas le développement d’une culture du “travailler ensemble”.
Si le cadre réglementaire actuel de l’éducation thérapeutique semble a priori favorable au développement du travail
en interprofessionnalité, l’approche par programme privilégiée jusqu’à présent présente de nombreuses limites,
soulignées par plusieurs intervenants au congrès. Dans des situations de rupture du parcours de santé, liées par
exemple à une vulnérabilité sociale, il paraît plus pertinent de saisir les opportunités éducatives dès qu’elles se
présentent plutôt que de programmer des séances ou des ateliers auxquels les patients ne participent pas. De même,
l’approche par programme ne facilite pas la prise en charge éducative des patients porteurs de plusieurs pathologies
chroniques, car elle favorise une approche centrée sur la maladie plutôt qu’une approche centrée sur le patient.
Quelles pistes le congrès a-t-il permis de dégager pour développer le “travailler ensemble en éducation
thérapeutique” ?
1. Intégrer la formation à l’interprofessionnalité dans les cursus de formation initiale des soignants.
L’expérience des séminaires étudiants “Apprendre à travailler ensemble” de l’Afdet, portée et présentée au congrès
par Françoise Annézo, constitue une approche innovante. Nous espérons pouvoir étendre cette initiative, déjà mise
en place dans plusieurs régions, à l’ensemble du territoire. Réunissant des étudiants de fi lières médicales, paramédicales
et sociales en fi n de formation initiale, ces séminaires les préparent, avant leur arrivée sur le “marché du travail”, à
reconnaître leurs compétences respectives et à mener des projets de santé communs.
2. Poursuivre le développement des formations continues interprofessionnelles.
Depuis les débuts de l’association, les formations mises en place par l’Afdet réunissent différentes catégories de
professionnels et leur permettent d’expérimenter le “travailler ensemble”. La mise en place du développement
professionnel continu (DPC) devrait favoriser le développement de ce type de formations.
3. Penser l’éducation thérapeutique “hors programmes” comme levier de l’interprofessionnalité.
L’éducation thérapeutique, dont l’objectif dépasse et fédère les professions soignantes, constitue un cadre favorable
au développement de coopérations interprofessionnelles et à la création de synergies, en laissant à chacun sa part
de responsabilité. Toutefois, comme nous l’avons déjà expliqué, l’approche par programmes centrés sur les maladies
est peu opérationnelle, en particulier pour les patients en situation de vulnérabilité sociale ou de polypathologie. Dans
ces circonstances, l’éducation thérapeutique est indissociable des soins et du soutien psychosocial. L’approche par
programmes est également peu adaptée aux soins de premier recours : rappelons que plus de 70 % des programmes
autorisés par les Agences régionales de santé sont hospitaliers.
Il paraît donc indispensable de revoir les recommandations de la Haute Autorité de santé(2007) et les textes
réglementaires qui en découlent, afi n de favoriser le développement d’une éducation thérapeutique de proximité,
incorporée aux soins, en associant l’ensemble des professionnels sanitaires et sociaux. Les recommandations formulées
par le Haut Conseil de la santé publique en 2009
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constituent des pistes de travail qu’il serait intéressant de creuser.
Ce n’est qu’à cette condition que l’on pourra faire face aux polypathologies et aux diffi cultés psychosociales dont la
fréquence ne cesse d’augmenter, générant des échecs et des coûts de santé considérables. L’éducation thérapeutique
et l’interprofessionnalité ne constituent pas une dépense de santé supplémentaire mais plutôt un investissement qui,
à terme, permettra des économies. Le “travailler ensemble” ne se décrète pas mais nécessite des conditions favorables
pour exister.
Régis Bresson, Président de l’Afdet
Références
bibliographiques
1.
Guihard JP.
Interprofessionnalité
ou interprovidence ?
Journal d’ergothérapie
1999;21(3):91-5.
2.
Haut Conseil de la
santé publique.
L’éducation théra-
peutique intégrée aux
soins de premier
recours. Rapport.
Paris, 2009, 36 pages.