L 5 Congrès de l’ECCO Symposium Abbott

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THÉRAPEUTIQUE
Symposium Abbott
5e Congrès de
l’ECCO
Prague, 25-27 février 2010
Vered Abitbol*
CHARM, puis ADHERE ont montré que le traitement
par adalimumab était associé à une réduction des
hospitalisations liées à la maladie de Crohn (Loftus
EV Jr et al., ECCO 2009). Ces données suggèrent une
intervention thérapeutique plus précoce. Dans les
recommandations thérapeutiques de la maladie
de Crohn (ECCO 2009, 5F), les patients ayant de
mauvais facteurs pronostiques doivent bénéficier
d’un traitement précoce par thiopurines, méthotrexate ou anti-TNFα. Plusieurs facteurs de mauvais
pronostic de la maladie de Crohn ont été publiés.
Selon Remo Panaccione, les patients ayant une indication de traitement précoce par anti-TNFα sont
ceux qui ont une maladie extensive de l’intestin
grêle, une atteinte sévère du haut tractus digestif
et/ou du rectum, un âge jeune, des lésions anopérinéales, une maladie sténosante et/ou fistulisante
précoce, et, enfin, les patients ayant des ulcérations
coliques profondes. S. Vermeire (Louvain, Belgique)
a illustré, à travers l’étude de trois cas cliniques, la
notion d’optimisation thérapeutique. Selon l’his-
Patients (%)
L
e symposium satellite organisé par les laboratoires Abbott à l’occasion du 5e Congrès de
l’European Crohn’s and Colitis Organisation
(ECCO) a porté sur les nouveaux objectifs du traitement de la maladie de Crohn et sur la notion de
“rémission profonde”, qui tient compte de la cicatrisation muqueuse. Daan Hommes (Leyde, Pays-Bas)
a ouvert le symposium en rappelant que dix ans
se sont écoulés depuis l’introduction des biothérapies dans la maladie de Crohn et que l’efficacité
de ces traitements, notamment sur la cicatrisation
muqueuse, a fait évoluer les objectifs thérapeutiques,
posant la question de l’intérêt de leur introduction
avant l’apparition de lésions irréversibles. Le traitement de la maladie de Crohn devrait permettre
le contrôle de la maladie avec la meilleure sécurité
possible. Il devrait prévenir la survenue de poussées inflammatoires et les complications à type de
sténose, d’abcès et de fistule ainsi que les complications irréversibles et l’installation d’une maladie
handicapante altérant la qualité de vie. Remo Panaccione (Alberta, Canada) a analysé les différentes
études évaluant l’efficacité de l’adalimumab dans la
maladie de Crohn, puis discuté le meilleur moment
de l’introduction d’un traitement anti-TNFα. L’étude
EXTEND (Rutgeerts P et al., DDW 2009) a montré
que l’adalimumab pouvait induire et maintenir une
cicatrisation muqueuse complète chez des patients
souffrant de maladie de Crohn iléocolique modérée à
sévère. La cicatrisation muqueuse était maintenue à
12 et 52 semaines chez respectivement 28 % et 24 %
des patients (figure 1). Les pourcentages de patients
en rémission profonde (rémission clinique associée
à une cicatrisation muqueuse) à 12 et 52 semaines
étaient respectivement de 16,1 % et 19,4 % (EXTEND,
analyse en post hoc) [Colombel JF et al. ECCO 2010]
(figure 2). La cicatrisation muqueuse était affectée
par la durée d’évolution de la maladie de Crohn :
pour les durées inférieures à 2 ans, comprises
entre 2 et 5 ans, et supérieures à 5 ans, elle était
observée dans, respectivement, 44 %, 41 % et 21 %
des cas (Sandborn WJ et al. ECCO 2010). Les études
50
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
* Service de gastroentérologie, hôpital
Cochin, Paris.
Adalimumab, induction seulement
Adalimumab, en continu
p = 0,056
27
13
p = 0,046
28
p < 0,001
24
13
8/61
17/62
S12, ITT
7/56
17/61
0
S12, per protocole
15/62
S52, ITT
ITT : intention de traiter.
Le per protocole représente tous les patients en ITT qui n'ont pas eu de déviation du protocole.
Les pourcentages ont été arrondis.
D'après Rutgeerts P. et al. Gastroenterol 2009;136(Suppl.1):A-116 (abstract 751e)
Figure 1. Cicatrisation muqueuse complète sous adalimumab à 12 et 52 semaines.
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIII - n° 3 - mai-juin 2010 |
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THÉRAPEUTIQUE
Patients en rémission profonde (%)
toire clinique du patient et l’évaluation des facteurs
pronostiques, le plan de traitement est élaboré puis
adapté à l’aide d’outils cliniques, biologiques (CRP,
marqueurs fécaux) et morphologiques (échographie, entéro-IRM, coloscopie). Ce plan de traitement
doit être optimisé pour éviter la progression de la
maladie vers des lésions irréversibles. Le traitement
est renforcé en augmentant les doses en période
de crise et possiblement diminué en période de
rémission, lorsqu’une cicatrisation muqueuse est
observée. Le choix du traitement tient compte de
sa capacité à maintenir une rémission à long terme,
du patient et du rapport coût/efficacité. Comme le
soulignent les recommandations de l’ECCO 2009
(5I) [Dignass A et al. J Crohn’s Colitis 2010], tous les
traitements anti-TNF ont le même profil d’efficacité
et de tolérance : le choix dépend de la disponibilité du
traitement, de sa voie d’administration, du patient,
du prix et des recommandations nationales.
Autrefois, la seule stratégie thérapeutique était celle
de l’escalade progressive (step-up), fondée sur les
symptômes cliniques (CDAI). Puis la stratégie du
step-down a été proposée avec l’utilisation précoce
Adalimumab, induction seulement
Adalimumab, 1 semaine sur 2
25
20
p = 0,34
p < 0,001
16,1
15
19,4
10
9,8
5
0
6/61
10/62
0
S12
12/62
S52
Rémission profonde et définie par la rémission clinique (CDAI < 150) associée à une cicatrisation muqueuse complète
(absence d'ulcération).
D'après J.F Colombel et al. ECCO 2010;abstract oral 19
Figure 2. Rémission profonde sous adalimumab.
des immunosuppresseurs et des biothérapies. On
ne sait pas encore si une stratégie thérapeutique
guidée non seulement par la clinique mais aussi
par des marqueurs objectifs d’activité biologiques
et/ou morphologiques améliore le profil évolutif de
la maladie. J.F. Colombel a proposé une nouvelle stratégie, celle de l’escalade rapide (rapid step-up), qui
sera évaluée dans l’étude CALM. Dans cette étude,
l’escalade thérapeutique sera fondée sur des paramètres objectifs additionnés aux scores cliniques.
Cette conduite thérapeutique sera comparée à l’attitude conventionnelle fondée sur les symptômes.
L’objectif primaire de l’étude sera l’évaluation de la
cicatrisation muqueuse à 1 an. Les objectifs secondaires seront la rémission profonde (deep remission), le nombre d’hospitalisations et de procédures
chirurgicales et l’élaboration d’un score de lésions
digestives (Crohn’s Disease Digestive Damage Score
[CD3S]) ; celui-ci sera fondé sur la clinique, l’imagerie (IRM, échographie ou TDM) et l’endoscopie,
et devrait pouvoir témoigner à un moment donné
chez un malade, des lésions digestives cumulées de
sa maladie de Crohn.
Le symposium Abbott a été suivi d’une conférence
de presse présentée par Y. Bouhnik (Clichy, France),
qui a rappelé que les anti-TNF ont profondément
modifié la prise en charge des MICI et fait évoluer
les objectifs thérapeutiques de la maladie de Crohn.
Autrefois, on traitait les symptômes sans traiter
les lésions, on s’adaptait à l’histoire naturelle, les
corticoïdes étaient largement utilisés et la chirurgie
était un outil thérapeutique. Actuellement, on
essaie d’induire et de maintenir une rémission sans
corticoïdes, de cicatriser les lésions, de prévenir les
complications, d’éviter hospitalisation et chirurgie et
de permettre une qualité de vie normale. Avec une
utilisation adaptée et peut-être plus précoce des
immunosuppresseurs et des anti-TNFα, on espère
modifier l’histoire de la maladie. Les recommandations thérapeutiques d’ECCO 2009 ont récemment été publiées ; elles précisent les différentes
indications des traitements de la maladie de Crohn
et la place actuelle des anti-TNFα (Dignass A et al.
J Crohn’s Colitis 2010).
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Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays.
© février 1998 - EDIMARK SAS - Dépôt légal : à parution.
Imprimé en France - ÉDIPS - 21800 Quetigny
Le supplément “Les Nouvelles des MICI” (16 p.) est routé avec ce numéro.
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