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La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - no2 - vol. III - avril 2000
TRAITEMENTS DIFFICILES
Ainsi, la survie sans détérioration de la qualité de vie était signi-
ficativement plus longue dans le bras traité (4 mois versus 1 mois).
Palmer (9) a évalué le score d’anxiété et de dépression chez
31 patients : la chimiothérapie a permis de diminuer le syndrome
dépressif mais n’a pas influé sur l’anxiété.
•Peut-on améliorer les symptômes ?
L’extrême intensité des symptômes de l’adénocarcinome pan-
créatique, les douleurs, le retentissement physique et psycholo-
gique souvent majeur ont conduit Rothenberg à proposer un score
original fondé sur l’évaluation de paramètres cliniques (11) :
état général, intensité des douleurs et consommation d’antal-
giques, courbe pondérale. La gemcitabine, dans une étude contrô-
lée (12), comparée au 5FU en bolus hebdomadaire, s’est avérée
légèrement supérieure en termes de survie (4,4 mois versus
5,6 mois) mais surtout en termes de bénéfice clinique, puisque
22 % des patients sous gemcitabine, versus 5 % (p < 0,05),
présentaient une amélioration du score.
•Comment évaluer l’efficacité du traitement ?
Quelle que soit la molécule utilisée, le taux de réponse objec-
tive (réduction du volume supérieure à 50 %) ne dépasse pas
15 % (1). Cependant, ces résultats sont probablement sous-
estimés du fait des difficultés de mesure de la taille d’une tumeur
pancréatique d’évolution purement loco-régionale (difficultés
d’apprécier précisément les limites de la tumeur, réaction
fibreuse de la tumeur et parfois de ses métastases qui minore la
réduction de taille induite par le traitement). Ainsi, l’efficacité
du traitement sera aujourd’hui plus volontiers évaluée par la
survie et l’amélioration des symptômes, selon l’algorithme
de Rothenberg qui définit le bénéfice clinique comme un
objectif essentiel du traitement. Compte tenu de l’extrême sévé-
rité de la maladie, les médianes de survie sont le plus souvent
courtes, et le pourcentage de survivants à long terme est une
mesure bien souvent intéressante à considérer, puisque certains
patients survivront un à 2 ans sous chimiothérapie ou après
radiothérapie.
Monochimiothérapie
•Le 5-fluoro-uracile
Le 5FU est la molécule de référence testée maintes fois dans
cette localisation (1). Aucune molécule n’avait jusqu’à présent
permis d’obtenir des résultats supérieurs. On peut toutefois
considérer que l’efficacité du 5FU est mineure, si l’on en juge
par les résultats des derniers essais où le 5FU, administré en
bolus 5 jours toutes les 6 semaines, ne donne aucune réponse
objective (13). Dans un vaste essai européen, le 5FU adminis-
tré en perfusion continue de 225 mg/m2/jour, 8 semaines sur 9,
n'a permis d'obtenir que 1 % de réponse objective et une
médiane de survie de 22 semaines chez 280 patients (14). La
meilleure modalité d’administration du 5FU n’a cependant pas
été bien évaluée dans cette indication. L’expérience du cancer
colorectal a montré un avantage significatif par la modulation
du 5FU par l’acide folinique. La demi-vie très brève du 5FU et
son action spécifique sur les cellules en phases S confortent son
utilisation en perfusion continue qui permet une augmentation
de dose sans majorer la toxicité (tableau IV).
•Efficacité des nouvelles drogues : la gemcitabine
En monothérapie seule, la gemcitabine (2’2’- difluorodéoxy-
cytidine) a montré un bénéfice clinique substantiel malgré un
taux de réponse objective très faible, le plus souvent inférieur
à 10 % (11, 12, 15) (tableau V). Plusieurs essais ont confirmé
son efficacité en première et deuxième ligne de traitement, ainsi
que sa supériorité par rapport au 5FU (16). Dès le début du déve-
loppement de ce nouvel analogue nucléosidique, une mauvaise
concordance est apparue aux investigateurs entre le faible taux
de réponse objective et les fréquentes améliorations sympto-
matiques constatées chez les patients dont le volume tumoral
demeurait stable. Un algorithme de mesure du bénéfice cli-
nique a alors été élaboré, rendant compte d’une manière sim-
ple et aisément reproductible des principaux symptômes de la
maladie.
Les deux paramètres principaux sont :
–l’évaluation de la douleur quantifiée par la consommation
d’antalgiques et l’intensité de la douleur sur une échelle visuelle
analogique ;
–l’évaluation de l’état général, chez les patients dont l’indice de
Karnofsky est inférieur à 80.
L’évaluation du poids est un critère de mesure d’efficacité secon-
daire par rapport aux deux premiers paramètres.
Un algorithme original permet de définir une réponse en termes
de bénéfice clinique : un patient, pour être jugé répondeur, doit
remplir au moins l’un des critères suivants :
•diminution d’au moins 50 % de sa consommation d’antal-
giques ;
•et/ou diminution de 50 % de l’intensité de la douleur ;
•et/ou amélioration de 20 points de l’indice de Karnofsky durant
Tableau IV. Essais de phase II : efficacité des associations 5FU /acide folinique).
Auteurs Drogues Effectif Réponses Survie
Crown 1991 (18) Acide folinique perfusion continue 5FU bolus 22 0 –
De Caprio 1991 (20) Acide folinique bolus 5FU bolus 42 3 (7 %) 6,2 mois
Bruckner 1988 (21) Acide folinique bolus 5FU bolus 8 4 –
Weinerman 1994 (19) Acide folinique bolus 5FU bolus 30 3 (13 %) 4 mois
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