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Actualités dans les cancers digestifs en 2000
! C. Tournigand*
L’
année 2000 a incontestablement été dominée
par les résultats de grandes études randomisées
démontrant l’efficacité des nouveaux agents
chez les patients ayant un cancer colorectal métastatique.
Saluons à ce sujet le dynamisme des équipes françaises dans
ce domaine.
CANCER COLORECTAL
Métastatique
Les résultats finaux d’études de phase III chez les patients
ayant un cancer colorectal métastatique sont parus, qu’il
s’agisse d’essais introduisant le CPT-11 ou l’oxaliplatine dans
un schéma de 5-FU, ou encore des essais de chimiothérapie
intra-artérielle.
Faisant suite aux précédentes publications démontrant l’efficacité du CPT-11 en deuxième ligne métastatique, les résultats
définitifs des essais en première ligne ont été publiés. La première étude randomisée a comparé une association de 5-FUacide folinique (AF) au même schéma avec CPT-11 (1). Le
schéma de 5-FU-AF pouvait être soit un schéma hebdomadaire
soit un schéma bimensuel, selon les habitudes de chaque centre.
Au total, 387 patients ont été inclus dans cette étude : 199 dans
le bras avec CPT-11 et 188 dans le bras 5-FU-AF seul. Le taux
de réponse est significativement plus élevé dans le bras avec
CPT-11 (49 % versus 30 %). Le temps jusqu’à progression et la
survie globale sont également en faveur du bras avec CPT-11
(respectivement 6,7 versus 4,4 mois et 17,4 versus 14,1 mois).
L’essai américain a, quant à lui, comparé 3 schémas (2) : une
association CPT-11 125 mg/m2, 5-FU (500 mg/m2 bolus) et
acide folinique (20 mg/m 2) toutes les semaines pendant
4 semaines, toutes les 6 semaines, un schéma FUFOL de type
Mayo Clinic et un schéma CPT-11 en monothérapie,
125 mg/m2/sem. pendant 4 semaines, toutes les 6 semaines. Six
cent quatre-vingt-trois patients ont été inclus dans cette étude.
L’association acide folinique, 5-FU et CPT-11 montre sa supériorité en termes de survie sans progression (7 versus
4,3 mois), de taux de réponse (39 % versus 21 %) et de survie
globale (14,8 versus 12,6 mois) par rapport au schéma
FUFOL. La comparaison entre CPT-11 seul et FUFOL ne
montre pas de différence significative. Les principales toxicités observées avec la triple association ont été les diarrhées de
grade 3.
* Service d’oncologie, hôpital Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine,
75511 Paris Cedex 12.
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Parallèlement, deux essais de phase III ont comparé une association 5-FU-AF avec oxaliplatine au même schéma sans oxaliplatine, toujours chez des patients en première ligne métastatique. Le premier a comparé le schéma LV5FU2 (AF, 5-FU
bolus et continu toutes les 2 semaines) sans et avec oxaliplatine (85 mg/m2 à J1 toutes les 2 semaines) (3). Quatre cent
vingt patients ont été traités. Les résultats sont en faveur du
bras contenant l’oxaliplatine, tant en ce qui concerne les taux
de réponse (50 % versus 22,3 %) que la survie sans progression, objectif principal de l’étude (9 mois pour le bras
LV5FU2-oxaliplatine et 6,2 mois pour le bras LV5FU2 seul).
L’incidence des neutropénies et des diarrhées de grades 3-4 est
plus importante dans le bras avec oxaliplatine, de même que
l’incidence des neuropathies de grade 3 (NCICTC), toxicité
limitante et réversible de l’oxaliplatine. Ces toxicités ne sont
cependant pas responsables d’une dégradation de la qualité de
vie. Le deuxième essai a comparé un schéma chronomodulé
d’AF et de 5-FU (5 jours toutes les 3 semaines) sans oxaliplatine au même schéma avec oxaliplatine (125 mg/m 2 sur
6 heures à J1 toutes les 3 semaines) (4). Là encore, on observe
un bénéfice en faveur du bras avec oxaliplatine, que ce soit en
termes de taux de réponse (53 % versus 16 %) ou de survie
sans progression (8,7 mois versus 6,1 mois). Les principales
toxicités sont digestives (43 % de grades 3-4) et neurologiques
(13 % des patients ont eu une impotence fonctionnelle modérée). Dans ces deux études, l’absence de significativité pour la
survie est en grande partie expliquée par l’utilisation fréquente
de l’oxaliplatine en deuxième ligne chez les patients randomisés dans le premier bras (LV5FU2 sans oxaliplatine).
L’intérêt d’une chimiothérapie intra-artérielle demeure un
sujet controversé. La plupart des études comparant une administration intra-artérielle de fluorodésoxyuridine (FUDR) à une
chimiothérapie intraveineuse (5-FU ou FUDR) ne montraient
pas d’amélioration de la survie, même si les taux de réponse
étaient supérieurs lors d’une administration intra-artérielle.
Une étude a comparé 3 traitements : 5-FU-AF intra-artériel, 5FU-AF intraveineux et FUDR intra-artériel, chez des patients
présentant des métastases hépatiques inopérables (5). Les
temps jusqu’à progression observés sont respectivement de
9,2 mois, 6,6 mois et 5,9 mois et la survie globale de
18,7 mois, 17,6 mois et 12,7 mois. Aucune de ces différences
n’est statistiquement significative. La toxicité principale de
l’administration intra-artérielle était digestive, avec des
mucites, des diarrhées ainsi que quelques cas de cholangite
sclérosante ou d’hépatite chimique. L’administration intraLa Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 6 - décembre 2000
artérielle semble en revanche plus intéressante lorsqu’elle est
associée à une chimiothérapie i.v., chez des patients ayant
bénéficié d’une résection hépatique au préalable. Ce sont les
conclusions de l’étude publiée par l’équipe de N. Kemeny (6).
Il s’agit d’une étude randomisée entre 6 cycles de 5-FU-AF
i.v. et 6 cycles du même schéma i.v. associé à 6 cycles de
FUDR intrahépatique, après résection des métastases hépatiques. La survie à deux ans est de 86 % dans le bras traité par
voie i.v. + intrahépatique contre 72 % dans le bras traité par
chimiothérapie i.v. seule. Les médianes de survie sont de
72,2 mois versus 59,3 mois.
Adjuvant
L’essai NSABP C-04 a comparé, chez 2 151 patients ayant un
cancer du côlon Dukes B ou C, 3 schémas de modulation du 5FU : 5-FU-AF, 5-FU-lévamisole et 5-FU-AF-lévamisole (7).
Les résultats en termes de survie sans maladie sont en faveur
du groupe traité par 5-FU-AF, avec une amélioration de la survie globale à la limite de la significativité. Par ailleurs, la comparaison du bras 5-FU-AF au bras 5-FU-AF-lévamisole ne
montre pas de différence entre ces deux bras en termes de survie globale. Cela confirme l’association 5-FU-AF comme standard du traitement adjuvant du cancer du côlon.
L’essai de vaccination autologue mené par l’ECOG chez des
patients opérés d’un cancer du côlon stade II ou III compare
l’administration intradermique de cellules tumorales irradiées
associées au BCG lors des 2 premières injections à une simple
surveillance (8). Les résultats sont négatifs, puisque aucune
différence en termes de survie sans récidive ou de survie globale n’a été observée. Il faut cependant noter que la survie est
corrélée à l’importance de la réaction au vaccin autologue, ce
qui pose malgré tout la question du rôle d’une réaction
d’hypersensibilité retardée.
Les résultats préliminaires de trois études randomisées de traitement adjuvant du cancer du côlon ont été communiqués à
l’ASCO, avec essentiellement une analyse de la toxicité. Une
étude anglaise (abstr. 928) a comparé 6 cycles d’une chimiothérapie de type FUFOL (acide folinique 20 mg/m2 et 5-FU en
bolus 425 mg/m2, J1 à J5) à 12 semaines de 5-FU administré en
continu (300 mg/m2/j). Tous patients confondus, la survie sans
progression est plus longue dans le bras 5-FU continu. De plus,
le schéma FUFOL est plus toxique, avec davantage de diarrhées,
de mucites et de neutropénies que dans le groupe 5-FU continu.
L’étude de qualité de vie est également en faveur du 5-FU
continu. L’étude américaine (abstr. 931) a comparé un schéma
FUFOL + lévamisole (6 cycles mensuels) à une association 5FU continu (250 mg/m2/j) + lévamisole pendant 24 semaines.
Les résultats en termes d’efficacité ne sont pas encore connus,
mais on observe davantage de toxicités chez les patientes ayant
reçu du 5-FU en bolus (70,6 % contre 35,1 % de toxicité de
grades 3-4). Il faut noter que les études récentes ont montré
l’absence d’intérêt d’un ajout de lévamisole à un schéma de
5-FU modulé. Enfin, l’étude française du GERCOR
(abstr. 996), comparant un schéma FUFOL avec fortes doses
d’acide folinique au schéma LV5FU2, montre elle aussi une
La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 6 - décembre 2000
moins bonne tolérance lorsque le 5-FU est administré en bolus
(25 % de toxicité de grades 3-4 contre 10 %). Les résultats en
termes d’efficacité ne sont pas encore disponibles. Au total, le 5FU continu entraîne moins de diarrhées, de mucites et de neutropénies que le FUFOL, mais il augmente en revanche l’incidence
des syndromes mains-pieds et des thromboses sur site implantable.
Facteurs pronostiques biologiques du cancer colorectal
L’instabilité microsatellite (MSI) est observée chez environ
15 % des cancers colorectaux sporadiques et chez 40 % des
patients ayant un cancer colorectal héréditaire sans polypose
(HNPCC). Grâce aux nouvelles techniques de biologie moléculaire (microdissections sur coupe paraffine, PCR), il est possible
de déterminer la présence d’une MSI au sein d’un tissu inclus en
paraffine et de déterminer ainsi si elle constitue un facteur pronostique. Elsaleh a communiqué à l’ASCO une étude rétrospective sur 742 patients ayant un cancer colorectal Dukes C (470
sans chimiothérapie adjuvante et 272 ayant reçu une chimiothérapie adjuvante) (abstr. 922). Le statut MSI a été déterminé par
PCR. Les auteurs observent que la survie est significativement
plus longue chez les patients MSI+, et que parmi les patients
ayant reçu une chimiothérapie adjuvante, les patients MSI+ ont
une survie bien supérieure à celle des patients MSI–. On peut
donc émettre l’hypothèse selon laquelle le phénotype MSI serait
un facteur de chimiosensibilité, ce qui pourrait permettre de
sélectionner les patients pouvant bénéficier d’une chimiothérapie. Cela nécessite d’être évalué de façon prospective. L’instabilité de microsatellites a également été recherchée chez un effectif de 640 jeunes patients américains ayant un cancer colorectal
(patients âgés de moins de 50 ans) (9). Dix-sept pour cent des
patients avaient une forte instabilité, 3 % une faible instabilité et
80 % une stabilité des microsatellites. Le survie des patients
MSI+ est plus longue que celle des patients MSI–, avec une
moindre probabilité d’avoir un envahissement métastatique ganglionnaire ou d’un organe à distance.
ESTOMAC
Sous l’égide de l’EORTC, un essai multicentrique a comparé
le schéma ELF (étoposide, acide folinique, 5-FU), une association 5-FU-cisplatine (FUP) et le schéma FAMTX (5-FU-doxorubicine-méthotrexate) chez des patients ayant un cancer de
l’estomac avancé (10). Au total, 399 patients ont été inclus
dans cette étude. Sur les 245 patients ayant une maladie mesurable, les taux de réponse ne sont pas significativement différents (ELF 9 %, FUP 20 %, FAMTX 12 %). Il n’y a pas non
plus de différence en termes de survie médiane (respectivement 7,2 mois, 7,2 mois et 6,7 mois). En conclusion, ces
3 schémas ont chacun une efficacité modeste dans le cancer de
l’estomac avancé, et aucun d’entre eux ne démontre sa supériorité par rapport aux autres. Rappelons que les résultats à
long terme de l’essai ECF (épirubicine, 5-FU, cisplatine) versus FAMTX étaient nettement en faveur de l’ECF, avec 46 %
de réponse contre 21 %, et une survie à 2 ans de 14 % contre
5 % (11).
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Un essai de phase II européen a quant à lui testé l’association
docétaxel-cisplatine, toujours chez des patients ayant un cancer de l’estomac avancé (non résécable et/ou métastatique)
(12). Les patients recevaient 8 cycles de docétaxel 85 mg/m2
J1 + cisplatine 75 mg/m2 J1 toutes les 3 semaines. Un effectif
de 48 patients a été traité. Le taux de réponse observé est de
56 %. Le temps jusqu’à progression a été de 6,6 mois et la survie globale de 9 mois. La toxicité principale est hématologique, avec 81 % de neutropénies de grades 3-4 et 32 % d’anémies de grades 3-4. Il faut noter que 9 patients ont eu une
neutropénie fébrile, sans qu’il y ait de décès toxique. Ces
résultats sont encourageants et incitent à poursuivre les essais
comportant du docétaxel, mais il faut également ajouter que
cet essai s’adressait uniquement aux patients ayant un indice
de performance de 0 ou 1.
L’étude INT 0116 de l’intergroupe américain a été présentée à
l’ASCO (abstr. 1). Il s’agit d’une étude comparant la chirurgie
seule à la chirurgie suivie d’une séquence chimiothérapie
(FUFOL), association radiochimiothérapie (45 Gy + FUFOL)
puis FUFOL. Un effectif de 603 patients de stade Ib à IV M0 a
été stratifié selon le centre et le stade (N0, N1, N2). L’analyse
de la toxicité montre un taux de neutropénies de grades 3-4 de
54 %, associé à 33 % de toxicité digestive et 1 % de décès
toxiques. L’incidence des rechutes locales est de 29 % dans le
bras sans traitement complémentaire, contre 19 % dans le bras
traité. La survie globale et la survie sans progression sont en
faveur du bras traité en adjuvant (respectivement 35 versus
28 mois et 30 versus 19 mois). Cependant, une des critiques de
cet essai est la qualité médiocre de la chirurgie, puisque 54 %
des patients avaient eu une résection non satisfaisante (< D1),
30 % avaient une résection D1 et 10 % une résection D2. On
peut donc se demander si l’effet thérapeutique de la radiochimiothérapie n’a pas simplement contrebalancé l’effet délétère d’une chirurgie insuffisante.
Un essai français de la FFCD comparant une chimiothérapie
adjuvante 5-FU-cisplatine versus chirurgie seule a inclus
278 patients sur les 400 initialement prévus (abstr. 1017). Le
schéma était le suivant : 5-FU 800 mg/m2/j en continu de J1 à
J5, suivi un mois plus tard de 5-FU 1 g/m 2/j de J1 à J5 en
continu associé à du cisplatine à la dose de 100 mg/m2 (J1 ou
J2). La toxicité a été importante, puisque la moitié des patients
ont eu une toxicité de grades 3-4. Les différences de survie
sans progression et de survie globale ne sont pas significatives
(survie globale 44 mois dans le groupe contrôle et 46 mois
dans le groupe traité).
L’essai espagnol initié en 1988 s’est intéressé au traitement
adjuvant dans le cancer de l’estomac (13). Il s’agit d’une étude
de phase III dans laquelle les patients ayant un adénocarcinome gastrique de stade III réséqué étaient randomisés entre
un simple suivi et une chimiothérapie adjuvante mensuelle
(mitomycine 20 mg/m2 J1 puis tegafur 400 mg x 2/j pendant
3 mois). Cent quarante-huit patients ont été inclus sur une
durée d’environ 7 ans. Avec un recul médian de 3 ans, les
auteurs observent un avantage en survie sans récidive et en
survie globale en faveur du bras traité à titre adjuvant (survie à
5 ans 56 % versus 36 %). Ce type d’essai alimente le débat sur
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le traitement adjuvant dans le cancer de l’estomac, d’autant
que le schéma utilisé dans cette étude ne peut pas être considéré à l’heure actuelle comme optimal.
Une méta-analyse communiquée à l’ASCO a porté sur
20 études adjuvantes (chirurgie versus chirurgie puis chimiothérapie), sur un effectif de 3 788 patients (abstr. 1017). Les
résultats montrent qu’il existe un bénéfice faible mais significatif en termes de survie en faveur de la chimiothérapie. Les
anthracyclines, en revanche, ne semblent pas apporter de bénéfice par rapport à un schéma sans anthracyclines. La prise en
compte d’études plus récentes (comportant du cisplatine)
devrait donner davantage de renseignements.
Parmi les nouvelles drogues testées dans le cancer de l’estomac, signalons l’étude comparant le Marimastat® (inhibiteur
des métalloprotéinases) à un placebo (abstr. 929). La population étudiée est hétérogène : patients métastatiques non prétraités, patients avec résection incomplète, patients répondeurs à
un premier schéma thérapeutique. Il n’y a pas de différence
significative entre les deux groupes, même s’il existe une tendance en faveur du groupe Marimastat®. Les auteurs ont pu
néanmoins déterminer certains sous-groupes de patients chez
lesquels il existe un bénéfice en survie (patients répondeurs à
un premier traitement, patients non métastatiques). Même
si l’avantage en survie n’est pas obtenu dans cet essai sur
369 patients, il faut signaler qu’il s’agit d’un des premiers
essais d’envergure testant l’efficacité de ce type de molécules,
dont le mécanisme d’action est différent de celui des drogues
habituellement utilisées en chimiothérapie.
CANCER DU PANCRÉAS
Les principales nouveautés dans le cancer du pancréas ont été
communiquées lors du congrès de l’ASCO. En situation adjuvante, l’essai ESPAC 1 (abstr. 923) a comparé, selon un plan
factoriel 2 x 2, la chimiothérapie, une association radio-chimiothérapie (5-FU + 45 Gy) et l’absence de traitement adjuvant. La chimiothérapie employée était une association 5-FU
bolus + acide folinique hebdomadaire. Outre les patients inclus
dans le plan factoriel, une autre partie de l’étude randomisait,
d’une part, observation seule versus chimiothérapie et, d’autre
part, observation seule versus radio-chimiothérapie. Les comparaisons directes (hors plan factoriel) montrent un avantage
en survie en faveur de la chimiothérapie, alors qu’il n’y a pas
de bénéfice en survie pour la radio-chimiothérapie. L’analyse
du plan factoriel, quant à lui, ne met pas en évidence de différence significative entre les 4 bras.
En situation avancée, une étude de phase II randomisée a comparé du 5-FU seul (1 g/m2/j, 4 jours toutes les 3 semaines), de
l’oxaliplatine seul (130 mg/m2/3 semaines), et l’association des
deux (abstr. 1 018). Le nombre de patients par bras est faible
(respectivement 16, 18 et 31 patients), mais deux bras ont d’ores
et déjà été interrompus pour défaut d’efficacité : aucune réponse
n’a été observée avec le 5-FU seul ou avec l’oxaliplatine en
monothérapie. L’association 5-FU-oxaliplatine entraîne un taux
de réponse de 9,7 %, avec une médiane de temps jusqu’à progression de 4,9 mois et une survie globale de 9,2 mois.
La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 6 - décembre 2000
CANCER DE L’ŒSOPHAGE
Une communication a eu lieu au congrès de l’ESMO 2000
concernant l’intérêt de la chimiothérapie néoadjuvante dans le
cancer de l’œsophage (14). Il s’agit d’un essai randomisé sur
802 patients ayant une tumeur résécable initialement, comparant une résection chirurgicale d’emblée à une chimiothérapie
(cisplatine 80 mg/m2 J1 + 5-FU 1 g/m2/j de J1 à J4, 2 cycles à
3 semaines d’intervalle) suivie d’une résection. La résection a
été considérée comme complète chez 84 % des patients ayant
reçu une chimiothérapie néoadjuvante, contre 71 % chez les
patients opérés d’emblée. La mortalité postopératoire est similaire (respectivement 9 % et 10 %). La survie globale et la survie sans progression sont significativement allongées dans le
bras chimiothérapie (survie globale 17,4 versus 13,4 mois). "
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Pr P. Rougier
hôpital Ambroise-Paré, Boulogne
Les résultats de l’essai ESPAC 1 vous incitent-ils à modifier
votre attitude thérapeutique ?
Pour l’essai ESPAC 1, le résumé ne donne pas suffisamment de détails
pour changer notre attitude dans les adénocarcinomes du pancréas
réséqués ; de plus, la chimiothérapie utilisée est quasi inefficace en
phase métastatique, et l’on peut soupçonner des problèmes d’équilibre
de groupes...
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La Lettre du Cancérologue - volume IX - n° 6 - décembre 2000
Interview...
Un schéma de 5-FU en perfusion continue doit-il se substituer
au standard FUFOL dans les cancers coliques de stade III
en adjuvant ?
Pour les cancers coliques de stade III, les essais en faveur des perfusions continues par rapport au FUFOL Mayo Clinic sont en effet des
arguments importants, mais on ne peut comparer l’essai anglais, où il y
a des complications des cathéters tunnélisés, l’essai américain, où le
bénéfice ne semble pas important et pour lequel la conclusion est très
sibylline, et l’essai GERCOR, qui est très nettement en faveur du LV5FU2
pour la toxicité. Pour ma part, je pense que le LV5FU2 est une option
raisonnable en attendant les résultats sur la survie, et je traite effectivement mes patients hors essai avec ce protocole, tout en continuant à
randomiser dans le protocole PETACC 2 si possible.
Les résultats de l’étude de Mac Donald dans les cancers gastriques
opérés vous paraissent-ils suffisamment convaincants
pour faire de la radio-chimiothérapie un standard thérapeutique
adjuvant ?
En ce qui concerne les cancers gastriques réséqués, l’association
5-FU-radiothérapie est surtout intéressante pour les patients qui n’ont
pu bénéficier d’une exérèse complète R0 et d’un curage D1-D2 avec
l’examen d’au minimum 15 ganglions (25 selon la Société germanique
de cancérologie). J’attends aussi la publication pour me faire une idée
plus précise. Sur le plan pratique, je traite les patients avec
curage < D1 par une association RT + 5-FU semaines 1, 3 et 5 après
2 cycles de LV5FU2 modifié ; pour les autres patients, je les inclus dans
les essais de chimiothérapie, ou je ne fais pas de chimiothérapie adjuvante. Dans le prochain essai de la FFCD, nous discutons l’intégration
de ce schéma dans un des bras.
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