La chimiothérapie palliative des cancers gastriques
est-elle utile?
Cancérologie
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 6 - vol. V - novembre-décembre 2002 295
algré une incidence en constante diminution
depuis 20 ans (de 9800 cas en 1975 à 7310 en
1995), le cancer gastrique était encore en 1995 responsable de
5400 décès en France. Le traitement curatif repose sur la chirur-
gie qui peut laisser espérer une survie relative à 10 ans de l’ordre
de 31%. Mais en raison d’un diagnostic souvent tardif à un stade
localement avancé ou métastatique, une exérèse à visée curative
ne peut être réalisée que dans moins de 50% des cas. Dans l’étude
de Msika, les taux de survie à 5 ans en l’absence d’exérèse à visée
curative étaient inférieurs à 5% et il n’y avait pas de survivant à
10 ans (1). Le pronostic reste donc globalement sombre avec des
taux de survie relative à 5 ans variant de 10 à 25% dans les séries
de population européenne les plus récentes (2).
En cas de métastases, la survie spontanée est catastrophique avec
une médiane n’excédant pas 6 mois et seule une chimiothérapie
à visée palliative peut être actuellement proposée. En effet, les
cancers de l’estomac sont des tumeurs relativement chimio-
sensibles avec des taux de réponse aux protocoles les plus récents
de l’ordre de 40 à 50%. Cependant, le bénéfice de cette chimio-
sensibilité reste faible avec des médianes de survie globale n’at-
teignant pas un an.
Depuis le début des années 1990, plusieurs études ont évalué l’im-
pact réel d’une chimiothérapie en cas de tumeur gastrique avan-
cée (3-5). Ces études ont révélé que la survie des patients traités
par chimiothérapie par rapport à un traitement symptomatique
était significativement améliorée avec des médianes s’allongeant
de 3 à 9 mois selon les études. Le premier essai, publié en 1993,
a comparé un schéma de type FAMTX (5-FU, adriamycine et
méthotrexate) à un groupe contrôle sans chimiothérapie. La ran-
domisation a été interrompue après l’inclusion de 22 patients en
raison d’un bénéfice de survie très significatif en faveur du bras
traité (9 mois versus 3 mois, p = 0,001) et survie à un an :
40versus 0%. Cependant, l’effectif global était faible et la métho-
dologie contestable puisque l’analyse de la survie était faite avec
18 patients supplémentaires inclus dans le bras chimiothérapie
sans randomisation (3). La seconde étude a randomisé 41 patients
pour recevoir une chimiothérapie similaire (FEMTX : l’épirubi-
cine remplaçant l’adriamycine) ou un traitement symptomatique
avec, dans les deux groupes, des suppléments en vitamines A et
E. Les résultats étaient nettement en faveur de la chimiothérapie
avec une survie médiane de 12 mois versus 3 mois dans le bras
contrôle (p = 0,0006) et une survie à un an de 52 versus 5% (4).
Dans cette étude, les auteurs avaient également noté un meilleur
contrôle des douleurs chez les patients ayant reçu une chimio-
thérapie. Cependant, ces protocoles administrant de fortes doses
de méthotrexate pouvaient être à l’origine de toxicité importante
(en particulier en cas d’hypoalbuminémie ou d’épanchement péri-
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Niveau de preuve
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