raissent dans l’expectoration exclusivement lorsqu’il existe un
cancer bronchique détectable. Cette approche représente une
voie d’avenir pour le dépistage des tumeurs bronchiques proxi-
males.
LES PROGRÈS EN BIOLOGIE
L’adénomatose du mouton est un cancer endémique, conta-
gieux, causé par un virus, le JSRV (jaagsiekte sheep retrovi-
rus). Cette maladie ressemble morphologiquement et clinique-
ment au carcinome bronchiolo-alvéolaire humain, notamment
par l’existence d’une grande bronchorrhée. Les mécanismes
expliquant le rôle oncogénique du rétrovirus JSRV commen-
cent à être mieux connus (8, 9), et son éventuelle responsabi-
lité dans l’apparition de cancers pulmonaires a été évaluée.
Deux cent quarante-neuf tumeurs pulmonaires humaines,
21 lésions non tumorales, 4 spécimens de poumon normal,
23 adénocarcinomes d’autres organes ont été étudiés par
immunohistochimie (IHC) avec un anticorps dirigé contre les
protéines de la capside de JSRV (10). L’immunomarquage
s’est avéré positif pour 39 des 129 (30 %) carcinomes bron-
chiolo-alvéolaires, 17 des 65 (26 %) adénocarcinomes pulmo-
naires et 2 des 7 carcinomes à grandes cellules. En revanche,
les autres prélèvements étaient négatifs en IHC.
Cette étude sur des tumeurs humaines évoque la possibilité
d’une association entre le JSRV et certaines tumeurs pulmo-
naires, notamment certains carcinomes bronchiolo-alvéolaires.
Cette hypothèse virale pourrait rendre compte du caractère
multifocal de cette maladie et de l’absence d’exposition au
tabac parfois retrouvée.
Il a été montré in vitro, sur des lignées cellulaires de carci-
nomes à petites cellules, que plus de 70 % des carcinomes à
petites cellules expriment le récepteur de c-Kit et son ligand, le
stem cell factor (SCF). Cette coexpression constitue probable-
ment une boucle autocrine fonctionnelle dans au moins 70 %
des CPC. Cela fait envisager un rôle thérapeutique potentiel
pour les inhibiteurs de l’activité tyrosine kinase de c-Kit. In
vitro, sur ces lignées cellulaires, le STI571, déjà bien connu
pour le traitement des leucémies myéloïdes chroniques et des
tumeurs stromales gastro-intestinales, exerce un effet inhibiteur
de la croissance. Plusieurs études concernant le STI571 (11)
mais aussi d’autres inhibiteurs de la kinase de c-Kit (12)
démontrent un effet intéressant de blocage de la croissance des
lignées cellulaires in vitro. Des essais cliniques sont actuelle-
ment en cours pour vérifier si ces constatations in vitro peuvent
se traduire par un bénéfice thérapeutique en clinique humaine.
L’avenir nous dira si cette stratégie est prometteuse et si les
inhibiteurs de c-Kit ont une place dans le traitement des cancers
bronchiques. Au-delà des aspects concernant c-Kit, d’autres
cibles moléculaires sont en évaluation avec d’autres inhibiteurs
de kinase, tels que le ZD1839 (Iressa®), qui cible le récepteur à
l’EGF (HER1). Ce médicament est administré par voie orale et
sa tolérance est excellente. Une étude japonaise présentée à
l’ASCO (13) a évalué Iressa®chez des patients porteurs de
tumeurs d’histologies variées, dont 23 CBNPC. Cinq adénocar-
cinomes parmi les 23 CBNPC ont obtenu une réponse partielle
sous traitement, avec une durée de réponse de 1 à 11 mois. Ce
taux de réponse, sur une petite série de patients et dans ce
contexte clinique péjoratif, est bon et mérite confirmation dans
des cohortes de patients plus larges. Les essais de phase III tes-
tant cette molécule seront bientôt à notre disposition en atten-
dant une AMM prochaine.
Le développement de ces molécules pose le problème, d’une
part, de leur coût futur, d’autre part de la définition de critères
moléculaires prédictifs d’une réponse au traitement. À court ou
moyen terme, ces critères moléculaires prédictifs vont appa-
raître dans notre pratique courante pour guider notre prescrip-
tion, à l’instar de ce qui est l’usage dans les carcinomes mam-
maires, où la recherche des récepteurs hormonaux est
routinière.
La recherche de marqueurs moléculaires permettra aussi de
mieux classer les tumeurs, et l’utilisation de biopuces permet-
tra l’analyse simultanée de multiples marqueurs.
Les premiers travaux concernant la classification des adéno-
carcinomes bronchiques viennent d’être publiés (14, 15).
Ainsi, les prélèvements provenant de 203 patients (139 adéno-
carcinomes, dont 12 métastases suspectées de tumeurs extra-
pulmonaires, 21 carcinomes épidermoïdes, 20 carcinoïdes pul-
monaires, 6 carcinomes à petites cellules ainsi que
17 prélèvements de poumon normal) ont été analysés à l’aide
d’un système de biopuce à ARN (puce Affymetrix®contenant
12 600 gènes). L’analyse statistique et le regroupement en
sous-groupes des tumeurs ont été réalisés par étapes, concer-
nant d’abord 3 312 gènes puis 675 gènes pour les adénocarci-
nomes. Cette étude apporte des informations importantes et a
concerné tout d’abord le diagnostic différentiel entre adénocar-
cinome primitif et secondaire. En effet, l’analyse de l’expres-
sion génique a permis de retrouver, dans les 12 cas décrits, une
“signature” correspondant à une tumeur extra-thoracique. La
filiation théorique entre carcinoïdes et cancers à petites cel-
lules semble remise en question par cette analyse. En effet, si
les deux groupes comportent une forte expression de gènes de
la lignée neuroendocrine, en revanche, il n’existe que peu
d’homologie sur les autres gènes étudiés, ce qui suggère une
profonde divergence entre ces deux types de tumeurs. Dans
cette étude, les adénocarcinomes se sont révélés beaucoup plus
hétérogènes que les autres types histologiques de tumeurs
bronchopulmonaires. Ces adénocarcinomes peuvent être clas-
sés en quatre sous-groupes distincts sur le plan génique. Le
type C1 présente un haut niveau d’expression des gènes asso-
ciés à la division cellulaire et à la prolifération, gènes qui sont
par ailleurs fréquemment observés dans les carcinomes épider-
moïdes et les carcinomes à petites cellules. Sur le plan histolo-
gique, ces tumeurs sont peu différenciées. Le type C2 contient
des marqueurs de prolifération comme le type C1, mais est
surtout caractérisé par ses marqueurs géniques neuroendo-
crines. Sur le plan histologique, les C2 sont des adénocarci-
nomes moyennement différenciés. Enfin, les types C3 et C4
sont bien différenciés. Le type C4 exprime des marqueurs des
pneumocytes de type II du poumon normal tels que le TTF1 et
les gènes codant pour les protéines du surfactant B, C et D. Le
type C3 exprime ces mêmes gènes à un niveau inférieur, ainsi
que les gènes de la glutathion S transférase pi et de l’ornithine
décarboxylase 1. Il est intéressant et logique de noter que, sur
le plan histologique, le type C4 correspond en majorité à des
CANCER DU POUMON
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La Lettre du Cancérologue - volume X - n° 6 - novembre-décembre 2001