D Actualités sur les tumeurs urothéliales What’s new in urothelial tumors?

Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2013
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dossier thématique
Les temps forts
de l’ASCO
®
-GU 2013
Actualités sur les tumeurs urothéliales
Whats new in urothelial tumors?
Y. Vano*
D
epuis plusieurs années, le carcinome uro-
thélial est le parent pauvre de l’onco-urologie.
Et l’ASCO® GU 2013 ne fera pas mentir cette
assertion. Quelques présentations méritent néanmoins
d’être rapportées.
Formes localisées : chimiothérapie
néo-adjuvante/adjuvante
Une étude japonaise, présentée en session orale, avait
pour objectif de prouver la supériorité d’une chimio-
thérapie néo-adjuvante par 2 cycles de MVAC (métho-
trexate + doxorubicine + vinblastine + cisplatine) avant
une cystectomie radicale sur une cystectomie radicale
seule, chez des patients atteints de carcinomes uro-
théliaux (1). Malheureusement, comme beaucoup
d’essais dans le cancer de la vessie, l’étude s’est ter-
minée précocement, puisque seuls 130 patients ont
été randomisés sur les 360 prévus, 64 dans le bras
chimiothérapie et 66 dans le bras cystectomie radicale
seule. Un bénéfi ce en survie sans progression (SSP) a été
observé dans le bras chimiothérapie (99 versus 78 mois
[p = 0,04]), ainsi qu’en survie globale (SG) [102 versus
81 mois (p = 0,07)]. On note le temps court entre la SSP
et le décès (3 mois), qui suggère que la majorité des
rechutes surviennent sous une forme métastatique à
distance, et donc que le gain apporté par la chimio-
thérapie néo-adjuvante est lié essentiellement à la
réponse pathologique (pRC) qu’elle permet d’obtenir
(pT0 = 34 versus 9 %). Les auteurs concluent à l’effi ca-
cité du schéma MVAC à l’heure où de plus en plus de
chimiothérapies GC (gemcitabine + cisplatine) sont
réalisées en néo-adjuvant. À juste titre, puisqu’une
équipe de Seattle a comparé rétrospectivement le
schéma GC au schéma MVAC en néo-adjuvant (2).
Quarante-six patients ont reçu du GC, et 32, du MVAC.
Les 2 groupes étaient comparables, avec néanmoins
plus de patients âgés traités par GC (17 patients sur
les 18 âgés de plus de 70 ans). Les taux de pT0 sont
compa rables (30 versus 25 % [p = 0,15]), mais les taux de
quasi-pRC (pT0/Ta/Tis) sont supérieurs dans le bras GC
(50 versus 38 % [p = 0,04]). Enfi n, l’équipe de T. Choueiri
a rapporté les taux de pRC avec le schéma MVAC dose-
dense (ddMVAC) tous les 15 jours, dans une étude de
phase II incluant 39 patients souff rant d’un carcinome
urothélial, avant une cystectomie (3) ; 95 % des patients
ont pu recevoir les 4 cycles de ddMVAC, 49 % ont eu
une quasi-pRC (< pT1N0) et 26 % étaient pT0N0. Une
toxicité de grade supérieur à 3 a été observée chez
10 % des patients.
Les données sur la chimiothérapie néo-adjuvante
sont robustes, et les 3 schémas MVAC, ddMVAC et
GC montrent des résultats intéressants en termes de
pRC, d’autant plus que P.J. Gray a montré, en session
orale, que 42 % des patients avaient un stade clinique
sous-évalué par rapport au stade pathologique
*Service de cancérologie
médicale,
hôpital européen Georges-
Pompidou, Paris.
Le staging préopératoire dans le cancer de la vessie est peu fi able,
car il sous-évalue le stade dans 42 % des cas. La chimiothérapie néo-
adjuvante confi rme son intérêt clinique et se révèle d’un bon rapport
coût/effi cacité. Il n’y a pas de schéma standard de chimiothérapie
néo-adjuvante, mais les diff érentes variantes du MVAC (ddMVAC,
sMVAC) et le schéma GC semblent d’effi cacités comparables. Dans
les formes métastatiques, il n’y a pas de nouvelles molécules effi caces
à l’horizon. Il ne faut pas sous-traiter les patients âgés. Ils peuvent et
doivent recevoir du cisplatine si leur fonction rénale le permet.
Mots-clés : Carcinome urothélial − Vessie − MVAC − Gemcitabine −
Cisplatine.
Preoperative staging in bladder cancer is not accurate because 42% of
cases have their tumour upstaged after pathology report. Neo-adjuvant
chemotherapy confi rms its clinical benefi t and seems cost-eff ective. There is
no standard chemotherapy in neoadjuvant setting, but diff erent variations
of MVAC (dose-dense MVAC, simplifi ed MVAC) and GC have a comparable
effi cacy. In metastatic disease, there is no new eff ective drugs this year.
Older patients with a good performance status and a good renal function
can and should receive cisplatin because it gives the same survival benefi t
as for younger patients.
Keywords: Urothelial carcinoma − Bladder − MVAC − Gemcitabine −
Cisplatine.
RÉSUMÉsummary
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après la cystectomie radicale. Il s’est appuyé sur la
base de données nationale américaine, qui comptait
16 953 patients ayant eu une cystectomie radicale entre
1998 et 2009 (4).
Pour conclure avec le traitement néo-adjuvant,
S.M. Stevenson et al. ont rapporté en poster une analyse
coût/effi cacité (5). Ils ont rétrospectivement repris les
données de 186 patients atteints d’un carcinome uro-
thélial, dont 64 % avaient reçu une cystectomie radicale
seule et 36 % une chimiothérapie néo-adjuvante. La
SG est de 26,6 mois pour le groupe cystectomie radi-
cale et de 38,3 mois pour le groupe chimiothérapie
néo- adjuvante (p = 0,056). La survie à 5 ans par Quality
Adjusted Life Years (QALY) est de 21,8 versus 39,8 %
(p = 0,039), respectivement. En termes de coût, la
chimiothérapie néo-adjuvante représente une augmen-
tation absolue de 9 712 dollars et une augmentation
par QALY gagné de 10 317 dollars, ce qui est tout à fait
favorable comparativement à d’autres thérapeutiques
antitumorales, notamment les thérapies ciblées.
Formes métastatiques
Il n’y a pas eu de nouveautés dans ce domaine. Citons le
poster de A. Necchi et al., qui ont présenté les données
rétrospectives concernant l’effi cacité d’un schéma de
MVAC simplifi é (sMVAC) avec soit suppression du J22,
soit suppression des J15 et J22, toutes les 3 semaines (6).
Ces schémas sont fréquemment utilisés en pratique
quotidienne, sans que l’on connaisse réellement leur
effi cacité. Cent trente-deux patients ont reçu l’un de ces
2 schémas simplifi és. La SSP est de 9,5 mois, et la SG,
de 19,5 mois, supérieures aux résultats de l’étude pivot
actualisée de H. Von der Maase et al. (8,3 et 15,2 mois
respectivement) [J Clin Oncol 2005;23[21]:4602-8].
Population unfi t
Une étude de phase III randomisée, présentée en
session orale par J. Lehmann, a comparé une chimio-
thérapie adjuvante par 6 cycles de gemcitabine à cette
même chimiothérapie administrée à la progression,
chez des patients opérés d’un carcinome urothélial,
et non éligibles à une chimiothérapie par sels de
platine (7). Létude s’est terminée précocement en raison
d’un faible recrutement, malgré les 29 centres partici-
pants, qui nont pu inclure que 120 patients en 8 ans.
La SSP à 3 ans est de 50 % pour le bras gemcitabine
en adjuvant versus 40 % pour le bras gemcitabine à la
progression (p = 0,6), infi rmant l’hypothèse de supé-
riorité du bras adjuvant, puisquil fallait prouver une
supériorité de 15 % en SSP à 3 ans.
Cette question de l’inéligibilité au cisplatine est cru-
ciale, car elle est fréquente dans la pratique quo-
tidienne. G. Chen et al. ont rapporté les données
démographiques des patients âgés porteurs d’un
cancer de la vessie avancé (≥ T3, N1-N3, M1) entre 2004
et 2007, d’après la base de données SEER-Medicare (8).
1 031 patients ont été identifi és, l’âge médian était
de 74 ans, 51,6 % ont reçu de la chimiothérapie – du
cisplatine pour 40 % dentre eux, soit seulement 20 %
d’une population âgée dont l’extension tumorale jus-
tifi ait une chimiothérapie.
Dans cette population, le cisplatine est-il aussi effi cace
que chez des patients plus jeunes, et, surtout, n’est-il
pas plus toxique ?
C’est ce qu’ont étudié A. Bamias et al., en comparant
l’effi cacité et la tolérance d’une chimiothérapie avec
cisplatine chez des patients âgés de plus de 70 ans
et chez des patients plus jeunes (9). Ils ont repris les
données individuelles de 8 essais de phase II et III,
ayant inclus 543 patients, dont 162 (30 %) âgés de
plus de 70 ans. Les caractéristiques cliniques étaient
identiques dans les 2 groupes, hormis la clairance de
la créatinine, qui était inférieure chez les sujets âgés
(57 ml/ mn versus 73 ml/ mn [p < 0,0001]). Les patients
âgés ont reçu 1 cycle de moins en médiane (5 versus
6 [p = 0,004]), mais le taux de réponse (50 versus 52 %
[p = 0,65]) et la SG (12,1 versus 12,8 mois [p = 0,91])
sont comparables. Il n’y a pas de diff érence en termes
de toxicité rénale de grade 3-4, de neutropénie fébrile
ni de décès toxiques. En conclusion, la chimiothérapie
avec cisplatine peut être administrée chez des patients
âgés de plus de 70 ans en cas de bonne fonction rénale,
avec une effi cacité comparable à celle obtenue chez
des patients plus jeunes.
Conclusion
Il est temps que l’on s’intéresse aux populations âgées
et unfi t : plus de 70 ans, PS supérieur ou égal à 2, clai-
rance inférieure à 60 ml/mn ; car ce sont les patients
que l’on soigne au quotidien.
Les essais de phase III avec plus de 200 patients, qui
mettent plus de 8 ans à inclure, ne sont plus réalisables.
C’est une perte de temps et un gâchis en termes de
ressources.
Il faut retourner à la biologie de la tumeur afi n d’émettre
des hypothèses biologiques et mécanistiques plus
robustes afin de permettre l’élaboration de théra-
peutiques réellement effi caces.
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Actualités sur les tumeurs urothéliales
1. Kitamura H, Tsukamoto T, Masumori N et al. Randomized
phase III trial of neoadjuvant chemotherapy with methotrexate,
doxorubicin, vinblastine, and cisplatin followed by radical
cystectomy compared with RC alone for invasive bladder
cancer: Japan Clinical Oncology Group Study. J Clin Oncol
2013;(Suppl. 6): abstr. 249.
2. Wright JL, Lee F, Proctor W et al. Pathologic response rates
between gemcitabine-cisplatin and methotrexate, vinblas-
tine, doxorubicin hydrochloride, and cisplatin neoadjuvant
chemotherapy in muscle-invasive urothelial cell carcinoma
of the bladder. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 267.
3. Choueiri T, Jacobus SJ, Qu AQ et al. A phase II multicenter
study of neoadjuvant dose-dense methotrexate, vinblastine,
doxorubicin, and cisplatin chemotherapy with pegfi lgrastim
support in patients muscle-invasive urothelial cancer: safety,
pathologic, radiologic, and molecular correlates. J Clin Oncol
2013;(Suppl. 6): abstr. 278.
4.
Gray PJ, Fedewa SA, Shipley WU et al. Clinical-pathologic
stage discrepancy in patients with bladder cancer treated with
radical cystectomy: associations with clinical variables and
survival. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 248.
5. Stevenson SM, Deibert CM, McKiernan JM et al. Cost-
effectiveness analysis of neoadjuvant chemotherapy in
patients with muscle-invasive bladder cancer. J Clin Oncol
2013;(Suppl. 6): abstr. 258.
6. Necchi A, Mariani L, Giannatempo P et al. Long-term effi cacy
and safety outcomes of the modifi ed (simplifi ed) combination
of methotrexate, vinblastine, doxorubicin, and cisplatin as
front-line therapy for unresectable or metastatic urothelial
cancer. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 284.
7. Lehmann J, Kuehn M, Fischer C et al. Randomized phase III
study of adjuvant versus progression-triggered treatment with
gemcitabine after radical cystectomy for locally advanced blad-
der cancer in patients not suitable for cisplatin-based chemothe-
rapy (AUO-trial AB22/00). J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 250.
8. Chen G, Galsky MD, Latini DM et al. Proportion of elderly
patients with advanced bladder cancer receiving cisplatin-
based chemotherapy: a large Medicare database study. J Clin
Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 276.
9.
Bamias A, Krege S, Lin CC et al. Cisplatin-based combination
chemotherapy in elderly patients with metastatic urothelial
cancer. J Clin Oncol 2013;(Suppl. 6): abstr. 269.
Références
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