
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIII - n° 1 - janvier-février 2010 | 19
DOSSIER THÉMATIQUE
55 mois (9). Dans notre expérience au CHU de
Nancy, 15 % (8/53) des patients traités entre 2005 et
2008 par adalimumab pour un échec de l’infliximab
(intolérance ou perte de réponse) ont dû recourir à
une chirurgie abdominale majeure (10).
Résection intestinale
dans les études de population
Comme pour la RCH, peu de données sont dispo-
nibles sur le taux de chirurgie chez les patients
avec maladie de Crohn traités par infliximab et
inclus dans des études de population. Une seule
étude scandinave a retrouvé un taux de chirurgie
abdominale majeure égal à 17 % (33/191) chez des
patients atteints de la maladie de Crohn ayant reçu
en moyenne 2,6 perfusions d’infliximab entre 1999
et 2001 (5).
Conclusion
Globalement, environ un patient sur deux atteints
de la maladie de Crohn ou de RCH devra recourir à
une résection intestinale sous anti-TNF. Alors que les
anti-TNF semblent avoir significativement réduit le
recours à la chirurgie dans la maladie de Crohn, le
taux de colectomie avant l’avènement des anti-TNF
et celui observé à l’heure actuelle dans les essais
cliniques randomisés contrôlés mais aussi dans les
études observationnelles semblent identiques dans
la RCH. Toutefois, seules des études de population,
qui sont en cours, permettront de répondre à la
question suivante : les anti-TNF ont-ils simplement
retardé la date de la chirurgie ou ont-ils diminué
durablement le recours à une chirurgie abdominale
majeure ? Quoi qu’il en soit, le taux de chirurgie
sous anti-TNF reste élevé dans la vraie vie, autour
de 20 %, aussi bien dans la maladie de Crohn que
dans la RCH. Il n’est donc pas nécessaire de tout
tenter pour éviter une chirurgie qui, quoi que l’on
fasse, aura lieu chez un sous-groupe non négligeable
de sujets. Il paraît beaucoup plus intéressant d’iden-
tifier les patients qui ne bénéficieront pas d’un trai-
tement par anti-TNF et chez qui la chirurgie doit
être réalisée dans les meilleures conditions. Ne pas
utiliser les anti-TNF dans les MICI en 2010 serait
une faute professionnelle, oublier de recourir à la
chirurgie le serait tout autant. Une autre question
reste en suspens : faut-il introduire les anti-TNF
tôt après le diagnostic de la maladie ? Les seules
données disponibles proviennent du désormais
célèbre essai clinique souvent appelé step-up versus
top-down publié dans The Lancet (11). Tout le monde
(ou presque !) a oublié que, dans cette étude, le
taux de résection intestinale pour maladie de Crohn
était quasi identique dans les deux bras (9,2 % dans
le groupe top-down versus 12, 5 % dans le groupe
step-up) [11]. On ne peut donc recommander, à
l’heure actuelle, un traitement agressif précoce
chez tous les patients chez qui l’on diagnostique
une maladie de Crohn en arguant du fait que seule
cette stratégie pourrait modifier l’histoire naturelle
des MICI. Les rapports coût-efficacité et bénéfice-
risque doivent plus que jamais nous guider dans
notre décision thérapeutique qui ne peut se faire
qu’au cas par cas. ■
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