La Lettre de l'Hépato-gastroentérologue • Vol. XX - n° 2 - mars-avril 2017 | 91
Points forts
»La prévalence évaluée des TIPMP est proche de 15 % dans la population âgée de plus de 60ans.
»
La wirsungo-IRM a une sensibilité proche de 100 % pour le diagnostic des TIPMP des canaux secondaires.
»Il n’existe pas de marqueurs spécifiques du grade de dysplasie des lésions.
» Les indications opératoires formelles actuellement sont la présence
1/ d’un ictère chez un patient présentant une lésion kystique de la tête du pancréas ;
2/ d’une composante solide au sein de la lésion ;
3/ d’un nodule mural prenant le contraste ;
4/ d’une atteinte du canal pancréatique principal >10mm de diamètre.
»En cas de suivi, il est recommandé d’alterner l’IRM et l’échoendoscopie. Ce suivi doit être annuel.
Mots-clés
TIPMP
Lésion précancéreuse
Kyste pancréatique
Cancer du pancréas
Highlights
»
Intraductal papillary muci-
nous neoplasms of the pan-
creas (IPMN) are precancerous
cystic lesions involving main or
branch ducts. The prevalence
is estimated at nearly 15% in
the general population over 60
years of age.
»
MRI (with MRCP sequences)
is the first line procedure;
however, endoscopic ultra-
sound has to be performed at
baseline and regularly, notably
in case of doubt of nodule.
»
No specific marker exists
regarding the grade of dys-
plasia.
»
Indications of surgery in 2017
are high-risk stigmata of malig-
nancy: 1/ obstructive jaundice
in a patient with a cystic lesion
of the head of the pancreas, 2/
presence of any one of: solid
component suggesting a sec-
ondarily cystic solid neoplasm,
enhancing mural nodule and
main pancreatic duct >10 mm
in size.
Keywords
IPMN
Precancerous lesion
Pancreatic cyst
Pancreatic cancer
mais les lésions infracentimétriques sont également
prises en compte. Les canaux secondaires peuvent
apparaître comme une dilatation tubulaire branchée
ou une formation arrondie “en boule”. Il s’agit alors
d’une lésion multiloculée liquidienne, séparée par des
septa, pouvant mimer un aspect en grappe de raisin.
Des bourgeons papillaires intracanalaires peuvent
apparaître au cours du processus d’oncogenèse, qui
correspondent aux nodules muraux vus en imagerie.
Les TIPMP peuvent être diagnostiquées par les
examens d’imagerie conventionnelle à un stade
précoce. Ce diagnostic repose sur l’association de
l’IRM avec séquence de CP-IRM (wirsungo-IRM), de
l’échoendoscopie et de la scanographie. Les séquences
pondérées T2 de la CP-IRM sont l’examen clé pour
confirmer le diagnostic de TIPMP touchant les canaux
secondaires (isolée ou associée à une atteinte du
CPP), avec une sensibilité proche de 100 % (3-4).
Existe-t-il des outils pertinents
pour évaluer le grade de dysplasie ?
De très nombreuses études ont été publiées portant
sur des analyses du liquide de ponction : marqueurs
tumoraux, recherche de mutations génétiques
spécifiques du stade de l’oncogenèse, étude des
micro-ARN. À ce jour, aucune de ces techniques ne
permet de déterminer le grade de la dysplasie. Il
a été mis en évidence des mutations spécifiques
des TIPMP, mutations du gène GNAS. Cependant, le
degré d’expression de ces mutations n’est pas corrélé
au grade de la dysplasie.
L’avenir réside probablement dans la biopsie liquide,
qui devrait émerger dans la prochaine décennie.
A.W. Berger et al. ont publié en 2016 les premiers
résultats confirmant la faisabilité d’une détection
dans le sang de fragments d’ADN circulant issus de
cellules dysplasiques chez des patients porteurs de
TIPMP. Ces travaux sont très prometteurs (5).
TIPMP : une prise en charge
encore controversée
Afin de proposer une prise en charge optimale de ces
lésions, il faudrait connaître le risque exact de can-
cérisation et les facteurs de risque associés. Depuis
la dernière décennie, ces données ont beaucoup
évolué, mais il est encore difficile d’en avoir une
idée précise.
Connaît-on le risque de cancérisation
des TIPMP ?
Le risque de cancer au cours des TIPMP est très
variable selon la localisation des lésions, leur taille et
leur phénotype histologique. La dernière conférence
d’experts sur le sujet date de 2012. Après revue de la
littérature, les experts affirmaient que, parmi tous
les paramètres étudiés, l’atteinte du canal pancréa-
tique principal était un facteur de risque majeur de
cancérisation, significatif dans toutes les études.
Cinq ans après le premier signe ou symptôme en
rapport avec une TIPMP touchant le CPP, le risque
de dysplasie de haut grade ou de carcinome invasif
était évalué à plus de 60 %. En cas d’atteinte exclu-
sive des canaux secondaires, ce risque variait de 3 à
18 % selon les études. Les lésions invasives étaient
plus fréquentes chez les patients âgés de plus de
60 ans. Le risque annuel de transformation maligne
des TIPMP-CS pouvait être estimé entre 2 et 3 %
selon les données de la littérature (6-7).
Les recommandations d’experts
internationaux de 2012
Afin d’affiner ces données, la conférence d’experts
internationaux de 2012 avait énoncé des critères (7) :
➤
de haut risque de malignité (HR) correspondant
à une indication de la chirurgie : présence d’un ictère
chez un patient présentant une lésion kystique de la
tête du pancréas ; ou présence d’un critère morpho
-
logique parmi les suivants : présence d’une masse
solide au sein de la lésion kystique, présence d’un
nodule mural prenant le contraste, atteinte du
canal pancréatique principal supérieure à 10 mm
de diamètre ;
➤“d’inquiétude” ou “worrisome”, devant amener
à intensifier les investigations : kyste supérieur à
3 cm, diamètre du CPP entre 5 et 9 mm, nodule
mural sans prise de contraste.