RUY BLAS
© Christian Ganet
7e FESTIVAL
AUTOMNE EN NORMANDIE
Devant l’histoire
DE VICTOR HUGO
THÉÂTRE NATIONAL
POPULAIRE
TRÉTEAUX
DE FRANCE
20 I NOV 2012
21 I NOV 2012
CRÉATION AU THÉÂTRE NATIONAL POPULAIRE LE 11 NOVEMBRE 2011 POUR LA RÉOUVERTURE DU TNP À VILLEURBANNE
CRÉATION VERSION ITINÉRANTE TRÉTEAUX DE FRANCE AUX RENCONTRES DE BRANGUES, LES 30 JUIN ET 1ER JUILLET 2012
PRODUCTION TRÉTEAUX DE FRANCE
COPRODUCTION THÉÂTRE NATIONAL POPULAIRE | CONSEIL GÉNÉRAL DE L’EURE
TOURNÉE 2012-2013 23 ET 24 NOVEMBRE 2012 AU THÉÂTRE, CHELLES | DU 27 AU 30 NOVEMBRE 2012 À L’HEXAGONE, SCÈNE NATIONALE, MEYLAN
Directeur de la publication : Robert Lacombe | Coordination éditoriale : Muriel Dubos, Faustine Le Bras, Stéphanie Malnuit, Anna Messager | Création graphique : Jérôme Le Scanff | Réalisation graphique : Martine Rousseaux
Impression Imprimerie Conseil Général de Seine-Maritime
Licences d’entrepreneur de spectacles Licence 2 : 2-1054802 Licence 3 : 3-105480 | Tous droits réservés EPCC Arts 276
THÉÂTRE
de VICTOR HUGO
mise en scène CHRISTIAN SCHIARETTI
avec (par ordre dentrée en scène)
NICOLAS GONZALES* ruy blas
ROBIN RENUCCI don salluste
OLIVIER BORLE* don césar
JULIETTE RIZOUD* la reine
PHILIPPE DUSIGNE don guritan, don antonio ubilla
CLAUDE KOENER le marquis del basto, covadenga, une duègne
YASMINA REMIL* casilda, le page
LAURENCE BESSON* la duchesse dalbuquerque, un conseiller, la duègne
THOMAS FITTERER montazgo, un alcade
CLÉMENT CARABÉDIAN* le comte de camporeal, un alcade
YVES BRESSIANT le comte dalbe, marquis de priego, le laquais
JOSÉ LÉMIUS gudiel, le marquis de santa-cruz, un conseiller
JULIEN GAUTHIER* don manuel arias, un alguazil, un valet
BRAHIM ACHHAL technicien en jeu
LARBI GUÉMAR technicien en jeu
*DE la troupe du tnp
assistant à la mise en scène OLIVIER BORLE
scénographie CHRISTIAN SCHIARETTI et FANNY GAMET
accessoires FANNY GAMET
lumière JULIA GRAND
son LAURENT DUREUX
costumes THIBAUT WELCHLIN
maquillages et coiffures CLAIRE COHEN
DURÉE 3H AVEC ENTRACTE
> VAL-DE-REUIL, FERME DE LA SALLE SOUS CHAPITEAU
MARDI 20 NOVEMBRE – 19H30
MERCREDI 21 NOVEMBRE – 19H30
EN COLLABORATION AVEC LE THÉÂTRE DES CHALANDS, VAL-DE-REUIL
DOSSIER D’ACCOMPAGNEMENT
téléchargeable sur le site
© Christian Ganet
© Christian Ganet
Vous êtes depuis peu directeur des Tréteaux de France, le seul Centre Dramatique National
itinérant en France. Pour
Ruy Blas
, vous avez fait équipe avec Christian Schiaretti, directeur
du Théâtre National Populaire – un autre CDN emblématique de l’utopie de la Décentralisation
théâtrale et où Jean Vilar mit en scène un
Ruy Blas
avec Gérard Philipe, en 1954. Est-ce une
manière de défendre le théâtre populaire et sa tradition ?
Robin Renucci : En effet, je suis, depuis le mois de juillet 2011, directeur des Tréteaux de
France. Le premier geste pour moi, puisque mon projet s’intitule « Faire ensemble », a été
de m’allier à d’autres équipes. « Faire ensemble » : mon premier compagnon a été Christian
Schiaretti, parce qu’il montait Ruy Blas de Victor Hugo au TNP (sans doute en écho à Jean
Vilar), mais aussi parce que le TNP et les Tréteaux ont la même origine : Firmin Gémier. Et
c’est Victor Hugo qui, le premier a parlé de « théâtre national populaire » dans la préface de
Marion de Lorme. Il s’agit donc d’un hommage croisé, à Vilar, à Hugo, au théâtre populaire.
Vous aviez déjà travaillé avec Christian Schiaretti ?
Je l’ai rencontré au Conservatoire dans les années 1978-1980. Puis nous nous sommes retrou-
vés à la Comédie de Reims, où il a créé Les Langagières, un évènement qui concevait la langue
comme un projet de démocratie. Notre langue qui se transforme, qui accueille tout le monde,
est notre terrain commun. Nous nous rejoignons sur les questions de l’Education populaire,
de la création, de la formation, de la transmission. Nous pensons qu’elles peuvent se conju-
guer et se réinventer. C’est mon origine : j’ai commencé par des stages très exigeants dans le
cadre de Jeunesse et Sport, avec des gens qui avaient travaillé aux côtés des réformateurs de
la première Décentralisation, dans un théâtre à la fois amateur et professionnel. Je reste atta-
ché à réparer cette fracture qui a eu lieu en 1959 entre le ministère des Affaires culturelles et
le ministère des Sports. C’est essentiel de raconter d’où l’on vient : Les Tréteaux doivent conti-
nuer ce travail de diffusion et amener le théâtre dans les zones rurales et périurbaines. Mais il
s’agit aussi d’un travail d’infusion : passer du temps sur le territoire avec les gens, sur le ter-
rain ; créer des ateliers, des moments de lecture partagée. C’est une autre manière de conce-
voir la présence et l’action d’un Centre dramatique national.
Comment se déroule ce travail d’infusion pour
Ruy Blas
?
L’infusion, c’est cette tisane qui est un soin, pharmacologique. Nous travaillons sur le vers et
l’alexandrin, autour du thème « Venez prendre un vers avec nous », sur l’exemple d’une langue
qui se troque, qui est un moment convivial. Nous effectuons un travail sur l’alexandrin par
le biais d’ateliers de lecture à voix haute, de pratique du vers, en abordant les questions de
À L’ATELIER DE LA LANGUE
ENTRETIEN AVEC ROBIN RENUCCI
syntaxe, de métrique, de phonétique, aidés par des acteurs de terrains venant du monde asso-
ciatif, de l’éducation. L’idée est de permettre une réappropriation des outils de la langue. Or
le vers est un outil puissant qui permet cette réappropriation. L’alexandrin peut faire peur…
On peut avoir été brusqué à l’école. Mais les barrières s’estompent vite et, par la pratique, les
gens arrivent à se révéler quand on leur donne les bons outils. Nous vivons une véritable perte
de savoir-faire dans le spectacle vivant, qui est devenu un lieu de consommation culturelle. Je
pense que nous sommes tous porteurs de savoir-faire. La lecture à voix haute, par exemple,
redonne vite conscience de ces savoir-faire.
Pourquoi commencer ce mandat, cette aventure avec Victor Hugo, et avec
Ruy Blas
?
Nous vivons une époque où les publics sont très segmentés. Ruy Blas est écrit au moment où
Hugo cherchait déjà, avec Alexandre Dumas au Théâtre de la Renaissance, un moyen de réu-
nifier les publics : ceux des Grands boulevards, l’univers du théâtre de la rue, le public fémi-
nin, le public de la Comédie-Française où se jouait Hernani… Il écrit donc une pièce qui mêle
le mélodrame et une histoire d’amour au grand drame de la jalousie et de la vengeance. Il veut
réunir les publics autour d’une œuvre politique forte qui fasse rire et qui élève le public. Cela
donne Ruy Blas, le ver de terre amoureux d’une étoile, le valet indigné qui n’a aucun véritable
projet pour se battre, aux prises avec Don Salluste, l’homme de pouvoir qui cède à ses pul-
sions sexuelles avec une femme de chambre. Hugo réunit par l’humour et le rire des publics
qui ne seraient pas venus. Notre spectacle a été créé le 11 septembre 2011. Puis avec Christian
Schiaretti, nous avons pris la décision de reconstruire le spectacle pour partir en itinérance
avec les Tréteaux.
Le spectacle a évolué ?
Il évolue surtout en séjournant sur le terrain. Nous restons une semaine, en Haute-Isère dans
la maison Paul Claudel. Il y a eu la Corse cet été avec l’ARIA… Nous serons à Villefranche-sur-
Saône pour des temps longs, puis à Val-de-Reuil où j’aimerais échanger avec les publics au-
tour de la pratique. Le nomadisme permet de travailler avec les gens - je préfère ce terme à
celui d’itinérance. Les Tréteaux existent pour éclairer des actions qui existent déjà. Il y a des
choses qui existent sur les territoires.
Ruy Blas
fut interprété pour la première fois par Frédérick Lemaître. La pièce a-t-elle conservé
sa force tragi-comique subversive ?
Oui je le crois car, comme je l’ai suggéré, elle colle à l’actualité politique à travers le per-
sonnage de Salluste, par le mélange des affaires privées et publiques. Toute la part comique
exploitée par Gérard Oury dans La Folie des grandeurs est présente, avec une trame shakes-
pearienne. C’est une pièce formidablement riche.
Vous jouez Don Salluste, le manipulateur, le captateur, le financier, l’homme de réseaux, un
Tartuffe sans foi. Comment avez-vous abordé ce personnage antipathique ?
C’est un personnage très noir, machiavélique, qui a sa force et sa puissance. Je trouve qu’il
vaut mieux valoriser tous les personnages : un personnage inconsistant n’intéresse personne.
Jouez Don Salluste comme un fantoche, et le complot n’existe plus. Au contraire, on est au
cœur du pouvoir. Il faut donc lui donner de l’envergure. Je suis très bien entouré par de jeunes
artistes du TNP. Je suis professeur au Conservatoire national, j’ai créé l’ARIA : être en contact
avec les jeunes acteurs du TNP est très riche et opère une synthèse de mes différentes actions.
Est-ce que l’alexandrin parle à tout le monde ? Est-ce que tout le monde peut l’entendre ?
Tout le monde ne peut pas l’entendre comme cela. Je crois que c’est une langue qui nous réu-
nit dès lors que l’on accompagne l’écoute du public. C’est un merveilleux outil, très ludique, de
la langue. Les novlangues viennent rendre notre pensée concise : elles l’appauvrissent, lui en-
lèvent du souffle. Mon but est de donner les outils dans cette forge de l’art et de la pensée des
Tréteaux, pour que les gens se partagent la langue et la conjuguent avec leurs pratiques quo-
tidiennes. La langue nous rassemble.
La pièce est truculente. Elle multiplie les rebondissements invraisemblables tout en restant
d’une cinglante vérité. Le plaisir du théâtre, du jeu doit être au plus fort.
Oui, surtout incarner Don César qui est la partie burlesque de cette pièce, qui ouvre sur des
regards en labyrinthe. C’est un univers de fantaisie, tout à fait assumé par Victor Hugo. La
mise en scène de Christian Schiaretti est très limpide, on ne rate rien, on suit l’intrigue dans
ses moindres recoins.
© Christian Ganet
La programmation du festival Automne en Normandie est très politique. Comment voyez-
vous la place de
Ruy Blas
au sein de cette programmation qui interroge notre présent face à
l’histoire ?
Précisément, c’est un théâtre d’aujourd’hui qui utilise un objet de notre patrimoine. Nous re-
trouver dans cette diversité des publics et des créations, dans cette multi-culturalité, je trouve
cela très beau, et très politique qu’il y ait une présence du patrimoine dans cette programma-
tion moderne.
D’autres se réclament du théâtre populaire dans la programmation, comme David Bobee.
En quoi le théâtre populaire a-t-il changé depuis un siècle, depuis les premiers grands
réformateurs ?
Le théâtre populaire est celui des hommes associés aux hommes. Ce n’est pas le théâtre de
masse. Ce n’est pas le théâtre pour tout le monde. C’est le théâtre qui associe les hommes entre
eux. J’y vois la considération de l’autre comme constitutif de sa propre personne. Ce qui a pu
changer, c’est la vulgarisation du mot « populaire ». Je revisite le théâtre populaire dans un
monde fragmentaire, divisé, où le marketing dissocie la famille, les classes sociales, les jeunes,
les vieux pour en faire des cibles de consommation. Le théâtre qui rassemble tente de barrer
cette fragmentation, de re-symboliser, tout en laissant une partie d’inachevé pour laisser cha-
cun reconstruire. Le théâtre populaire est un outil de la retrouvaille.
Le répertoire et la création sont souvent mis en porte à faux aujourd’hui. L’un serait
conservateur car patrimonial ; l’autre incarnerait une alternative. De même entend-on souvent,
à juste titre ou pas, parler de la scission entre CDN et réseaux de création. Ce dualisme est
bien entendu malsain, mais quel est votre point de vue sur cet état des lieux ?
Un répertoire, avant de devenir répertoire, est une création ! La création est centrale, pre-
mière. Ce qui m’importe, c’est de parler de la création plutôt que des créateurs. En tant que
telle. Il y a une sorte de confiscation du jeu de la création par des gens qui sont des profes-
sionnels du spectacle vivant. La création d’une troupe amateur est une véritable création.
Aujourd’hui, on a tendance à confondre ces deux endroits. J’aime l’idée de reconnaître la créa-
tion où qu’elle soit.
Propos recueillis par Isabelle Barbéris
CHRISTIAN SCHIARETTI
Né en 1955, Christian Schiaretti débute dans
les années 80 en fondant sa compagnie
avant d’être nommé, en 1991, à la tête de
la Comédie de Reims qu’il dirige durant onze
ans. Il y débute une collaboration avec l’écri-
vain et philosophe Alain Badiou qui aboutit
aux créations des farces contemporaines :
Ahmed le subtil (Festival d’Avignon, 1994),
Ahmed philosophe (1995), Ahmed se fâche
(1995) et Les Citrouilles (1996). Avec Jean-
Pierre Siméon, il crée notamment D’entre
les morts (1999), Stabat mater furiosa
(1999), Le Petit Ordinaire (2000), La Lune
des pauvres (2001). En 2002, il est nommé
à la direction du Théâtre National Populaire
de Villeurbanne. Il y crée notamment
L’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht et
Kurt Weill (2003), LAnnonce faite à Marie de
Claudel (2005) et Coriolan de Shakespeare
(2006), récompensé par de nombreux prix
(Prix Georges-Lerminier 2007, décerné par
le Syndicat de la Critique, Molière du met-
teur en scène et Molière du Théâtre public,
2009…). À la Comédie-Française, il met en
scène Aujourd’hui ou les Coréens de Michel
Vinaver et fait entrer au répertoire de la Salle
Richelieu, Le Grand Théâtre du monde, suivi
du Procès en séparation de l’Âme et du Corps
de Pedro Calderón de la Barca en 2004. En
2008, il monte Par-dessus bord de Michel
Vinaver, joué pour la première fois en France
dans sa version intégrale et récompensé du
Grand Prix du Syndicat de la Critique pour
le meilleur spectacle de l’année 2008. De
2007 à 2009, il crée, avec les comédiens de
la troupe du TNP, plusieurs pièces de Molière
dont Sganarelle ou le Cocu imaginaire,
L’École des maris ou encore Les Précieuses
ridicules. En septembre 2009, il présente à
l’Odéon-Théâtre de l’Europe Philoctète de
Jean-Pierre Siméon avec Laurent Terzieff
dans le rôle titre. L’année suivante, il met en
scène Siècle d’or, un cycle de trois pièces :
Don Quichotte de Miguel de Cervantès, La
Célestine de Fernando de Rojas et Don Juan
de Tirso de Molina. En mai 2011, il crée à
la Colline à Paris le diptyque Mademoiselle
Julie et Créanciers d’ August Strindberg.
© Christian Ganet
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