Le traitement volumique est réalisé le plus sou-
vent de façon automatique par l’administration
généreuse de perfusions chaudes. La perfusion
de base comportera un soluté de NaCl à 0,9%
avec adjonction de glucose selon les besoins. Le
Ringer-lactate est contre-indiqué en raison du
danger d’hyperkaliémie et de la limitation du
métabolisme hépatique avec possibilité d’accu-
mulation de lactane. Les besoins volumiques
peuvent atteindre plusieurs litres au cours du
traitement et sont souvent sous-estimés par rap-
port au développement possible d’une rhabdo-
myolyse et d’un syndrome de fuite capillaire. Pour
ce qui concerne la vitesse de l’apport, on doit tenir
compte de la chute initiale de la fonction myocar-
dique. C’est pourquoi il est utile de mettre en
place précocement une mesure de la pression
veineuse centrale (PVC) dans le service des
urgences. On s’efforcera d’atteindre une pression
veineuse centrale de 10 à 12 cm. La nécessité
de recourir à une voie veineuse centrale résulte
aussi souvent de l’impossibilité de mettre en place
un accès veineux périphérique. Le cathéter uri-
naire permet également d’évaluer la situation
circulatoire.
L’utilisation de médicaments chez des patients en
hypothermie est comparable à un phénomène de
«boîte noire». Nous n’avons aucune représen-
tation claire de la pharmacocinétique ni de la
pharmacodynamique des médicaments en situa-
tion d’hypothermie. On peut évoquer notamment
le danger d’une accumulation puis d’une libéra-
tion retardée des médicaments pendant le ré-
chauffement. Nous mettons aussi en garde contre
les effets arythmogènes des substances cardio-
actives. Pour ces raisons, nous ne pouvons que
déconseiller l’utilisation de médicaments au-des-
sous de 30 °C [4]. Entre 30 et 32 °C, l’intervalle
entre les doses sera prolongé. L’utilisation de fai-
bles doses de catécholamines peut néanmoins être
indiquée au cours du traitement [7]. L’utilisation
d’antibiotiques peut être envisagée en cas de
suspicion d’un processus septique concomitant.
Les stéroïdes n’ont qu’une seule indication: en
traitement substitutif, comme par exemple dans
l’insuffisance surrénalienne.
Paramètres sanguins et diagnostics
Le potassium et le glucose comptent parmi les
quelques paramètres sanguins qui doivent être
contrôlés régulièrement dans le cadre de l’acti-
vité métabolique croissante. Ce contrôle se fait
de la façon la plus simple qui soit, par l’analyse
des gaz du sang veineux. La kaliémie initiale a
une signification importante dans le cadre de la
détermination d’un pronostic défavorable. Après
un refroidissement rapide, une hyperglycémie
initiale est fréquente, mais elle se corrige pen-
dant le réchauffement chez les sujets non diabé-
tiques sans instauration d’insuline. En revanche,
après un refroidissement lent, les patients pré-
sentent plutôt une hypoglycémie.
CABINET Forum Med Suisse 2006;6:939–944 941
perte de chaleur supplémentaire pendant le sau-
vetage et le transport du patient.
L’équipement spécifique du service de sauvetage
est à disposition. La mesure de base la plus im-
portante est l’enveloppement chaud et intégral
comportant des sachets chimiques chauffants
comme par exemple une couverture de survie
Heat Wave™. L’enlèvement des vêtements
mouillés n’est utile que pour un temps de trans-
port prolongé (>1⁄2 h) et dans un environnement
protégé. De même, la perfusion doit immédiate-
ment être chauffée (par exemple «save and
warm™», «Lavatherm®»). Sur le terrain, on ne
doit dans aucun cas perdre du temps à chercher
un accès veineux (max. 5–10’). Evoquons
aussi comme alternative la mise en place d’une
aiguille intra-osseuse (par exemple «Bone Injec-
tion Gun™»).
Le patient en hypothermie qui présente un arrêt
circulatoire ou une hypothermie grave (<30 °C)
doit si possible être immédiatement transféré
dans un centre disposant d’une infrastructure de
CEC. Si la circulation est encore maintenue, l’hô-
pital cible doit disposer au moins d’un service de
soins intensifs.
Voies respiratoires et ventilation (A + B)
Conformément au premier palier, la liberté
des voies respiratoires doit être assurée et la
respiration soutenue par une administration
d’oxygène en fonction de la situation. La colonne
cervicale doit être stabilisée si un traumatisme
n’est pas exclu.
Comme dans d’autres situations de réanimation,
l’indication à une intubation est donnée par la
perte du réflexe de protection ou par le danger
d’aspiration. Le facteur température joue aussi
un rôle lors de la mise en place de la médication
d’induction dont l’efficacité baisse rapidement
au-dessous de 30 °C. Aussi certains auteurs re-
commandent de renoncer aux myorelaxants et
de se limiter uniquement à une sédation à dose
réduite.
L’oxymétrie de pouls ne livre aucune donnée
fiable, la surveillance globale de l’efficacité de
la ventilation dépend en premier lieu de la gazo-
métrie.
Circulation et déficit (C + D)
L’efficacité de la défibrillation chez les patients
en hypothermie est une autre question sujette
à controverse. La littérature théorique donne
la plupart du temps une température limite de
28 à 30 °C. Toutefois, des études de cas signalent
que la réussite d’une défibrillation est également
possible avec des températures plus basses.
Une tentative unique est ainsi justifiée à partir de
26 °C. Dans ce cas, une décharge unique est ap-
pliquée en monophasique à 360 J, en biphasique
à 200 J ou selon la recommandation du fabri-
cant. Dans le cas où cette manœuvre reste vaine,
il faut attendre le réchauffement jusqu’à 30 °C.