MPSI1 fondements des math´ematiques lyc´ee Chaptal
Fondements des math´ematiques : un peu de logique et de vocabulaire
ensembliste
Nous allons d´efinir dans ce chapˆıtre un vocabulaire et pr´esenter des propri´et´es utiles dans tous les domaines des
math´ematiques.
Ces notions ne sont pr´esenees de fa¸con ni exhautive ni mˆeme compl`etement rigoureuse. Nous nous contenterons
de saisir ce qui est indispensable `a l’approche des math´ematiques que nous ´etudierons par la suite.
I Quelques ´el´ements de logique
Une assertion est vraie (V) ou fausse (F), mais pas simultan´ement. La construction math´ematique repose sur
l’´etablissement de la v´eracit´e d’assertions, `a partir d’ assertions connues (et au d´epart d’assertions dont la v´eracit´e est
suppos´ee : ce sont les postulats, ou axiomes) et de r`egles de d´eduction que nous allons aborder un peu plus loin.
Un th´eor`eme (appel´e aussi, selon son importance, proposition, lemme, corollaire. . . ) est une assertion vraie.
La n´egation d’une assertion pest l’assertion not´ee non(p) et d´efinie par la table de v´erit´e suivante :
pnon(p)
V F
F V
(tableau indiquant les valeurs induites (Vou F) d’une
ou plusieurs assertions en fonction des valeurs des asser-
tions de d´epart).
Nous utiliserons 4 connecteurs logiques : la conjonction hh et ii , la disjonction hh ou ii , l’implication hh ii et l’´equi-
valence logique hh ii , d´efinis par la table suivante :
p q p et q p ou q p q p q
V V V V V V
V F F V F F
F V F V V F
F F F F V V
Remarques :
1. La disjonction (hh ou ii ) correspond `a ce que l’on appelle commun´ement le hh ou inclusifii : au moins l’une des
deux assertions est vraies, les deux pouvant ˆetre vraies simultan´ement. A ne pas confondre avec le hh ou exclusifii
du c´el`ebre hh fromage ou dessert ?ii
2. Dans l’assertion hh pqii ,pest l’hypoth`ese et qla conclusion.
(a) Cette assertion s’exprimera souvent par hh si p, alors qii , ou hh pour que p, il faut que qii ou encore hh pour
que q, il suffit que pii . Nous trouvons ici la premi`ere occurrence de condition n´ecessaire et de condition
suffisante, notions qu’il convient de maˆıtriser d`es `a pr´esent.
(b) Remarquons que (pq) est vraie `a partir du moment o`u pest faux. Ceci ne signifie absolument pas que
la conclusion qsoit vraie, mais que toute implication `a partir d’une hypoth`ese fausse est vraie.
3. L’assertion hh pqii s’exprimera par hh psi et seulement si qii ou encore hh pour que q, il faut et il suffit que pii .
4. Attention `a ne pas utiliser abusivement les notations =et . Celles-ci n’ont leur place que dans une assertion
pr´ecise et non dans le corps d’une d´emonstration : les math´ematiques se r´edigent en fran¸cais.
Donnons, `a titre d’exemples, quelques n´egations qui nous seront tr`es utiles par la suite (et donc qu’il convient de
maˆıtriser parfaitement) :
Soient pet qdeux assertions.
T1: ( non (pet q)(( non p) ou ( non q)).
Preuve : D´emontrons l’assertion T1`a l’aide d’une table logique :
p q p et qnon (pet q) non pnon q(non p) ou (non q)T1
V V V F F F F V
V F F V F V V V
F V F V V F V V
F F F V V V V V
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T2: ( non (pou q)(( non p) et ( non q)).
Preuve : toujours `a l’aide d’une table logique :
p q p ou qnon (pou q) non pnon q(non p) et (non q)T2
V V V F F F F V
V F V F F V F V
F V V F V F F V
F F F V V V V V
T3: non (pq)(pet ( non q)).
Cette derni`ere assertion s’appelle le raisonnement par l’absurde. En pratique, une fa¸con de proc´eder pour ´etablir
que pqest vraie, est de supposer pvraie, qfausse et de montrer que cela entraine une contradiction. Il est alors
´etabli que (pet ( non q) est fausse, et donc par l’´equivalence T3, ( non (pq)) aussi, donc (pq) est vraie.
T4: (( non p)( non q)) (pq).
Exercice 1 D´emontrer les th´eor`emes logiques T3,T4, ainsi que les th´eor`emes suivants :
a) (pq)(qp).
b) (p(qr)) ((pet q)r).
c) ((pou q)r)((pr)et (qr)).
d) ((pq)et (qp)) (pq).
(Ce th´eor`eme sera utilis´e pour prouver une ´equivalence.)
II Les ensembles
II.1 D´efinitions
Notons `a nouveau que notre but n’est pas de donner une d´efinition ou un cadre pr´ecis et complet de la th´eorie
des ensembles, chose ardue d´epassant l’ambition de ce texte. Nous nous contenterons d’en appr´ehender les principales
notions qui nous seront utiles dans la suite de l’expos´e.
De fa¸con tr`es intuitive, nous nous contenterons de d´efinir un ensemble comme une collection d’objets.
Par exemple : ensemble des joueurs d’une ´equipe de football, ensemble des clubs de football d’un championnat,
ensemble des championnats nationaux de football, etc. . .
D´efinir ainsi un ensemble revient `a d´efinir les objets qui le constituent, c’est `a dire ses ´el´ements, mˆeme si cette
d´efinition n’est pas explicite : les ´el´ements d’un ensemble (et donc l’ensemble) seront g´en´eralement d´efinis par une
propri´et´e commune.
Notations :
nous noterons un ensemble ainsi : E={x| R(x)}, ce qui se lit :
hh Eest l’ensemble des objets xv´erifiant (tel que) la propri´et´es Rii ;
xEsignifie xappartient `a (ou est ´el´ement de) E;
est l’ensemble vide, c’est `a dire l’ensemble qui n’a aucun ´el´ement ;
un ensemble `a un ´el´ement est appel´e singleton et est not´e E={x}.
efinition II.1 ´
Etant donn´e deux ensembles Eet F, nous dirons que Eest inclus dans F(ou Eest une partie de
F,Fcontient E. . . ), ce que nous noterons EF, si tout ´el´ement de Eappartient `a F1.
Par convention, est inclus dans tous les ensembles.
Si EFet FE, alors E=F.
1Remarque culturelle : nous pouvons apercevoir ici pourquoi notre d´efinition d’un ensemble n’est pas suffisante. Par exemple, elle n’´evite
pas un c´el`ebre paradoxe du `a Bertrand Russel et qui repose sur la construction possible d’ensembles d’ensembles. Construisons l’ensemble
Ades ensembles qui ne sont pas inclus dans eux-mˆemes (noter que cela n’est possible que parce qu’un ensemble est ici `a la fois ensemble et
objet). Aest encore un ensemble, et si AA, par d´efinition de A,A /Aet de mˆeme si A /Aalors, toujours par d´efinition de A,AA.
Or, nous avons vu en logique que (pet (non p)) est toujours faux (tiers exclu). . .
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L’ensemble de tous les sous-ensemble de E(ensemble des parties de E) est not´e P(E).
L’assertion non (EF) se note E6⊂ F.
Exemples : P() = ;P({0,1}) = {∅,{0},{1},{0,1}}.
efinition II.2 D´efinissons les quantificateurs universels suivants, toujours de mani`ere intuitive :
qui se lit hh pour toutii ou hh quel que soitii ;
qui se lit hh il existe un . . .ii (sous-entendu au moins un . . . ) ;
!qui se lit hh il existe un unique. . .ii .
La d´efinition II.1 s’´ecrit alors, pour tous ensembles Eet F, de la fa¸con suivante :
(EF)(xE, x F).
Remarque importante : la lettre qui suit un quantificateur est muette, c’est `a dire que l’on peut la remplacer
par n’importe quel symbole (non encore utilis´e) sans rien changer au sens de l’assertion. Par exemple l’assertion
(xZ, x Q) est ´equivalente `a (toto Z, toto Q).
Proposition II.3 Soient E,Fet Gdes ensembles.
1. ∅ ⊂ E,EE.
2. Si EFet FG, alors EG.
D´emonstration :
1. La premi`ere partie est dans la d´efinition II.1, et la seconde est ´evidente.
2. R´edigeons ce raisonnement, afin de se familiariser avec la formalisation matematique : supposons que EF
et FG.
Soit xE.
Comme EF, d’apr`es la d´efinition II.1, xFet comme FG, le mˆeme argument montre que xG.
Nous venons d’´etablir que xE, x Get donc la d´efinition II.1 permet de conclure : EG. CQFD2
N´egation d’une phrase quantifi´ee : soient Eun ensemble et Pune propri´et´e que peut v´erifier les ´el´ements de E(ce
que nous noterons P(x)). Nous avons alors les ´equivalences suivantes, fondamentales pour la suite de notre expos´e :
(non (xE, P (x)) (xEtel que (non P(x))) ;
(non (xE, P (x)) (xEtel que (non P(x))).
II.2 Op´erations sur les parties d’un ensemble
Dans toute cette partie, Eest un ensemble.
efinition II.4 Soient A, B ∈ P(E). D´efinissons les parties de Esuivantes :
CE(A) = {xE|x /A}, compl´ementaire de Adans E, not´e ´egalement quelquefois A;
AB={xE|xAou xB}, union de Aet de B;
AB={xE|xAet xB}, intersection de Aet de B;
AB={xE|xAet x /B}, diff´erence de Aet de B.
Proposition II.5 Soient A, B, C ∈ P(E).
a) CE() = E;CE(E) = ;CE(CE(A)) = A.
b) est commutative : AB=BAet associative : A(BC) = (AB)C.
A∪ ∅ =A;AE=E; (AB=B)AB.
c) est commutative : AB=BAet associative : A(BC) = (AB)C.
A∩ ∅ =;AE=A; (AB=B)BA.
d) est distributive par rapport `a : (AB)C= (AC)(BC).
est distributive par rapport `a : (AB)C= (AC)(BC).
2CQFD signifie hh Ce Qu’il Fallait D´emontrerii et sert ainsi de conclusion abgr´eg´ee `a une d´emonstration bien ficel´ee. Les latinistes
pourront lui pr´ef´erer QED.
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D´emonstration : aucune de ces ´egalit´es d’ensembles ne posent de r´eelle difficult´e, si ce n’est justement comment
d´emontrer une ´egalit´e d’ensembles ? Nous allons nous appuyer `a nouveau sur la d´efinition II.1 et donc proc´eder par
double inclusion.
Par exemple, ´etablissons l’´egalit´e : () (AB)C= (AC)(BC).
Commen¸cons par montrer que (AB)C(AC)(BC) :
Soit x(AB)C; alors xABou xC.
1er cas : xAB. Alors xAet xB. Donc, comme AACet BBC, nous obtenons xACet
xBC. Finalement, x(AC)(BC).
2nd cas : xC. Comme CACet CBC,C(AC)(BC), d’o`u x(AC)(BC).
Dans tous les cas, x(AC)(BC). Ce qui prouve l’inclusion rechercee.
R´eciproquement, montrons que (AC)(BC)(AB)C:
Soit x(AC)(BC) ; alors x(AC) et x(BC).
1er cas : xC. Alors, comme C(AB)C,x(AB)C.
2nd cas : x6∈ C. Alors xACimplique que xA, et xBCque xB. Donc xAB, donc
x(AB)C.
Dans tous les cas, x(AB)C.L’inclusion r´eciproque est donc v´erifi´ee, et donc l’´egalit´e (*).
Les autres ´egalit´es sont laiss´es en exercice. ]]
efinition II.6 Soit P∈ P(P(E)).
Pest une partition de Esi et seulement si :
i) AP,A6=;
ii) AP, BP, (A6=B)(AB=);
iii) xE, APtelle que xA.
Exemples :
1. pour toute partie A∈ P(E), PA={A, CE(A)}, est une partition de E;
2. P1={{x} | xE}est une partition de E;
3. {R
,{0},R
+}est une partition de R.
Les op´erations ensemblistes et les connexions logiques sont ´etroitement li´ees. Montrons comment la conjonction, la
disjonction ainsi que la n´egation de propri´et´es portant sur les ´el´ements d’un ensemble peuvent s’interpr´eter en termes
ensemblistes : soient Pet Qdeux propri´et´es portant sur les ´el´ements de E,
{xE|P(x) et Q(x)}={xE|P(x)}∩{xE|Q(x)}
{xE|P(x) ou Q(x)}={xE|P(x)}∪{xE|Q(x)}
{xE|non P(x)}=CE({xE|P(x)}).
Proposition II.7 Soient Pet Qdeux propri´et´es sur les ´el´ements de E.
Il y a ´equivalence entre les ´enonc´es :
(i) xE, (P(x)Q(x)) ;
(ii) {xE|P(x)} ⊂ {xE|Q(x)}.
D´emonstration : commen¸cons par montrer que (i)(ii). Supposons donc que xE, (P(x)Q(x)).
Soit x∈ {y|P(y)}. Alors xv´erifie la propri´et´e P, donc l’hypoth`ese (i) montre que xerifie la propri´et´e Q:
x∈ {yE|Q(y)}.Ceci prouve que {xE|P(x)} ⊂ {xE|Q(x)}, et ´etablit la premi`ere implication.
D´emontrons maintenant (ii)(i) :
supposons que {xE|P(x)} ⊂ {xE|Q(x)}.
Soit xEv´erifiant P. Alors x∈ {yE|P(y)}et donc par l’hypoth`ese (ii), x∈ {yE|Q(y)}, donc
xv´erifie Q.L’implication r´eciproque est v´erifi´ee. CQFD
Exercice 2 Soient Eun ensemble et A, B ∈ P(E)
1. Montrer que CE(AB) = CE(A)CE(B) ;
2. Montrer que (AB=AC)(BAC).
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Exercice 3 Soient E,Fet Gdes ensembles. D´emontrer que :
a. EF=EEF.
b. EF=EFE.
c. (EF)(EG) = E(FG).
On rappelle que EF={xE|x /F}.
En cherchant ces exercices, ainsi que les propositions laiss´ees en exercice, mettre l’accent d`es `a present sur la rigueur
du raisonnement bien sˆur, mais aussi de la r´edaction.
II.3 Ensembles Produits
Soient Eet Fdes ensembles.
efinition II.8 Si x, y E, le couple (x, y)est le sous-ensemble de E
(x, y) = {{x},{x, y}}.
Cette d´efinition permet d’´etablir en ordre entre xet yqui n’existe pas dans la paire {x, y}: (x, y)6= (y, x).
Proposition II.9 Soient x, x0, y, y0E.
Il y a ´equivalence entre les ´enonc´es :
(i) (x, y) = (x0, y0) ;
(ii) x=x0et y=y0.
D´emonstration : (ii)(i) est ´evident.
D´emontrons la r´eciproque (i)(ii) : supposons que (x, y) = (x0, y0), c’est `a dire {{x},{x, y}} ={{x0},{x0, y0}}.
Nous allons raisonner par l’absurde : supposons que x6=x0.
Alors {x} 6={x0}donc n´ecessairement, {x}={x0, y0}. Mais dans ce cas, {x}={x0, y0}est un singleton, donc
x0=y0, et par suite {x0}={x0, y0}={x}: contradiction.
Il en r´esulte que x=x0, donc {x}={x0}puis {x0, y0}={x, y}et finalement y=y0. CQFD
efinition II.10 Le produit cart´esien de Epar F(ou ensemble produit) est :
E×F={(x, y)|xEet yF}.
Notation : E2=E×E.
Proposition II.11 Pour tous x, y E,
((x, y)E×F)(xEet yF).
D´emonstration : () est ´evident.
() : Soit (x, y)E×F. Par d´efinition (II.10) du produit cat´esien, il existe uEet vFtel que (x, y) = (u, v).
Mais la proposition II.9 montre alors que x=uet y=v, donc en particulier xEet yF.CQFD
Proposition II.12 Pour tous ensembles E,F,G,H, nous avons :
1. (E×F=)(E=ou F=) ;
2. (E×F=F×E)(E=ou F=ou E=F) ;
3. (E×F)(E×G) = E×(FG) ;
4. (E×F)(G×F) = (EG)×F;
5. (E×F)(G×H) = (EG)×(FH).
D´emonstration : nous admettrons 1. et 2. Les trois ´egalit´es suivantes sont laiss´ees en exercice. ]]
ATTENTION : en g´en´eral, (E×F)(G×H)6= (EG)×(FH).
Par exemple, E=F={1}et G=H={−1}, ou encore E=F= [0,1], G=H= [2,3], donnent des contre-
exemples. Faire des dessins pour s’en convaincre, avant d’´ecrire la d´emonstration.
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