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ל ו פ ל י פPilpoul
éthique / Reflexion suR la fonction de la loi
la même part qu’un Cohen Gadol, un
Grand Prêtre? C’est à ce sujet que le
verset vient nous dire « que l’homme
fera et vivra avec ». Le verset ne parle ni
d’un Cohen, ni d’un Lévy, ni d’un Israël
mais dit l’homme, ce qui nous enseigne
que même un non-juif qui s’investirait
dans la Torah pourrait avoir la même
part qu’un Cohen Gadol, un Grand
Prêtre. »
Il ressort de ces deux enseignements, de
celui de Rabbi Shimon bar Yo’haï et de
celui de Rabbi Méïr, qu’il y a une diffé-
rence de fond entre la notion exprimée
par le terme Adam, et la notion expri-
mée par le terme HaAdam.
Adam, homme, correspondrait stricte-
ment à Israël ; HaAdam, l’homme, cor-
respondrait à tout homme, quel qu’il
soit, juif ou non-juif.
Mais quelle est la différence de fond
entre les deux termes ?
II. Quelle différence de sens
y a-t-il entre le terme Adam,
homme, et le terme HaAdam,
l’homme ?
Béréshit 5,1 :
םדא ארב םויב םדא תודלות רפס הז
.ותוא השע םיקלא תומדב
« Voici le livre des engendrements
d’Adam, le jour de la création d’Adam à
la ressemblance de D. il le t. »
Rav Shimshon Raphaël Hirsch dans son
commentaire sur la Torah relève deux
éléments fondamentaux, premièrement
que dès le jour de sa création l’homme,
ou plus précisément Adam, ‘homme’,
est créé à la ressemblance de D. et deu-
xièmement que toutes les dérivées de
cette création ]Toledot, engendrements,
signie aussi dérivées] sont le dévelop-
pement de l’homme créé à la ressem-
blance de D..
Expliquons-nous.
Le jour où il fut créé, à la ressemblance
de D. Il le t. On a tendance à penser
que l’homme est une chose mal chue,
assez proche somme toute de la barba-
rie mais qu’avec l’évolution il se parfera
et deviendra enn ‘humain’. Le verset
tranche et nous enseigne : le jour où il
fut créé, il le fut à la ressemblance de D. .
Le second enseignement, corollaire du
premier, est que si tu vois quelqu’un agir
de manière qui dépasse ou outrepasse
tes concepts, le verset nous dirait qu’il
ne se disqualierait pas pour autant
d’être appelé ‘homme’, toutes les déri-
vées, toutes les actions de celui appelé
‘homme’ sont des actions de l’être créé
à la ressemblance de D. . Hirsch relève
que le mot Toledot, ‘générations’, est
écrit sous la forme défectueuse, c’est-à-
dire sans un second Vav comme marque
du pluriel, pour nous dire que même
une génération défectueuse est appelée
‘à la ressemblance de D.’.
Nous ne sommes pas des entités qui
parfois peuvent avoir un bon point qui
les qualierait d’humain et qui pour-
raient parfois perdre ce bonus. Tout ça
c’est Adam, homme, dans sa capacité
de grandeur, d’atteindre la prophétie, et
dans sa capacité de déchéance et d’obs-
curité.
Mais peut-être serait-ce possible de do-
mestiquer cette masse informe ? Trou-
ver une solution à cette malédiction
d’être homme ? Etre assuré une fois
pour toute de ne pas fauter et d’être
bien et présentable devant notre Créa-
teur ?
D’autre part, fait remarquer Hirsch, dès
qu’il fut créé, D. parle à Adam. Dès qu’il
est créé, il est à la ressemblance de D. .
A la fois Adam est en équilibre instable,
comme nous venons de le dénir, et à la
fois, à cet instant même, il est prophète.
Mais serait-ce possible de le domesti-
quer, de cadrer cet être improbable ?
Rabbi Mena’hem Mendel de Vitebsk re-
lève dans son livre Peri HaArets que
l’idolâtrie est nommée fréquemment
םתארי, ‘leurs craintes’, dans les ensei-
gnements des ‘Ha’hamim car les ido-
lâtres aimeraient être dans une crainte
constante.
Rav Shimshon Raphael Hirsch (1808-1888)
Adam, c’est l’homme créé à la ressem-
blance de D., il est ce qu’il est, capable
du meilleur comme du pire.
Le terme HaAdam introduit une nou-
velle dimension mise en exergue par
l’article déni.
De même, l’humanité se crée des sys-
tèmes, des modèles, pour essayer de se
domestiquer.
Nous pouvons maintenant rendre
compte de la différence de sens entre le
terme Adam, homme, et le terme HaA-
dam, l’homme.
L’article déni du terme ‘l’homme’
montre qu’il se réfère à autre chose qu’à
lui-même, à une notion extérieure, à un
critère d’humanité abstrait.
Homme, Adam, est ce qu’il est par lui-
même sui generis créé à la ressem-
blance de D..
L’homme, comme nous le voyons dans
la Guemara du Traité Avoda Zara, re-
présentera toute l’humanité, et même
les populations idolâtres, car parler
d’homme en y mettant un article déni
est le premier glissement vers une tota-
lisation, une volonté de systématiser, de
globaliser.
2 Lorsque Rabbi Méïr complimente le non-juif qui s’investit dans la Torah, il s’agit qu’il s’investit dans les sept commandements noah’ides et non des commandements
sinaïques (Tossephot Avoda Zara 3a).
l’humanité se crée des systèmes, des modèles, pour essayer de se
domestiquer.