LETTRE
DROIT PUBLIC DES AFFAIRES
& DROIT DE L’IMMOBILIER
Octobre Décembre 2013
AMENAGEMENT
Du nouveau pour les SPL / SPLA et le "in house" (CE, 6 novembre 2013, Commune de
Marsannay-la-Côte, n° 365079)
URBANISME
L’intérêt à agir des entreprises concurrentes (CE, 13 novembre 2013, société EURL Les
Magnolias, n° 361.350)
ACTION FONCIERE
La Cour de Cassation rappelle les conditions d’indemnisation de l’exproprié lorsqu’à
la suite de la privation de base légale de l’ordonnance d’expropriation, la restitution
s’avère impossible en raison de la réalisation d’installations d’utilité publique (Cass.
Civ. 3e, 4 décembre 2013, Département de la Haute-Loire, n°12-28.919)
CONTRATS PUBLICS
IMMOBILIER
L’erreur du preneur sur l’environnement concurrentiel des locaux loués (Cass. 3ème
civ. 2 octobre 2013, n° 12-13.302)
CONSTRUCTION
Maîtres d'ouvrage, méfiez vous du décompte néral et définitif ! L’intervention du
DGD a pour conséquence d’interdire au maître de l’ouvrage toute réclamation à
l’encontre du maître d’œuvre (CE, 6 nov. 2013, Région d’Auvergne : n° 361837)
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AMENAGEMENT
Du nouveau pour les SPL / SPLA et le "in
house" (CE, 6 novembre 2013,
Commune de Marsannay-la-Côte,
365079)
Rappelons à titre liminaire que la loi
2005-809 du 20 juillet 2005 a
expressément dispensé d’obligation de
publicité et de mise en concurrence
préalable, la passation des
« concessions d’aménagement
conclues entre le concédant et un
aménageur sur lequel il exerce un
contrôle analogue à celui qu’il exerce
sur ses propres services et qui réalise
l’essentiel de ses activités avec lui, ou, le
cas échéant, les autres personnes
publiques qui le contrôle » (C. urb. art. L.
300-5-2). Le législateur a par la suite créé
les SPLA puis les SPL, qui sont des sociétés
à capital exclusivement public, qui
exercent exclusivement leur activité sur
le territoire et pour le compte de leurs
actionnaires. La loi du 20 juillet 2005 a
ainsi retranscrit en droit français
l’exception jurisprudentielle dite du « In
house », consacrée par la Cour de
Justice de l’Union Européenne (CJUE) au
principe de publicité et mise en
concurrence préalable à la passation
d’un marché ou d’une concession de
travaux au sens du droit européen..
Or, l’appréciation du contrôle analogue
qui constitue une des deux conditions
à la caractérisation de l’exception « In
house » - peut poser difficultés dans
certains cas de figure.
Dans l’affaire ici jugée par le Conseil
d’Etat, il s’agissait d’apprécier à quelles
conditions lexistence d’un tel contrôle
pouvait être caractérisé entre une SPLA
et une collectivité extrêmement
minoritaire au capital et étant ainsi
membre de l’assemblée spéciale de la
SPLA. En l’espèce, la commune de
Marsannay-la-Côte, membre de
l’assemblée spéciale des actionnaires,
ne détenait qu’1,076 % du capital
social de la SPLA de l’agglomération
dijonnaise, avec laquelle elle avait
conclu une concession
d’aménagement sans avoir suivi au
préalable une procédure de publicité
et de mise en concurrence. Des
requérants avaient alors contesté la
délibération par laquelle le conseil
municipal avait décidé de conclure la
concession d’aménagement avec la
SPLA, ainsi que la décision de rejet du
recours gracieux contre cette
délibération. Le Tribunal administratif
de Dijon avait alors rejeté la requête.
La Cour administrative d’appel de
Lyon, quant à elle, avait accueilli le
recours. La Commune et la SPLA se
sont donc pourvues en cassation.
Dans la lignée de la jurisprudence
ECONORD SPA de la CJUE (CJUE, 29
novembre 2012, C-182/11, Econord
SpA), le Conseil d’Etat considère qu’il
résulte des dispositions de l’article L.
300-5-2 « qu’une collectivité territoriale
peut concéder la réalisation
d’opérations d’aménagement à une
société publique locale
d’aménagement, créée sur le
fondement de l’article L. 327-1 du
Code de l’urbanisme et qui ne peut
dès lors exercer son activité que pour
le compte de ses actionnaires et sur
leur territoire, sans publicité ni mise en
concurrence préalables, à la
condition que cette collectivité
exerce sur cette société un contrôle
IMAGINATION
analogue à celui qu’elle exerce sur ses
propres services ; que pour être
regardée comme exerçant un tel
contrôle sur cette société,
conjointement avec la ou les autres
personnes publiques également
actionnaires, cette collectivité doit
participer non seulement à son capital
mais également aux organes de
direction de cette société ».
Après avoir relevé :
que la commune de
Marsannay-la-Côte,
détentrice d’1,076 % du
capital de la SPLA, « ne
dispose pas d’un représentant
propre au sein de son conseil
d’administration alors que
cette instance, principal
organe de direction de cette
société, approuve les
concessions d’aménagement
et n’y a voix délibérative que
de façon indirecte, par
l’intermédiaire d’un
représentant commun des
petits actionnaires »
qu’elle « ne peut seule,
requérir l’inscription d’un
projet à l’ordre du jour » selon
les statuts de la société,
et qu’aucun des organes au
sein desquels elle est
directement représentée ne
disposent en matière
d’exécution des concessions
d’aménagement confiées à
cette société d’un pouvoir
décisionnaire,
il en déduit que la collectivité
n’exerçait donc pas un contrôle
analogue sur la SPLA. La simple
participation au capital d’une SPL ou
d’une SPLA ne suffit donc pas à
caractériser l’existence d’un contrôle
analogue. La personne publique
membre d’une telle société doit
également participer directement au
conseil d’administration.
URBANISME
L’intérêt à agir des entreprises
concurrentes (CE, 13 novembre 2013,
société EURL Les Magnolias, n° 361.350)
Rappelons qu’en principe, une
entreprise n’a pas, en qualité de
concurrent, d’intérêt à agir à
l’encontre d’une autorisation
d’urbanisme délivrée pour l’édification
d’un local commercial, même si celui-
ci est situé à proximité (CE, 7 juillet 1998,
Mme Carbo et M. Carré, n° 101.501).
Cependant, la Haute Juridiction a
tempéré ce principe en consacrant,
dans une décision du 22 février 2002,
une exception : l’hypothèse les
caractéristiques de la construction
envisagée sont de nature à affecter
par elles-mêmes les conditions
d’exploitation d’un établissement
commercial (CE, 22 février 2002,
société France Quick SA, n° 216.088).
Ainsi, une société intentant un recours
contre l’autorisation d’urbanisme
délivrée à son concurrent doit
démontrer en quoi le projet est
susceptible d'affecter les conditions
d'exploitation de son commerce et ne
peut se borner à invoquer la seule
concurrence commerciale (CE, 13
mars 1987, société albigeoise
spectacles, 55.525) ni à faire état du
simple accroissement du flux de
circulation induit par la nouvelle
construction (CAA Douai, 27 juin 2013,
société Auchan France, n° 12DA00354).
RIGUEUR
La décision commentée, rendue le 13
novembre 2013, s’inscrit dans la lignée
de cette jurisprudence puisque le
Conseil d’Etat a expressément rappe
le principe selon lequel la simple qualité
de concurrent ne confère pas d’intérêt
à agir et son exception tenant à
l’atteinte portée par le projet aux
conditions d’exploitation de
l’établissement commercial
concurrent.
De plus, par cette décision, la Cour
Suprême illustre cette exception qui est
rarement retenue par le juge
administratif.
En effet, dans cette affaire, le Conseil
d’Etat a considéque la circonstance
que le projet était de nature à
comporter des risques relatifs au plus
grand nombre de personnes à évacuer
en cas de crue est en relation avec les
conditions d'exploitation commerciale
de l'établissement géré par la société
requérante et lui confère dès lors un
intérêt à agir.
ACTION FONCIERE
La Cour de Cassation rappelle les
conditions d’indemnisation de
l’exproprié lorsqu’à la suite de la
privation de base gale de
l’ordonnance d’expropriation, la
restitution s’avère impossible en raison
de la réalisation d’installations d’utilité
publique (Cass. Civ. 3e, 4 décembre
2013, Département de la Haute-Loire,
n°12-28.919)
Conformément au Code de
l'expropriation pour cause d'utilité
publique (article L.12-5), lorsque la
déclaration d'utilité publique ou l'arrêté
de cessibilité est annulé par une
décision définitive du juge administratif,
tout exproprié peut faire constater par
le juge de l'expropriation que
l'ordonnance portant transfert de
propriété est dépourvue de base
légale.
Une fois saisi, le juge de l’expropriation
constate, par jugement, l'absence de
base légale du transfert de propriété et
en précise les conséquences de droit :
« a) Si le bien exproprié n'est pas en
état d'être restitué, l'action de
l'exproprié se résout en dommages et
intérêts » ;
« b) S'il peut l'être, le juge désigne
chaque immeuble ou fraction
d'immeuble dont la propriété est
restituée ».
La première hypothèse est
généralement mise en œuvre par le
juge lorsque les biens expropriés ont
été démolis et que des constructions
ont été réalisées à leur lieu et place.
C’est ce cas de figure qui s’est
présenté dans l’affaire objet du présent
commentaire. Ainsi, au cas d’espèce,
l’expropriation d’une parcelle afin de
réaliser un projet d’agrandissement
d’un terrain de sport s’est avérée,
après annulation de la déclaration
d’utilité publique et de l’arrêté de
cessibilité par le juge administratif,
dépourvue de base légale.
Néanmoins, pour la Cour d’appel,
approuvée par la Cour de Cassation,
la circonstance que ces installations
étaient affectés au public et revêtaient
par suite une utilité publique
incontestable, rendait la démolition et
la rétrocession impossible.
L’action devait donc se résoudre en
dommages et intérêts. C’est sur ce
DISPONIBILITE
point que l’arrêt d’appel est censuré
par la Cour de Cassation pour erreur
de droit. En effet, c’est à tord que les
juges du fond qui avaient considéré
que la somme proposée par
l’expropriant était satisfactoire
« lorsqu'on la rapporte à celles tirées de
ventes de parcelles voisines présentant
les mêmes caractéristiques ».
La haute juridiction rappelle à cette
occasion le principe d’indemnisation
dégagé en 2010 (Civ. 3e, 17 novembre
2010, M. et Mme X, 09-16.797) et
récemment appliqué par certaines
juridictions du fond (Cour d’appel
Rennes, 27 septembre 2013, S.E.L.A,
42, 12/04119), selon lequel « un bien
irrégulièrement exproprié, qui ne peut
être restitué en nature, entraîne pour
l'exproprié le droit à des dommages-
intérêts correspondant à la valeur
actuelle du bien, sous la seule
déduction de l'indemnité principale de
dépossession perçue au moment de
l'expropriation majorée des intérêts
depuis son versement ».
CONTRATS PUBLICS
Les seuils de la procédure formalisée
ont été légèrement relevés par le
règlement n°1336/2013 de la
Commission européenne du 13
décembre 2013, publié au Journal
officiel de l’Union européenne du 14
décembre 2013. Ils sont désormais de :
5.186.000 HT pour les
marchés de travaux ;
134.000 HT pour les marchés
de fournitures et de services
de l’État ;
207.000 HT pour les marchés
de fournitures et de services
des collectivités territoriales
414.000 HT pour les marchés
de fournitures et de services
des entités adjudicatrices et
pour les marchés de
fournitures et de services
passés dans le domaine de la
défense ou de la sécurité.
Quelques précisions relatives au référé
contractuel...
Par deux arrêts récents, le Conseil d’Etat
est venu limité la portée du référé
contractuel s’agissant des délégations
de service public et des marchés à
procédure adaptée.
Ces deux contrats ont en commun que
le pouvoir adjudicateur n’est pas soumis
à une obligation d’information
préalable des candidats avant la
signature du contrat. Le pouvoir
adjudicateur n’est donc pas soumis au
respect d’un délai dit de « stand still »,
prévu à l’article 80 du code des
marchés publics.
Or, la nullité d’un contrat ne peut être
prononcée par le juge des référés
contractuels que dans trois hypothèses :
1/soit le contrat n’a fait l’objet d’aucune
publicité ni mise en concurrence, alors
qu’il le devait,
2/ soit le pouvoir adjudicateur a
méconnu le délai dit de « stand still » de
l’article 80 du code des marchés
publics, sous réserve de la réunion de
deux autres conditions (la
méconnaissance de ce délai a privé le
demandeur d’exercer un recours en
référé précontractuel et les obligations
de publicité te de mise en concurrence
auxquelles la passation du contrat est
soumise ont été méconnues d’une
manière affectant les chances de
RIGUEUR
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