Gérard Debionne lundi 18 mars 2002
Les Points de Lagrange
A la fin du 17eme siècle Newton avait retrouvé par une démarche purement
mathématique les lois du mouvement des planètes formulées empiriquement
par J. Kepler. Autrement dit, Newton avait parfaitement résolu le problème de
deux corps en interaction. Il pouvait sembler évident à l'époque que l'on
saurait rapidement étendre cette théorie à un nombre quelconque de corps en
interaction gravitationnelle. On dut rapidement déchanter… Au delà de deux
corps, le problème sous sa forme générale est insoluble autrement que par des
méthodes approchées …
Toutefois, dans un mémoire à l'Académie des Sciences daté de 1772,
Lagrange démontrait dans un cas particulier tout à fait intéressant un résultat
général sur le problème de 3 corps sans faire d'hypothèse sur les masses
relatives des corps.
Par la suite, ce résultat fut étendu au cas où le troisième corps a une masse
négligeable par rapport aux deux premiers.
C'est de ces configurations particulières des corps célestes que traite cet
exposé.
Quasar 95
SOMMAIRE
1. Introduction.......................................................................................................................... 3
2. La mécanique dans un référentiel non galiléen................................................................... 3
3. Le Problème "restreint" de 3 corps...................................................................................... 5
3.1 Le problème traité par L. Euler..............................................................................................................................5
3.2 Cas général où les 3 corps ne sont pas alignés :..................................................................................................7
3.3 Raffinement à la théorie:.........................................................................................................................................9
3.4 Illustration sur deux cas de figures :......................................................................................................................9
3.4.1 Les points L1,L2,L3 du couple Soleil / Jupiter...............................................................................................9
3.4.2 Les points L4, L5 du couple Soleil / Jupiter....................................................................................................9
3.4.3 Le point L1 du couple Soleil / Terre:..............................................................................................................10
4. Le Problème des 3 corps "quelconques" traité par Lagrange............................................ 10
5. ANNEXES MATHEMATIQUES :.................................................................................. 11
5.1 Résolution de l'équation du problème d'Euler:..................................................................................................11
5.1.1 Mise en équation pour le point L2...................................................................................................................11
5.1.2 Résolution de l'équation:...................................................................................................................................11
5.1.3 Solution approchée pour le point L2:..............................................................................................................12
5.2 Le problème général de 3 corps...........................................................................................................................13
5.3 La force de Coriolis:...............................................................................................................................................14
5.4 L'intégrale de Jacobi...............................................................................................................................................15
5.5 Etude de la stabilité des points de Lagrange:.....................................................................................................17
5.5.1 Mise en équations ..............................................................................................................................................17
5.5.2 Discussion de la stabilité pour les points L4, L5 :..........................................................................................18
5.5.3 Discussion pour les points L1, L2, L3 :............................................................................................................19
1. Introduction
On se propose de montrer que le problème de trois corps, bien qu'insoluble dans le cas général
est susceptible d'être résolu dans des cas particuliers importants puisque ces cas se rencontrent
dans le système solaire.
Le premier de ces cas est celui de trois corps de masses quelconques et formant un triangle
équilatéral. Dans ce cas, Lagrange a montré que le triangle reste équilatéral même si les
orbites ne sont pas parfaitement circulaires.
Le second cas suppose que le troisième corps a une masse négligeable par rapport aux deux
autres. On montre dans ce cas qu'il existe pour ce troisième corps cinq positions d'équilibres
appelées "points de Lagrange".
Dans les deux cas, la théorie du mouvement de ces corps fait intervenir un référentiel "non
galiléen" qui tourne avec les corps. Pour traiter le problème, il faut donc écrire les équations
de la mécanique sous la forme :
airecomplémentForceNewtondeAttractiononAccéleratiMasse ___*
+
=
La force complémentaire étant due à la rotation du référentiel. Une première section est
consacrée au rappel des équations de la mécanique dans un référentiel non galiléen.
Avant d'entrer dans les détails techniques il importe de souligner le génie extraordinaire de
Lagrange. En effet, lorsque Lagrange envisage puis démontre la possibilité de configuration
d'équilibre particulière dans le système solaire, nous sommes en 1772, c'est à dire 29 ans
avant que Piazzi n'ait découvert la première des petites planète (Céres)… Ce n'est que bien
plus tard que les prédictions théoriques de Lagrange trouveront leur application dans le
comportement de groupes de planètes (les Troyens) qui précèdent et suivent Jupiter à ±60° de
longitudes.
Bravo donc Monsieur Lagrange…
2. La mécanique dans un référentiel non galiléen
Dans un référentiel galiléen, c'est à dire fixe ou en
translation uniforme, les équations de la
mécaniques appliquées à un corps de masse M
soumis à une force F prennent la forme simple :
M.Γ = F
Soit encore en appelant R le vecteur position du
corps et en exprimant l'accélération
Γ
comme la
dérivée seconde de R
M.d²R/dt² = F
L'équation précédente est une "équation différentielle" dont la fonction inconnue est la
position R(t) du corps.
Généralement, il est possible d'écrire l'accélération d²R/dt² comme la somme de deux termes,
le premier représente une accélération dans un repère local, le second est un terme plus ou
moins compliqué que nous noterons provisoirement A. L'équation précédente s'écrit donc :
M.{ (d²R/dt² )local + A} = F
En faisant passer le terme A à droite, on obtient :
o
R
x
yF
M.(d²R/dt² )local = F – M.A
Tout se passe donc comme si le fait d'avoir utilisé un repère "non galiléen" ajoutait à la force
réelle F une "force fictive" M.A
Prenons un exemple
Lorsque vous vous promenez en voiture en ligne droite et à vitesse constante, votre voiture
constitue un référentiel galiléen. Dans votre voiture, vous être immobile parce que la somme
des 2 forces qui agissent sur vous est nulle. Rappelons que ces deux forces sont d'une part la
pesanteur et d'autre part les ressorts de votre siège. Prenez maintenant un virage à vive allure,
supposons aussi qu'il fasse nuit... La voiture suivant une trajectoire non rectiligne, les lois
simples relatives aux référentiels galiléens ne s'appliquent plus. Par ailleurs, demandons nous
comment le passager interprète la situation alors qu'il ne voit pas ce qui se passe à l'extérieur.
Tout naturellement, il dit:
Une force non négligeable m'attire et me plaque sur la portière.
En fait , cette force n'est pas réelle mais fictive et est due au référentiel local en mouvement
non galiléen. cette force n'est autre que le terme de l'équation ci-dessus qui est passé du
membre de gauche à celui de droite. Dans le référentiel de la voiture, tout ce passe comme s'il
y avait une force et le passager se déplace effectivement sur sa banquette. Ce principe étant
acquis, retournons aux équations qui régissent le mouvement des planètes:
Application à l'astronomie :
Dans ce qui suit, nous allons considérer le cas des 3 corps suivants:
1) Le soleil. Sa masse est prépondérantes par rapport à tous le reste du système solaire.
2) Une planète de masse importante bien que négligeable par rapport au soleil.
3) Un corps qui aura suivant les cas soit une masse comparable au second corps soit une
masse négligeable.
Pour étudier le mouvement des planètes, nous allons nous placer dans un référentiel qui
tourne avec le second corps, c'est à dire la planète la plus grosse. Tout d'abord, exprimons la
force fictive dans ce référentiel tournant.
Que se passe-t-il si le référentiel tourne, disons à vitesse constante ? Tout se passe alors
comme si nous habitions sur un "manège tournant" pour enfants et que nous cherchions à y
réécrire les lois de la mécanique. En pratique, la "force induite par le référentiel tournant se
compose de deux termes. Le premier est bien connu, il s'agit de la force dite "centrifuge" et
que nous avons déjà rencontrée plus haut dans un virage. Son expression est bien connue. On
l'écrit souvent pour un corps de masse M:
Fa = M.V2/R .
Cette écriture semble simple mais peut prêter à confusion. dans la suite, nous ferons plutôt
référence à la "vitesse angulaire", c'est à dire l'angle ω parcouru par seconde. Il s'agit ici de la
vitesse de rotation du repère. La vitesse est donnée pas V=ω.R. La force centrifuge est donc
donnée par
Fa = M.R.ω2.u
Bien entendu, cette force se représente par un vecteur dirigé suivant la direction radiale u pour
exprimer son caractère dirigé.
La seconde force est plus subtile et moins bien connue, on l'appelle "Force de Coriolis".
Cette force ne s'exerce dans le référentiel local que si le corps se déplace , donc a une certaine
vitesse dans ce référentiel. Pour reprendre l'exemple de la voiture dans le virage, tant que je
reste immobile sur mon siège (donc avec une vitesse nulle), cette force ne s'exerce pas.
L'expression de cette force est un peu particulier dans la mesure ou elle fait intervenir à la fois
la vitesse angulaire du référentiel local, la vitesse relative du corps dans ce référentiel mais
aussi et surtout l'angle que fait le vecteur vitesse avec l'axe de rotation du repère.
Cette force s'exprime vectoriellement sous la forme :
ω
r
r
r
=rcor VMF..2
On notera que la rotation ω est une grandeur "dirigée" dont la direction est précisément l'axe
de rotation. On trouvera en annexe B quelques illustrations de la manifestation de cette "force
fictive"
Dans le cas du système solaire, les forces qui s'exercent sur un corps sont d'origine
gravitationnelle. Le dessin ci-dessus ne représente donc qu'imparfaitement la réalité dans la
mesure où:
Le centre "o" n'existe pas matériellement.
En vertu de l'égalité de l'action et de la réaction, Le corps attiré exerce aussi une attraction
sur le corps attracteur.
3. Le Problème "restreint" de 3 corps.
On présente dans cette section d'abord un problème unidimentionnel traité par Léonard Euler puis sa
généralisation à deux dimensions traitée par Lagrange.
3.1 Le problème traité par L. Euler1
Ce problème qui a été traité par Euler consiste à rechercher les positions d'équilibre des 3
corps lorsqu'ils sont alignés comme ci-dessous.
Considérons donc la situation dans laquelle les 3 corps sont alignés et recherchons s'il existe
une position d'équilibre. Dans les équations générales données ci-dessus et détaillées en
section 3.2, on se place donc sur l'axe ox, autrement dit, on prend y=0. De même, puisqu'on
recherche une solution dynamique, mais statique dans le référentiel tournant, on annule toutes
les dérivées. Il reste alors pour le troisième corps supposé petit, la force centrifuge et
l'attraction des deux corps principaux:
M3 .x3 . ω2 = G. M3*(M1/(x3-x1)2 - M2/(x2-x3)2)(1)
1 Léonard Euler (1707 -1787) et Joseph Louis de Lagrange (1736 – 1813) dominent de leurs statures
toutes les mathématiques du 18ème siècle.
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