Les complexes I Supposé connu, admis C est un ensemble contenant R, et muni des lois de composition interne + et qui prolongent les lois + et usuelles sur R. On suppose connues les règles de calcul : + et sont commutatives, associatives. est distributive sur +. 0 est neutre pour +. 1 est neutre pour . Tout élément x de C est symétrisable pour +, son symétrique est noté x (opposé) Tout élément x de C* est symétrisable pour , son symétrique est noté x 1 (inverse) Il y a dans C un élément i tel que i i 1 Tout complexe z C s’écrit de manière unique sous la forme z a i b , où a, b R (écriture algébrique). a est la partie réelle de z ( Re( z ) ), et b sa partie imaginaire ( Im( z ) ). (Les six premières règles sont communes à R et C, et définissent un corps commutatif) Interprétation graphique : Soit P un plan muni d’un repère orthonormé R (O, i , j ) . On peut mettre P en bijection avec C en associant à tout point M de P le complexe z x iy , où ( x, y ) est le couple de coordonnées de M dans R. Ce complexe est l’affixe de M. On parle alors du plan complexe. II Conjugaison et module Soit z C . Alors z s’écrit de manière unique z x iy , avec ( x, y ) R 2 (c'est-à-dire x Re( z ), y Im( z ) ) Le module de z est, par définition, z x 2 y 2 Remarque : si z R , alors z x 2 y 2 x 2 x . Le conjugué de z est, par définition, z x iy z x iy y z i O -y 1 x z x iy z : distance de O à z ; z : symétrique de z par rapport à l’axe réel. Propriétés : z z zR z z z iR z z z z' z z' zz Re( z ) 2 Re( z ) z z zz , d' où 2 zz ' z z ' zz 2i Im( z ) z Im( z ) 1 z 2 z z zz ' z z ' si z 0, zz ' zz ' z z ' z z ' 2 2 2 1 1 z z z z ' z z ' (inégalité triangula ire) Démonstration du dernier point : 2 2 2 z z ' z z 'z z ' zz z ' z z z ' z ' z ' z z ' z ' z z z ' Et z z ' z 2 z z ' z ' . 2 2 2 Or, z ' z z z ' zz ' zz ' 2 Re( z z ') 2 z z ' 2 z z ' Donc z z ' z z ' , d’où l’inégalité voulue. 2 2 Conséquence : le module d’un complexe a les propriétés suivantes : z C , z R z C , z 0 z 0 z, z ' C , zz ' z z ' z, z ' C , z z ' z z ' n n k 1 k 1 z1 , z 2 ,...z n C , z k z k z, z ' C , z z ' z z ' z z ' III Exponentielle complexe Définition : On note U z C, z 1 (c’est le "cercle unité") Pour R , on pose e i cos i sin . Interprétation géométrique : On oriente C de sorte que le repère naturel (0,1, i ) soit direct. e i est l’unique point M du cercle unité tel qu’une mesure de l’angle orienté (Ox, OM ) soit . Propriétés : e i 1 e i 1 2Z e i ( ') e i e i ' Proposition : Tout complexe de module 1 s’écrit sous la forme z e i . Démonstration : z a ib , où a, b R . z 1. Donc a 2 b 2 1 . Donc a 2 1, soit a [1,1] . Il existe donc R tel que cos a . Alors b 2 1 a 2 1 cos 2 sin 2 Donc : Si b sin , alors a cos et b sin , soit z e i . Si b sin , alors a cos( ) et b sin( ) , soit z e i . Conséquence : L’application : R C est un morphisme de groupes de (R , ) dans (C *,) , dont le ei noyau est 2Z et l’image U. Autres formules : n Z , (e i ) n e ni (formule de Moivre). (Démonstration par récurrence pour N, puis pour Z avec m n ) e i e i e i e i , sin (formule d’Euler) cos 2 2i Argument d’un complexe – module. Proposition : Soit z C * , soit z . (1) Il existe R tel que z e i . Un tel réel est un argument de z. (2) Si 0 est un argument de z, alors l’ensemble des arguments de z est l’ensemble 0 2k , k Z . (3) z admet un unique argument dans , , c’est l’argument principal de z, noté Arg ( z ) Démonstration : z z z 1. (1) est un complexe de module 1 : z 0 , donc 0 et Il s’écrit donc sous la forme e i . (2) Soit 0 tel que z e i0 , soit R . On a les équivalences : z e i e i e i 0 e i ( 0 ) 1 0 2Z , d’où le résultat. (3) Soit 0 un argument de z. Les autres arguments sont les 0 2k , k Z . On a : 0 2k 0 2k 2k 0 2k 2k 0 2(k 1) 0 k 1 2 k E 0 2 D’où l’existence et l’unicité. k Propriétés (pour z 0 ) : Arg( zz ' ) Arg( z) Arg( z' ) 2 . En effet, zz ' e i ' e i ' ' e i ( ') . 1 Arg Arg ( z ) Arg ( z ) 2 z Arg z Arg( z) 2 IV Racine n-ième de l’unité A) Détermination On cherche les z C tels que z n 1 , où n est un entier naturel non nul. n D’abord, si z vérifie z n 1 , alors z z n 1 . Donc z 1 (un seul réel positif vérifie x n 1 , et c’est n 1 1 ) On cherche donc les z sous la forme e i , avec 0,2 . Soit 0,2 . On a les équivalences : (e i ) n 1 e ni 1 n 2Z k Z , n 2k k 0, n 1 , n 2k ( 0,2 , donc n 0,2n ) k 0, n 1 , 2k n Conclusion : Les racines n-ièmes de 1 sont les e 2ik n , k 0, n 1 . Il y en a exactement n car les 2 k pour k 0, n 1 sont n réels distincts de 0,2 , et e i est injective sur n 0,2 puisque deux éléments de 0,2 ne peuvent jamais différer d’un multiple entier non nul de 2 . Représentation : On note U n l’ensemble des racines n-ièmes de 1. On a alors : 2 i 2ikn k U n e , k 0, n 1 , k 0, n 1 , où e n Soit : n n 1 k U n 1 , 2 ,... n 1 1 , 2 ,... n 1 , , 1 ,... , k Z 0 Ainsi, on coupe le cercle trigonométrique en n parties égales (et en prenant 1). U n est de cardinal n. Autre notation : Pour k Z , k est aussi noté k . Ainsi, pour tout p, q Z , on a pq pq qp 1pq Proposition : Les racines n-ièmes de l’unité sont représentés sur un polygone régulier à n côtés inscrit dans le cercle unité et dont l’un des sommet est 1. Ce polygone est symétrique par rapport à Ox car U n est stable par la conjugaison. (En effet, si z U n , z n z n 1 1 ). En revanche, U n est stable par z z si et seulement si n est pair En effet, ( z ) n (1) n z n z n 1 si n est pair, et ( z ) n z n 1 sinon. Proposition : U n est un sous-groupe du groupe (C *,) , c'est-à-dire : U n est stable par , par passage à l’inverse, et 1 U n B) Calcul de certaines sommes Soit n N * . 2 ik Pour tout k Z , on note k e n Soit p N . On s’intéresse à S 0p 1p ... np (somme des puissances p-ièmes des racines n-ièmes de 1) On a : n si p 1 n 0 1 n S p p ... p 1 p 1 0 si p 1 p 0 1 n Si p 1 , 1 1 ... 1 0 . C) Racine n-ième d’un complexe quelconque Soit Z C ; une racine n-ième de Z, c’est un complexe z C tel que z n Z . - Si Z 0 , Z n’admet qu’une seule racine n-ième, à savoir 0. - Sinon, Z 0 . Z s’écrit e i , où R , et R . Une racine n-ième évidente de Z est i z1 n e n . Cherchons les autres : Soit z C . On a les équivalences : n z z Z z z 1 u U n , z z1u . z1 Conclusion : Si Z 0 , Z a exactement n racines n-ièmes, ce sont les z z1u, u U n , où z1 est l’une d’entre elles. n n n n 1 Cas particuliers, exemples : Si Z a , où a est un réel non nul, les racines carrées de Z sont a et a si a 0 , i a et i a si a 0 . Si Z ib , où b est un réel non nul, les racines carrées de b sont : i be 4 si b 0 i 3 be 4 si b 0 Si Z a ib , où a et b sont deux réels non nuls : On cherche les racines sous forme z x iy z2 Z z2 Z et z2 Z ( x iy ) 2 a ib et x2 y2 a2 b2 x 2 2iyx y 2 a ib et x 2 y 2 (avec a 2 b 2 ) a x 2 y 2 a 2x 2 a x 2 x 2 y 2 2 y 2 a y 2 a 2 xy b sgn( xy) sgn( b) 2 xy b (Faire attention pour les implications dans l’autre sens) Si Z se met facilement sous forme trigonométrique, il vaut mieux l’utiliser. V Equation polynomiale de degré 2 à coefficients complexes Rappels : Une fonction polynomiale de degré 2 à coefficients complexes, c’est une fonction du type P : C C , où a, b, c sont des complexes tels que a 0 . zaz 2 bzc Si z C , az 2 bz c a' z 2 bz c , alors a a' , b b' , c c' . Proposition : Soit (a, b, c) C * C C . Notons P : z az 2 bz c (forme développée). Alors : 2 2 b b 2 4ac b (1) z C , P( z ) a z a z (forme canonique) 2a 2a 4a 2 4a 2 (2) Si on note une des racines carrées de , on a donc : b b z C , P( z ) a z z (forme factorisée) 2a 2a 2a 2a (3) L’équation P ( z ) 0 a donc exactement deux solutions, éventuellement confondues, à savoir : b b et z 2 z1 2a 2a c b (4) La somme des racines de P est , leur produit est . a a 2 En effet : z C , P( z ) az bz c a( z z1 )( z z 2 ) az 2 a( z1 z 2 ) z az1 z 2 . b c (5) Inversement, étant donnés deux complexes quelconques p et s, il y a exactement une "paire" de complexes de somme s et de produit p, c’est la "paire" des solutions de l’équation z 2 sz p 0 Cas particulier : Lorsque (a, b, c) R * R R . Alors R . Si 0, Si 0, i Petit truc : le discriminant réduit Soit P : z az 2 2b' z c 4(b' 2 ac) 4' 2b'2 ' b' ' Racines : 2a a VI Suites complexes A) Définition et premières constatations Définition : Soit u (u n ) nN une suite complexe (c'est-à-dire à valeurs dans C), et soit l C . On dit que la suite u converge vers l lorsque : R * , n N , n N , u l . n Par souci de cohérence, remarquons d’abord que dans le cas particulier où la suite u est à valeurs dans R, on retrouve bien l’ancienne définition. Compte tenu de la définition de la convergence, et des propriétés communes du module sur C et de la valeur absolue sur R, on voit tout de suite qu’on peut aisément reprendre les démonstrations faites dans le cadre des suites réelles pour prouver : - L’unicité de la limite (lorsqu’il y en a une) - Les théorèmes portant sur les limites et opérations sur les suites, c'est-à-dire : Si u (u n ) nN converge vers l et v (v n ) nN converge vers l’, et si C , alors : o La suite u ( un ) nN converge vers l o La suite u (u n ) nN converge vers l o La suite u v (u n vn ) nN converge vers l l ' o La suite uv (u n vn ) nN converge vers l l ' o Si l 0 , la suite 1 1 u u n est définie à partir d’un certain rang et nN 1 l (Attention, pour la démonstration de l’unicité de la limite, on ne peut pas utiliser la même démonstration que dans le cas réel : la relation d’ordre n’est pas valable sur C. Il faut se ramener à une étude avec des voisinages, vu dans le chapitre suivant : chapitre de topologie) On rappelle qu’on dispose aussi, pour les suites complexes, de la notion de suite arithmétique, ou géométrique, ainsi que des formules concernant les sommes de termes en progression arithmétique ou géométrique. converge vers B) Parties réelles et imaginaires, conjugaison Pour étudier une suite complexe, on peut se ramener de plusieurs façons à l’étude de suites réelles. En effet, on a déjà de manière évidente l’équivalence : La suite complexe de terme général u n tend vers l si et seulement si la suite réelle de terme général u n l tend vers 0. On a aussi : Proposition : Soit u (u n ) nN une suite complexe, et soit l C . Si u converge vers l, alors les suites u (un ) nN , Re(u) (Re( u n )) nN , Im( u ) (Im( u n )) nN convergent, vers l , Re(l ) et Im(l ) respectivement. Démonstration : Pour tout n N , on a : u n l u n l u n l , d’où la convergence de u (un ) nN vers l . Ensuite, d’après les propriétés relatives aux opérations sur les suites convergentes, l l l l u u u u on tire que Re( u ) converge vers vers Re l et Im( u ) Im l 2 2i 2 2i Pour les deux dernières égalités, on peut aussi utiliser le fait que : n N , Re(un ) Re(l ) un l et Im( un ) Im( l ) un l , et le théorème des gendarmes pour les suites réelles (on n’a pas de théorème des gendarmes pour les suites complexes, n’ayant pas de relation d’ordre) Proposition : La suite complexe u (u n ) nN tend vers l si et seulement si les deux suites réelles Re(u) (Re( u n )) nN et Im( u ) (Im( u n )) nN convergent vers Re(l ) et Im(l ) respectivement. En effet, la première implication vient directement de la proposition précédente (si u converge, alors sa partie réelle et sa partie imaginaire aussi). L’autre vient des opérations sur les suites convergentes : si deux suites ( x n ) nN et ( y n ) nN convergent vers a et b respectivement, alors ( xn iy n ) nN converge vers a ib . Remarque : Si ( n ) nN et ( n ) nN sont deux suites réelles convergentes vers r et respectivement, alors la suite de terme général u n n e i n converge vers re i (il suffit d’écrire la forme trigonométrique, puisque cos n et sin n tendent vers cos et sin ) C) Suites bornées On dit qu’une suite u (u n ) nN est bornée lorsque la suite réelle u ( un ) nN est bornée. On établit alors comme dans le cas réel que toute suite convergente de complexes est bornée. La réciproque est évidemment (comme dans le cas réel) fausse, mais on a toujours le théorème de Bolzano–Weierstrass : De toute suite bornée de complexes, on peut extraire une suite convergente. Démonstration (du théorème) : Soit u (u n ) nN une suite bornée. Il existe donc M R tel que n N , u n M . On note ( x n ) nN , ( y n ) nN les deux suites réelles telles que : n N , u n xn i. y n . Alors ( x n ) nN est bornée (Par M aussi : n N , xn u n M ) On en extrait une suite convergente ( x' n ) nN ( x ( n ) ) nN vers R . Alors la suite ( y ' n ) nN ( y ( n ) ) nN est aussi bornée, puisque extraite d’une suite bornée. On en extrait alors une suite convergente ( y ' ' n ) nN ( y ' ( n ) ) nN ( y ( ( n )) ) nN vers R . Alors la suite ( x' ' n ) nN ( x' ( n ) ) nN ( x ( ( n )) ) nN , extraite d’une suite convergente (à savoir ( x' n ) nN ), converge vers la même limite que cette suite ( ). Donc la suite (u ( n ) ) nN est convergente, et tend vers i. , et cette suite est bien extraite de (u n ) nN .